Cour de cassation, Chambre criminelle, du 18 juin 1990, 88-86.550, Inédit

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Cour de cassation, Chambre criminelle, du 18 juin 1990, 88-86.550, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-huit juin mil neuf cent quatre vingt dix, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller SOUPPE, les observations de la société civile professionnelle GUIGUET, BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général PERFETTI ; Statuant sur les pourvois formés par :

D… Antoine,

B…Alain,

Z…Georges,

contre l’arrêt de la cour d’appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 7 octobre 1988, qui les a condamnés :

Antoine D… à 5 000 francs d’amende pour faux en écriture privée, Alain B… à 4 000 francs d’amende pour abus de biens sociaux et Georges Z… à 5 000 francs d’amende pour infractions à la loi sur les sociétés commerciales, et a prononcé d sur les intérêts civils à l’égard de D… et de B… ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ; I Sur les pourvois de Antoine D… et de Alain B… :

Attendu qu’aucun moyen n’est produit par ces deux demandeurs à l’appui de leurs pourvois ; II Sur le pourvoi de Georges Z… :

Vu le mémoire produit ; Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 220, 433, 4°, 456 et 457 de la loi du 24 juillet 1966, 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale, 1382 du Code civil et 146 du nouveau Code de procédure civile ;  » en ce que l’arrêt attaqué a reçu les constitutions de partie civile et ordonné une expertise pour apprécier la réalité du préjudice invoqué ;  » aux motifs que devant la juridiction de jugement, il appartient à la partie civile d’établir, non plus seulement la possibilité d’un préjudice, mais sa réalité, indépendamment de la relation de cause à effet entre l’infraction et le préjudice ; que les parties civiles se bornent à demander réparation d’un préjudice sans imputer celui-ci à des infractions déterminées, mais le font d’une façon générale ; que la Cour ne s’estime pas suffisamment informée par les documents présentés et les explications données et qu’il convient de faire droit à la demande d’expertise des parties civiles ;  » alors qu’une mesure d’instruction ne peut avoir pour objet de suppléer la carence des parties dans l’administration de la preuve ; que l’arrêt attaqué qui ordonne une expertise sur l’action civile tout en constatant que les parties civiles n’établissent pas la réalité du préjudice dont elles demandent réparation et ne l’imputent même pas à une infraction déterminée, a violé les textes visés au moyen  » ; Attendu que prononçant sur la recevabilité de la constitution des parties civiles en cause, la cour d’appel énonce que leur action est recevable en leur d qualité d’actionnaires, en ce qu’elle est dirigée contre Joseph et Sébastien A…, Alain B…, Antoine D… et la société SERNI (civilement responsable) ; Qu’en cet état le demandeur, contre qui les parties civiles n’étaient pas constituées, est sans qualité pour se faire grief des dispositions civiles de l’arrêt attaqué ; que dès lors le moyen est irrecevable ; Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l’article 433, 4° de la loi du 24 juillet 1966 et de l’article 593 du Code de procédure pénale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d’avoir frauduleusement fait attribuer à des apports en nature une évaluation supérieure à leur valeur réelle et l’a condamné à la peine de 5 000 francs d’amende ;  » aux motifs qu’il convient d’adopter les motifs pertinents du tribunal pour retenir le commissaire aux comptes de SA TPBM et le commissaire aux apports de SA SEPICO dans les liens de la prévention pour ce qui est de la surévaluation des apports en nature dont il ne pouvait ignorer l’inexactitude ; qu’il est reproché à Georges Z… d’avoir à Nîmes courant 1971 et en tout cas sur le territoire national depuis temps non prescrit fait attribuer à des apports en nature une valeur supérieure à leur valeur réelle ; qu’Z… pour sa défense déclare qu’il n’y a pas eu une surévaluation de matériel faisant l’objet de son rapport du 26 juin 1971 dans l’affaire SEPICO ; qu’Z… semble avoir oublié que dans son rapport de commissaire aux apports pour la création de SEPICO, il avait repris intégralement la valeur figurant sur la facture A… à la TPBM, qu’il en a été de même lors de l’expertise que le cabinet Galtier a effectuée avant la création de la SEPICO ;  » alors que l’article 433, 4° de la loi du 24 juillet 1966 réprime ceux qui frauduleusement auront fait attribuer à un apport en nature une évaluation supérieure à sa valeur réelle ; qu’en ne précisant pas la nature des apports concernés ni leur prétendue surévaluation et en ne caractérisant pas l’intention frauduleuse qui aurait animé le prévenu la cour d’appel n’a pas spécifié les éléments matériel et intentionnel de l’infraction et a violé les textes susvisés au moyen  » ; d

Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l’article 457 de la loi du 24 juillet 1966 et de l’article 593 du Code de procédure pénale ;  » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d’avoir à Nîmes, courant 1971, sciemment donné, étant commissaire aux comptes de la société TPBM, des informations mensongères sur la situation de la société et omis de révéler au procureur de la République les faits délictueux dont il avait eu connaissance, reprochés à Joseph A… ;  » aux motifs propres et adoptés des premiers juges qu’il devait, en effet, dénoncer au Parquet les abus commis par les dirigeants sociaux sous peine d’en être complice, notamment en ce qui concerne les comptes courants débiteurs ; qu’il ne peut s’agir de simples négligences sa déposition est claire sur ces différents points, même s’il en tire d’autres conclusions ; que les éléments du dossier permettent de retenir dans les liens de la prévention Z… qui ne saurait être suivi dans ses explications ; que, d’une part la maladie ne saurait excuser ses négligences qui ne peuvent être également couvertes par le peu de sérieux avec lequel il a exercé ses fonctions ;

 » alors que la non-révélation par un commissaire aux comptes de faits délictueux ou la fourniture par celui-ci d’informations mensongères n’est punissable que si le commissaire aux comptes a agi de mauvaise foi ; que la cour d’appel en se bornant à relever par motifs propres ou adoption des motifs des premiers juges que Z… s’était rendu coupable de négligence ou que les faits qui lui étaient reprochés ne pouvaient constituer de simples négligences, sans caractériser sa mauvaise foi, n’a pas donné de base légale à sa décision  » ; Les moyens étant réunis ; Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué et du jugement dont il adopte les motifs que dans la gestion de la société TPBM, Joseph A…, son président, Alain B…et Sébastien A…, administrateurs, ont commis des agissements frauduleux ; qu’ont été relevés à leur charge notamment la présentation de bilans inexacts et des abus de biens sociaux caractérisés par la situation débitrice persistante de leurs comptes courants dans la société ; d que, par ailleurs, pour la constitution de la société anonyme SEPICO dont Joseph A… était l’instigateur, il a été fait apport en nature par la société TPBM d’un train de bétonnage et d’une usine de préfabrication de maisons individuelles, évalués respectivement à 400 000 et 3 000 000 francs selon le rapport de Georges Z… en date du 26 juin 1971 ; que sur l’apport de 400 000 francs, une partie a disparu et qu’une autre a été vendue pour la somme de 38 000 francs ; que l’usine de préfabrication subissait une dépréciation du fait qu’elle était destinée à être utilisée pour la construction de parkings ; qu’en outre le terrain sur lequel elle était édifiée, avait été acheté en 1970 pour le prix de 441 262 francs sur lequel il restait dû 404 491 francs, ce qui devait entraîner l’inscription d’une hypothèque par le vendeur ; Attendu que Georges Z… a été poursuivi notamment en sa qualité de commissaire aux apports d’une société commerciale pour majoration frauduleuse d’apport en nature, et en celle de commissaire aux comptes d’une autre société des chefs d’informations mensongères sur la situation de la société et de non-révélation de faits délictueux au procureur de la République ; Attendu que pour déclarer le prévenu coupable de ces infractions à la loi sur les sociétés commerciales, les juges du fond énoncent que dans son rapport de commissaire aux apports pour la constitution de la société SEPICO, Z… a repris intégralement les valeurs proposées par A…, dont il ne pouvait ignorer l’inexactitude et qu’il ne saurait prétendre, pour se disculper, qu’il ne s’était pas rendu compte des agissements frauduleux des dirigeants de la société TPBM dont il était le commissaire aux comptes, et spécialement que la position débitrice permanente des comptes courants lui avait échappé ; qu’une telle carence ne procède pas de simples négligences ; Attendu qu’en l’état de ces constatations et énonciations par lesquelles les juges du fond ont, contrairement à ce qui est allégué au premier moyen, décrit les apports frauduleusement majorés ainsi que la consistance de cette majoration, la cour d’appel a relevé tous les éléments constitutifs des infractions aux articles 433, 4° et 457 de la loi sur les sociétés commerciales dont Z… a été déclaré coupable et a donné une base légale à sa décision ; Et attendu que la déclaration de culpabilité sur ces chefs de prévention justifie la peine d prononcée ; que dès lors, par application de l’article 598 du Code de procédure pénale, il n’y a pas lieu de statuer sur le deuxième moyen relatif au délit d’exercice des fonctions de commissaire aux comptes nonobstant une incompatibilité légale, également retenu à la charge du demandeur ; Que l’arrêt est régulier en la forme ; REJETTE les pourvois ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ; Où étaient présents :

M. Tacchella conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Souppe conseiller rapporteur, MM. Gondre, Hébrard, Hecquard conseillers de la chambre, MM. Y…, de Mordant de Massiac conseillers référendaires, M. Perfetti avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


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