Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Requête de la société anonyme Gondrand Frères tendant à l’annulation de la décision du ministre de l’économie et des finances du 30 novembre 1979 infligeant à ladite société une sanction pécuniaire de 10 000 F pour infraction à la législation relative aux ententes illicites subsidiairement à la réduction du montant de cette amende ;
Vu l’ordonnance du 30 juin 1945 modifiée et complétée par le décret du 9 août 1953, la loi du 2 juillet 1963 et l’ordonnance du 28 septembre 1967 ; l’ordonnance du 31 juillet 1945 et la décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Considérant qu’aux termes de l’article 50 de l’ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 relative aux prix » les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites, ou coalitions sous quelque forme et pour quelque cause que ce soit, ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, notamment : en faisant obstacle à l’abaissement des prix de revient, de vente ou de revente ; en favorisant la hausse ou la baisse artificielles des prix ; en entravant le progrès technique ; en limitant l’exercice de la libre concurrence par d’autres entreprises sont prohibées sous réserve des dispositions de l’article suivant » aux termes desquelles » ne sont pas visées par les dispositions de l’article précédent les actions concertées, conventions ou ententes … 1° lorsqu’elles résultent de l’application d’un texte législatif ou réglementaire. Les textes de forme réglementaire intervenus avant le 31 octobre 1967 cesseront de pouvoir être invoquées à compter du 1er janvier 1969 ; 2° dans la mesure où leurs auteurs peuvent en justifier lorsqu’elles ont pour effet d’assurer le développement du progrès économique, notamment par l’accroissement de la productivité » ;
Cons. qu’aux termes de l’article 55 de l’ordonnance du 30 juin 1945, dans la rédaction que lui a donné la loi du 19 juillet 1977 relative au contrôle de la concentration économique et à la répression des ententes illicites et des abus de position dominante, par dérogation à l’article 53 qui l’habilite à infliger à toute entreprise ou à toute personne morale des sanctions pécuniaires dont le montant ne peut être supérieur à celui qui est mentionné dans l’avis de la commission de la concurrence préalablement consultée, » le ministre chargé de l’économie peut infliger, dans les conditions précisées ci-après, une sanction pécuniaire à une ou plusieurs entreprises ou personnes morales pour des faits qui ont été consignés ou constatés selon les modalités fixées au deuxième alinéa de l’article 52 et dont il estime qu’ils constituent une infraction aux prescriptions de l’article 50 sans être justifiés par les dispositions de l’article 51. Après avoir communiqué ses griefs aux entreprises ou personnes morales en cause et recueilli leurs observations sur ces griefs, le ministre consulte le président de la commission de la concurrence. Le dossier qu’il lui transmet comprend la communication des griefs, les observations des intéressés et un projet de décision indiquant les motifs et le montant des sanctions envisagées. Si le président estime inutile de saisir la commission, le ministre peut, par décision motivée, infliger une sanction pécuniaire n’excédant pas 100 000 F à chaque entreprise ou personne morale auteur d’une infraction. Toutefois, si l’une des parties en cause demande le bénéfice de la procédure de l’article 53, celle-ci est de droit. Si le président estime que la commission doit être saisie, il est fait application des dispositions des articles 52, 53 et 54 » ;
Cons. qu’en application de cet article, le ministre de l’économie a infligé à la société anonyme Gondrand Frères, par une décision en date du 30 novembre 1979, une sanction pécuniaire de 10 000 F dont cette société conteste à la fois le bien-fondé et le montant ;
Sur la motivation de la décision : Cons. qu’en relevant qu’à la suite de la publication de l’arrêté du 31 mai 1978, libérant les prix de leurs services, six entreprises de déménagement, dont l’agence locale de la société requérante, avaient procédé à une augmentation généralisée et concomitante des tarifs de leurs prestations, et que ces faits constituaient une action concertée ayant eu pour effet de limiter le jeu de la concurrence et justifiant après consultation du président de la commission de la concurrence, l’application de l’article 55 précité, le ministre chargé de l’économie a suffisamment motivé sa décision ;
Sur la procédure suivie : Cons. d’une part, qu’il ressort des pièces versées au dossier que le président de la commission de la concurrence a été consulté ;
Cons. d’autre part, que l’article 55 précité n’impose pas de communiquer aux entreprises mises en cause l’avis émis par le président de la commission ;
Cons. enfin que, dans sa lettre du 9 juillet 1979, le ministre, après avoir informé la société requérante des griefs retenus à sa charge et l’avoir invitée à présenter ses observations, lui indiquait qu’il avait décidé d’engager à son encontre la procédure prévue par l’article 55, mettant ainsi ladite société en mesure, contrairement à ce qu’elle soutient, de demander si elle le jugeait souhaitable, la saisine de la commission de la concurrence ;
Sur les griefs retenus à l’encontre de la société : Cons. qu’il est constant que le 6 juillet 1978, à l’initiative de la présidente de la chambre syndicale des entreprises de déménagement du département de la Meuse, s’est tenue à Bar-le-Duc une réunion à laquelle assistait un représentant de la société requérante et qui avait pour objet d’étudier les conséquences de l’arrêté du 31 mai 1978 libérant les prix dans cette branche professionnelle ; qu’à la suite de cette réunion, un certain nombre d’entreprises de ce département, dont la société requérante, ont de façon concomitante, augmenté notablement leurs prix en mettant en vigueur une tarification nouvelle comportant pour la plupart des prestations de base des prix identiques ou très voisins ; que c’est, par suite, à bon droit que le ministre chargé de l’économie a estimé que ces faits présentaient le caractère d’une action concertée ayant eu pour objet et pour effet de restreindre le jeu de la concurrence et constituaient une infraction aux prescriptions de l’article 50 de l’ordonnance du 30 juin 1945 ;
Sur le montant de la sanction pécuniaire : Cons. que si la loi du 19 juillet 1977 a modifié la procédure de répression des infractions à la législation relative aux ententes illicites et aux abus de position dominante, elle n’a rien changé à l’énoncé des infractions, qui restent définies par le décret du 9 août 1953, la loi du 2 juillet 1963 et l’ordonnance du 28 septembre 1967 et dont la société requérante ne pouvait ignorer le sens et la portée, que, par suite, ladite société n’est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que le ministre, qui était habilité à infliger des sanctions pécuniaires à concurrence de 100 000 F, a fait une appréciation excessive de la gravité des infractions constatées en lui infligeant une amende de 10 000 F ;
rejet .