CAA de PARIS, 3ème chambre, 04/05/2021, 20PA00111, Inédit au recueil Lebon

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CAA de PARIS, 3ème chambre, 04/05/2021, 20PA00111, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’association Judo Club de Châtelaillon a demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler la décision du 13 juillet 2018 par laquelle le tribunal fédéral d’appel de la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées (FFJDA) a confirmé la décision de la commission nationale de discipline de première instance de la FFJDA du 23 mai 2018 prononçant à son encontre une sanction de radiation.

Par un jugement n° 1821902 du 15 novembre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 13 janvier 2020 et 9 octobre 2020, l’association Judo Club de Châtelaillon, représentée par Me D… E…, demande à la Cour :

1°) d’infirmer le jugement du tribunal administratif de Paris du 15 novembre 2019 ;

2°) d’annuler la sanction prononcée à son encontre le 13 juillet 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

– la composition de l’organe disciplinaire de première instance et de l’organe disciplinaire d’appel est identique, en violation des règlements et des principes d’indépendance et d’impartialité ;

– il ne résulte pas de l’article L. 131-6 du code du sport que ceux qui pratiquent leur discipline doivent détenir autant de licences que de fédérations sportives auxquelles le club serait affilié dans la même discipline indépendamment de celle au sein de laquelle ils pratiquent en réalité ;

– l’article L. 131-6 du code du sport méconnait le principe d’intelligibilité de la loi ;

– la décision porte atteinte au principe de liberté d’accès aux pratiques sportives ;

– l’obligation que la fédération cherche à imposer ne répond pas à un objectif de préservation de l’intérêt général mais de ses intérêts financiers ;

– la décision, qui ne sanctionne pas un comportement fautif, méconnait les règles de la concurrence qui s’appliquent hors des domaines délégués où elle exerce des prérogatives de puissance publique ;

– elle porte atteinte à la liberté d’association garantie par l’article 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

– aucune faute n’a été commise.

Par des mémoires, enregistrés les 2 septembre et 23 octobre 2020, la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées, représenté par Me C… A…, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du judo club de Châtelaillon la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La clôture de l’instruction est intervenue le 11 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

– le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,

– le code civil,

– le code de commerce,

– le code de la consommation,

– le code du sport,

– les statuts de la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées,

– le règlement intérieur de la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées,

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de M. B…,

– les conclusions de Mme Péna, rapporteur public,

– les observations de Me E…, représentant l’association Judo Club de Châtelaillon et les observations de Me A…, représentant la fédération française de judo et disciplines associées.

Considérant ce qui suit :

1. Le Judo Club de Châtelaillon était, jusqu’à sa radiation prononcée par la décision contestée, une association sportive affiliée à la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées (FFJDA). Le nombre des membres de ce club détenteurs d’une licence de judo délivrée par la FFJDA est passé de 236 en 2014/2015, à 186 en 2015/2016, puis à 136 en 2017 pour finalement s’établir à 20 en décembre 2017. Cette diminution trouve son origine dans une modification des pratiques du Judo Club de Châtelaillon qui ne sollicitait la délivrance de la licence de la FFDJA que pour les seuls membres du club inscrits dans la section  » compétition  » tandis que les membres du club inscrits dans la section  » loisirs  » détenaient uniquement une licence de judo délivrée par la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT).

2. La Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées, qui considère que cette pratique méconnait les statuts de la FFJDA et ses règlements intérieurs qui imposent à un club de faire souscrire à l’ensemble de ses adhérents qui pratiquent le judo, et non certains d’entre eux, une licence fédérale, et de lui reverser les cotisations correspondantes, a engagé une procédure disciplinaire contre le Judo Club de Châtelaillon. Par une décision du 13 juillet 2018, le tribunal supérieur d’appel de la FFJDA a confirmé la décision rendue le 23 mai 2018 en première instance par la commission nationale de discipline qui avait prononcé la radiation de l’association Judo Club de Châtelaillon et interdit à son président toute activité fédérale pour une durée de dix-huit mois. Le 17 octobre 2018, le conciliateur désigné par le Comité national olympique et sportif français a proposé à la FFJDA de rapporter la décision du tribunal fédéral d’appel en ce qui concerne la sanction prononcée à l’encontre du président du club, et, au Judo Club de Châtelaillon, de s’en tenir à la décision de radiation.

3. L’association Judo Club de Châtelaillon, qui s’est opposée à cette proposition du conciliateur, a demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler la sanction prise par le tribunal supérieur d’appel de la FFJDA le 13 juillet 2018. Elle relève appel du jugement du

15 novembre 2019 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur le moyen tiré de l’irrégularité de la désignation des membres des instances disciplinaires et de leur absence d’impartialité :

4. Aux termes de l’article 2 de l’annexe 6 du règlement intérieur de la FFJDA de la saison 2017-2018 portant règlement disciplinaire :  » Au niveau national, il est institué un organe disciplinaire de première instance dénommé commission nationale de discipline de première instance de la FFJDA. / Il est également institué un organe disciplinaire d’appel dénommé tribunal fédéral d’appel de la FFJDA compétent pour connaître des appels formés sur toutes les décisions des organes disciplinaires de première instance de la FFJDA. (…) Les membres des organes disciplinaires, y compris leur président, sont désignés par le Conseil d’Administration fédéral, sur proposition des conseils d’administration des ligues concernées (…). L’article 7 dispose par ailleurs :  » Les membres des organes disciplinaires doivent faire connaître au président de l’organe dont ils sont membres s’ils ont un intérêt direct ou indirect à l’affaire. Dans ce cas, ils ne peuvent siéger. A l’occasion d’une même affaire, nul ne peut siéger dans l’organe disciplinaire d’appel s’il a siégé dans l’organe disciplinaire de première instance. « .

5. Il ressort des pièces du dossier que les membres qui ont siégé tant à la commission nationale de discipline de première instance qu’au tribunal fédéral d’appel ont été désignés par délibération du Conseil d’administration fédéral du 17 décembre 2016 conformément aux dispositions précitées de l’article 2 de l’annexe 6 du règlement intérieur de la FFJDA. Ces dispositions n’imposent pas au Conseil d’administration fédéral de désigner à l’avance ceux des membres de l’instance disciplinaire qui siègeront au tribunal fédéral d’appel et ceux qui siègeront à la commission nationale de discipline de première instance, la seule contrainte étant celle posée par l’article 7 qui prévoit qu’à l’occasion d’une même affaire, nul ne peut siéger dans l’organe disciplinaire d’appel s’il a siégé dans l’organe disciplinaire de première instance. Il est constant que MM. Coujard, Legond et Jarno, qui ont siégé au tribunal fédéral d’appel, n’avaient pas siégé à la commission nationale de discipline de première instance. Il n’est pas soutenu et il ne ressort d’aucune pièce du dossier que ces personnes auraient été appelées à siéger au tribunal fédéral d’appel tel qu’il était constitué le 13 juillet 2018 en raison de la position qu’elles ont adoptée à cette occasion. Dès lors, l’organe disciplinaire d’appel n’était pas irrégulièrement composé, et une éventuelle irrégularité, tirée de ce que la délibération du 17 décembre 2016 ne désignait pas à l’avance les membres de la formation disciplinaire qui siégeraient dans la commission de première instance et ceux qui siégeraient dans l’instance d’appel, n’aurait pas été en tout état de cause susceptible d’exercer une influence sur le sens des délibérations ni de nature à priver le club d’une garantie. Le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure et du manquement à l’impartialité doit donc être écarté.

Sur le moyen tiré du défaut de base légale.

6. D’une part, aux termes de l’article L. 131-6 du code du sport :  » La licence sportive est délivrée par une fédération sportive ou en son nom. Elle ouvre droit à participer aux activités sportives qui s’y rapportent et, selon des modalités fixées par ses statuts, à son fonctionnement. Les statuts des fédérations sportives peuvent prévoir que les membres adhérents des associations affiliées doivent être titulaires d’une licence sportive « .

7. D’autre part, aux termes de l’article 1er des statuts de la FFJDA :  » L’association dite  » Fédération Française de Judo, Jujitsu, Kendo et Disciplines Associées  » (F.F.J.D.A.), fondée le 5 décembre 1946 et déclarée d’utilité publique par le décret du 2 août 1991, a pour objet : / 1) de regrouper les associations au sein desquelles sont pratiqués le judo, le jujitsu, le kendo ou les disciplines associées, telles que iaïdo, naginata, jodo, sumo, sport chanbara, taïso, dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé des sports ou par décision du comité directeur fédéral, dénommés ci-après : disciplines fédérales. (…). « . Aux termes de l’article 4 de ses statuts :  » Le fonctionnement de la fédération est basé sur les principes mutualistes énoncés par le fondateur du judo :  » entraide et prospérité mutuelle « . A ce titre, tous les membres de la fédération s’engagent à contribuer à son fonctionnement par le paiement d’une cotisation fédérale annuelle et le paiement d’une licence annuelle prise par tous leurs adhérents pratiquants d’une discipline fédérale ou exerçant une activité ou une charge d’élu relevant de la fédération et de ses membres. « . Enfin aux termes de l’article 3 du règlement intérieur de la FFJDA :

 » Conformément au contrat club, les clubs affiliés sont mandataires de la fédération pour faire souscrire par chacun de leurs membres une licence fédérale, en collecter le montant et sont garants de leur paiement à la fédération. « .

8. L’article L. 131-6 du code des sports autorise les statuts d’une fédération sportive à prévoir que les membres adhérents d’une association affiliée soient titulaires d’une licence sportive que cette fédération délivre. En l’espèce, la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées a utilisé cette possibilité qui lui était ouverte par la loi, en sorte qu’il résulte de l’article 4 de ses statuts et de l’article 3 de son règlement intérieur que tout adhérent d’une association affilée à la FFJDA pratiquant le judo doit détenir une licence fédérale de cette fédération, sans qu’ait d’incidence la circonstance qu’il ne prenne pas part aux compétitions fédérales, et qu’il incombe à l’association de collecter le montant de la licence pour le reverser à la fédération. Pour demander l’annulation de la sanction qui lui a été infligée pour ne pas avoir respecté ces règles, le Judo Club de Châtelaillon en conteste la base légale.

9. En premier lieu, si le Judo Club de Châtelaillon soutient que les dispositions précitées de l’article L. 131-6 du code du sport, qui relèvent du domaine législatif et qui sont issues d’une ordonnance dont le délai d’habilitation est aujourd’hui expiré, méconnaissent le principe constitutionnel d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi, ainsi que le principe de libre accès aux activités sportives, ces moyens, à défaut d’avoir fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité soulevée par mémoire distinct, sont irrecevables.

10. En tout état de cause, l’interprétation à donner à ces dispositions, à supposer qu’elle donne lieu à des difficultés, relève de l’office du juge. En l’espèce, les dispositions précitées de l’article L. 131-6 ne subordonnent pas la pratique d’un sport par un sportif à la délivrance d’une licence, elles ne font pas obligation à un club de s’affilier à une fédération et elles ne lui interdisent pas de s’affiler à plusieurs fédérations. Elles ont pour objet et pour effet de subordonner le droit pour un sportif à participer aux activités sportives organisées par une fédération à l’obtention d’une licence délivrée par cette fédération, si les statuts de cette fédération le prévoient.

11. En second lieu, en indiquant que les statuts des fédérations sportives peuvent prévoir que les membres adhérents des associations affiliées doivent être titulaires d’une licence sportive, les dispositions codifiées à l’article L. 131-6 du code du sport n’ont pas, compte tenu de l’intérêt général qui s’attache à la mission d’organisation de la pratique sportive confiée aux fédérations et de la circonstance qu’une adhésion à une association affiliée à une fédération ne constitue pas une condition nécessaire à la pratique d’une activité sportive, porté une atteinte excessive à la liberté d’association garantie par l’article 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

12. En troisième lieu, si l’article 101 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne prohibe les pratiques concertées qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre Etats membres et qui ont pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché intérieur, et si l’article 102 du même traité interdit, dans la mesure où le commerce entre Etats membres est susceptible d’en être affecté le fait pour une ou plusieurs entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché intérieur, les dispositions de l’article L. 131-6 du code du sport n’affectent pas le commerce entre les Etats membres, la délivrance de licences sportives n’est pas une activité de production, de distribution ou de services et elle ne débouche pas sur la conclusion de contrats commerciaux entre une fédération sportive et les associations qui se lient à elle.

13. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l’inconstitutionnalité et de l’inconventionnalité de l’article L. 131-6 du code du sport ne peuvent qu’être écartés.

14. Le Judo Club de Châtelaillon soutient également que les dispositions précitées de l’article 4 des statuts et de l’article 3 du règlement intérieur la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées portent atteinte au principe de libre activité des activités sportives, à la liberté d’association garantie notamment par l’article 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, aux stipulations mentionnées au point 12 des articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne relatives à la libre concurrence et à l’abus de position dominante, aux dispositions correspondantes des articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, aux dispositions des articles L. 121-11 et L. 121-12 du code de la consommation relatives au refus de vente et à la vente forcée. Cependant, cette contestation porte sur les statuts d’une fédération sportive qui sont des actes de droit privé et sur des dispositions du règlement intérieur de cette fédération qui se bornent à reprendre lesdites clauses statutaires. En imposant aux associations qui en sont membres de contribuer à son fonctionnement par le paiement d’une cotisation fédérale annuelle et par le paiement d’une licence annuelle prise par tous leurs adhérents pratiquants d’une discipline fédérale, la FFJDA, alors même qu’elle est investie d’une mission de service public, n’a pas fait usage d’une prérogative de puissance publique. Eu égard à sa nature, une telle contestation ressortit à la compétence de l’autorité judiciaire.

15. Il n’y a cependant lieu pour la cour de saisir l’autorité judiciaire d’une question préjudicielle qui porterait sur la légalité des statuts et règlements de la FFJDA que pour autant que les moyens soulevés soient sérieux. En l’espèce, l’adhésion à une association affiliée à une fédération ne constitue pas une condition nécessaire à la pratique d’une activité sportive et les amateurs de judo peuvent pratiquer leur discipline au sein du Judo Club de Châtelaillon quand bien même cette association ne serait pas affiliée à la FFJDA. L’obligation faite aux membres de la FFJDA de contribuer à son fonctionnement par le paiement d’une cotisation fédérale annuelle et par le paiement d’une licence annuelle prise par tous leurs adhérents pratiquants d’une discipline fédérale ne porte en rien atteinte à la liberté d’association, le Judo Club de Châtelaillon restant libre de ne pas adhérer à la FFJDA, d’adhérer à une autre fédération, d’adhérer à plusieurs ou de n’adhérer à aucune. Enfin, les dispositions invoquées du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne, du code de commerce et du code de la consommation qui s’appliquent aux seules activités de production, de distribution ou de services auxquelles ne saurait être assimilée la délivrance de licences sportives par des fédérations, qui ne présentent pas de caractère commercial et qui correspondent à la participation des adhérents aux charges de la fédération, ne peuvent être utilement invoquées en l’espèce. Il en va, par suite, de même pour l’argumentation tirée de ce que la contribution demandée par la FFJDA à ses membres ne correspondrait pas à sa mission de service public ni à l’intérêt général, et que la fédération poursuivrait une stratégie visant à asseoir une position commercialement dominante et à protéger ses intérêts privés. Aucun de ces moyens ne peut donc être considéré comme sérieux.

16. Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin pour la Cour de poser une question préjudicielle à la juridiction judiciaire compétente, que les moyens tirés de l’illégalité de l’article 4 des statuts et de l’article 3 du règlement intérieur de la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées doivent être écartés.

Sur l’absence de faute :

17. Il est constant que l’association Judo Club de Châtelaillon ne faisait licencier auprès de la fédération, et ne collectait donc pour son compte la cotisation correspondante, que les membres du club inscrits à la section  » compétition  » et que les membres inscrits dans la section  » loisirs  » n’étaient pas licenciés auprès de la fédération. Le tribunal fédéral d’appel a donc pu considérer que le Judo Club de Châtelaillon n’avait pas respecté l’article 4 des statuts de la fédération et confirmer la sanction prise en première instance prononçant la radiation de l’association et à l’encontre de son président une interdiction de toute activité fédérale d’une durée de dix-huit mois.

18. Si pour contester cette sanction, l’association Judo Club de Châtelaillon soutient qu’elle porte atteinte au libre exercice des activités sportives, la radiation du club en elle-même ne fait pas obstacle à ce que les judokas affiliés à ce club continuent à pratiquer leur sport, le cas échéant avec une licence d’une autre fédération, comme par exemple celle de la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT) dont dispose la majorité des membres du club. La sanction ne porte pas davantage atteinte à la liberté d’association, les associations qui adhérent à une fédération se devant d’en accepter et d’en appliquer les règles. Enfin, l’ensemble des moyens, auxquels il a été déjà répondu dans le présent arrêt, tenant à la méconnaissance du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne, du code de commerce et du code de la consommation sont inopérants contre la sanction elle-même.

19. Si, pour soutenir qu’elle n’a pas commis de faute, l’association Judo Club de Châtelaillon soutient également que la convention d’affiliation qu’elle a été amenée à conclure avec la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées méconnaitrait l’article 1190 du code civil qui prévoit que  » dans le doute le contrat de gré à gré s’interprète contre le créancier et en faveur du débiteur et le contrat d’adhésion contre celui qui l’a proposé « , l’article 1171 du code civil qui prévoit que  » dans un contrat d’adhésion toute clause qui crée un déséquilibre entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite  » et l’article

L. 121-12 du code de la consommation qui  » interdit le fait d’exiger le paiement de biens ou de services sans que ceux-ci aient fait l’objet d’une commande préalable « , il n’appartient pas à la juridiction administrative de se prononcer sur la nullité d’un contrat de droit privé.

20. Il n’y a cependant lieu pour la cour de saisir l’autorité judiciaire d’une question préjudicielle qui porterait sur l’adhésion de l’association Judo Club de Châtelaillon à la FFJDA que pour autant que la question posée soit nécessaire au jugement de la requête et que les moyens soulevés soient sérieux. Or en l’espèce, la sanction prononcée l’a été sur la base de la méconnaissance de l’article 4 des statuts de la fédération, la convention d’affiliation d’adhésion se bornant à transcrire les obligations respectives des parties tels qu’elles découlent des statuts. L’existence de l’obligation de l’association Judo Club de Châtelaillon envers la FFJDA qui découle de l’article 4 des statuts ne fait donc aucun doute. En tout état de cause, et pour le surplus, l’obligation faite à un club qui adhère à une fédération sportive de s’acquitter des obligations qui résultent de son affiliation et notamment de payer la cotisation club fédérale et de faire prendre une licence à tous ses adhérents en échange des services que la fédération s’engage à lui fournir ne crée pas de déséquilibre entre les droits et obligations des parties. Enfin les dispositions du code de la consommation relatives au paiement de services en l’absence de commande préalable ne sont manifestement pas applicables à l’adhésion d’un club à une fédération sportive, laquelle répond en tout état de cause à une démarche volontaire de l’association.

21. Il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin pour la Cour de poser une question préjudicielle à la juridiction judiciaire compétente, que les moyens tirés de l’absence de faute doivent être écartés.

22. Il résulte de tout ce qui précède que l’association Judo Club de Châtelaillon n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

23. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions de l’association requérante qui est la partie qui succombe. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’association Judo Club de Châtelaillon la somme de 1 500 euros à verser à la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées sur le fondement de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l’association Judo Club de Châtelaillon est rejetée.

Article 2 : L’association Judo Club de Châtelaillon versera la somme de 1 500 euros à la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l’association Judo Club de Châtelaillon et à la Fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées.

Copie en sera communiquée pour information au président de la conférence des conciliateurs du Comité national olympique et sportif français et au ministre des sports

Délibéré après l’audience publique du 20 avril 2021, à laquelle siégeaient :

– M. B…, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l’article R. 222-26 du code de justice administrative,

– Mme Jayer, premier conseiller,

– Mme Mornet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 mai 2021.

L’assesseur le plus ancien,

M-D. JAYER Le président de la formation de jugement,

président-rapporteur,

Ch. B… Le président,

M. B… Le greffier,

E. MOULIN

Le greffier,

A. DUCHER

La République mande et ordonne au ministre des sports en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

5

N° 10PA03855

2

N°20PA00111


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