Cour d’appel de Versailles, du 27 janvier 2005

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Cour d’appel de Versailles, du 27 janvier 2005

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE VERSAILLES 12ème chambre section 2 F.L./P.G. ARRET Nä Code nac : 39A contradictoire DU 27 JANVIER 2005 R.G. Nä 03/06500 AFFAIRE : S.A. PARASHOP DIFFUSION C/ S.A. LA ROCHE POSAY LABORATOIRE PHAMACEUTIQUE … MINISTRE DE L’ECONOMIE DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Mai 2003 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE Nä Chambre : 5ème Nä Section : Nä RG : 2001F2749 Expéditions exécutoires Expéditions délivrées le : à : SCP KEIME GUTTIN JARRY SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD LR.AR. : Ministre de l’Economie et des Finances LS :

M.P. E.D. REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LE VINGT SEPT JANVIER DEUX MILLE CINQ, La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre : S.A. PARASHOP DIFFUSION ayant son siège 9 avenue de l’Opéra 75011 PARIS, agissant poursuites et diligences de son Président Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège. représentée par la SCP KEIME GUTTIN JARRY, avoués – Nä du dossier 03.635 Rep/assistant : Me Agathe MOREAU du cabinet REINHART- MARVILLE-TORRE avocats au barreau de PARIS (K.30). APPELANTE S.A. LA ROCHE POSAY LABORATOIRE PHAMACEUTIQUE ayant son siège Avenue René Levayer 86270 LA ROCHE POSAY, agissant poursuites et diligences de son Président Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège. S.N.C. COSMETIQUE ACTIVE FRANCE ayant son siège 28 rue du Président Wilson 03200 VICHY, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. représentées par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, avoués – Nä du dossier 338701 Rep/assistant : la SCP SICARD ET ASSOCIÉS avocats au barreau de PARIS. INTIMEES Monsieur le Ministre de l’Economie des Finances et de l’Industrie -direction de la concurrence de la consommation et de la repression des fraudes des Yvelines – représenté par M. Henri X…, directeur départemental. demeurant Direction de la

concurrence de la consommation et de la Repression des fraudes des Yvelines 30 rue Jean Mermoz 78035 VERSAILLES CEDEX. Représenté par Me BOURHIS muni d’un pouvoir entendu en ses observations.- PARTIE INTERVENANTE Composition de la cour : En application des dispositions de l’article 786 du nouveau code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 25 Novembre 2004 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Françoise LAPORTE, Président chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Françoise LAPORTE, Président Monsieur Jean-François FEDOU, conseiller, Monsieur Denis COUPIN, conseiller, Greffier, lors des débats : Mme Marie-Thérèse Y…, 5FAITS ET PROCEDURE : La SA LA ROCHE POSAY et la SNC COSMETIQUE ACTIVE FRANCE sont des filiales du groupe L’OREAL. La première fabrique des médicaments et des produits dermo-cosmétiques vendus sous la marque « la Roche Posay » et la seconde les distribue en FRANCE depuis 1999. Les produits la ROCHE POSAY ont été commercialisés exclusivement dans le circuit officinal jusqu’à l’arrêt de la cour d’appel de PARIS rendu le 1er juillet 1997, sur recours contre la décision nä96-D57 du Conseil de la Concurrence, confirmé par arrêt de la cour de cassation du 07 avril 1998, lui enjoignant de cesser de subordonner l’agrément de ses distributeurs de produits non médicamenteux à la qualité de pharmacien d’officine. La SA PARASHOP DIFFUSION, créée en 1993, qui exerce l’activité de vente de produits cosmétiques et de parapharmacie dans 34 magasins est ainsi devenue en 1998, distributeur agréé de la société la ROCHE POSAY. Arguant avoir été victime de conditions commerciales discriminatoires de la part de la société LA ROCHE POSAY destinées principalement à favoriser le réseau pharmaceutique et résultant du non octroi de l’ensemble des remises accordées par cette société, la société PARASHOP a initié une action

indemnitaire sur le fondement de l’article L 442-6 du code de commerce à l’encontre des sociétés LA ROCHE POSAY et COSMETIQUE ACTIVE devant le tribunal de commerce de NANTERRE où est intervenu volontairement le Ministre de l’Economie des Finances et de l’Industrie. Par jugement rendu le 06 mai 2003, cette juridiction a débouté la société PARASHOP DIFFUSION et le Ministre de toutes leurs prétentions et les a condamnés à verser aux sociétés défenderesses une indemnité globale de 6.000 euros en vertu de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu’aux dépens. Appelante de cette décision, la société PARASHOP DIFFUSION fait grief au tribunal d’avoir admis, à tort, que le règlement CE nä 2790/1999 du 22 décembre 1999 portant exemption par catégorie des accords verticaux avait vocation à s’appliquer en la cause et légitimerait « la remise présence sur catalogue » de 3 % accordée aux seules officines de pharmacie au détriment des distributeurs de parapharmacie, en faisant valoir que les pratiques unilatérales incriminées qui sont restrictives de concurrence et insusceptibles de bénéficier de telles exemptions sont prohibées par le droit interne. Elle soutient que cette remise offerte à tout distributeur offrant la présence des produits pharmaceutiques, cosmétiques et d’hygiène et calculée sur l’ensemble de la gamme est bien discriminatoire puisqu’elle ne peut bénéficier qu’aux seuls pharmaciens et n’est justifiée par aucune contrepartie réelle et proportionnée en soulignant l’absence de lien de rattachement juridique ou économique entre les médicaments et les produits cosmétiques. Elle ne conteste pas le principe de la « remise qualité conseil » de 4 % consentie lorsque le ratio CA la ROCHE POSAY/ nombre de pharmaciens diplômés est inférieur à 40.000 francs (6.097,96 euros) mais estime son application discriminatoire en affirmant qu’elle est accordée de manière systématique à de nombreuses officines ne remplissant pas la condition prévue et que la

société LA ROCHE POSAY ne démontre pas sa licéité. Elle allègue l’opacité du système « remises promotionnelles » qui est contraire au principe de la transparence des prix édicté notamment à l’article L 441-6 du code de commerce. Elle indique que son préjudice résulte de la non attribution des remises et réductions sur les promotions et de la perte de marge brute évaluée par comparaison entre sa part de marché réalisée de 3,3 % et celle de la moyenne nationale de 5,5 %. Elle sollicite donc la condamnation des sociétés LA ROCHE POSAY et COSMETIQUE ACTIVE FRANCE au paiement à la somme de 528.507,05 euros assortie des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 04 mai 2001, la publication d’un extrait de l’arrêt à intervenir aux frais des sociétés intimées dans la revue LSA dans le mois de sa signification sous astreinte de 800 euros par jour de non parution ainsi qu’une indemnité de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Le Ministre de l’Economie des Finances et de l’Industrie, intervenant sur le fondement de l’article L 470-5 du code de commerce, invoque l’inopposabilité de principe du règlement 2790/99 du 22 décembre 1999 eu égard aux pratiques restrictives de concurrence imputées aux intimées relevant de l’article L 442-6 du code de commerce et non pas anticoncurrentielles régies par les articles 81 et 82 du traité CE et L 420-1, et L 420-1-2 du code de commerce et son inapplicabilité, en l’espèce, dès lors que les remises litigieuses n’affectent pas les échanges intracommunautaires. Il considère la remise de catalogue de 3 % discriminatoire au détriment des partenaires ne pouvant commercialiser des produits bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché en raison de leur statut de non pharmacien alors même que le catalogue la ROCHE POSAY ne possède que huit références de médicaments contre 96 ne l’étant pas. Il soutient que la société la ROCHE POSAY ne s’assure pas, par ailleurs, du respect des conditions

pour l’obtention de la remise « qualité conseil ». Il ajoute qu’il n’y a nul besoin de procéder à un bilan économique pour apporter la preuve d’un désavantage dans la concurrence, lequel est, en tout état de cause, nécessairement subi par la société PARASHOP DIFFUSION par rapport aux officines de pharmacie compte tenu de l’impossibilité d’obtenir les mêmes remises que celles-ci. Il demande, en conséquence, à la cour de dire que le règlement nä 2790/99 ne fait pas obstacle à l’application de l’article L 442-6 du code de commerce, que les pratiques de la société LA ROCHE POSAY sont discriminatoires au sens de ce texte, de l’enjoindre de les cesser et de se doter de moyens appropriés de contrôle de respect des conditions exigées pour l’attribution de la remise « qualité conseil » ou de modifier ses conditions et de constater la nullité des remises discriminatoires. Les sociétés LA ROCHE POSAY et COSMETIQUE ACTIVE FRANCE objectent que le Ministre de l’Economie n’a pas qualité pour réclamer des mesures d’injonction et la nullité des dispositions contractuelles, lesquelles constituent, en outre, des prétentions nouvelles en cause d’appel et aussi irrecevables en ce qu’elles violent l’article 5 du code civil. Elles prétendent que la contestation, en son principe de la « remise présence catalogue » se heurte aux dispositions du règlement CE nä 2790/1999 est incohérente et incompatible avec la primauté du droit communautaire. Elles s’estiment en droit de se prévaloir au titre de cette remise des dispositions du règlement nä 2790/1999 du 22 décembre 1999 concernant l’application de l’article 81 OE 3 du traité à des catégories d’accords verticaux et de pratiques concertées dans la mesure où sa position sur le marché est inférieure à 30 %. Elles opposent que les arguments de l’appelante et du Ministre de l’Economie sur l’absence d’atteinte au commerce intracommunautaire et d’effet sensible sur la concurrence, comme celui sur le caractère unilatéral de l’attribution

de la remise prétendument exclusif de la notion d’ »accord » ou de « pratique concertée » sont inopérants. Elles dénient tout effet discriminatoire à la « remise présence catalogue » en invoquant la liberté de principe des remises de fidélité sauf position dominante inexistante et non alléguée dans le cas présent dont elle-ci n’est qu’une variante. Elles soutiennent que cette remise constitue une incitation financière pour les pharmaciens d’officine à proposer, à côté des médicaments faisant partie de la gamme la ROCHE POSAY, les produits de soin de cette marque et dont l’intérêt qui résulte d’une distribution simultanée de leur part la justifie en tant que contrepartie réelle reconnue par la jurisprudence. Elles ajoutent que son calcul est licite. Elles considèrent que la contestation par la société PARASHOP et le Ministre de l’Economie de la « remise qualité conseil » relève du procès d’intention puisqu’ils n’établissent pas l’existence d’un seul cas d’application discriminatoire de cette remise et leur reprochent, de ne pas exercer de contrôle et de déterminer de façon laxiste le ratio servant à son attribution. Elles précisent que la « remise qualité conseil » vise à rémunérer une disponibilité du conseil supérieur à l’exigence minimale résultant de leurs critères d’agrément. Elles remarquent que la société PARASHOP ne démontre pas la réalité d’exemples de discriminations au titre des « remises promotionnelles » et inverse la charge de la preuve en leur faisant grief de ne pas justifier que toutes les promotions lui aient été présentées en 1998 et 1999. Elles relèvent que la société PARASHOP remet en cause plusieurs années après les prix et conditions appliquées à des ventes parfaitement exécutées en leur temps. Elles prétendent que son action révèle une conception dévoyée de la concurrence asservie à des objectifs purement financiers de renégociation des conditions acceptées en leur temps. Elles estiment que le préjudice évoqué par l’appelante est fantaisiste tant dans son

principe que dans son montant en indiquant qu’il correspond à une reconstitution artificielle sans lien avec les faits dénoncés à tort. Elles concluent à la nullité de l’intervention du Ministre de l’Economie pour défaut de capacité à agir, en application de l’article 117 du nouveau code de procédure civile et subsidiairement à l’irrecevabilité de ses demandes sur le fondement des articles 524 du nouveau code de procédure civile et 5 du code civil. Elles sollicitent la confirmation intégrale du jugement déféré, sauf à y ajouter une indemnité de 10.000 euros en vertu de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Le dossier a été communiqué le 11 juin 2004 au Ministère Public qui l’a visé à la même date. MOTIFS DE LA DECISION : SUR L’INTERVENTION DU MINISTERE DE L’ECONOMIE :

Considérant que pour intervenir à l’instance, le Ministre de l’Economie se prévaut de l’article L 470-5 du code de commerce, lequel l’autorise à déposer des conclusions et à les développer oralement à l’audience ainsi qu’à produire les procès-verbaux et les rapports d’enquête devant les juridictions civiles et pénales ; que sur ce fondement, l’intervention du Ministre pour exposer sa position et soutenir ses moyens notamment sur l’inapplicabilité en la cause du règlementque sur ce fondement, l’intervention du Ministre pour exposer sa position et soutenir ses moyens notamment sur l’inapplicabilité en la cause du règlement nä2790/1999 du 22 décembre 1999 et le caractère discriminatoire de certaines remises accordées par la société LA ROCHE POSAY, s’avère parfaitement valable en son principe ; considérant, toutefois, que le Ministre de l’Economie n’a pas qualité, en application de l’article L 470-5 du code de commerce, pour solliciter des mesures d’injonctions ou la nullité des dispositions contractuelles prétendument discriminatoires alors qu’il n’a pas lui-même engagé une telle action conformément et selon les modalités de l’article L 442-6 du code de commerce et que de

surcroît, ce texte dans sa rédaction en vigueur à l’époque des faits, objet du litige, ne prévoyait pas comme sanction la nullité ; considérant, par conséquent, que l’exception de nullité de l’intervention du Ministre de l’Economie soulevée par les intimées sera rejetée, mais que ses prétentions précitées seront déclarées irrecevables. SUR LA « REMISE PRESENCE CATALOGUE TVA 2,1 % – 5 % » :

Considérant qu’il est constant que la société LA ROCHE POSAY a proposé dans ses « conditions commerciales France-vente, aux détaillants » pour les années 1998, 1999 et 2000 ce type de remises ; considérant que la société la ROCHE POSAY a ainsi accordé une remise de 3 % à tout distributeur qui offre « la présence » dans ses points de vente, des produits visés à son tarif bénéficiant d’un taux réduit de TVA (2,1 % et 5 %) correspondant concrètement aux médicaments et excipients, ce taux de TVA n’étant appliqué qu’aux produits pharmaceutiques soumis à une autorisation de mise sur le marché (A.M.M.) ; que cette remise était assise sur la totalité du chiffe d’affaires réalisé comprenant à la fois les produits pharmaceutiques et les produits cosmétiques ainsi que d’hygiène corporelle . SUR LE REGLEMENT CE Nä 2790/99 : Considérant que la société LA ROCHE POSAY prétend que la « remise présence catalogue » octroyée aux seules officines de pharmacie bénéficie de l’exemption par catégorie des accords verticaux prescrite par le règlement du 22 décembre 1999 eu égard à sa part de marché de 5 % inférieure au seuil de 30 % fixé et à l’absence d’une des restrictions visées à l’article 4 de ce texte ; considérant cependant, qu’une telle argumentation procède d’une confusion de la part de cette intimée entre d’une part, les pratiques anticoncurrentielles qui, portant atteinte au fonctionnement du marché, sont sanctionnées sur le fondement des articles 81 et 82 du traité CE, réprimant les ententes et les abus de position dominante et en droit interne, des articles L 420-1 et L 420-2 du code de

commerce et d’autre part, les pratiques restrictives de concurrence dont notamment les pratiques discriminatoires qui, limitant la capacité concurrentielle des entreprises par des faits civilement sanctionnables en vertu de l’article L 442-6 du code de commerce ; considérant que seules les ententes anticoncurrentielles qui supposent un accord sur la pratique elle-même et dont l’objet même présente cette caractéristique puisqu’il consiste à instaurer une telle pratique prohibée sont susceptibles de bénéficier de dérogations exceptionnelles, selon certaines conditions lorsque leurs effets sont bénéfiques ou n’affectent pas de manière sensible le marché, en application des articles 81, paragraphe 3 du traité CE et L 420-4 du code de commerce ; considérant que le droit communautaire a reconnu aux Etats membres la faculté de prévoir des mesures d’interdiction ou de sanction d’actes liés à des pratiques commerciales déloyales destinées à protéger d’autres intérêts légitimes que la protection de la concurrence sur un marché ; que l’article L 442-6 du code de commerce qui répond précisément à cet objectif, ne s’avère donc nullement en contradiction avec celui recherché par le règlement nä 2790/99 en sorte que des pratiques restrictives de concurrence condamnables au regard de ce texte ne sauraient se trouver exonérées par les dispositions dudit règlement qui leur sont inapplicables ; considérant qu’il suit de là, que l’invocation par la société LA ROCHE POSAY de la communication de la commission du 13 février 1993 relative à la coopération entre elle et les juridictions nationales pour l’application des articles 85 et 86, devenus 81 et 82 du traité CE, comme toutes les décisions judiciaires par elles produites concernant également ces textes, sont inopérantes ; considérant, de surcroît, qu’en la cause, l’attribution de la remise catalogue de 3 % aux officines de pharmacie ne peut porter atteinte au commerce intracommunautaire dès lors que cette remise ne

concerne que le réseau national de la société la ROCHE POSAY et qu’elle ne peut avoir d’incidence sur la structure de la concurrence, eu égard au nombre élevé d’offreurs sur le marché des produits de soins, tandis que la pratique litigieuse ne restreind pas de manière sensible la concurrence compte tenu de la part de marché de la société la ROCHE POSAY sur celui des produits de soins qui se limite à 5 % ; considérant, par ailleurs, que l’article L 442-6 du code de commerce sur lequel la société PARASHOP et le Ministre de l’Economie fondent respectivement leurs prétentions et observations, répriment des comportements unilatéraux tels que celui imputé à la société LA ROCHE POSAY ayant trait à l’établissement de la remise en question dans ses « conditions de vente » qui est par eux critiqué « per se » nonobstant tout contrat signé avec ses distributeurs ; que la circonstance que cette mesure décidée par la société la ROCHE POSAY s’inscrive dans le cadre de relations commerciales par elle entretenues avec ses distributeurs ne saurait être suffisante pour conclure à l’existence d’un accord entre eux en l’absence de manifestation réciproque de volonté de leur part sur un but anticoncurrentiel commun ainsi que, tant en raison de la généralité des conditions où figure la remise en cause qui sont applicables à tous les distributeurs agréés générant un effet non dissocié de l’intérêt particulier d’une officine précise, que sur l’adhésion des distributeurs, lors de leur admission, à la politique poursuivie par la société LA ROCHE POSAY, étant de surcroît observé que la prévision d’une telle remise réservée aux propriétaires d’une officine de pharmacie est contraire à l’intérêt de la société PARASHOP qui n’en est pas titulaire ; considérant, par conséquent, que le tribunal a retenu, à tort, l’applicabilité du règlement CE nä 2790/99 en l’espèce tandis que la « remise catalogue » qui ne peut en aucun cas être qualifiée d’entente, n’est soumise qu’aux dispositions de droit

interne de l’article L 442-6 du code de commerce. SUR LE CARACTERE DISCRIMINATOIRE DE LA « REMISE CATALOGUE » : Considérant qu’une pratique est restrictive de concurrence au sens de l’article L 442-6-I du code de commerce et la différenciation tarifaire des remises offertes aux distributeurs est prohibée, si notamment les conditions de vente ou d’achat sont discriminatoires et non justifiées par des contreparties réelles ; considérant que réserver l’avantage de la « remise catalogue » aux pharmaciens, ayant de surcroît pour assiette le chiffre d’affaires global alors même que la société la ROCHE POSAY proposait à l’époque des faits litigieux, seulement huit produits pharmaceutiques et 77 produits cosmétique et d’hygiène corporelle constitue une pratique discriminatoire à l’égard des distributeurs du secteur parapharmaceutique, la vente des médicaments relevant du monopole légal de l’exercice de la pharmacie ; considérant que la société la ROCHE POSAY n’est pas fondée à invoquer comme contrepartie réelle à cette remise, un prétendu effet de gamme n’existant pas entre des produits qui ne sont pas de même nature, les médicaments relevant de la santé publique étant commercialisés dans des conditions légales et règlementaires strictes, par des personnes titulaires d’un diplôme et d’une compétence spécifiques et ne pouvant être délivrés qu’au sein d’une officine, selon un mode dit « derrière le comptoir », tandis que les produits cosmétiques qui sont de confort ou d’agrément sont en accès libre et sont vendus par des personnes sans exigence légale de formation particulière ; que la distribution sous la même appellation de ces deux types différents de produits n’induit pas, par ailleurs, qu’il s’agisse pour autant d’une même gamme de produits, l’intérêt de commercialiser l’un n’entrainant pas celui de distribuer l’autre ; considérant, en outre, que la seule condition à l’octroi de la « remise catalogue » selon les propres termes du courrier adressé par

la société la ROCHE POSAY le 02 avril 2001 à la société PARASHOP, résulte non d’un prétendu « référencement » ou « assortiment » des produits sous la marque « La ROCHE POSAY » mais de la seule « présence » et donc exclusivement à la vente de produits pharmaceutiques ; considérant que la société la ROCHE POSAY ne rapporte donc pas la preuve lui incombant de la justification de sa pratique discriminatoire à l’égard de la société PARASHOP par une contrepartie réelle ; considérant que l’existence d’un avantage ou d’un désavantage dans la concurrence est patente dès lors que le caractère discriminatoire de la pratique est établi, sans qu’il soit besoin de procéder à un bilan économique à cet égard ; qu’en tout cas, l’absence de possibilité pour la société PARASHOP d’obtenir la « remise présence catalogue » crée nécessairement un tel désavantage à son détriment par rapport aux distributeurs propriétaires d’officine pharmaceutiques qui en bénéficient. SUR LA « REMISE QUALITE CONSEIL » :

Considérant que cette remise alors de 4 % et ramenée à 2 % à partir de 2001 est consentie dès lors que le ratio la ROCHE POSAY/nombre de pharmaciens diplomés est inférieur à 6.097,96 euros ; considérant qu’il n’est pas contesté que cette remise soit attribuée sans distinction à tous les distributeurs la ROCHE POSAY qui disposent au moins d’un pharmacien diplomé pour 6.097,96 euros de chiffre d’affaires réalisé avec la marque ; considérant que la société LA ROCHE POSAY indique que cette remise rémunère l’assurance d’un service de conseil à la fois disponible et effectif qui peut constituer une contrepartie réelle ; considérant que la société PARASHOP n’allègue, ni à fortiori ne justifie, en l’absence de toute communication de documents comptables, qu’elle aurait été dans l’impossibilité effective de percevoir une telle remise en raison d’un coût économique trop important et disproportionné par rapport aux officines pharmaceutiques ; considérant que la société PARASHOP

affirme, sans en rapporter la moindre preuve, que la « remise qualité conseil » est accordé de façon systématique par la société LA ROCHE POSAY à de nombreuses officines qui ne remplissent pas la condition de ratio et ne démontre pas la réalité d’une pratique discriminatoire dont elle aurait été victime à ce sujet, alors même qu’elle ne discute pas ne pas pouvoir prétendre au bénéfice de cette remise, eu égard au nombre de diplomés pharmaciens employés et à l’importance du chiffre d’affaires réalisé par ses soins ; considérant, en outre, que le tribunal, selon des motifs adoptés sur ce point par la cour, a estimé, à juste titre, qu’il n’était pas établi, surabondamment, que l’application de la « remise qualité conseil » ait été discriminatoire. SUR LES REMISES PROMOTIONNELLES : Considérant que la société PARASHOP soutient que toutes les promotions en 1998 et 1999 ne lui auraient pas été présentées par la société LA ROCHE POSAY, mais ne fournit aucun élément probant de nature à établir qu’elle aurait été victime de discrimination à ce sujet. SUR LE PREJUDICE DE LA SOCIETE PARASHOP : Considérant que la société appelante est en droit d’obtenir la réparation de son préjudice résultant de la non attribution de la remise de 3 % de « présence catalogue », calculée sur la base non contestée des montants des achats de produits à la société LA ROCHE POSAY, au titre des années 1998, 1999 et 2000 énoncés dans ses écritures ; qu’il lui sera donc accordé en raison de la perte certaine de cette remise une indemnité de 52.708,79 euros de ce chef tandis que ses prétentions concernant les autres remises dont le caractère discriminatoire n’a pas été démontré, seront rejetées ; considérant que la société PARASHOP n’est pas, en revanche, fondée à revendiquer à la fois la perte de la remise « présence catalogue » et une perte de chance de marge brute sur le chiffre d’affaires non réalisé dès lors qu’elle n’aurait pu obtenir un chiffre d’affaires supplémentaire qu’en réduisant ses prix par l’effet de ladite remise

ayant déjà donné lieu à l’indemnisation précitée ; considérant que le préjudice de la société PARASHOP étant ainsi entièrement réparé, il n’y a pas lieu d’ordonner la publication d’un extrait du présent arrêt par elle sollicitée. SUR LES PRETENTIONS ACCESSOIRES :

Considérant que l’équité commande d’accorder à la société PARASHOP une indemnité de 6.500 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ; considérant que les sociétés intimées qui succombent à titre principal en leurs demandes, supporteront les dépens des deux instances. PAR CES MOTIFS Statuant en audience publique, contradictoirement et en dernier ressort, REJETTE l’exception de nullité de l’intervention du Ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie soulevée par les sociétés intimées, LE REOEOIT en son intervention volontaire, DECLARE irrecevables les prétentions de ce Ministre tendant à enjoindre à la SA LA ROCHE POSAY de cesser ses pratiques discriminatoires et de se doter de moyens appropriés de contrôle du respect des conditions exigées pour l’attribution de la « remise qualité conseil » ou de modifier ses conditions ainsi qu’à constater la nullité des remises discriminatoires pour défaut de qualité à agir à cet effet sur le fondement de l’article L 470-5 du code de commerce, INFIRME le jugement déféré sous réserve de ses dispositions concernant le débouté des demandes au titre des remises « qualité conseil » et promotionnelles, Et statuant à nouveau des autres chefs, DIT que le règlement CE 2790/99 du 22 décembre 1999 n’est pas applicable en l’espèce, DIT que la « remise présence catalogue TVA 2,1 %, 5,5 % » accordée par la SA LA ROCHE POSAY LABORATOIRE PHARMACEUTIQUE et la SNC COSMETIQUE ACTIVE FRANCE, aux seuls distributeurs du circuit officinal constitue une pratique discriminatoire an sens de l’article L 442-6-I du code de commerce, CONDAMNE ces deux sociétés in solidum à verser à la SA PARASHOP DIFFUSION la somme de 52.708,79 euros en

réparation de son préjudice résultant de la perte générée par la non attribution de la « remise présence catalogue TVA 2,1 % – 5,5 % », DEBOUTE la SA PARASHOP DIFFUSION du surplus de ses prétentions, DIT n’y avoir lieu à publication du présent arrêt par extrait dans la revue LSA, CONDAMNE les sociétés intimées in solidum à régler à la société appelante une indemnité de 6.500 euros en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, LES CONDAMNE, sous la même solidarité, aux dépens des deux instances et AUTORISE la SCP KEIME-GUTTIN-JARRY, avoués, à recouvrer ceux d’appel conformément à l’article 699 du nouveau code de procédure civile. Arrêt prononcé par Madame Françoise LAPORTE, Président, et signé par Madame Françoise LAPORTE, Président et par Madame Marie Z…, Greffier en Chef présent lors du prononcé Le GREFFIER EN CHEF,

Le PRESIDENT,


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