Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par la société Laboratoires Genevrier, dont le siège est 280, rue de Goa, ZI Les Trois Moulins, Parc de Sophia Antipolis à Antibes (06600) ; la société requérante demande au juge des référés du Conseil d’Etat :
1°) d’ordonner, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l’exécution de l’arrêté de la ministre des affaires sociales et de la santé et du ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances chargé du budget en date du 31 mai 2013 portant radiation, à compter du 15 juillet 2013 de la liste des médicaments remboursables aux assurés sociaux prévue au premier alinéa de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale des spécialités CHONDROSULF 400 mg, granulés pour solution buvable en sachets (B/84) et CHONDROSULF 400 mg, gélules (B/84) ;
2°) d’ordonner la suspension de l’exécution de l’arrêté de la ministre des affaires sociales et de la santé et du ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances chargé du budget en date du 31 mai 2013 portant radiation, à compter du 15 juillet 2013 de la liste des médicaments agréés à l’usage des collectivités publiques et divers services publics mentionnée à l’article L. 5123-2 du code de la santé publique des spécialités CHONDROSULF 400 mg, granulés pour solution buvable en sachets (B/84) et CHONDROSULF 400 mg, gélules (B/84) ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
– la condition d’urgence est remplie, dès lors que les arrêtés contestés portent une atteinte grave et immédiate aux intérêts de la société, à l’intérêt général de protection de la santé publique et entraîneraient une augmentation importante des dépenses de l’assurance maladie ;
– il existe un doute sérieux quant à la légalité des arrêtés contestés ;
– les arrêtés contestés méconnaissent l’article R. 163-3 du code de la sécurité sociale en ce que les ministres compétents ont commis une erreur manifeste d’appréciation ;
– ils méconnaissent l’objectif de réduction des dépenses de santé poursuivi par le législateur ;
– ils instituent une inégalité de traitement entre des médicaments appartenant à la même classe thérapeutique et créent ainsi une distorsion de concurrence ;
Vu les arrêtés dont la suspension de l’exécution est demandée ;
Vu la copie de la requête à fin d’annulation des arrêtés contestés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
1. Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de justice administrative : » Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’ une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ; qu’en vertu de l’article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d’urgence n’est pas remplie ou lorsqu’il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu’elle est irrecevable ou qu’elle est mal fondée ;
2. Considérant qu’en vertu de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, les médicaments dispensés en officine ne peuvent être pris en charge ou donner lieu à remboursement par les caisses d’assurance maladie que s’ils figurent sur une liste établie dans les conditions fixées par décret en Conseil d’Etat ; que les dispositions de l’article R. 163-3 et du I de l’article R. 163-7 du même code prévoient leur radiation de cette liste, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé pris après avis de la commission de la Haute autorité de santé prévue à l’article R. 163-15 de ce code, dite » commission de la transparence « , lorsque leur service médical rendu est insuffisant ; qu’un tel motif est également de nature à justifier l’abrogation d’une inscription sur la liste des spécialités agréées à l’usage des collectivités publiques, prévue à l’article L. 5123-2 du code de la santé publique, dans les conditions fixées par le décret mentionné à l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale ;
3. Considérant que, par arrêtés du 31 mai 2013, la ministre des affaires sociales et de la santé et le ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances chargé du budget ont radié à compter du 15 juillet 2013 les spécialités CHONDROSULF 400 mg, granulés pour solution buvable en sachets (B/84), et CHONDROSULF 400 mg, gélules (B/84), de la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, ainsi que de celle prévue à l’article L. 5123-2 du code de santé publique, au motif que le service médical rendu par ces spécialités était insuffisant ; que la société Laboratoire Genevrier demande la suspension de l’exécution de ces arrêtés ;
4. Considérant, en premier lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que pour qualifier d’insuffisant le service médical rendu par les spécialités CHONDROSULF 400 mg, granulés pour solution buvable en sachets (B/84) et CHONDROSULF 400 mg, gélules (B/84), les auteurs des arrêtés contestés auraient retenu des faits matériellement inexacts ni entaché leur appréciation d’une erreur manifeste ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que d’autres spécialités seraient maintenues sur la liste des spécialités remboursables et sur celle mentionnée à l’article L. 5123-2 du code de la santé publique alors qu’elles auraient un service médical rendu insuffisant est sans incidence sur la légalité des arrêtés contestés ; qu’à supposer même que le maintien de médicaments concurrents sur ces listes ait pour effet de placer les entreprises qui les exploitent en situation d’abus de position dominante, une telle circonstance ne peut être utilement invoquée à l’encontre de la mesure prise à l’égard des spécialités exploitées par la société Laboratoires Genevrier ;
6. Considérant, enfin, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le déremboursement des spécialités pharmaceutiques exploitées par la société requérante serait sans incidence positive sur la réduction des dépenses d’assurance maladie par un effet de report sur d’autres spécialités pharmaceutiques plus coûteuses ;
7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il est manifeste qu’aucun des moyens invoqués par la société Laboratoires Genevrier n’est de nature à créer un doute sérieux sur la légalité des arrêtés dont elle demande la suspension ; que, dès lors, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue par l’article L. 522-3 du même code ;
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de la société Laboratoires Genevrier est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Laboratoires Genevrier.
Copie en sera adressée pour information à la ministre des affaires sociales et de la santé et au ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances chargé du budget.
ECLI:FR:CEORD:2013:369330.20130620