Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le recours enregistré le 23 septembre 2010, complété par un mémoire enregistré le 22 février 2011, présenté par le MINISTRE DU BUDGET DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L’ETAT ;
Le MINISTRE DU BUDGET demande à la Cour :
1°) d’annuler l’article 1er du jugement n° 0802446 du 22 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a déchargé M. et Mme A des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2003, résultant de l’imposition, comme revenus distribués, de sommes perçues au titre des frais de déplacement et de mission injustifiés ;
2°) de remettre à la charge de M. et Mme A les droits supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales mis en recouvrement au titre de l’année 2003 ;
Le MINISTRE DU BUDGET soutient que :
– le Tribunal a commis une erreur en considérant que M. A avait expressément formulé auprès du service vérificateur une demande tendant à obtenir la communication des documents ayant servi à fonder l’imposition des revenus supplémentaires mis à sa charge au titre de l’année 2003 alors qu’une telle demande avait uniquement été adressée au mandataire judiciaire de la société APS 57 ;
– les conclusions présentées à titre reconventionnel par M. et Mme A et tendant, d’une part, à la décharge de l’imposition supplémentaire d’un montant de 16 964 euros, et, d’autre part, à la condamnation de l’Etat au paiement d’un montant de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2010, présenté pour M. et Mme A, demeurant … par Me Brancaleoni ;
M. et Mme A concluent au rejet du recours du MINISTRE et, par la voie de l’appel incident, à la réformation du jugement en tant qu’il a rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l’impôt sur le revenu qui leur a été assignée au titre de l’année 2003 et à la condamnation de l’Etat à leur verser une indemnité de 2 000 sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. et Mme A soutiennent que :
– c’est à tort que le service a réintégré dans leurs revenus imposables de l’année 2003, un montant de 16 964 euros correspondant à des prestations réalisées par la société APS 57 et dont les paiements avaient été directement appréhendés par M. A sans être enregistrés dans la comptabilité de la Sarl APS 57 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 8 décembre 2011 :
– le rapport de Mme Fischer-Hirtz, président,
– les conclusions de M. Féral, rapporteur public,
– et les observations de Me Provenzano, avocat de M. et Mme A ;
Sur l’appel principal du MINISTRE DU BUDGET :
Considérant qu’il incombe à l’administration, quelle que soit la procédure d’imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d’informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d’arrêter d’office les bases d’imposition, de l’origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu’elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l’intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que, lorsque le contribuable en fait la demande à l’administration, celle-ci est tenue de lui communiquer les documents ou copies de documents contenant les renseignements obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés ; qu’il en va ainsi alors même que le contribuable a pu avoir connaissance de ces renseignements ou de certains d’entre eux, afin notamment de lui permettre d’en vérifier, et le cas échéant d’en discuter, l’authenticité et la teneur ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’à la suite de la proposition de rectification du 22 décembre 2006 consécutive à l’examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, M. et Mme A ont, par un courrier du 16 janvier 2007 resté sans réponse, demandé à l’administration fiscale de leur communiquer une copie des documents qu’elle s’était procurée auprès de la société APS 57 dont M. A avait été le gérant jusqu’en janvier 2004, date de l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire et de la désignation de Me Donnais en qualité de mandataire judiciaire ; qu’en s’abstenant de communiquer les documents qu’elle avait utilisés pour établir le redressement litigieux et en imposant, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, le montant des remboursements de frais de déplacements et de missions non justifiés au double motif, d’une part, qu’elle s’était crue dispensée de son obligation de communication dès lors que M. et Mme A avaient également saisi d’une demande en ce sens Me Donnais aux fins d’obtenir les pièces en cause et, d’autre part, que les contribuables lui avaient demandé un délai de soixante jours pour apporter les éléments de réponse en fonction des documents qui leur seraient transmis, l’administration a entaché d’irrégularité la procédure d’imposition ;
Sur les conclusions d’appel incident de M. et Mme A :
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 109, 1-2° du code général des impôts : … Sont considérés comme distribués (…) toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevés sur les bénéfices. ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction et notamment de la proposition de rectification en date du 22 décembre 2006, qu’à la suite de l’examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, l’administration fiscale a, sur le fondement des dispositions de l’article 109-1-2° du code général des impôts, réintégré dans les revenus imposables de M. et Mme A au titre de l’année 2003, les recettes de la société APS 57 qui avaient été directement appréhendées par M. A, pour un montant de 16 964 euros, sans être enregistrées dans la comptabilité de la société, en se fondant sur les éléments de l’enquête pénale communiqués par l’autorité judiciaire ; que si M. et Mme A soutiennent que, d’une part, l’enquête pénale n’a pas eu de suite judiciaire et que, d’autre part, aucun redressement n’a été notifié à la société APS 57, ces circonstances demeurent, en tout état de cause, sans incidence sur le bien-fondé de l’imposition personnelle de son ancien gérant et ne faisaient pas obstacle à ce que les éléments ainsi recueillis soient utilisés pour établir les cotisations supplémentaires d’impôt auxquelles les contribuables ont été assujettis ;
Considérant, en second lieu, que si M. et Mme A soutiennent que les prestations réalisées par la société APS 67 ont fait l’objet de factures établies au nom des clients de la société, l’administration fiscale fait valoir sans être utilement contredite qu’il résulte du rapprochement effectué entre lesdites factures et la comptabilité de la société APS 67 que la totalité des montants facturés n’avaient pas été enregistrés dans la comptabilité de l’entreprise alors qu’ils avaient directement été appréhendés par M. A ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, d’une part que le MINISTRE DU BUDGET n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme A ont été assujettis pour l’année 2003 en conséquence de la réintégration dans leur revenu imposable des sommes perçues à titre des frais de déplacement et de missions non justifiés, et, d’autre part, que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le même jugement, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté le surplus des conclusions de leur demande ;
Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. et Mme A au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L’ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT, ensemble le recours incident de M. et Mme A, sont rejetés.
Article 2 : L’Etat versera à M. et Mme A la somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L’ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT et à M. et Mme Hervé A.
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N° 10NC01576