CAA de DOUAI, 2ème chambre – formation à 3, 05/06/2018, 17DA00232, Inédit au recueil Lebon

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CAA de DOUAI, 2ème chambre – formation à 3, 05/06/2018, 17DA00232, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B…A…der Beken ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire à l’impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l’année 2007 ainsi que des contributions sociales.

Par un jugement n° 1305876 du 24 novembre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 février 2017 et le 17 mai 2018, M. et MmeA… der Beken, représentés par MeD…, demandent à la cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Lille ;

2°) à titre principal, de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire à l’impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l’année 2007 ainsi que des contributions sociales correspondantes ;

3°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge des pénalités de 40 % pour manquement délibéré ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller,

– les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

– et les observations de Me C…représentant M. et Mme A…der Beken.

1. Considérant que M. A…der Beken est associé et gérant de la société à responsabilité limitée (Sarl) Safari qui exerce une activité de marchand de biens ; que la SARL Safari a acquis le 18 octobre 2006 un immeuble situé à Lambres-lez-Douai (Nord), qu’elle a revendu en deux lots, le premier, constitué d’une maison, à un tiers le 25 avril 2007 au prix net vendeur de 116 750 euros, et le second lot, constitué d’un terrain à bâtir aux époux A…der Beken le 17 décembre 2007, au prix de 80 000 euros ; que la société Safari a fait l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 à l’issue de laquelle l’administration a procédé à un rehaussement du résultat imposable de la société résultant, d’une part du montant des cessions qui avait été inscrit au compte courant d’associé de M. A… der Beken, et n’avait pas été imposé à l’impôt sur les sociétés, et d’autre part, de la minoration du prix de cession du terrain à bâtir ; que l’administration fiscale, estimant que ces rectifications constituaient des distributions au profit de M. A…der Beken, a, par une proposition de rectification du 23 juillet 2010, procédé à des rectifications en matière d’impôt sur le revenu au titre de l’année 2007 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, ainsi qu’en matière de contributions sociales et a assorti les suppléments d’impositions envisagés de pénalités pour manquement délibéré ; que le redressement fondé sur la minoration du prix du terrain à bâtir a été abandonné par l’administration fiscale suite à l’avis de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires du département du Nord ; que M. et Mme A… der Beken relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Lille du 24 novembre 2016 qui a rejeté leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l’impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l’année 2007 ainsi que des contributions sociales correspondantes ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts alors applicable :  » 1. Sont considérés comme revenus distribués : (…) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (…)  » ;

3. Considérant que les sommes inscrites au crédit d’un compte courant d’associé d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé, alors même que l’inscription résulterait d’une erreur comptable involontaire, et ont donc, même dans une telle hypothèse, le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu du 2° du 1 de l’article 109 du code général des impôts ; que pour que l’associé échappe à cette imposition, il lui incombe de démontrer, le cas échéant, qu’il n’a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d’un revenu ; que, par suite, M. A… der Beken, pour échapper à l’imposition supplémentaire mise à sa charge au titre de l’année 2007, ne saurait utilement soutenir que l’inscription à son compte courant d’associé dans la SARL Safari au cours de cette année 2007 des sommes de 116 750 euros et de 80 000 euros correspondant au montant de la cession par la SARL Safari de deux biens immobiliers résulterait d’une erreur commise par son cabinet comptable ;

4. Considérant que la circonstance que la SARL Safari a encaissé sur son compte bancaire le produit de la vente des deux biens immobiliers pour des montants respectivement de 116 750 euros et 80 000 euros est sans incidence sur la mise à disposition de ces sommes par voie d’inscription au compte courant d’associé détenu par M. A…der Beken ;

5. Considérant enfin, d’une part, qu’il résulte de l’instruction que, comme le soutient l’administration fiscale, M. A…der Beken a prélevé sur les comptes de la SARL Safari en novembre 2007, la somme de 80 000 euros et a ainsi appréhendé cette somme au cours de cette année 2007 ; que la comptabilité du compte courant d’associé de M. A…der Beken dans les comptes de la SARL Safari, reconstituée après les opérations de contrôle, et les copies de chèques produites par le requérant ne permettent pas de démontrer que la somme ainsi appréhendée correspondrait à un remboursement d’apports qu’il aurait antérieurement fait à la SARL Safari ; que, d’autre part, l’administration fiscale n’établit ni même n’allègue qu’une autre somme aurait été appréhendée directement par M. A…der Beken au cours de l’année 2007 mais soutient, sans être contredite, que la somme de 116 750 euros était inscrite au crédit du compte courant d’associé de M. A…der Beken dans les comptes de la SARL Safari au 31 décembre 2007 ; qu’en se bornant à produire une copie d’un relevé de compte bancaire au nom de la SARL Safari faisant apparaître un solde créditeur de 239,36 euros au 28 décembre 2007 et en l’absence de production de tout autre élément permettant de connaître l’intégralité de la situation comptable de la SARL Safari au 31 décembre 2007 et notamment les éléments relatifs aux actifs dont disposait la société, M. A…der Beken n’établit pas, comme il en a la charge, qu’il aurait été dans l’impossibilité, faute de trésorerie suffisante, de prélever effectivement la somme de 116 750 euros restant au crédit de son compte courant d’associé après avoir appréhendé la somme de 80 000 euros en cours d’année ; que, par suite, c’est à bon droit que l’administration fiscale a imposé entre les mains de M. A…der Beken les sommes de 80 000 euros et 116 750 euros comme revenus distribués dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Sur les pénalités pour manquement délibéré appliquées au titre de l’année 2007 :

6. Considérant qu’aux termes de l’article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige :  » Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (…)  » ; qu’aux termes de l’article L. 80 D du livre des procédures fiscales :  » Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l’expiration d’un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l’administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu’elle se propose d’appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l’intéressé de présenter dans ce délai ses observations  » ; qu’aux termes de l’article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, la motivation doit  » comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision  » ; qu’en vertu de ces dispositions, l’administration doit indiquer au contribuable les motifs de droit et de fait qui justifient l’application de la majoration, en fonction des circonstances propres à chaque espèce, afin de permettre à l’intéressé de présenter des observations ;

7. Considérant que M. A…der Beken soutient, pour la première fois en appel, que les pénalités pour manquement délibéré dont ont été assortis les rehaussements en litige ne sont pas motivées ; qu’il résulte de l’instruction que la proposition de rectification du 23 juillet 2010 ne mentionne pas les considérations propres aux faits de l’espèce à même de justifier l’application des pénalités pour manquement délibéré ; que si la décision de rejet du 31 octobre 2012 mentionne l’application des majorations pour manquement délibéré, cette décision est intervenue postérieurement à la mise en recouvrement des impositions en litige ; qu’en tout état de cause, la motivation de cette décision, sommaire, et sans rapport aux circonstances particulières de la situation de M. A…der Beken, ne saurait être regardée comme suffisante ; que, par suite, M. A… der Beken doit être déchargé des pénalités pour manquement délibéré ;

8. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A…der Beken sont seulement fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des pénalités pour manquement délibéré dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution sociale auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2007 ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de l’Etat à verser à M. et Mme A…der Beken, en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme A…der Beken sont déchargés des pénalités pour manquement délibéré dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contribution sociale auxquelles ils ont été assujettis au titre de l’année 2007.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 24 novembre 2016 est réformé en ce qu’il a de contraire à l’article 1er du présent arrêt.

Article 3 : L’Etat versera à M. et Mme A…der Beken une somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’action et des comptes publics et à M. et Mme B…A…der Beken.

Copie sera adressée à l’administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

5

N°17DA00232


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