Cour d’appel de Versailles, du 15 avril 1999

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Cour d’appel de Versailles, du 15 avril 1999

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE VERSAILLES – JLG – REPUBLIQUE FRANOEAISE AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS Arrêt nE

Le VINGT MAI

MIL NEUF CENT QUATRE VINGT DIX NEUF du 20.05.1999

la Cour d’Appel de VERSAILLES, 12ème Chambre, 1ère Section

a rendu l’arrêt CONTRADICTOIRE suivant,

prononcé en AUDIENCE PUBLIQUE R.G. nE599/99

la cause ayant été débattue en AUDIENCE PUBLIQUE

le DIX SEPT MARS

MIL NEUF CENT QUATRE VINGT DIX NEUF

devant : Affaire :

Monsieur GALLET, Président NETFOODS

magistrat rapporteur en application de l’article 786 du Nouveau Code de NETFOODS TRADING

Procédure Civile, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, assisté C/

de Madame LE X…, Greffier SOCOPA

INTERNATIONAL

Le magistrat rapporteur en a rendu compte à la Cour, celle-ci étant

SOCINTER

composée de :

Monsieur GALLET, Président Appel d’un jugement

Madame TOUTAIN, Conseiller rendu le 00.00.90

Monsieur RAFFEJEAUD, Conseiller par le TC de

( ème chambre)

et ces mêmes magistrats en ayant délibéré conformément à la Loi,

DANS L’AFFAIRE ENTRE

LA SOCIETE NETFOODS

ayant son siège

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés

en cette qualité audit siège Copie certifiée conforme Expédition exécutoire

APPELANTE délivrées le à :

CONCLUANT par la SCP KEIME-GUTTIN, avoués, près la Cour d’Appel Scp Keime-Guttin

de VERSAILLES Scp Lissarrague-

AYANT pour avocat, Maître ROUMIANTZOFF du Barreau de PARIS Dupuis Scp Bommart-

LA SOCIETE NETFOODS TRADING, Minault

ayant son siège

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés

en cette qualité audit siège

APPELANTE

CONCLUANT par la SCP LISSARRAGUE-DUPUIS & Associés,

avoués près la Cour d’Appel de VERSAILLES

ET

LA SOCIETE SOCOPA INTERNATIONAL SOCINTER

ayant son siège

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité

audit siège

INTIMEE

CONCLUANT par la SCP BOMMART-MINAULT, avoués près la Cour

d’Appel de VERSAILLES

AYANT pour avocat, Maître DE MARTEL du Barreau de PARIS

5RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE Alléguant deux reconnaissances de dettes signées par la société NETFOODSTRADING, la société SOCOPA INTERNATIONAL (SOCINTER) a, par acte du 23 novembre 1998, assigné en référé cette société et sa société mère, la société NETFOODS S.A. en paiement solidaire de la somme de 540.000,00 US$ et du solde de la valeur de son lot sur la cargaison du navire WISIDA WINTER pour laquelle lui restait due la somme de 795.600,00 US$ diminuée de la somme de 358.838,00 US$ payés par les assureurs. Par ordonnance rendue le 8 janvier 1999, le président du tribunal de commerce de NANTERRE a rejeté l’exception d’incompétence territoriale soulevée par les sociétés défenderesses, a condamné la société NETFOODS TRADING à payer à la société SOCOPA INTERNATIONAL (SOCINTER), la somme provisionnelle de 975.000,00 US$, a condamné la société NETFOODS S.A. à se substituer à la société NETFOODS TRADING au cas où celle-ci n’exécuterait pas la condamnation qui précède, et a condamné solidairement les deux sociétés défenderesses à payer à la société SOCOPA INTERNATIONAL (SOCINTER) la somme de 50.000,00 Frs en application de l’article 700 du NCPC, en précisant que l’exécution des condamnations sera subordonnée à la production d’une caution bancaire de même montant. Le magistrat des référés a écarté l’exception d’incompétence au motif que, s’agissant d’une simple provision pour laquelle la décision juridictionnelle est le titre de créance et dont le paiement s’effectuera en monnaie scripturale excluant l’application de l’article 1247 du code civil, le juge français est compétent. Sur le fond, il a considéré que les pièces produites justifiaient la demande de provision, et a retenu la solidarité entre les deux sociétés défenderesses sur le fondement de

la promesse de porte-fort faite par la société NETFOODS S.A. Par conclusions récapitulatives signifiées le 25 mars 1999, les sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING, appelantes, font état des relations de coopération existant entre les parties qui se sont dégradées après l’échec de deux opérations de vente de poulets brésiliens sur le marché russe. En considération des jurisprudences communautaire et française, elles soutiennent que, dans la mesure où le fondement de l’action introduite contre elles consiste en des reconnaissances de dettes, l’article 1247 du code civil conduit à considérer que le lieu d’exécution de l’obligation est localisé au domicile de la société NETFOODS TRADING, à LAUSANNE, de sorte que, eu égard aux dispositions de l’article 5.1 de la Convention de LUGANO, les tribunaux français ne sont pas compétents. Elles ajoutent que, ou bien leurs relations contractuelles recouvrent de simples contrats de vente, et l’obligation prétendument méconnue est l’obligation de délivrance qui devait s’exécuter au BRESIL ou à SAINT-PETERSBOURG, de sorte que les juridictions brésiliennes ou russes sont compétentes, ou bien les relations contractuelles s’analysent en une convention de compte joint ou en une société en participation, et l’obligation correspondante est celle de la reddition des comptes qui devait être exécutée au siège de la société NETFOODS TRADING. Elles soutiennent que la détermination du droit applicable sera effectuée par le juge du fond, et contestent l’application du droit suisse et de la Convention de VIENNE. Pareillement, elles réfutent la mise en oeuvre de l’article 24 de la Convention de LUGANO, précisant que les mesures provisoires ou conservatoires ne pouvaient être sollicitées que devant les tribunaux de LAUSANNE. Sur le fond, elles invoquent la difficulté sérieuse tenant à la qualification des relations contractuelles liant les parties, dont les reconnaissances de dette alléguées ne peuvent être dissociées, et à la preuve des manquements

aux obligations corrélatives. En ce qui concerne la société NETFOODS, elles font valoir qu’elle n’a jamais été impliquée dans les relations contractuelles dont s’agit, et que les courriers où elle annonce l’indemnisation par sa filiale des pertes subies parla société SOCINTER mentionnent la condition, qui n’a pas été remplie, de l’entrée de la société SOCOPA INTERNATIONAL dans le capital du groupe NETFOODS, et comportent, tout au plus, un simple engagement moral dénué de conséquences juridiques. Elles ajoutent encore que l’offre de la société NETFOODS ne comporte aucun montant déterminé et ne saurait être le fondement d’une quelconque condamnation. Elles contestent toute solidarité entre elles, et font valoir que le premier juge, en se référant à la promesse de porte-fort, a contrevenu au principe du contradictoire et de la délimitation du litige par les prétentions des parties, de sorte qu’il convient de prononcer la nullité de l’ordonnance entreprise. En tout cas, elles réfutent la mise en ouvre de la notion de porte-fort. Elles en déduisent l’existence de nombreuses difficultés sérieuses qui excluent la compétence du juge des référés. Elles demandent à la Cour de – Les recevoir en leur appel, – Les y déclarer bien fondées, – 1 °) sur la nullité de l’ordonnance, Constater que le Juge des référés a violé les articles 4 et 16 du NCPC et s’est fondé sur un moyen de droit soulevé d’office sans mettre les parties à même de faire valoir leurs observations, En conséquence, prononcer la nullité pure et simple de l’ordonnance du 8 janvier 1999, – 2°) sur la compétence – Donner acte aux sociétés NETFOODS TRADING et NETFOODS SA qu’elles ont soulevé in limine titis l’incompétence du tribunal de commerce de Nanterre et de sa juridiction des référés au profit du tribunal civil de Lausanne, – Se déclarer incompétent et renvoyer la société SOCINTER à se mieux pourvoir, – 3°) sur le fond – constater que la demande de la société SOCINTER se heurte à de nombreuses difficultés

sérieuses et dire n’y avoir lieu à référé, – réformer en conséquence l’ordonnance du 8 janvier 1999 et débouter la société SOCINTER de toutes ses demandes, – condamner la société SOCINTER à payer à NETFOODS TRADING et à NETFOODS SA une somme de 75.000 F au titre de l’article 700 du NCPC, – condamner la société SOCINTER aux entiers dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés par la SCP KEIME & GUTTIN, Avoués, conformément aux dispositions de l’article 699 du NCPC. Par conclusions signifiées le 17 mars 1999, la société SOCINTER (SOCOPA INTERNATIONAL), appelante incidente, conteste la qualité et l’intérêt de la société NETFOODS TRADING à soutenir la nullité de l’ordonnance, et en tout cas s’oppose à cette nullité, le juge s’étant borné à qualifier les faits débattus devant lui. Elle fait essentiellement valoir que l’obligation qui sert de base à l’action, à savoir le paiement découlant des reconnaissances de dette devait s’exécuter en FRANCE. Elle invoque l’article 24 de la convention pour soutenir qu’en tout cas le juge français est compétent pour prendre les mesures provisoires, comme c’est le cas d’une demande de provision en référé. Sur le fond, elle indique que le solde qui lui est dû sur l’opération concernant le navire ROBIN n’est pas contestable, pas plus que l’est la somme due au titre de l’opération concernant le navire Wissida Winter, de sorte que sa créance globale est certaine, liquide et exigible. Elle soutient que la responsabilité solidaire de la société NETFOODS résulte des engagements explicites qu’elle a pris et a été reconnue par un décision hollandaise. Elle critique la notion de porte-fort. Elle demande à la Cour de Vu les articles 5-1 et 24 de la Convention de LUGANO, Vu l’article 74 du Code des obligations Suisse, Vu l’article 873 alinéa 2 du NCPC, – confirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a dit mal fondée l’exception d’incompétence soulevée par les sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING, condamné la société NETFOODS TRADING à

payer à la société SOCINTER la somme provisionnelle de 975.000 US $, condamné solidairement les sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING à payer une somme de 50.000 frs à la concluante au titre de l’article 700 du NCPC, et subordonné l’exécution à la production d’une caution bancaire de même montant et valable jusqu’à la fixation définitive, amiable ou judiciaire, de chacun des deux éléments de la créance de la société SOCINTER, La réformant pour le surplus et statuant à nouveau, – condamner solidairement la société NETFOODS SA avec la société NETFOODS TRADING SA à lui payer la somme provisionnelle de 975.000 US$, et subsidiairement de 436.762 US$ ou son équivalent en francs français, outre les intérêts légaux à compter du 5 février 1998, – condamner solidairement les sociétés NETFOODS SA et NETFOODS TRADING SA à payer à la société SOCOPA INTERNATIONAL la somme de 200.000 frs au titre de l’article 700 du NCPC ainsi qu’aux dépens dont distraction au profit de Maître BOMMART & MINAULT, avoués, conformément aux dispositions de l’article 699 du même Code. La procédure a été clôturée à l’audience du 25 mars 1999, et l’affaire a été évoquée conformément à l’article 910 du NCPC. SUR CE. LA COUR Considérant que la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER, dont le siège social est à CLICHY, dans le ressort du tribunal de commerce de NANTERRE, a réclamé au juge des référés de cette juridiction et réclame devant la Cour la condamnation solidaire des sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING, dont les sièges sociaux sont à LAUSANNE, au paiement provisionnel de la somme de 976.762,00 US$ sur le fondement de quatre courriers ou fax que ces dernières sociétés lui ont adressés, dans le cadre de leurs relations d’affaires marquées notamment parla réalisation en commun de deux opérations portant sur d’importantes quantités de poulets achetés au Brésil, transportés sur les navires MS/Robin et MS/Wisida Winter vers Saint-Pétersbourg et destinés à la revente sur le marché russe ; 1-

Sur la nullité de l’ordonnance entreprise Considérant qu’en relevant d’office, sans inviter les parties à fournir leurs observations, le moyen de pur droit tiré de la qualification de l’engagement pris parla société NETFOODS, dans son fax du 12 novembre 1998, de « présenter un montant et un programme de paiement », en promesse de porte-fort faite pour la société NETFOODS TRADING, pour fonder la condamnation de la première à se substituer à la seconde en cas d’inexécution de la décision qui condamne celle-ci à payer la somme provisionnelle de 975.000,00 US$ à la société SOCOPA INTERNATIONALSOCINTER, après avoir écarté le moyen, seul discuté par les parties, de la solidarité invoquée par la société demanderesse et motivée par les liens de mère à filiale existant entre ces mêmes sociétés et par l’engagement personnel de la société mère NETFOODS, le premier juge a méconnu le principe du contradictoire ; Qu’il convient, en conséquence, comme le demandent, à bon droit, les sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING, d’annuler l’ordonnance entreprise ; que, par l’effet dévolutif de l’appel, la Cour se trouve saisie de l’entier litige ; 2- Sur la compétence du tribunal de commerce de NANTERRE Considérant que, selon l’article 2 de la Convention de Lugano, applicable en l’espèce, « sous réserve des dispositions de la présente convention, les personnes domiciliées sur le territoire d’un Etat contractant sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat. » ; que l’article 5 de la même Convention prévoit que « le défendeur domicilié surie territoire d’un Etat contractant peut être attrait, dans un autre Etat contractant : 1 ° en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée  » ; qu’enfin, l’article 24 du même texte édicte que « les mesures provisoires ou conservatoires, prévues par la loi d’un Etat contractant peuvent être demandées aux autorités

judiciaires de cet Etat, même si, en vertu de la présente convention, une juridiction d’un autre Etat contractant est compétente pour connaître du fond. » ; Considérant que l’action en référé-provision introduite par la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOC INTER, qui tend au paiement intégral des sommes qu’elle revendique à l’encontre des sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING et a pour effet d’épuiser ses droits à leur égard, et qui, en conséquence, n’est pas seulement destinée à maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder des droits dont la reconnaissance est par ailleurs demandée au juge du fond, ne saurait constituer une mesure provisoire au sens de l’article 24, ci-dessus rappelé ; que, dès lors, ce texte ne peut servir à justifier la compétence du juge des référés du tribunal de commerce de NANTERRE; Mais, considérant que l’obligation, alléguée par la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER au soutien de son action, est fondée, en ce qui concerne la société NETFOODS TRADING, sur deux lettres et un fax émanant de cette dernière et relatifs aux deux opérations précédemment évoquées; que la première lettre, datée du 29 janvier 1998, indique : « Sans tenir compte des bénéficeslpertes à partager avec vous, nous vous devons à ce jour sur MSIRRobin US$ 540.000 En tout état de cause, le montant mentionné ci-dessus vous est dû dans nos livres et vous sera versé. En fonction de ce qui se passe avec les Russes et des encaissements que nous effectuons, vous serez réglés et ce, de toute façon, entièrement avant fin mai 1998. » ; que la deuxième lettre, datée du 11 mars 1998, contient « Nous vous confirmons par la présente que si votre lot n’a pas été en votre possession jusque là, nous vous en réglerons la valeur dés réception des fonds de nos assureurs. » ; que le fax, en date du 12 novembre 1998, comporte : « 1- MSIRRobin Vous nous avez versé un montant de US$ 720.000,00 frs, et nous vous avons garanti la solvabilité d’AXCO. Nous devons donc vous rembourser: …solde (en

accord avec votre fax) : US$ 540.000, 00 2- M3/ lisida tinter . ll nous paraît donc logique que vous supportiez la moitié de la perte, soit US$ 397.800  » ; Que, selon la société SOCOPA INTERNATIONAL, l’obligation solidaire de la société NETFOODS est fondée sur un courrier de celle-ci, en date du 22 août 1998, selon lequel « Finalement, j’aimerais préciser qu’en cas d’accord, toute somme que nous vous devons sur ces affaires malheureuses de Russie (somme sur laquelle il faudra convenir, aujourd’hui, nous sommes dans l’incapacité totale de payer toute somme) sera déduite du montant que vous nous versez pour l’acquisition des parts… », sur un fax du 12 novembre 1998 émanant également de la société NETFOODS et indiquant:

« ..II a été convenu dans nos bureaux, la semaine dernière, que vous acceptez d’attendre la vente de nos filiales anglaises pour que nous vous versions tout montant qui sera convenu, n’étant pas nous-mêmes en mesure actuellement, par manque de liquidités, d’avancer tout montant …. Malgré toutes ces incertitudes, nous nous engageons par la présente à vous présenter, début janvier 1999, un montant et un programme de paiement que nous pourrons respecter. II va de soi que dans tous les cas, si nous récupérons de Russie les montants perdus, votre part vous reviendra immédiatement. », ainsi que sur les termes du fax de la société NETFOODS TRADING, en date du 12 novembre 1998, annonçant: « Vous connaissez nos difficultés actuelles de liquidités, dues justement à cette affaire de Russie. Nous dépendons donc des fonds apportés par notre actionnaire principal, NETFOODS S.A. qui vous écrira séparément… » ; Que ces différents écrits émanant des sociétés NETFOODS TRADING et NETFOODS contiennent leurs engagements de payer à la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER des sommes qui lui sont dues à la suite des deux opérations réalisées en Russie ; qu’ainsi, les obligations qui en résultent et qui constituent l’objet du litige, entrent dans la matière contractuelle visée par l’article

5-1 ° de la Convention de Lugano, ci-dessus rappelé ; Considérant que, pour décider si les sociétés NETFOODS TRADING et NETFOODS pouvaient être attraites devant le tribunal de commerce de NANTERRE, il convient de rechercher la loi applicable aux obligations litigieuses afin de déterminer le lieu de leur exécution ; qu’il convient de préciser que les parties n’allèguent pas l’existence de stipulations désignant la loi à laquelle elles ont entendu soumettre leurs relations contractuelles ou la juridiction à laquelle elles ont entendu soumettre un litige les opposant ; que, eu égard à la nature et à l’objet du présent litige, les obligations qui servent de base à la demande en paiement de la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER procèdent, indépendamment des rapports contractuels liant les parties, des seuls engagements de payer des sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING, mentionnés précédemment et demeurés inexécutés, de sorte que la détermination de leur lieu d’exécution est indépendante du lieu d’exécution des conventions ayant pu lier ces sociétés à l’occasion des opérations commerciales portant sur les poulets brésiliens destinés au marché russe ; qu’au demeurant, les termes, cidessus rapportés, des engagements contractés en soulignent l’autonomie par rapport auxdites opérations commerciales ; Considérant que, s’agissant d’engagements de payer des sommes d’argent, la loi française comme la loi suisse désignent, en l’espèce, le domicile du créancier comme le lieu d’exécution des obligations correspondantes ; qu’en effet, l’article 74 du code des obligations suisse, dont la teneur est justifiée par la production du texte faite par la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER et n’est pas contestée par les sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING, prévoit que « le lieu où l’obligation doit être exécutée est déterminé par la volonté expresse ou présumée des parties. A défaut de stipulation contraire, les dispositions suivantes sont applicables : 1. Lorsqu’il

s’agit d’une somme d’argent, le paiement s’opère dans le lieu où le créancier est domicilié à l’époque du paiement ; 2… » ; que, si l’article 1247 du code civil français énonce que, hors les exceptions qu’il prévoit, « le payement doit être fait au domicile du débiteur’, le paiement est rendu portable par les délais octroyés ou la mise en demeure notifiée par le créancier ; qu’en l’occurrence, il ressort des courriers échangés entre les parties, tout particulièrement de ceux évoqués plus haut et émanant des sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING, que ces dernières effectueraient les paiements dès qu’elles pourraient, en fonction des résultats de leurs négociations avec leurs partenaires russes, de la réalisation de leurs actifs ou de l’existence de liquidités; qu’il se déduit de la latitude qui leur était laissée de remplir leurs obligations en fonction de leurs possibilités que les sociétés débitrices ont consenti à conférer à leur paiement un caractère portable entre les mains de leur créancière ; que, de plus, la mise en demeure par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 30 octobre 1998, que la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER leur a adressée, a emporté changement du lieu du paiement au domicile de celle-ci ; Qu’il suit de ces développements que le tribunal de commerce de NANTERRE était compétent pour connaître de l’instance en paiement dirigée par la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOC INTER contre les sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING sur le fondement de leurs engagements de payer ; 3- Sur l’existence des obligations Considérant qu’il ressort des documents ci-dessus cités que l’obligation de la société NETFOODS TRADING n’est pas sérieusement contestable ; qu’en effet, indépendamment des relations existant entre les parties, elle s’est reconnue débitrice de la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER au titre de l’opération du MS/Robin et de l’opération du MSNVîsida Winter ; que la teneur de ces courriers est confirmée par la

justification des avances, non contestées, effectuées par la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER pour permettre la réalisation des opérations envisagées, et par l’échec desdites opérations qui l’a empêchée de récupérer sa part du prix des marchandises ; Que le montant de sa dette, correspondant à l’expédition du MS/Robin, résulte clairement des propres écrits de la société NETFOODS TRADING, et s’élève à 540.000,00 US$; que, s’agissant de la cargaison du MS/Wisida Winter, pour laquelle il n’est pas prétendu que la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOC INTER aurait récupéré son lot, il est établi par les documents bancaires et non contesté que la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOC INTER a avancé un montant de 795.600,00 US$ à la société NETFOODS TRADING mais que les marchandises ont été considérées comme sinistrées par la compagnie d’assurance SIACI, ainsi que cela ressort de sa télécopie du 31 mars 1998 ; que, malgré son engagement, contenu dans sa lettre du 11 mars 1998, de « lui régler la valeur du lot dès réception des fonds de nos assureurs », la société NETFOODS TRADING n’a effectué aucun paiement à la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOC INTER, destinataire seulement d’un montant de 358.838,00 US$, alors que, selon le document du CESAM, la société NETFOODS a perçu une indemnité de 1.358.838,00 US$; qu’en l’absence de tout document justifiant le partage des risques, rien ne démontre, hormis son propre fax du 12 novembre 1998, insuffisamment probant et contredit par les autres documents versés aux débats, l’affirmation de la société NETFOODS TRADING selon laquelle la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER supporterait une partie des pertes ; qu’il s’ensuit que le solde de 436.762,00 US$ que celle-ci réclame paraît fondé ; Que, dans ces conditions, la créance de 976.762,00 US$ invoquée par la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER n’apparaît pas sérieusement contestable ; Qu’il convient, en conséquence, de faire droit à sa demande d’une indemnité provisionnelle de 975.000,00 US$ ;

Considérant que les termes, précédemment rapportés, des courriers de la société NETFOODS révèlent son engagement personnel de répondre de sa filiale et de verser les sommes dues à la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER ; que, contrairement à ce qu’elle soutient, cet engagement précis et circonstancié d’apporter les fonds nécessaires, confirmé par la teneur du fax du 12 novembre 1998 de la société NETFOODS TRADING ne constitue pas un simple engagement moral mais emporte des conséquences juridiques ; qu’elle ne saurait arguer de l’existence d’uneté NETFOODS TRADING ne constitue pas un simple engagement moral mais emporte des conséquences juridiques ; qu’elle ne saurait arguer de l’existence d’une condition qui ne se serait pas réalisée, à savoir l’entrée de la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER dans le capital du groupe NETFOODS ; qu’en effet, cette perspective, mentionnée dans son courrier du 22 août 1998, non reprise à l’occasion de ses écrits ultérieurs par lesquels elle a confirmé son engagement, n’est évoquée que pour envisager un paiement par compensation sur le prix d’acquisition des parts ou actions cédées à la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOC INTER et non comme une condition du paiement ; qu’il importe peu que le montant de son engagement ne soit pas déterminé dès lors qu’il était parfaitement déterminable, en considération de la part de la société créancière ; qu’il a déjà été dit que rien ne justifiait un éventuel partage des pertes ; que l’éventualité momentanée d’un accord transactionnel, dont les prémices ne sont pas confirmées, n’introduit, faute d’élément probant, aucun doute quant à l’existence de la créance revendiquée par la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER non plus quant à l’existence de l’obligation de la société NETFOODS ; qu’il doit être rappelé que celle-ci a perçu l’indemnité d’assurance à hauteur de 1.000.000,00 US$, comprenant une part correspondant au lot de la société SOCOPA INTERNATIONALSOCINTER

; Que, dans ces conditions, l’obligation solidaire de la société NETFOODS avec sa filiale n’apparaît pas contestable ; Considérant que l’équité commande que la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOCINTER n’ait pas à assumer l’intégralité des frais irrépétibles qu’elle a dû exposer ; que la Cour est en mesure de fixer à 100.000,00 frs la somme que les sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING devront lui payer à ce titre ; PAR CES MOTIFS LA COUR , statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, – DÉCLARE recevables l’appel principal interjeté par les sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING, et l’appel incident formé par la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOC INTER, à l’encontre de l’ordonnance rendue le 8 janvier 1999 par le président du tribunal de commerce de NANTERRE, – ANNULE ladite ordonnance, – DIT que le tribunal de commerce de NANTERRE, et, partant, la Cour d’appel de VERSAILLES sont compétents pour connaître de la demande en paiement dirigée par la société SOCOPA INTERNATIONALSOCINTER contre les sociétés NETFOODS et NETFOODS TRADING sur le fondement de leurs engagements de payer, – CONDAMNE solidairement la société NETFOODS et la société NETFOODS TRADING à payer à la société SOCOPA INTERNATIONALSOCINTER la somme de 975.000,00 US$, – LES CONDAMNE solidairement à payer également à la société SOCOPA INTERNATIONAL-SOC INTER la somme del 00.00O,OOfrs (CENT MILLE FRANCS) en application de l’article 700 du NCPC, – LES CONDAMNE aux entiers dépens qui, pour ceux d’appel, pourront être recouvrés directement par la SCP BOMMART & MINAULT, conformément à l’article 699 du NCPC, – DÉBOUTE les parties de leurs autres conclusions contraires ou plus amples. ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET Le Greffier

Le Président M. LE X…

J.L. GALLET

0 Arrêt 1999-599 1 15 avril 1999 2 CA Versailles 3 12 A, Présidence : M. J-L. GALLET, Conseillers : M. M. Y…, M. A. Raffejeaud.0 Arrêt 1999-599 1 15 avril 1999 2 CA Versailles 3 12 A, Présidence : M. J-L. GALLET, Conseillers : M. M. Y…, M. A. Raffejeaud. 4 1) Conventions internationales, Accords et conventions divers, Convention de Lugano du 16 septembre 1988, Compétence judiciaire, Référé, Mesure provisoire de l’article 24, Définition 2) Conventions internationales, Accords et conventions divers, Convention de Lugano du 16 septembre 1988, Compétence judiciaire, Article 5-1E, Matière contractuelle, Définition Selon l’article 2 de la Convention de Lugano, applicable en l’espèce, ‘ les personnes domiciliées sur le territoire d’un Etat contractant sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat ‘. Cependant, en vertu de l’article 5 du même texte, ‘ le défendeur domicilié sur le territoire d’un Etat contractant peut être

attrait, dans un autre Etat contractant : 1E en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l’obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée (..) ‘. Enfin, l’article 24 de la convention précitée prévoit que ‘ les mesures provisoires ou conservatoires, prévues par la loi d’un Etat contractant peuvent être demandées aux autorités judiciaires de cet Etat, même si en vertu de la présente convention, une juridiction d’un autre Etat contractant est compétente pour connaître du fond ‘. 1) En l’espèce, une action en référé-provision qui tend au paiement intégral des créances revendiquées par une partie à l’encontre d’une autre, a pour effet d’épuiser les droits de la première à l’égard de la seconde et n’a, en conséquence, pas pour seul objet de maintenir une situation de fait ou de droit afin de sauvegarder des droits dont la reconnaissance est par ailleurs demandée au juge du fond. Il s’ensuit qu’une telle action ne saurait constituer, au sens des dispositions de l’article 24 précité, une mesure provisoire susceptible de justifier la compétence du juge des référés. 2) Lorsque des écrits émanant du débiteur contiennent engagement de payer au créancier les sommes qui lui sont dues consécutivement à des opérations commerciales communes, les obligations qui en sont issues, constitutives de l’objet du litige, entrent dans la matière contractuelle visée par l’article 5-1E de la Convention de Lugano évoquée ci-dessus. En l’espèce, en l’absence de stipulations contraires alléguées par les parties, dès lors que les obligations servant de base à la demande en paiement présentée par le créancier, procèdent, indépendamment des rapports contractuels liant les parties, des seuls engagements de payer du débiteur, la détermination du lieu d’exécution du payement demeure indépendante du lieu d’exécution des conventions.. La loi suisse (article 74 du code des obligations) et, en l’espèce, indépendamment des dispositions de

l’article 1247 du code civil, la loi française désignant l’une et l’autre le lieu du domicile du créancier comme le lieu d’exécution de l’obligation au paiement, étant relevé que le paiement est rendu portable par les délais octroyés et la mise en demeure notifiée par le créancier, il s’ensuit que le tribunal de commerce du domicile du créancier a compétence pour connaître de l’instance en paiement introduite par celui-ci sur le fondement de l’engagement de payer du débiteur. * * *


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