Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
(Deuxième chambre)
Vu, enregistré au greffe le 4 mars 1998 sous le n 98NC00451, le recours présenté par le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE ;
Le ministre demande à la Cour :
1 ) – d’annuler le jugement n 951075 en date du 7 octobre 1997 par lequel le tribunal administratif de Nancy a accordé à la société Maximo, venant aux droits de la S.A. La Moderne qu’elle avait absorbée, la décharge des suppléments d’impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie, au titre des années 1990 et 1991 ;
2 ) – de rétablir à la charge de la société Maximo, ces impositions initialement établies au nom de la S.A. La Moderne au titre des années 1990 et 1991 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 14 mars 2002 :
– le rapport de M. BATHIE, Premier-conseiller,
– et les conclusions de M. LION, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales : « Ne peuvent être opposés à l’administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d’un contrat ou d’une convention à l’aide de clauses : ( …) b) ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus … . L’administration est en droit de restituer son véritable caractère à l’opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l’avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L’administration peut également soumettre le litige à l’avis du comité dont les avis rendus feront l’objet d’un rapport annuel. Si l’administration ne s’est pas conformée à l’avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement. » ; que lorsque l’administration use des pouvoirs qu’elle tient de ce texte dans des conditions telles que, comme en l’espèce, la charge de la preuve lui incombe, elle doit, pour pouvoir écarter certains actes passés par le contribuable, établir que les actes ont eu un caractère fictif ou, à défaut, qu’ils n’ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;
Considérant que pour soutenir que la constitution de la société holding luxembourgeoise Fifties n’a eu d’autre but que de permettre à la S.A. La Moderne, aux droits de laquelle vient la S.A. Maximo, d’échapper au paiement de l’impôt dont elle serait redevable lors de la perception des dividendes perçues de la société Fifties, l’administration allègue que la S.A. La Moderne, qui détenait 16,66 % du capital de la société Fifties, a fait, en mettant en place la structure ad hoc de la société holding précitée, une utilisation abusive du régime d’imposition entre les sociétés mères et les sociétés filiales prévu par les articles 145 et 216 du code général des impôts ; qu’à l’appui de son allégation, l’administration fait valoir que la banque internationale de placement, actionnaire de la société holding Fifties a outrepassé sa fonction d’intermédiaire financier en ne plaçant pas en sicav actions les fonds investis par la S.A. La Moderne, que cette banque était le véritable maître de l’affaire au niveau de la gestion, que le choix de la localisation et de la structure juridique constituent un levier fiscal maximal en contravention avec l’esprit des textes fiscaux, qu’il existe ainsi une série d’actes, un élément intentionnel dans la mise en place d’un montage et un élément objectif caractérisé par l’usage anormal et excessif d’un régime de faveur prévu par le législateur qui a pour effet de diminuer d’un niveau proche de zéro la charge fiscale que l’entreprise aurait dû normalement acquitter, révélant un abus de droit ; que ces allégations ne peuvent être retenues comme preuve de l’abus de droit invoqué par l’administration dès lors qu’elle n’établit pas que la société holding n’aurait pas fonctionné selon les règles prévues par le droit commercial, notamment en ce qui concerne la distribution de dividendes, qu’elle n’aurait pas comptabilisé régulièrement les opérations afférentes à son activité et qu’ainsi les actes de création et du fonctionnement de la société holding avaient un but exclusivement fiscal ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a déchargé la S.A. Maximo du complément d’impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des années 1990 et 1991 ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE et à la S.A. MAXIMO.