Cour Administrative d’Appel de Marseille, 7ème chambre – formation à 3, 30/07/2013, 10MA04524, Inédit au recueil Lebon

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Cour Administrative d’Appel de Marseille, 7ème chambre – formation à 3, 30/07/2013, 10MA04524, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2010, présentée pour M. et Mme B…, demeurant…, par Me C… ;

M. et Mme B…demandent à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0803085 du 20 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur les sociétés et aux contributions sociales auxquelles ils sont été assujettis au titre des années 2003 à 2005, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 2 juillet 2013 :

– le rapport de M. A… ‘hôte,

– et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

1. Considérant qu’à la suite de la vérification de comptabilité dont a fait l’objet la SARL Le Diamant noir, M. et MmeB…, uniques associés de la société, ont été regardés comme bénéficiaires de revenus distribués par cette dernière ; que l’administration leur a alors notifié les redressements en résultant pour eux au titre des années 2003 à 2005, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, assortis des pénalités pour mauvaise foi ; que les requérants demandent à la Cour d’annuler le jugement en date du 20 octobre 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu et aux contributions sociales qui leur ont été ainsi assignées ;

2. Considérant, en premier lieu, que M. et Mme B…soutiennent que la vérification de comptabilité dont a fait l’objet la SARL Le Diamant noir était irrégulière dès lors que le vérificateur aurait emporté irrégulièrement des documents comptables et que la société aurait été privée d’un débat oral et contradictoire ; que les irrégularités qui ont pu entacher la vérification de la comptabilité de la SARL Le Diamant noir sont toutefois sans influence sur les impositions supplémentaires réclamées aux requérants au titre de l’impôt sur le revenu ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que M. et Mme B…ne sauraient utilement faire valoir que la proposition de rectification du 12 juillet 2006 adressée à la SARL Le Diamant noir était insuffisamment motivée pour permettre à cette dernière de présenter utilement ses observations ; que la proposition de rectification du 17 octobre 2006 qui leur a été personnellement notifiée mentionne la catégorie de revenu imposé, les montants et les années d’imposition et reproduit le contenu de la proposition de rectification adressée à la société ; que, par suite, elle était suffisamment motivée au regard des exigences de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

4. Considérant que M. et Mme B…soutiennent, en troisième lieu, qu’aucun revenu n’a pu leur être distribué dès lors que les redressements notifiés à la SARL Le Diamant noir sont injustifiés ;

5. Considérant, d’une part, qu’il résulte de l’instruction que la SARL Le Diamant noir n’a pas été mesure de justifier du détail de ses recettes journalières pour les exercices faisant l’objet de la vérification de comptabilité et que l’examen de ses stocks a révélé des achats non comptabilisés ; qu’il n’est pas contesté que la société n’a pas été en mesure de produire les bandes de contrôle de la caisse enregistreuse ; que les requérants n’expliquent pas l’absence d’une partie des feuilles de caisse journalières en indiquant que certains tickets Z regroupaient les recettes de plusieurs journées, ni en invoquant les périodes de fermeture de l’établissement eu égard au nombre important de tickets Z manquants ; que les requérants ne contestent pas sérieusement l’existence d’achats non comptabilisés en se bornant à produire une facture datée du 29 mai 2002 pour l’acquisition de 12 bouteilles de vin  » Château Noirac « , sans établir que cette facture n’est pas celle dont le vérificateur a tenu compte dans l’examen de la comptabilité de la société ; que le vérificateur a pu, sans incohérence, déduire de la présence en stock de 16 de ces bouteilles à la clôture de l’exercice 2003, alors que le stock pour ce produit était nul au début du même exercice et que les écritures comptables n’avaient enregistré l’acquisition que de 12 bouteilles, qu’une partie seulement des achats avait été comptabilisée ; que, dès lors, l’administration a pu à bon droit regarder la comptabilité qui lui était présentée comme non probante et procéder à la reconstitution du chiffre d’affaires de la société ;

6. Considérant, d’autre part, que, pour reconstituer le chiffre d’affaires, le vérificateur a distingué la partie  » cave « , la partie  » restaurant  » et la partie  » bar  » ; que, pour chacun de ces secteurs, il s’est servi des éléments comptables fournis par l’entreprise et en particulier les justificatifs de recettes remis par le gérant couvrant une période de 13 mois et les factures d’achats disponibles ; qu’il a retenu les tarifs apparaissant sur les cartes de tarifications fournies par le gérant lors du débat oral et contradictoire ou sur les tickets Z journaliers, en tenant compte du prix spécial réservé aux clients insulaires ; que s’agissant de la partie  » cave « , il a déterminé la part que représentaient les ventes de vin au verre effectuées au bar sur l’ensemble des ventes de vin, pour déduire ensuite le taux de 24 % en résultant du chiffre d’affaires ; qu’il a pu ainsi évaluer la proportion des ventes de vin en bouteille sur le chiffre d’affaires global de la partie  » cave  » et appliquer le coefficient dégagé à l’ensemble des achats revendus de ce secteur, après avoir pratiqué un abattement au titre des offerts et des pertes ; que s’agissant des parties  » restaurant  » et  » bar « , le vérificateur a utilisé la méthode dite des vins consistant à déterminer, à partir des achats revendus d’un produit liquide, la part des ventes de ce produit sur le chiffre d’affaires global du secteur concerné ; que, pour ce faire, il a retenu les ventes de vin pour le restaurant et les ventes de bière pour le bar, en tenant compte des différents catégories de vin et des différentes contenances des verres de bière, ainsi que de la variation des stocks ; qu’il a appliqué un abattement au titre des pertes et des offerts, ainsi que, pour la partie  » bar « , un abattement supplémentaire afin de tenir compte de la tarification spéciale dont bénéficiaient les clients insulaires ;

7. Considérant que les requérants, qui ne contestent pas que la bière est le produit le plus régulièrement consommé par la clientèle du bar, ne démontrent pas que les ventes de ce produit ne seraient pas représentatives de l’activité du bar ; qu’il n’est pas établi que le vérificateur aurait omis de prendre en compte une partie des ventes de vin au verre, notamment celles à destination des résidents, et que la part correspondant à ces ventes dans le chiffre d’affaires du bar serait dès lors supérieure à 24 % ; qu’il n’est pas davantage démontré que les abattements pratiqués au titre des pertes et des offerts seraient insuffisants pour prendre en compte la consommation du personnel et du gérant ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que les prix retenus pour les ventes de bière seraient inexacts, alors qu’il n’est pas contesté que le vérificateur a appliqué les tarifs résultant des cartes de menus qui lui ont été communiquées par le gérant de la société, ainsi que des tickets Z journaliers produits ; que le vérificateur a pu, sans incohérence, s’appuyer sur un échantillon de tickets Z récapitulatifs et de tickets Z journaliers et sur les factures d’achats fournies par la société pour procéder à la reconstitution du chiffre d’affaires, alors même qu’il avait estimé la comptabilité présentée dépourvue de valeur probante ; que la circonstance qu’il a employé l’expression de  » coefficient multiplicateur  » pour désigner ce qui, selon les requérants, ne constituerait qu’un  » rapport moyen « , n’est pas davantage de nature à vicier la méthode de reconstitution utilisée ; que la méthode utilisée par l’administration n’apparait ainsi ni excessivement sommaire, ni radicalement viciée et se fonde sur les conditions réelles d’exploitation de l’établissement ; que les requérants ne proposent aucune autre méthode de reconstitution aboutissant à un chiffre plus précis que celui auquel est parvenu l’administration ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce que la reconstitution du chiffre d’affaires de la SARL Le Diamant noir serait erronée et rendrait infondés les redressement notifiés à cette dernière, doit être écarté ; que l’administration établit de ce fait le bien-fondé du montant des sommes regardées comme ayant été distribuées ;

8. Considérant que M. et Mme B…soutiennent, en quatrième lieu, que l’administration ne rapporte pas la preuve de l’appréhension par eux des sommes distribuées ;

9. Considérant qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts :  » Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (…)  » ;

10. Considérant que si, par une lettre datée du 29 juillet 1996, le mandataire de la SARL Le Diamant noir a désigné M. et Mme B…comme bénéficiaire des revenus distribués, cette dernière n’était pas représentée elle-même par le signataire de cette lettre et conteste avoir bénéficié de cette distribution ; que, par suite, il appartient à l’administration d’apporter la preuve de l’appréhension par les requérants des revenus imposés à leur nom ;

11. Considérant qu’il n’est pas contesté que M. et Mme B…détiennent la totalité des parts sociales de la SARL Le Diamant noir, que M. B…en est le gérant et que Mme B…a en charge les tâches administratives au sein de la société ; qu’ils étaient dès lors les seuls maîtres de l’affaire et pouvaient disposer sans contrôle des fonds sociaux ; que, dans ces conditions, l’administration doit être regardée comme rapportant la preuve que les recettes dissimulées ont été appréhendées par eux, sans qu’elle soit tenue d’établir la confusion des patrimoines ; que la circonstance que Mme B…dispose d’une autre source de revenus ne fait pas obstacle à l’imposition entre les mains des requérants des sommes qui leur ont été distribuées ;

12. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B…ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande de décharge ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme B…est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B…et au ministre de l’économie et des finances.

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 »

2

N° 10MA04524

sm


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