Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 31 janvier 2011, présentée pour la SARL Société Mobilière François André, dont le siège est 35, boulevard des Capucines à Paris (75002), par Me de Manneville et Me A…; la SARL Société Mobilière François André demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0718710 du 22 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2004, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et intérêts de retard contestés ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive 90/434/CEE du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, apports d’actifs et échanges d’actions intéressant des sociétés d’Etats membres différents ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 23 mai 2013 :
– le rapport de Mme Oriol, premier conseiller,
– les conclusions de Mme Dhiver, rapporteur public,
– et les observations de Me de Manneville, avocat de la SARL Société Mobilière François André ;
1. Considérant que la SARL Société Mobilière François André, qui exerce une activité de placement de valeurs mobilières, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité au titre des exercices clos de 2003 à 2005, selon la procédure de rectification contradictoire ; qu’à l’issue de ce contrôle, l’administration a mis à sa charge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt procédant de l’imposition d’une plus-value de cession de titres placée en sursis d’imposition lors d’un apport partiel d’actif réalisé en 1997 ; que la SARL Société Mobilière François André fait appel du jugement n° 0718710 en date du 22 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2004, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;
2. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 38 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : » 1. (…) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d’après les résultats d’ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d’éléments quelconques de l’actif, soit en cours, soit en fin d’exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l’actif net à la clôture et à l’ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l’impôt diminuée des suppléments d’apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l’exploitant ou par les associés. L’actif net s’entend de l’excédent des valeurs d’actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (…) » ; qu’aux termes de l’article 210 B du même code : » 1. Les dispositions de l’article 210 A s’appliquent à l’apport partiel d’actif d’une branche complète d’activité ou d’éléments assimilés (…) » ; que l’article 210 A du même code dispose que la société bénéficiaire doit calculer les plus-values réalisées ultérieurement à l’occasion de la cession des immobilisations non amortissables d’après la valeur qu’elles avaient, du point de vue fiscal, dans les écritures de la société absorbée ;
3. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 216 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : » I. Les produits nets des participations, ouvrant droit à l’application du régime des sociétés mères et visées à l’article 145, touchés au cours d’un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci (…) » ;
4. Considérant que le gain net dégagé par un associé ou actionnaire passible de l’impôt sur les sociétés détenant des titres de participation à l’occasion du rachat par la société émettrice de ses propres actions, ne constitue pas un gain en capital mais un produit net de participation à concurrence, conformément aux dispositions du 2 de l’article 38 combiné avec l’article 209 du même code, de la différence entre le prix de rachat et la valeur d’acquisition des titres inscrite à son bilan d’ouverture ; que, dans le cas où l’actionnaire a acquis les titres à l’occasion d’un apport partiel d’actif placé sous le régime des articles 210 A et 210 B du code général des impôts, qui instaure un sursis d’imposition, la valeur d’acquisition des titres ainsi apportés est celle qui était retenue dans les écritures de la société apporteuse ;
5. Considérant que le 30 octobre 1997, la Société Hôtelière de la Chaîne Lucien Barrière a bénéficié de la part de sa société mère, la SARL Société Mobilière François André, d’un apport partiel d’actifs comprenant des titres de la société immobilière du casino de l’hôtel royal de La Baule figurant au bilan de la société apporteuse pour un montant de 1 946 623 euros ; qu’en échange de cet apport, la Société Hôtelière de la Chaîne Lucien Barrière a transféré à la SARL Société Mobilière François André 775 de ses actions, valorisées à son actif à hauteur de 13 795 471 euros ; que la plus-value d’apport ainsi dégagée par la SARL Société Mobilière François André à l’occasion de cette opération, placée sous le régime prévu aux articles 210 A et 210 B, a bénéficié du sursis d’imposition résultant de ce régime ; que le 17 décembre 2004, la Société Hôtelière de la Chaîne Lucien Barrière a procédé au rachat de 397 des 775 actions détenues par la SARL Société Mobilière François André, au prix de 20 012 002 euros, en vue de l’annulation ultérieure de ces titres par voie de réduction de capital ; que la SARL Société Mobilière François André a alors constaté un profit égal à la différence entre ce prix de rachat et la valeur d’apport estimée à 997 173 euros des 397 titres cédés, soit un montant de 19 014 829 euros qu’elle a retranché de son bénéfice net imposable au titre de l’exercice clos en 2004 en application du régime des sociétés mères et filiales prévu par les articles 145 et 216 du code général des impôts ; qu’à l’issue de la vérification de comptabilité de la SARL Société Mobilière François André, l’administration a remis en cause le bénéfice de ce régime pour le montant du prix de rachat correspondant à la plus-value d’apport placé en sursis d’imposition, soit un montant de 6 069 668 euros représentant la différence entre la somme de 7 066 841 euros, correspondant à la valeur d’inscription au bilan de l’appelante des 397 titres de la Société Hôtelière de la Chaîne Lucien Barrière échangés en 1997 contre les 14 280 actions de la société immobilière du casino de l’hôtel royal de la Baule, et celle de 997 173 euros égale à la valeur d’inscription comptable, en 1997, desdites actions dans les écritures de la SARL Société Mobilière François André, qu’elle a soumis à l’impôt sur les sociétés au taux réduit de 19 % prévu par les dispositions de l’article 219 du code général des impôts dans leur rédaction alors applicable ;
6. Considérant qu’il résulte de ce qui a été dit au point 4 que la somme de 20 012 002 euros versée par la Société Hôtelière de la Chaîne Lucien Barrière à la SARL Société Mobilière François André correspond, pour sa fraction excédant le montant du remboursement de l’apport partiel d’actif effectué en 1997, à une distribution de revenus, y compris en tant qu’elle inclut la somme égale à la plus-value d’apport placée en sursis d’imposition dans les conditions rappelées précédemment ; que la somme de 6 069 668 euros pouvait donc à bon droit être regardée comme une distribution faite par une filiale à sa société mère relevant du régime prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts ;
7. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que la SARL Société Mobilière François André est fondée à soutenir que c’est à tort que le Tribunal administratif de Paris, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2004, ainsi que des intérêts de retard correspondants ;
8. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SARL Société Mobilière François André et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 0718710 du 22 octobre 2010 du Tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La SARL Société Mobilière François André est déchargée des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l’exercice clos en 2004, ainsi que des intérêts de retard correspondants.
Article 3 : L’Etat versera à la SARL Société Mobilière François André une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 11PA00521
Classement CNIJ : 19-04-01-04-02
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