Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SA ASIALIS a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 mars 2012.
Par un jugement n° 1306497 du 7 mars 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 5 mai 2017 et le 29 mars 2018, la SA ASIALIS, représentée par Me Branellec, avocat, demande à la Cour :
1° d’annuler ce jugement ;
2° de la décharger des impositions litigieuses ;
3° de mettre à la charge de l’État la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens.
4° de condamner l’Etat aux entiers dépens ;
Elle soutient qu’elle exerce, en tant qu’holding mixte s’immisçant dans la gestion de ses filiales, une activité de soutien à ses filiales, en assurant la direction et la gestion effective du groupe et en leur fournissant diverses prestations de service d’ordre administratif et technique et que, dès lors, elle revêt la qualité de personne morale assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée qui est déductible.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Beaujard,
– les conclusions de M.A… yvialle, rapporteur public ;
– et les observations de MeB…, pour la société ASIALIS.
Considérant ce qui suit :
1. L’administration fiscale a remis en cause des remboursements de taxe sur la valeur ajoutée dont a bénéficié la SA ASIALIS au titre des années 2009 et 2012. Cette dernière relève appel du jugement en date du 7 mars 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur le droit au remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée :
2. Aux termes de l’article 256 du code général des impôts : » I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. « . Aux termes de l’article 256 A du même code : » Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention (…) Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées « . Aux termes de l’article 271 du même code : » I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d’une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (…) « .
3. Il résulte de l’article 17 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977 que si la simple acquisition et la simple détention de parts sociales ne doivent pas être regardées comme des activités économiques au sens de la directive, conférant à leur auteur la qualité d’assujetti, il en va différemment lorsque la participation est accompagnée d’une immixtion directe ou indirecte dans la gestion des sociétés dans lesquelles des participations sont détenues. Dans ce cas, la taxe sur la valeur ajoutée est déductible, d’une part, lorsque les opérations effectuées en amont présentent un lien direct et immédiat avec des opérations en aval ouvrant droit à déduction, d’autre part, même en l’absence de lien direct et immédiat entre une opération particulière en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction, lorsque les coûts en cause font partie des frais généraux de l’assujetti et sont, en tant que tels, des éléments constitutifs du prix des biens ou des services qu’il fournit. Par un arrêt Beteiligungsgesellschaft Larentia + Minerva mbH et Co. KG du 16 juillet 2015, la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que, dans ces conditions, les frais liés à la détention de participations dans ses filiales supportés par une société holding qui participe à leur gestion et qui, à ce titre, exerce une activité économique, doivent être regardés comme affectés à l’activité économique de cette société et que la taxe sur la valeur ajoutée acquittée sur ces frais ouvre droit à déduction intégrale. Elle a précisé que ce n’est que dans l’hypothèse où ces frais ont été affectés pour partie à d’autres filiales à la gestion desquelles cette société holding ne participait pas, que la taxe sur la valeur ajoutée acquittée sur ceux-ci ne pourrait être déduite que partiellement, selon une clef de répartition reflétant objectivement la part d’affectation réelle des dépenses en amont à chacune des deux activités, économique et non économique, de la société holding. Il s’en déduit que la taxe grevant les frais généraux des holdings qui s’immiscent dans la gestion de leurs filiales est entièrement déductible.
4. S’il incombe normalement à chaque partie, sous réserve des conséquences éventuellement attachées par des dispositions législatives à la procédure d’imposition, d’apporter la preuve de l’existence des faits dont elle se prévaut, il appartient au redevable de fournir tous éléments qu’il est seul à détenir permettant à l’administration, sous le contrôle du juge de l’impôt, de se prononcer sur son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée.
5. La circonstance que les statuts de la société requérante fassent état d’une activité de gestion de ses filiales est insuffisante pour démontrer la réalité de cette activité. Il en est de même de l’absence de mouvement de titres depuis le rachat des filiales, et de la production de factures de » management fees » établies postérieurement à la période vérifiée et même à la vérification de comptabilité, et ne comportant aucune précision sur la nature des prestations facturées. La production d’un contrat d’assistance informatique comptable pour un montant de 232 euros n’implique nullement que la société requérante apporte une assistance comptable à ses filiales. De même, la production d’une note d’honoraires d’avocat, d’un montant de 8 970 euros, sans aucune précision sur la nature du service rendu n’implique pas que la société holding rendait des services juridiques à ses filiales. Le contrat de cautionnement produit au dossier, au demeurant établi à l’en-tête de la SA ASIALIS, et non signé par le contractant a été conclu par la SA ASIALIS en qualité d’actionnaire, et non en qualité d’animatrice de la filiale. La société holding pouvait d’ailleurs être déchargée de son obligation de caution en cas de perte de la qualité d’actionnaire majoritaire. La réponse à l’appel d’offre de la société UNAKRT date de l’année 2013, soit postérieurement aux années en litige. Les cinq voyages effectués au Cambodge par le PDG de la SA ASIALIS, où l’une des filiales est active n’établissent pas son implication dans la gestion des filiales, les » nombreuses réunions « , les » contacts directs avec diverses institutions » allégués n’étant démontrés par aucune pièce à l’exception d’un courriel de l’ambassade de France au Cambodge, rédigés en termes généraux, alors qu’en outre, le PDG de la SA ASIALIS est également le PDG des filiales. Les comptes-rendus de plusieurs
comptes-rendus de conseil d’administration de la holding produits aux dossiers sont également rédigés en termes très vagues et sont dépourvus de dates certaines. Enfin, le relevé de production de créances par l’administration à la liquidation de la SA ASIALIS concerne les sommes en litige dans la présente instance, soit des remboursements indus de taxe sur la valeur ajoutée, et ne peuvent, contrairement aux allégations de la société requérante, établir que l’administration la tenait pour assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée pour les années litigieuses.
6. Il résulte de ce qui précède que l’assujettissement de la SA ASIALIS à la taxe sur la valeur ajoutée n’est pas établi. Les conclusions présentées par elle et tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 mars 2012 doivent ainsi être rejetées.
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens et sur les dépens :
7. Aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : » Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. « .
8. Les dispositions précitées de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SA ASIALIS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, la présente instance n’a en tout état de cause pas généré de dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA ASIALIS est rejetée.
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N17VE01411