Conseil d’État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 28/03/2008, 295735, Publié au recueil Lebon

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Conseil d’État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 28/03/2008, 295735, Publié au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE, enregistré le 21 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat ; le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 17 mai 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Paris, faisant droit à l’appel de M. Jean A, a annulé le jugement du 19 juin 2003 du tribunal administratif de Melun et accordé à l’intéressé la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée et de contribution au remboursement de la dette sociale ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 1994, 1995 et 1996 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Yves Salesse, Conseiller d’Etat,

– les observations de Me Ricard, avocat de M. Jean A,

– les conclusions de Mme Claire Landais, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu’aux termes de l’article 39 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : «1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (…) notamment : (…) / 3° les intérêts servis aux associés à raison des sommes qu’ils laissent ou mettent à la disposition de la société, en sus de leur part du capital, quelle que soit la forme de la société, dans la limite de ceux calculés à un taux égal à la moyenne annuelle des taux de rendement brut à l’émission des obligations des sociétés privées » ; qu’aux termes de l’article 212 du même code : « Les intérêts afférents aux sommes que les associés laissent ou mettent à la disposition de la société sont admis dans les charges déductibles dans les conditions prévues au 3° du 1 de l’article 39. / Toutefois : / 1° La déduction n’est admise, en ce qui concerne les associés ou actionnaires possédant, en droit ou en fait, la direction de l’entreprise ou détenant plus de 50 % des droits financiers ou des droits de vote attachés aux titres émis par la société, que dans la mesure où ces sommes n’excèdent pas, pour l’ensemble desdits associés ou actionnaires, une fois et demie le montant du capital social (…) » ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, président-directeur général et principal actionnaire de la SA Etablissements A, a personnellement contracté un emprunt bancaire de 2 millions de francs intégralement mis à la disposition de sa société qui a pris en charge les intérêts de cet emprunt ; qu’à la suite d’une vérification de la comptabilité de la société portant sur les années 1994 à 1996, l’administration fiscale a regardé la fraction des intérêts d’emprunt excédant les limites fixées par les articles 39-1-3° et 212-1° du code général des impôts comme des revenus distribués à M. A et les a imposés sur le fondement de l’article 109-1-1° du code général des impôts ;

Considérant que la SA Etablissements A a effectué auprès de la banque les remboursements afférents à l’emprunt et, de ce fait, est devenue directement la débitrice de la banque ; qu’ainsi, les intérêts versés doivent être regardés comme rémunérant le prêt consenti par celle-ci, nonobstant la circonstance que les fonds ont été mis à la disposition de la société par M. A ; qu’en jugeant que, dans ces conditions, ne trouvent pas à s’appliquer les dispositions précitées du code général des impôts qui limitent la déduction des intérêts versés aux associés à raison de sommes qu’ils laissent ou mettent à la disposition de la société, la cour administrative d’appel de Paris n’a pas commis d’erreur de droit ; qu’ainsi, le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L’INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : L’Etat versera la somme de 3 000 euros à M. A au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à M. Jean A.


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