Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
(2ème chambre A)
VU, enregistrée le 12 décembre 1996 au greffe de la cour, la requête présentée pour M. Raymond A…, demeurant …, par Me X…, avocat ; M. A… demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n 9209375/1 du 6 juin 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris ne lui a accordé qu’une décharge partielle des compléments d’impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1980, 1981, 1982 et 1983 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2 ) de lui accorder la décharge des impositions restant en litige ;
3 ) de condamner l’administration aux entiers dépens ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 decembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu, au cours de l’audience publique du 14 décembre 2000 :
– le rapport de M. MAGNARD, premier conseiller ;
– et les conclusions de M. MORTELECQ, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. A…, qui était notamment président directeur général des deux sociétés anonymes Ray Marjory et Ray Z…, spécialisés dans la fabrication de vente de vêtements, et associé de la société de production de films Samfilm, a fait l’objet en 1984 d’une vérification approfondie de sa situation fiscale d’ensemble portant sur les années 1980 à 1983 à l’issue de laquelle divers redressements lui ont été notifiés dans la catégorie des revenus d’origine indéterminée, des bénéfices non commerciaux et des revenus de capitaux mobiliers ; que M. A… fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris ne lui a accordé qu’une décharge partielle des compléments d’impôts consécutifs à ces redressements ;
Sur l’étendue du litige :
Considérant que le ministre déclare en appel, d’une part, renoncer à taxer la somme de 75.000 F qui avait fait l’objet d’un redressement au titre de l’année 1980 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et, d’autre part, limiter aux sommes de 17.310 F et 59.376 F le solde des balances des espèces établies respectivement pour les années 1982 et 1983 ; que, par décision du 13 août 1997, le directeur chargé de la direction nationale des vérifications des situations fiscales a prononcé à ce titre en faveur de M. A… des dégrèvements en droits et pénalités d’un montant total de 203.371 F ; que dans cette mesure, il n’y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête ;
Sur la régularité de la procédure d’imposition :
En ce qui concerne la mise en oeuvre de l’article L.16 du livre des procédures fiscales :
Considérant qu’en vertu des articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales, l’administration peut, lorsqu’elle a réuni des éléments permettant d’établir qu’un contribuable peut avoir disposé de revenus plus importants que ceux qu’il a déclarés, lui demander des justifications et, s’il s’abstient de répondre à cette demande ou n’apporte pas de justifications suffisantes, le taxer d’office à l’impôt sur le revenu ; que, sur le fondement des dispositions précitées, l’administration a adressé à M. A… des demandes de justifications de ses revenus portant pour les quatre années 1980 à 1983, d’une part, sur ses crédits bancaires et, d’autre part, sur les soldes des balances des espèces établies par le vérificateur ;
Considérant, s’agissant des crédits bancaires d’origine indéterminée, que, pour les deux années 1982 et 1983, M. A… soutient que l’administration n’avait pas réuni des éléments lui permettant d’établir qu’il avait disposé de revenus plus importants que ceux qu’il avait déclarés et ne pouvait, par suite, lui adresser une demande de justifications sur le fondement de l’article L.16, précité, du livre des procédures fiscales ; que, toutefois, contrairement à ce que soutient le requérant, aucune disposition n’obligeait l’administration à procéder à un examen critique préalable de ses crédits bancaires ni, quand elle l’a fait, à se référer comme terme de comparaison aux seuls crédits dont l’origine n’est pas justifiée après ce premier examen ; que, par suite, pour contester l’existence d’indices permettant à l’administration de mettre en oeuvre les dispositions de l’article L.16, M. A… n’est pas fondé à comparer ses revenus bruts déclarés avec le solde résiduel des crédits restés inexpliqués à la date des demandes de justifications ; qu’il résulte de l’instruction que pour l’année 1982, le montant des crédits enregistrés sur le compte de M. A… s’est élevé à 5.197.815 F pour un montant de revenus bruts déclarés de 1.155.923 F et que, pour l’année 1983 le montant des crédits bancaires s’est élevé à 4.465.581 F et celui des revenus déclarés à 796.556 F ; qu’à supposer même qu’ainsi que le soutient le requérant, il aurait également déclaré des revenus tirés de son activité agricole s’élevant à 833.913 F pour l’année 1982 et à 1.330.859 F pour l’année 1983, la discordance constatée, pour chacune de ces deux années, entre les crédits bancaires de M. A… et les revenus qu’il avait déclarés suffisait à constituer un élément établissant qu’il pouvait avoir disposé de revenus plus importants que ceux par lui déclarés et autorisait l’administration à lui adresser une demande de justification quant à l’origine de certaines des sommes portées au crédit de ses comptes bancaires ;
Considérant, s’agissant du solde inexpliqué des balances des espèces, que, lorsque l’administration se fonde sur l’existence d’un déséquilibre entre les ressources connues et une évaluation des disponibilités engagées et taxe le solde de la balance ainsi établi, il convient que ce solde présente un caractère significatif et ne résulte, ni d’une évaluation arbitraire des dépenses de train de vie, ni de l’inclusion dans les disponibilités engagées d’éléments de patrimoine dont rien ne permet de présumer l’acquisition au cours de la période vérifiée ; qu’en revanche, contrairement à ce que soutient M. A…, l’administration est en droit de prendre en compte, pour l’établissement d’une balance de trésorerie espèces, le prix d’acquisition d’éléments du patrimoine dès lors que ces éléments ont été acquis au cours de l’année au titre de laquelle est établie ladite balance ; qu’il n’est pas contesté que M. A… a acquis en espèces le 16 avril 1980 une pouliche pour un montant de 30.450 F et le 12 juin 1980 deux parts d’un cheval de course pour un montant de 21.000 F dont ses comptes bancaires ne gardent pas trace ; que l’administration était dès lors en droit d’inclure ces deux sommes dans la balance de trésorerie espèces établie au titre de l’année 1980 ;
Considérant, en revanche, que, si l’administration est en droit, lorsqu’elle interroge un contribuable sur les crédits figurant à son compte bancaire au titre d’une année donnée de lui demander des précisions sur la date d’acquisition de certains éléments de patrimoine dont la vente est supposée expliquer lesdits crédits et si, en l’absence de justification sur ce point, elle est fondée à taxer d’office les crédits litigieux, elle ne saurait intégrer le prix d’acquisition de ces éléments de patrimoine dans une balance de trésorerie établie pour la même année sans établir préalablement, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, que lesdits éléments ont été acquis au cours de l’année en litige ; qu’aucun élément du dossier ne permet d’établir que les tableaux, bijoux et les cent cinquante pièces de cinquante pesos mexicains vendus par M. A… au cours de l’année 1981 pour un montant total de 1.004.000 F ont été acquis au cours de ladite année ; qu’ainsi l’administration n’était pas fondée à intégrer leur prix dans les disponibilités employées en 1981 ; que, si l’administration soutient que la vente de ces pièces d’or, bijoux et tableaux a été invoquée par l’intéressé pour expliquer certains crédits bancaires, cette argumentation n’est pas de nature à justifier le bien-fondé de l’imposition des sommes litigieuses dans le cadre de la balance de trésorerie ; que, par suite, il convient de réduire de 1.004.000 F la base imposable de M. A… au titre de l’année 1981 ;
Considérant, enfin, que le solde des balances espèces établi au titre des années 1980 et 1981 ne s’explique pas, à titre principal, par l’évaluation, nécessairement approximative, faite par le vérificateur des dépenses de train de vie de l’intéressé ; que le requérant qui se borne à des critiques globales et générales n’établit pas que cette évaluation pour des montants s’élevant respectivement à 48.000 F et 53.000 F aurait été effectuée d’une manière exagérée et arbitraire, alors qu’aucune dépense de train de vie courante concernant notamment la nourriture, les loisirs ou l’habillement n’a été retrouvée débitée sur les comptes bancaires de ces années ;
En ce qui concerne l’utilisation de renseignements obtenus auprès de tiers :
Considérant que lorsque le vérificateur utilise pour la détermination des bases d’imposition des renseignements provenant d’autres sources que les résultats de la vérification approfondie de situation fiscale d’ensemble, il lui appartient d’informer le contribuable, avant la mise en recouvrement des impositions de la teneur desdits renseignements afin de le mettre à même de les contester ; qu’en revanche l’administration n’est pas tenue de communiquer d’elle-même au contribuable les pièces et documents se rapportant aux renseignements provenant d’autres sources que la vérification, et notamment aux informations recueillies dans l’exercice de son droit de communication ; qu’il résulte de l’instruction que, dans la notification de redressements en date du 30 mai 1985, relative à l’année 1982, le vérificateur a indiqué que dans la comptabilité de la société Ray Marjory une dette de 729.248 F avait été enregistrée à l’égard de la société Samfilm et que les fonds correspondant à cette dette avaient en réalité été mis à disposition de M. A…, d’une part, par le débit de son compte courant dans la société, et d’autre part, par la prise en charge par cette société de ses dettes personnelles ; qu’elle a ainsi suffisamment informé le requérant de la teneur des renseignements qu’elle avait recueillis dans l’exercice de son droit de communication pour qu’il ait été mis à même de demander la communication des documents en cause avant la mise en recouvrement des impositions ; que M. A… ne soutient pas avoir présenté une telle demande ; que s’il indique par ailleurs que ces renseignements auraient été obtenus irrégulièrement auprès des sociétés dont il était dirigeant, actionnaire ou salarié, il n’assortit ce moyen d’aucune précision qui permette à la cour d’en apprécier le bien-fondé ;
En ce qui concerne la mise en oeuvre de l’article L.69 du livre des procédures fiscales :
Considérant qu’aux termes de l’article L.69 du livre des procédures fiscales : « Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d’office à l’impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d’éclaircissements ou de justifications prévues à l’article L.16. » ;
Considérant qu’en réponse à la demande de justifications qui lui a été adressée le 25 août 1984 sur l’origine des sommes lui ayant permis de procéder à l’acquisition d’une bon de caisse de 250.000 F en 1980, M. A… s’est borné dans un courrier en date du 17 septembre 1984 à indiquer qu’il effectuait des recherches sur ce point ; qu’en réponse à la demande de justifications qui lui a été adressée le 15 mars 1985 au sujet des crédits de 40.000 F, 76.000 F, 39.000 F et 188.488,90 F constatés en 1981 au compte courant ouvert à son nom dans la comptabilité de la société Samfilm, M. A…, dans un courrier en date du 4 avril 1985, a fait valoir respectivement une erreur de comptabilisation, l’impossibilité de retrouver la trace de l’opération, et, pour les deux dernières sommes précitées, le paiement par lui-même de fournisseurs de la société sans produire la moindre pièce justificative à l’appui de ses allégations ; que c’est par suite à bon droit que l’administration a assimilé ses réponses à un défaut de réponse et a taxé d’office les sommes correspondantes en application des dispositions précitées de l’article L.69 du livre des procédures fiscales ;
Considérant que, si M. A… fait valoir que les sommes de 170.000 F au titre de l’année 1980 et de 48.655 F au titre de l’année 1983 ont été directement incluses dans les balances de trésorerie établies au titre de chacune de ces années sans que le vérificateur lui ait demandé des justifications, il résulte de l’instruction que les redressements correspondant à ces sommes ont été abandonnés par l’administration préalablement à la mise en recouvrement des impositions ; que ce moyen est dès lors inopérant ;
En ce qui concerne le défaut de saisine de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d’affaires :
Considérant que M. A… soutient qu’en refusant de considérer la somme de 118.742 F comme un revenu d’origine indéterminée, l’administration l’a indûment privé de la possibilité de saisir sur le bien-fondé de sa taxation la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d’affaires ; que, toutefois, en réponse à la demande de justifications que lui a adressée l’administration le 27 septembre 1986, M. A… a indiqué que le crédit figurant sur ses comptes bancaires pour un montant de 118.742 F correspondait au règlement par la société Samfilm d’une créance de ce montant détenu sur cette société par la société Kodak Film à qui il l’avait rachetée pour la somme de 80.000 F ; que l’origine et la nature de ce crédit ayant ainsi été identifiés, c’est à bon droit que l’administration n’a pas imposé la somme correspondante dans la catégorie des revenus d’origine indéterminée ; que M. A… ne saurait dès lors se plaindre de ce que, ce faisant, l’administration l’aurait privé de la possibilité de saisir la commission départementale ;
En ce qui concerne la motivation des notifications de redressements en date des 29 et 30 mai 1985 et de la réponse aux observations du contribuable en date du 3 octobre 1986 :
Considérant qu’aux termes de l’article L.57 du livre des procédures fiscales applicable à la procédure contradictoire : « L’administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. » ; qu’aux termes de l’article L.76 du même livre applicable aux procédures d’office : « Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d’office sont portés à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d’une notification qui précise les modalités de leur détermination. » ;
Considérant qu’il résulte de l’examen de la notification de redressement du 29 mai 1985 concernant l’année 1981 que celle-ci indiquait les bases servant à l’établissement des impositions d’office notifiées dans la catégorie des revenus d’origine indéterminée ; que l’administration a renoncé au cours de la procédure à la réintégration de la somme de 26.000 F figurant sur le compte courant ouvert au nom de M. A… dans les écritures de la SCI « du boulevard de la gare » ; que les notifications des 29 et 30 mai 1985 qui indiquaient les motifs de fait et de droit justifiant les redressements selon la procédure contradictoire de 35.000 F au titre de 1981, 104.189 F et 729.248 F au titre de 1982, et 72.000 F, 60.000 F et 1.000.000 F au titre de 1983 effectués dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et de 125.000 F au titre de revenus de créances, permettaient à M. A… de formuler ses observations ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce que ces notifications seraient insuffisamment motivées manque en fait ;
Considérant que, contrairement à ce qu’il est soutenu, l’administration dans sa réponse en date du 3 octobre 1986, a répondu aux observations du contribuable portant sur le redressement de 104.189 F notifié dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l’année 1982 et a maintenu ledit redressement à hauteur de 95.338 F ;
En ce qui concerne l’absence d’entretien avec l’interlocuteur départemental :
Considérant qu’antérieurement au 1er janvier 1988, date d’entrée en vigueur de l’article L.10 du livre des procédures fiscales relatif à l’opposabilité de la charte du contribuable vérifié, aucune disposition législative ou réglementaire n’imposait à l’administration d’accorder au contribuable vérifié une entrevue avec l’interlocuteur départemental ; qu’en conséquence, M. A…, qui a formulé sa demande d’entrevue le 13 novembre 1986 et ne l’a pas renouvelée postérieurement à l’entrée en vigueur de l’article L.10, n’est en tout état de cause pas fondé à soutenir, alors même que les impositions consécutives aux redressements en litige ont été mises en recouvrement le 31 décembre 1988, que l’administration aurait vicié la procédure en refusant de reporter l’entrevue qui lui avait été accordée pour le 3 décembre 1986 à laquelle il ne s’est d’ailleurs pas rendu ;
Sur le bien-fondé des redressements :
En ce qui concerne les revenus d’origine indéterminée :
Considérant qu’il appartient à M. A…, régulièrement taxé d’office en application des dispositions de l’article L.69 du livre des procédures fiscales pour les sommes restant en litige dans la catégorie des revenus d’origine indéterminée, d’apporter, en vertu des articles L.193 et R.193 du même livre, la preuve de l’exagération des redressements qu’il conteste ;
Considérant que M. A… n’établit pas l’exagération de l’évaluation par le vérificateur de ses dépenses de train de vie en espèces, intégrées dans les balances de trésorerie dont le solde a été taxé au titre de 1980 et 1981 ; qu’aucun élément n’est produit à l’appui du moyen tiré de ce que les achats de chevaux, pris en compte dans l’établissement de la balance 1980, auraient été effectués à l’aide de fonds en la possession du contribuable avant le début de l’année d’imposition ;
Considérant que M. A… n’établit pas, par la seule production d’un bordereau de remise de chèques et d’une attestation sans valeur probante, que la somme de 280.000 F versée en 1980 sur son compte bancaire par un tiers était destinée à l’acquisition de chevaux de course dans le cadre d’une association de fait entre les intéressés ; qu’il ne prouve pas davantage que le bon de caisse souscrit en 1980 pour un montant de 250.000 F ait été financé par un chèque de même montant tiré sur l’un de ses comptes bancaires et versé sur un autre compte dès lors qu’il n’est pas établi que ce dernier compte aurait enregistré une écriture débitrice d’un montant équivalent ; qu’enfin la copie illisible d’un chèque ne permet pas d’étayer l’affirmation selon laquelle le crédit de 25.000 F constaté en 1980 sur son compte bancaire proviendrait d’un de ses frères ;
Considérant que faute de produire les factures concernées et la preuve de leur paiement, M. A… ne peut être regardé comme établissant que les sommes versées pour un montant total de 278.028 F en 1981 et de 15.414 F en 1982 sur son compte courant d’associé dans la société Samfilm, de 20.000 F en 1983 sur son compte d’exploitant dans le Haras de Y… et de 20.000 F la même année sur l’un de ses comptes bancaires correspondraient à des remboursements par la société Samfilm et par la société Ray Marjory, de frais déboursés pour le compte de ces sociétés ;
Considérant que, si la somme de 75.741 F créditée au compte courant du contribuable dans la société Ray Marjory peut être regardée comme ayant pour contrepartie des débits constatés sur des comptes courants ouverts dans la comptabilité de cette société au nom de divers membres de la famille de M. A…, ce dernier ne fournit aucun élément permettant d’identifier les motifs de ces mouvements de fonds ; que M. A… ayant avec les personnes à l’origine des versements litigieux des relations de nature professionnelle, il n’est pas fondé à soutenir que le caractère privé desdits versements devrait être présumé ;
Considérant que, si M. A… soutient que les crédits relevés sur ses comptes bancaires pour un montant total de 229.896 F en 1982 ont pour origine des prêts qui lui auraient été consentis par son père et ses trois frères, il n’apporte aucun document probant à l’appui de cette allégation ; que M. A… n’établit pas davantage, faute de produire des justificatifs, que les sommes de 20.000 F et de 120.000 F créditées sur ses comptes bancaires le 3 août et le 30 décembre 1983 auraient eu pour origine des prêts que lui aurait consenti un ami ni que le crédit de 10.000 F relevé sur son compte bancaire le 14 novembre 1981 correspondrait à une vente de bijoux ; qu’il n’établit, enfin, nullement que le crédit de 10.000 F relevé sur son compte courant dans la société Ray Marjory en 1982 correspondrait à un remboursement par le trésor public d’un trop-perçu d’impôts sur le revenu émis au nom de son père ;
En ce qui concerne les bénéfices non commerciaux :
Considérant qu’aux temes de l’article 92 du code général des impôts : « 1. Sont considérés comme provenant de l’exercice d’une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux les bénéfices … de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus … » ;
Considérant en premier lieu qu’il résulte de l’instruction que M. A… a, par une convention du 2 janvier 1979, racheté pour la somme de 80.000 F une créance de 118.742,48 F détenue par la société Kodak Film sur la société Samfilm dont il était l’un des associés ; que son rôle dans cette dernière société lui a permis d’en redresser la situation financière et de lui revendre cette créance, en 1981, pour le prix de 118.742,48 F ; qu’ainsi ce produit doit être regardé comme trouvant son origine dans l’activité déployée par le requérant au sein de la société « Samfilm » et a donc à bon droit été imposé dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;
Considérant, en second lieu, qu’il résulte de l’instruction que la SCI du boulevard de la gare, dont M. A… possédait soixante des deux cents parts du capital social, a bénéficié en 1982 d’une avance, par une compagnie d’assurances, de 120.000 F sur le remboursement d’un sinistre ; que M. A… a directement appréhendé cette somme, que l’administration a taxé dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en application des dispositions de l’article 92 du code général des impôts ;
Considérant qu’il ne résulte pas de l’instruction que l’appréhension par M. A… de la somme précitée puisse être rattachée à une activité génératrice de revenus taxables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; que c’est par suite à tort que l’administration a imposé ladite somme dans la catégorie susmentionnée ; que si le ministre demande à la cour de maintenir l’imposition litigieuse, par voie de substitution de base légale, dans la catégorie des revenus fonciers, il résulte des dispositions de l’article 29 du code général des impôts définissant le revenu brut des immeubles donnés en location, dans sa rédaction alors applicable, que l’indemnité perçue par le propriétaire d’un immeuble, en exécution des stipulations du contrat d’assurance souscrit en vue de le garantir contre des risques tels que ceux du sinistre, n’a pas sa source dans la propriété dudit immeuble et, par suite, quel que soit l’emploi que le propriétaire peut faire de ladite indemnité, n’a pas à être incluse dans le revenu brut foncier de l’immeuble ; qu’ainsi, la somme litigieuse ne peut être regardée comme un revenu foncier au sens de l’article 14 du code général des impôts ; qu’il ne peut par suite être fait droit à la demande de substitution de base légale présentée par le ministre ;
En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :
Considérant, en premier lieu, qu’il résulte de l’instruction que M. A…, qui a perçu en 1980 la somme de 160.000 F de la société Ray Marjory en rémunération d’un compte courant bloqué ouvert à son nom dans la société, s’est abstenu d’en déclarer les intérêts ; que dans son courrier en date du 24 juin 1985 adressé en réponse à la notification de redressements en date du 29 mai, M. A… a d’ailleurs reconnu la perception desdits intérêts ; qu’en se bornant à faire valoir que l’administration n’a pas établi le bien-fondé du redressement et n’a pas justifié de l’existence d’un désinvestissement, sans fournir le moindre élément de nature à établir que la situation de la société ne lui permettait pas de disposer des intérêts crédités à son compte, M. A… ne conteste pas utilement le redressement litigieux ;
Considérant, en deuxième lieu, que le vérificateur a constaté que le total des versements effectués en 1982 par les sociétés Ray Marjory et Ray Z…, à M. A… qui en était l’un des associés, s’élevait à 1.259.395 F alors que ces sociétés avaient déclaré au titre des salaires versés à l’intéressé au cours de cette année la somme de 1.155.206 F ; que la différence de 104.189 F entre ces montants, ramenée à 95.338 F par l’administration dans sa réponse du 3 octobre 1986 aux observations du contribuable, a été à bon droit imposée entre les mains de M. A… comme revenus distribués sur le fondement de l’article 109.1.2 du code général des impôts en l’absence de toute justification de la nature de cet excédent de versement ;
Considérant, en troisième lieu, qu’il résulte de l’intruction, et notamment des éléments tirés de la comptabilité de la société Ray Marjory, que la créance de 729.248 F détenue par cette société sur la société Samfilm correspondait en réalité à hauteur de 360.000 F, à des versements effectués en 1982 sur un compte bancaire personnel de M. A… et à hauteur de 369.248 F, au règlement de factures personnelles du requérant ; que la circonstance que celui-ci n’ait pas directement appréhendé la totalité de cette somme n’est pas de nature à faire obstacle à son imposition en tant que revenu distribué entre ses mains ; que, si l’intéressé fait valoir que ces sommes ont eu pour contrepartie, pour la première, le débit de son compte courant dans la société Samfilm et pour la seconde, le règlement de sommes pour le compte de cette société dont il était caution, il n’apporte aucun élément concret à l’appui de ces affirmations ;
Considérant, en quatrième lieu, qu’une somme de 72.000 F a été versée en 1983 par la société Ray Marjory à M. A…, qui l’a porté au crédit de son compte courant dans la SCI du boulevard de la gare ; que la dette de M. A… constatée à cette occasion dans la comptabilité de la société Ray Marjory a été ultérieurement annulée par une écriture de crédit de son compte courant ayant pour contrepartie une écriture de débit au nom de ladite SCI ; qu’aucune opération réelle ne venant justifier cette dernière écriture, la somme de 72.000 F doit être regardée comme ayant été mise à la disposition de M. A… ; que le requérant ne fournit aucune explication de nature à remettre en cause l’imposition de ladite somme entre ses mains comme revenu distribué ;
Considérant, enfin, qu’il résulte de l’instruction que la société Rim dont M. A… était associé a versé les 17 et 24 octobre 1983 les sommes respectives de 600.000 F et de 400.000 F sur les comptes courants que les frères de M. A… détenaient dans la société Ray Marjory ; que, pour taxer lesdites sommes au titre de revenus distribués par la société Rim à M. A…, le vérificateur s’est fondé sur la circonstance que ses frères lui en avaient transféré immédiatement le montant sur un compte courant ouvert dans les écritures de la société Ray Marjory ; que, si au cours de la procédure de redressement, M. A… a soutenu que lesdites sommes constituaient des prêts consentis par ses frères, il n’a produit aucun commencement de preuve à l’appui de ses allégations ; qu’au surplus, dans sa réponse aux observations du contribuable, le vérificateur a mentionné, sans être contredit, que « la surface financière » des frères de M. A… ne leur permettait pas d’accorder un tel prêt ; que, par suite, en se bornant devant la cour à faire valoir, sans autre précision, que l’administration n’apporte pas la preuve de l’origine des fonds ni de leur nature de revenus distribués, M. A… ne conteste utilement ni les faits avancés par l’administration ni les conséquences fiscales qui en ont été tirées ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. A… est seulement fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à la réduction de sa base imposable au titre de 1981 à hauteur de 1.004.000 F et au titre de 1982 à hauteur de 120.000 F et à la décharge des impositions en résultant ; que pour le surplus, la requête ne peut qu’être rejetée ;
Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A… à concurrence du dégrèvement de 203.371 F prononcé en cours d’instance.
Article 2 : La base imposable à l’impôt sur le revenu de M. A… au titre des années 1981 et 1982 est réduite respectivement de 1.004.000 F et 120.000 F.
Article 3 : M. A… est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction de la base d’imposition définie à l’article 2.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 6 juin 1996 est réformé en ce qu’il a de contraire aux articles 2 et 3 ci-dessus.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A… est rejeté.