Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
I – Vu l’ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d’Etat a transmis à la cour administrative d’appel de Paris, en application de l’article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d’Etat par la « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES » ;
Vu, enregistrée sous le n° 89PA00782, la requête présentée par la « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES », société civile à capital variable, dont le siège est …, représentée par son directeur général ; elle a été enregistrée le 30 mai 1988 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d’Etat ; la société demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler le jugement n° 61312/2 en date du 10 mars 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de la taxe sur les frais généraux à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 1981 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de lui accorder le remboursement des frais exposés en première instance et en appel ; II – Vu l’ordonnance en date du 2 janvier 1989 par laquelle le président de la 9ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d’Etat a transmis à la cour administrative d’appel de Paris, en application de l’article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d’Etat par la « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES » ;
Vu, enregistrée sous le n° 89PA00789, la requête présentée par la « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES », société civile à capital variable, dont le siège est …, représentée par son directeur général ; elle a été enregistrée le 30 mai 1988 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d’Etat ; la Caisse demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler le jugement n° 61313/2 en date du 10 mars 1988 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations à l’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1980 et 1981 et des pénalités y afférentes ainsi que de l’amende fiscale prévue à l’article 1763 A du code général des impôts ;
2°) de prononcer les décharges demandées ;
3°) de lui accorder le remboursement des frais exposés en première instance et en appel ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu la loi n°87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience du 3 juillet 1990 :
– le rapport de Mme MARTIN, conseiller,
– et les conclusions de M. BERNAULT, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées de la société « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES » présentent à juger des questions semblables ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;
Sur l’étendue du litige :
Considérant que, par une décision en date du 1er décembre 1989 postérieure à l’introduction de la requête n° 89PA00789, le directeur des services fiscaux a accordé à la « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES » un dégrèvement de 5.788 F correspondant au montant des amendes fiscales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1980 et 1981 ; que, dans cette mesure, les conclusions de la requête sont devenues sans objet ;
Sur le principe de l’imposition à l’impôt sur les sociétés au titre des années 1980 et 1981 :
Considérant qu’aux termes du 2 de l’article 206 du code général des impôts, les sociétés civiles sont passibles de l’impôt sur les sociétés « si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 » ; que ces articles 34 et 35 sont ceux qui définissent les bénéfices imposables à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ;
Considérant que la société civile « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES » a été constituée entre trente-cinq obtenteurs publics et privés de variétés végétales ; qu’elle a pour objet « la gestion des intérêts de sélectionneurs obtenteurs ou de leurs représentants en ce qui concerne la propriété de leurs créations végétales, la délivrance, en leur nom, de licences permettant de reproduire et de commercialiser celles de leurs obtentions dont les marques et appellations ont été déposées, de poursuivre, pour leur compte, la perception des droits qui sont attachés à l’utilisation des licences accordées et, pour ce faire, réaliser toute opération mobilière ou immobilière … » ; qu’elle agit en tant que mandataire de ses adhérents et délivre des licences permettant l’exploitation des variétés végétales par les multiplicateurs, producteurs et vendeurs ; qu’elle perçoit à ce titre 5 % du montant des redevances attachées à l’exploitation des licences ; que l’ensemble de cette activité, qui ne comporte aucun acte de production agricole proprement dit, constitue des prestations de services de nature industrielle ou commerciale qui placent ladite société, par application des articles 34 et 206-2 susrappelés du code, dans le champ d’application de l’impôt sur les sociétés ;
Considérant qu’il résulte des stipulations des statuts de la société qu’en cas de dissolution ou de liquidation, l’actif net sera réparti entre tous les porteurs de parts ; que s’il n’est pas contesté qu’aucune distribution de bénéfices n’a eu lieu, la clause de répartition du boni de liquidation, dès lors qu’elle ne limite pas le droit des actionnaires à la seule reprise de leur apport, est de nature à donner à la personne morale un caractère lucratif ; qu’il résulte en outre de l’instruction que la société s’est livrée à des acquisitions immobilières et à des activités de placement des redevances perçues pour le compte des obtenteurs ; que, dans ces conditions, elle n’est pas fondée à soutenir qu’elle ne poursuivait aucun but lucratif ;
Sur l’application de l’article 218 bis du code général des impôts :
Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article 218 bis du code général des impôts, les sociétés passibles de l’impôt sur les sociétés en vertu de l’article 206 sont personnellement soumises audit impôt à raison de la part des bénéfices correspondant aux droits qu’elles détiennent, dans les conditions prévues à l’article 8 en qualité de membres des sociétés mentionnées audit article, au nombre desquelles figurent les sociétés en participation ; qu’en vertu des dispositions de l’article 238 bis K du même code, la part de bénéfices d’une société en participation correspondant aux droits inscrits à l’actif d’une personne morale passible de l’impôt sur les sociétés est déterminée selon les règles applicables au bénéfice réalisé par la personne qui détient ces droits ; qu’il résulte de l’instruction que la société requérante a, par acte enregistré le 21 juin 1979, constitué, avec une autre société avec laquelle elle a mis ses moyens en commun, une société en participation dont elle assure la gérance tout en continuant à exercer son activité de gestion d’affaires ; que dès lors que la société requérante était passible de l’impôt sur les sociétés, c’est à bon droit que sa quote-part de résultats provenant de la société en participation a été déterminée selon les règles applicables aux sociétés passibles de l’impôt sur les sociétés et soumise à cet impôt ;
Sur l’interprétation administrative de la loi fiscale :
Considérant qu’aux termes de l’article 1649 quinquies E du code général des impôts, repris à l’article L.80 A du livre des procédures fiscales : « Il ne sera procédé à aucun rehaussement d’impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l’administration est un différend sur l’interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s’il est démontré que l’interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l’époque, formellement admise par l’administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente » ;
Considérant que, d’une part, la contestation de la Caisse ne concerne pas un rehaussement d’impositions antérieures, mais des impositions qui, en l’absence de déclaration de sa part, avaient le caractère d’impositions primitives ; qu’elle ne peut en conséquence invoquer le premier alinéa de l’article 1649 quinquies E précité ; que si, d’autre part, elle invoque sur le fondement du second alinéa du même article une instruction en date du 3 novembre 1975 publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôts sous le n° 13 L 12.75, cette instruction, qui concerne l’article 1649 quinquies E lui-même, ne constitue pas l’interprétation du texte fiscal qui sert de base aux rappels de droits en litige ; qu’enfin, elle ne peut invoquer les dispositions de ce même second alinéa, en se prévalant d’une position prise par l’administration à son égard ;
Sur le principe de l’imposition à la taxe sur certains frais généraux déduits des résultats imposables de l’exercice 1981 :
Considérant qu’aux termes de l’article 5 de la loi n° 81-734 du 3 août 1981 : « Les redevables de l’impôt sur les sociétés doivent acquitter avant le 16 octobre 1981 un prélèvement exceptionnel pour 1981 de 10 % des frais généraux mentionnés aux c, d, e et f de l’article 39-5 du code général des impôts, déduits de leurs résultats imposables au titre de 1980 » ;
Considérant qu’ainsi qu’il a été dit, la « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES » était passible de l’impôt sur les sociétés au titre de l’année 1981 ; que, par suite, c’est à bon droit qu’elle a été assujettie au titre de cette année à la taxe sur certains frais généraux ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les conclusions des requêtes de la société « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES » doivent être rejetées, sans qu’il y ait lieu de faire droit, dans les circonstances de l’espèce, à la demande tendant au remboursement de frais de procédure qu’elle aurait engagés et qui ne sont pas justifiés ;
Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 89PA00789 de la société « CAISSE DE GESTION DES LICENCES VEGETALES » à concurrence des sommes de 2.541 F et 3.247 F dont le dégrèvement a été prononcé.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête n° 89PA00789 et les conclusions de la requête n° 89PA00782 sont rejetés.