Conseil d’Etat, 1 / 4 SSR, du 13 mai 1987, 25555, inédit au recueil Lebon

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Conseil d’Etat, 1 / 4 SSR, du 13 mai 1987, 25555, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la décision en date du 9 décembre 1983 par laquelle le Conseil d’Etat statuant au contentieux a, sur la requête de la société d’études d’un grand hôtel international à Paris SEGHIP enregistrée sous le n° 25 555 et tendant à ce que l’Etat soit déclaré responsable du préjudice subi par la société SEGHIP à raison de l’illégalité de l’accord préalable du 9 décembre 1969 délivré par arrêté du ministre de l’équipement, ordonné une expertise en vue de déterminer le montant des frais d’études et de gestion engagés par la société SEGHIP entre le 9 décembre 1969 et le 21 février 1975, ainsi que des frais financiers y afférents, en vue de la réalisation d’un ensemble hôtelier sur l’emplacement de la gare d’Orsay ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l’ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;

Vu la loi du 30 décembre 1977 ;

Après avoir entendu :

– le rapport de M. Tuot, Auditeur,

– les observations de la S.C.P. Fortunet, Mattei-Dawance , avocat de la SOCIETE D’ETUDES D’UN GRAND HOTEL INTERNATIONAL A PARIS et de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat du ministre de la culture,

– les conclusions de Mme de Clausade, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que par décision en date du 9 décembre 1983, le Conseil d’Etat statuant au contentieux a déclaré l’Etat responsable des préjudices subis par la société SEGHIP à raison de l’illégalité des arrêtés du 4 décembre 1969 portant dérogation au règlement d’urbanisme de Paris et du 9 décembre 1969 délivrant à la société un accord préalable pour la construction d’un ensemble hôtelier sur l’emplacement de la gare d’Orsay, et a décidé de faire procéder à une expertise en vue de « déterminer le montant des frais d’études et de gestions engagé par la société SEGHIP entre le 9 décembre 1969 et le 21 février 1975, ainsi que des frais financiers y afférents, en vue de la réalisation d’un ensemble hôtelier sur l’emplacement de la gare d’Orsay » ; qu’il ressort des motifs de cette décision que la société SEGHIP a droit, à l’exclusion de toute réparation du préjudice éventuel qui serait résulté de la perte de bénéfices attendus de l’opération projetée, et sous déduction des indemnités qu’elle a déjà reçues de l’Etat en réparation de ses préjudices, notamment à la suite du jugement rendu le 18 juin 1974 par le tribunal administratif de Paris, au remboursement des dépenses d’études et de gestion qu’elle a exposées inutilement en vue de la réalisation du projet entre le 9 décembre 1969 et le 21 février 1975, date de retrait de l’accord préalable irrégulièrement délivré, et qui peuvent être regardées comme la conséquence directe dudit accord préalable, ainsi qu’au remboursement des frais financiers afférents aux dépenses d’études et de gestion ainsi retenues ;

En ce qui concerne les frais d’études :

Considérant qu’il résulte de l’instruction, et notamment du rapport de l’expert, que les honoraires versés par la société requérante aux architectes, à la société OTH et à la société Western international Hôtels, au titre des études qu’ils ont effectuées à la suite de la délivrance de l’accord préalable, s’élevaient respectivement à 750 000 F, 940 000 F et 904 600 F ;

Considérant qu’il n’est pas établi que les honoraires supplémentaires d’un montant de 750 000 F versés à la société OTH en février 1971 correspondent à des prestations directement liées à la délivrance de l’accord préalable ;

Considérant que si la société SEGHIP a estimé , en avril 1971, devoir verser respectivement aux architectes et à la société OTH les sommes de 884 250 F et 806 231 F « pour solde de tous comptes », à la suite de la résiliation de leurs contrats, ces sommes ne peuvent être regardées comme correspondant à la rémunération d’études que les architectes et le bureau d’études devaient effectuer, en vertu de leurs contrats, pendant la période allant de la délivrance de l’accord préalable au dépôt du dossier de la demande de permis de construire ;

En ce qui concerne les frais de gestion :

Considérant qu’il résulte de l’instruction que les dépenses de fonctionnement de la SEGHIP se sont élevées au montant de 2 076 923 F entre le 9 décembre 1969 et le 21 février 1975 ;

En ce qui concerne les frais financiers :

Considérant que l’utilisation par la société d’une partie de son capital social, qui n’était pas rémunéré, pour le financement des dépenses d’études et de gestion ci-dessus retenues ne peut ouvrir droit à indemnisation, dès lors que la décision précitée du Conseil d’Etat en date du 9 décembre 1983 exclut toute réparation de la perte de bénéfices résultant de l’immobilisation du capital social ; que les seuls frais financiers à retenir sont représentés par les intérêts des avances consenties à la société par certains de ses actionnaires pour le financement des dépenses d’études et de gestion ci-dessus retenues ; qu’il résulte du rapport de l’expert que le montant total de ces intérêts s’élève à 1 306 904 F ;

Sur la déduction des indemnités déjà perçues par la société :

Considérant qu’il y a lieu de déduire des sommes ci-dessus retenues pour un montant total de 5 978 427 F l’indemnité de 500 000 F que l’Etat a déjà versée à la société SEGHIP en exécution du jugement du tribunal administratif de Paris en date du 18 juin 1974 ; qu’ainsi, le montant de l’indemnité due par l’Etat à la société requérante s’élève à 5 478 427 F ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant que le point de départ des intérêts auxquels a droit la société requérante doit être fixé, non, comme elle le soutient, au 7 avril 1971, date de sa première demande d’indemnité sur laquelle il a été définitivement statué par le jugement susmentionné du tribunal administratif de Paris du 18 juin 1974, mais au 25 mars 1975, date à laquelle elle a saisi le ministre de l’équipement d’une seconde demande d’indemnité sur laquelle le tribunal administratif de Paris s’est prononcé par le jugement du 22 mai 1980 dont la société a fait appel par la présente requête ;

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée une première fois devant le tribunal administratif le 6 août 1975 ; qu’à cette date, il n’était pas dû une année d’intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil, cette demande doit être rejetée ;

Considérant que la capitalisation des intérêts a été de nouveau demandée le 29 septembre 1978 devant le tribunal administratif, puis les 24 juillet 1980, 26 octobre 1982, 21 mai 1984, 17 juin 1985 et 28 janvier 1987 devant le Conseil d’Etat ; qu’à chacune de ces dates, il était dû au moins une année d’intérêts ; que, dès lors, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;

Sur les frais d’expertise :

Considérant qu’il y a lieu de mettre les frais d’expertise, d’un montant de 76 052,25 F à la charge de l’Etat ;

Article 1er : L’Etat est condamné à verser à la société SEGHIP la somme de 5 478 427 F, avec intérêts au taux légal à compterdu 25 mars 1975. Les intérêts échus les 29 septembre 1978, 24 juillet 1980, 26 octobre 1982, 21 mai 1984, 17 juin 1985 et 28 janvier 1987 seront capitalisés à ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Les frais d’expertise exposés devant le Conseil d’Etat sont mis à la charge de l’Etat.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société SEGHIP, au ministre de l’équipement, du logement, de l’aménagement duterritoire et des transports et au ministre de la culture et de la communication.


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