Cour administrative d’appel de Paris, du 21 septembre 1992, 89PA00428, inédit au recueil Lebon

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Cour administrative d’appel de Paris, du 21 septembre 1992, 89PA00428, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

VU l’arrêt en date du 12 février 1992 par lequel le Conseil d’Etat a d’une part annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 6 mars 1990 rejetant la requête d’appel de M. Jean X… dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 21 janvier 1988 qui avait rejeté sa demande tendant à la décharge de l’impôt sur le revenu auquel il avait été assujetti au titre des années 1978, 1979 et 1980, d’autre part renvoyé cette affaire devant la cour administrative d’appel de Paris ;

VU le mémoire présenté pour M. Jean X… demeurant … par la SCP ROUVIERE-LEPITRE-BOUTET, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ; il a été enregistré au greffe de la cour administrative d’appel de Paris le 1er avril 1992 ; M. X… demande à la cour administrative d’appel :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Paris du 21 janvier 1988 ;

2°) de lui accorder la décharge demandée ;

VU les autres pièces du dossier ;

VU le code général des impôts ;

VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;

VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 7 septembre 1992 :

– le rapport de Mme TRICOT, conseiller,

– et les conclusions de M. GIPOULON, commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, d’une part, qu’en vertu des dispositions combinées des articles R.199 à R.201 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel alors en vigueur dans les instances fiscales, l’avertissement du jour où la requête est portée en séance publique est donné aux parties qui, sur invitation du secrétaire-greffier en chef de la juridiction, ont fait connaître, antérieurement à la fixation du rôle, leur intention de présenter des observations orales ; qu’il résulte de l’instruction que M. X… n’a pas présenté une telle demande en réponse à l’invitation en ce sens du secrétaire-greffier du tribunal administratif de Paris en date du 13 février 1987 ; qu’il n’est, dès lors, pas fondé à soutenir que la circonstance qu’il n’a pas été convoqué à l’audience aurait entaché d’irrégularité le jugement attaqué ;

Considérant, d’autre part, que le requérant n’apporte aucune précision permettant d’apprécier la portée de son allégation selon laquelle ce jugement serait insuffisamment motivé ;

Sur les conclusions relatives aux impositions litigieuses :

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

Considérant, d’une part, que M. X… ne peut utilement soutenir que la notification de redressements du 23 décembre 1982 n’est pas motivée alors qu’il ressort du dossier que ladite notification se rapporte à l’année 1977 non concernée par la présente instance ;

Considérant d’autre part que la notification de redressements adressée à M. X… le 17 mars 1982 en ce qui concerne les années 1978, 1979 et 1980 mentionnait que l’activité menée par l’association Centre de recherches et d’études de sociologie, psychologie et d’urbanisme avait un caractère lucratif la rendant passible de l’impôt sur les sociétés et que M. X… en sa qualité de dirigeant de cette association était imposable à l’impôt sur le revenu sur le fondement de l’article 109 du code général des impôts à raison de l’inscription d’avances de fonds sur le compte courant ouvert à son nom, en précisant le montant des sommes concernées ; que le service a, fût-ce succinctement, motivé les raisons de droit pour lesquelles il estimait que l’association était imposable à l’impôt sur les sociétés et les motifs pour lesquels il estimait que le requérant était bénéficiaire de distributions ; que M. X… a d’ailleurs ainsi pu postérieurement formuler des observations suffisantes ; qu’ainsi la procédure d’imposition est régulière ;

Sur le principe de l’assujettissement à l’impôt sur le revenu de M. X… et sur le bien-fondé de l’imposition :

Considérant que l’administration est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de justifier l’imposition en substituant une base légale à une autre ;

Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 109-1-2° du code général des impôts : « Sont considérés comme revenus distribués … toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices » et qu’aux termes de l’article 111 a) du même code : « Sont notamment considérées comme revenus distribués, sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes interposées à titre d’avances, de prêts ou d’acomptes » ; que ces dispositions ne peuvent s’appliquer à un membre d’une association que dans la mesure où celle-ci a une activité lucrative la rendant passible de l’impôt sur les sociétés en application de l’article 206 du code général des impôts, et où il existe une confusion de patrimoine entre ledit membre et l’association permettant d’admettre que ce dernier a fait des apports et participe aux résultats de sorte qu’il peut être regardé comme un associé au sens des dispositions précitées ;

Considérant qu’en l’espèce, il résulte de l’instruction que si l’association Centre de recherches et d’études de sociologie, psychologie et d’urbanisme est passible de l’impôt sur les sociétés dès lors que ses ressources étaient, nonobstant son objet statutaire désintéressé, essentiellement constituées par des marchés passés à titre onéreux et que ses prix étaient au moins identiques à ceux pratiqués par des entreprises du même secteur pour des prestations similaires, il n’est ni établi, ni même allégué l’existence d’une confusion de patrimoine entre M. X… et l’association ; que dès lors l’administration n’était pas fondée, en vertu des dispositions combinées des articles 109-1-2° et 111 a du code général des impôts, à imposer M. X… à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers à raison des sommes qu’il aurait appréhendées de l’association à titre d’avances, de prêts ou d’acomptes ;

Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 111 du code général des impôts : « Sont notamment considérés comme revenus distribués : …c – les rémunérations et avantages occultes …. » ;

Considérant que si le ministre soutient que les sommes désinvesties du compte bancaire de l’association au profit du compte courant de M. X… constituent des avantages occultes au sens des dispositions de l’article 111 c du code général des impôts, il résulte de l’instruction que M. X… était suffisamment désigné par la comptabilité comme étant le bénéficiaire des sommes litigieuses ; que, par suite, le ministre qui se borne à affirmer sans le démontrer que lesdites sommes n’étaient pas suffisamment distinguées en comptabilité n’est pas fondé à soutenir que les sommes concernées présentaient le caractère d’avantages occultes, au regard de l’article 111 c du code général des impôts ;

Mais considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 109 du code général des impôts « 1 – Sont considérés comme revenus distribués : 1°) tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital … » ; qu’aux termes de l’article 110 du même code : « Pour l’application de l’article 109-1-1° les bénéfices s’entendent de ceux qui ont été retenus pour l’assiette de l’impôt sur les sociétés » ;

Considérant qu’il résulte de ces dispositions que dès lors qu’une personne morale exerce une activité lucrative la rendant passible de l’impôt sur les sociétés et réalise des bénéfices, lesdits bénéfices sont regardés comme des revenus distribués lorsqu’ils ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ;

Considérant qu’en l’espèce, il résulte de l’instruction qu’au titre de l’année 1979, l’association Centre de recherches et d’études de sociologie, psychologie et d’urbanisme était passible de l’impôt sur les sociétés et avait réalisé des bénéfices à hauteur de 1.615.380 F ; que cette somme n’a été « ni mise en réserve ni incorporée au capital » ; que l’administration a constaté qu’une somme d’un montant de 249.150 F portée en 1979 au débit du compte courant ouvert au nom de M. X… dans les écritures de l’association Centre de recherches et d’études de sociologie, psychologie et d’urbanisme correspondait aux prélèvements passés au crédit du compte bancaire de l’association ; que si M. X… soutient que la somme concernée a été inscrite à titre provisoire à son compte courant qui aurait ainsi servi de compte d’attente et permis d’enregistrer des frais engagés pour le compte de l’association, il n’apporte aucune justification à l’appui de cette allégation ; qu’en l’absence de tout commencement de preuve, l’expertise sollicitée par M. X… est inutile ; que, dès lors, l’administration apporte la preuve que la somme de 249.150 F sur laquelle elle a taxé M. X… au titre de l’année 1979 en application des articles 109-1-1° et 110 du code général des impôts a bien été appréhendée par le contribuable en l’absence même de désignation par l’association des bénéficiaires des revenus distribués ; que M. X… n’établit pas que cette somme n’avait pas le caractère de revenus imposables ;

Considérant que M. X… ne peut utilement se prévaloir sur le fondement de l’article L.80 A du livre des procédures fiscales des dispositions de l’instruction du 22 mai 1955 dès lors qu’il résulte de ce qui précède que la matérialité des distributions doit être tenue pour établie ;

Considérant également en quatrième lieu qu’au titre de 1978 et 1980 le ministre fait valoir comme il en a le droit « à titre infiniment subsidiaire » que les sommes appréhendées par M. X… par inscription au crédit de son compte courant s’analysent comme des avantages accordés à un administrateur non salarié par une personne morale à but non lucratif, ; que ces avantages constituent par suite des revenus non commerciaux entrant au nombre de ceux dont l’article 92 du code général des impôts prévoit l’imposition dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et non, comme le soutient M. X… des « mouvements de capitaux » non constitutifs de revenus imposables ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, que M. X… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement du 21 janvier 1988, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge des cotisations supplémentaires à l’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1978, 1979 et 1980 ;

Article 1er : La requête de M. X… est rejetée.


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