Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C…ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007, 2008 et 2009.
Par un jugement nos 1400047 et 1400076 du 3 février 2016, le tribunal administratif de Rennes a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d’une somme de 4 072 euros au titre de l’année 2007 (article 1er ), a déchargé M. et Mme C…de la majoration pour manoeuvres frauduleuses appliquée à l’imposition de la distribution résultant de la réintégration dans le résultat de l’exercice clos en 2007 de la société Acvi du montant s’élevant à 17 910 euros toutes taxes comprises de la facture émise par la société Soco Immobilier (article 2) et a rejeté le surplus de leur demande (article 3).
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 avril 2016 et 25 avril 2017, M. et MmeC…, représentés par Me Lefeuvre, demandent à la cour :
1°) d’annuler l’article 3 de ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007, 2008 et 2009 restant en litige ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 000 euros au titre de l’article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
– le jugement attaqué est entaché d’une insuffisance de motivation en ce qu’il ne répond pas à l’argument tiré de ce que seules sept factures ont été comptabilisées par la société Acvi pour un montant global de 101 576,99 euros, à l’argument tiré de ce que les opérations de compensation conventionnelle des dettes de la société Acvi à l’encontre de la société LP Immobilier s’inscrivaient dans le cadre d’une rationalisation des relations de sociétés membres d’un même groupe et de ce que M. et Mme C…n’avaient constaté à leur profit aucun enrichissement, à l’argument tiré de ce que les avances consenties par la société Acvi à M. C…les 30 juin 2007 et 31 décembre 2008 correspondaient à des avances sur sa rémunération sans qu’il y ait lieu de facturer des intérêts, enfin à l’argument tiré de ce que la rémunération constatée au titre de l’exercice 2008 se rapportait à deux années ;
– la société Acvi a procédé à la déduction de son résultat imposable de factures adressées par les sociétés LP Immobilier, Soco Immobilier et Bréal Immobilier correspondant à des prestations réelles dont ils justifient et ils ne peuvent être imposés sur ce point en application de l’article 111 c du code général des impôts ;
– les sommes de 103 703 euros, 144 583, 61 euros et 5 154 euros portées au crédit du compte-courant d’associé de M. C…dans la comptabilité de la société Acvi ne correspondent pas à des avantages occultes mais s’expliquent par des opérations de compensation conventionnelle entre les comptes de tiers et le compte-courant d’associé de M. C… ;
– les sommes créditées par la société Acvi sur le compte-courant d’associé de M. C… les 30 juin 2007 et 31 décembre 2008 correspondent à des rémunérations déductibles du résultat de la société Acvi et non à des avances en compte-courant susceptibles de produire des intérêts ; le solde du compte-courant de M. C…omet de prendre en compte des sommes portées au crédit du compte et qui ne sont pas sérieusement contestées ; ils invoquent l’absence de redressement à ce titre à l’issue d’un précédent contrôle ; la majoration pour manquement délibérée appliquée à ce redressement n’est pas justifiée ;
– la majoration pour manoeuvres frauduleuses appliquée aux revenus distribués en provenance de la société Acvi n’est pas justifiée dès lors qu’il n’y a pas eu facturation fictive de la part des sociétés LP Immobilier, Soco Immobilier et Bréal Immobilier ; celle appliquée aux distributions constituées du montant des crédits non justifiés du compte-courant d’associé de M. C… dans la comptabilité de la société Acvi n’est pas non plus justifiée ;
– la somme de 250 595 euros ne constitue pas un revenu distribué par la société LP Immobilier au profit de M. C…et se justifie par l’existence d’une compensation conventionnelle puisque la société Acvi a demandé à la société LP Immobilier de s’acquitter de sa dette envers elle auprès de M.C… ; la majoration pour manoeuvres frauduleuses correspondant à ce redressement n’est pas justifiée ;
– ils contestent le montant des prélèvements sociaux à la suite de la décision n° 2016-610 QPC du Conseil Constitutionnel du 10 février 2017 ;
– ils ont déjà déclaré en 2008 les sommes faisant l’objet d’une imposition dans la catégorie des traitements et salaires au titre de l’année 2007 ; ils invoquent l’absence de redressement à ce titre à l’issue d’un précédent contrôle ;
– une partie de la somme de 164 000 euros imposée dans la catégorie des traitements et salaires au titre de l’année 2008 aurait dû être imposée au titre de l’année 2007 à hauteur de 125 000 euros ;
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 16 août 2016 et 24 mai 2017, le ministre chargé des finances conclut, dans le dernier état de ses écritures, au non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement accordé en cours d’instance en ce qui concerne les contributions sociales, s’élevant à 35 803 euros au titre de l’année 2007 et à 337 euros au titre de l’année 2008, et au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il fait valoir que :
– il a prononcé un dégrèvement en ce qui concerne les contributions sociales des années 2007 et 2008 conformément à la décision n° 2016-610 QPC du 10 février 2017 du Conseil Constitutionnel ;
– les autres moyens soulevés par M. et Mme C…ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code civil ;
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Chollet,
– les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,
– et les observations de Me Lefeuvre, avocat.
1. Considérant qu’à la suite des vérifications de comptabilité des sociétés Acvi et LP Immobilier, dont M. C…est respectivement le gérant et le co-gérant, M. et Mme C…ont fait l’objet d’un contrôle sur pièces au titre de l’année 2007 ; qu’ils ont par ailleurs fait l’objet d’un examen de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2008 et 2009 ; qu’ils relèvent appel du jugement du 3 février 2016 en tant que le tribunal administratif de Rennes, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d’une somme de 4 072 euros au titre de l’année 2007, avoir prononcé la décharge de la majoration pour manoeuvres frauduleuses appliquée à l’imposition de la distribution résultant de la réintégration dans le résultat de l’exercice clos en 2007 de la société Acvi du montant, s’élevant à 17 910 euros toutes taxes comprises, de la facture émise par la société Soco Immobilier, a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007, 2008 et 2009 ;
Sur l’étendue du litige :
2. Considérant que, par une décision du 10 mai 2017, postérieure à l’introduction de la requête, l’administration a prononcé le dégrèvement de contributions sociales, en droits et pénalités, à hauteur de 35 803 euros au titre de l’année 2007 et de 337 euros au titre de l’année 2008 ; que les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet ; que, dès lors, il n’y a plus lieu d’y statuer ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les distributions résultant de la vérification de comptabilité de la société Acvi :
3. Considérant qu’aux termes de l’article 111 du code général des impôts : » Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (…) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; / (…) » ;
4. Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. et Mme C…n’ont pas accepté les redressements découlant du rattachement à leur revenu global des sommes de 147 690,31 euros, 103 701 euros, 144 583 euros, 5 154 euros et 250 595 euros, regardées comme des revenus distribués au titre de l’année 2007, en application du c l’article 111 du code général des impôts ; que, lorsque l’administration établit que des revenus occultes ont été appréhendés par une personne physique, les sommes correspondantes doivent être, sauf preuve contraire apportée par le contribuable, regardées comme ayant été perçues au cours de l’année de la clôture de l’exercice au titre duquel l’excédent de distribution a été constaté ;
5. Considérant, en premier lieu, d’une part, que dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société Acvi, l’administration a remis en cause la déduction d’une somme globale de 113 290,31 euros et la taxe sur la valeur ajoutée y afférente pour un montant de 22 205 euros, correspondant à huit factures comptabilisées au titre de l’exercice clos au 30 juin 2007 au motif que les factures produites étaient irrégulières et ne correspondaient à aucune prestation réelle effectuée par les sociétés LP Immobilier, Soco Immobilier et Bréal Immobilier ; qu’elle a en effet constaté que certaines factures sont numérotées » bis » contrevenant ainsi à l’exigence d’une numérotation chronologique et continue, que ces factures ne mentionnent pas la date de la prestation, le mode de calcul des commissions qu’elle rémunère, ni l’identité du négociateur et de l’apporteur de l’affaire, que les factures enregistrées au titre de l’exercice clos le 30 juin 2007 ont été établies postérieurement, le 31 juillet 2007, enfin que la société n’a pas été en mesure de présenter de documents probants relatifs à la nature des tâches confiées aux sociétés en contrepartie de la rémunération ; que le tribunal administratif de Rennes a admis la réalité de la prestation facturée par la société Soco Immobilier (facture n° 2060.07.2007 bis du 31 juillet 2007) concernant une prime d’indication de 15 000 euros hors taxes pour un terrain situé rue de la Scierie à Pontivy sans toutefois admettre sa déduction au motif que la prestation facturée se rapporte à une cession immobilière intervenue en 2005, soit lors d’un exercice antérieur à celui clos le 30 juin 2007 ; que M. et Mme C…ne contestent pas en appel l’irrégularité en la forme des factures produites ; que, pour justifier de la réalité des prestations fournies pour les factures restant en litige, M. et Mme C…se prévalent d’un partenariat de la société Acvi avec la société LP Immobilier et les sociétés regroupées sous l’enseigne » les agences réunies » prévoyant qu’elles étaient rémunérées par une commission de 1 % du prix de vente, hors taxe et encaissé, de l’immeuble construit sur le terrain indiqué ; que, toutefois, l’ensemble des éléments produits par les requérants ne permet pas de justifier de la réalité des prestations facturées, alors au surplus qu’il n’est pas contesté, d’une part, que la commission est parfois forfaitaire et peut intervenir avant le programme de vente, ce qui est en contradiction avec la note du 9 septembre 2003, d’autre part, que pour un terrain situé boulevard Jacques Cartier à Rennes il y a eu rémunération de deux indicateurs, à savoir les sociétés LP Immobilier et Bréal Immobilier, et, enfin, que six factures comptabilisées au titre de l’exercice clos au 30 juin 2007 ont fait l’objet d’un autre enregistrement en comptabilité au titre de l’exercice clos au 31 décembre 2008 pour un montant total hors taxes de 90 034 euros ;
6. Considérant, d’autre part, que l’administration a refusé la déduction d’une charge résultant d’une facture n° 6155.07.2007 bis du 31 juillet 2007, d’un montant de 29 400 euros, et de la taxe sur la valeur ajoutée y afférente, qui portait sur une prime de résultat versée à M. B… au motif que cette charge a été régulièrement déduite au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2008 ; que M. et Mme C…ne contestent pas en appel ce redressement ;
7. Considérant que M. C…ne conteste ni le montant des sommes considérées comme des revenus distribués, soit la somme totale de 170 657 euros, ni avoir appréhendé ces sommes ; que, dès lors, c’est à bon droit que l’administration les a imposées au nom de M. et Mme C…dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions du c de l’article 111 du code général des impôts ;
8. Considérant, en deuxième lieu, que dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société Acvi, le vérificateur a réintégré dans les résultats de l’exercice clos le 30 juin 2007 les sommes de 103 703,97 euros, de 144 583,61 euros représentant des dettes de la société Acvi à l’égard de la société LP Immobilier et de 5 154,05 euros correspondant à des opérations concernant la société civile de construction vente (SCCV) des Fontaines du Mail ; qu’elle a constaté que par des écritures d’opérations diverses, la société a porté ces sommes au crédit du compte-courant de M. C…sans en justifier, qu’il y a absence de réciprocité entre les dettes et les créances et que ces écritures considérées comme fictives se traduisent par la constatation de dettes injustifiées de la société Acvi envers son gérant, M.C… ; que si les requérants se prévalent de l’existence d’opérations de compensation conventionnelle, ils n’apportent aucun élément probant à l’appui de leurs allégations, faute de justifier en l’absence des formalités prescrites par l’article 1690 du code civil et de tout autre élément probant, que les écritures en cause caractérisent seulement une substitution de créanciers ; qu’ainsi, eu égard à la nature des opérations en cause, et alors notamment que lors de la vérification de comptabilité de la société LP Immobilier l’administration a constaté l’absence de réciprocité des écritures de compensation dans sa comptabilité, l’administration apporte la preuve que la société Acvi a volontairement porté en comptabilité une créance fictive au bénéfice de M.C… ; que, dès lors, c’est à bon droit que l’administration a imposé ces sommes au nom de M. et Mme C…dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions du c de l’article 111 du code général des impôts ;
9. Considérant, en troisième lieu, que l’administration a constaté la situation débitrice du compte-courant de M. C…ouvert dans la comptabilité de la société Acvi sur toute la durée des exercices clos au 30 juin 2007 et au 31 décembre 2008, en raison de prélèvements fréquents de ce dernier, et que la société n’a perçu aucun intérêt sur les avances ainsi consenties à M.C…, son gérant ; qu’elle a alors réintégré dans les résultats de cette société, à l’issue de l’entretien avec l’interlocuteur interrégional du 23 novembre 2012, la somme de 13 772,07 euros au titre de l’exercice clos en 2007 et 7 358,97 euros au titre de l’exercice clos en 2008, correspondant aux intérêts qui auraient dû être appliqués à ces avances et versés par M. C… ; que si M. et Mme C…allèguent que ces sommes constituent la rémunération de gérant perçue par anticipation par M. C…avant les décisions d’assemblées générales, ils n’apportent aucun élément probant à l’appui de leurs dires, alors au surplus que l’administration fait valoir sans être sérieusement contredite que les décisions d’assemblées générales de la société Acvi fixant la rémunération de M. C…n’ont été prises que le dernier mois des exercices concernés, ne mentionnent aucune avance sur rémunération et que les sommes en litige ne pouvaient correspondre à la rémunération de ses fonctions de gérant dont le montant n’était pas encore déterminé ; que si les requérants soutiennent que le solde du compte-courant retenu pour le calcul de l’intérêt omet de prendre en compte des sommes portées au crédit de ce compte et qui ne seraient pas contestées, ce moyen n’est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre à la cour d’en apprécier le bien-fondé ; que les requérants ne sont pas fondés à invoquer, sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, l’absence de redressement à ce titre à l’issue d’un précédent contrôle ; que, dès lors, c’est à bon droit que l’administration a taxé ces sommes en tant que revenus distribués entre les mains de M. et Mme C…sur le fondement du c de l’article 111 du code général des impôts ;
En ce qui concerne les distributions résultant de la vérification de comptabilité de la société LP Immobilier :
10. Considérant que le vérificateur a réintégré dans les résultats de l’exercice clos le 31 décembre 2007 de la société LP Immobilier une somme de 250 595 euros, représentant la dette de cette société vis-à-vis de la société Acvi ; qu’il a constaté que par une écriture d’opérations diverses, la société a soldé le compte » débiteurs et créanciers divers ACVI » par l’inscription de la somme correspondante au crédit du compte-courant de M. C…sans en justifier et que cette écriture, regardée comme fictive, a permis à ce dernier de devenir créancier de la société LP Immobilier et a eu pour effet que son compte-courant, qui présentait un solde débiteur de 56 622,86 euros, présentait après l’écriture un solde créditeur de 193 972,14 euros ; que, d’une part, si les requérants soutiennent que cette opération comptable se justifie par l’existence d’une compensation conventionnelle qui ferait de ce contrat, au demeurant non produit, la loi des parties, effectuée en vertu de l’article 1134 du code civil, ce moyen est inopérant dès lors l’administration fiscale n’était pas partie à ce contrat ; que, d’autre part, les requérants soutiennent qu’en application de l’article 1275 du code civil, la société Acvi a demandé à la société LP Immobilier de payer sa dette en versant la somme due à M. C…par le biais d’une écriture de crédit sur son compte-courant et, qu’en contrepartie de cette écriture, la société LP Immobilier a augmenté sa dette envers M. C…et M. C…est devenu débiteur de la société Acvi dans des proportions identiques ; que, toutefois, en dépit du caractère symétrique des écritures comptables, ils n’apportent aucun élément probant à l’appui de leurs allégations, faute de justifier, en l’absence des formalités prescrites par l’article 1690 du code civil et de tout autre élément probant, que les écritures en cause caractérisent seulement un transfert au profit de la société Acvi de la dette détenue par la société LP Immobilier sur M.C… ; que, dès lors, c’est à bon droit que l’administration a taxé la somme de 250 595 euros, inscrite sur le compte-courant de M.C…, en tant que revenus distribués entre les mains de M. et Mme C…sur le fondement du c de l’article 111 du code général des impôts ;
En ce qui concerne les traitements et salaires imposables au titre des années 2007 et 2008 :
11. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 62 du code général des impôts applicable à la rémunération de M. C…en tant que gérant majoritaire de la société Acvi : » Les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes autres rémunérations sont soumis à l’impôt sur le revenu au nom de leurs bénéficiaires s’ils sont admis en déduction des bénéfices soumis à l’impôt sur les sociétés par application de l’article 211, même si les résultats de l’exercice social sont déficitaires, lorsqu’ils sont alloués : / (…) / Le montant imposable des rémunérations visées au premier alinéa est déterminé, après déduction des cotisations et primes mentionnées à l’article 154 bis, selon les règles prévues en matière de traitements et salaires. » ;
12. Considérant, s’agissant de l’année 2007, que l’administration a constaté que la rémunération de M. C…a été fixée à 309 000 euros par décision de l’assemblée générale du 6 juin 2007 de la société Acvi et portée au crédit de son compte-courant le 30 juin 2007 ; qu’elle a relevé que la décision de l’assemblée générale précise que la société continue de supporter à titre de complément de rémunération les cotisations et charges afférentes à cette rémunération ; qu’elle a constaté que les cotisations sociales déductibles relatives à la rémunération de M. C… étaient effectivement acquittées par la société Acvi, que ce paiement intervenait lors de l’inscription de ces sommes au débit du compte courant de M. C…dans la société Acvi, qu’elles s’élevaient pour l’année 2007 à un montant de 56 770 euros et que la rémunération nette de M. C…s’élevait à 252 230 euros ; que M. et Mme C…ayant déclaré un montant de traitements et salaires de 218 303 euros, l’administration a rehaussé ce montant de la somme de 33 927 euros imposable sur le fondement de l’article 62 du code général des impôts ; que si les requérants soutiennent que cette somme a déjà été déclarée l’année précédente et qu’elle fait l’objet d’une double imposition, ils n’apportent aucun élément à l’appui de leurs allégations ; qu’ils ne sont pas fondés à invoquer, sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, l’absence de redressement à ce titre à l’issue d’un précédent contrôle ;
13. Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article 12 du code général des impôts : » L’impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année. » ; qu’aux termes de l’article 79 du même code : » Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l’impôt sur le revenu. » ;
14. Considérant que, s’agissant de l’année 2008, l’administration a constaté d’une part que la rémunération de M.C…, pour ses fonctions de gérant de la société Acvi, a été portée au crédit de son compte courant dans la société le 31 décembre 2008 pour un montant total de 164 000 euros en deux versements, soit 39 000 euros et 125 000 euros, d’autre part que la rémunération de M.C…, pour ses fonctions de gérant de la société ABC Voyages, a été portée au crédit de son compte courant dans la société le 31 décembre 2008 pour un montant de 26 000 euros et, enfin, que l’ensemble de ces rémunérations n’a pas été déclaré par M. et MmeC… ; que l’administration a imposé le montant de ces rémunérations, déduction faite des cotisations versées par M. C…auprès du régime social des indépendants, à savoir 65 089 euros, soit un montant imposable de 124 911 euros auquel l’administration a appliqué un abattement forfaitaire de 10 % ; que les requérants soutiennent qu’ils ont déclaré une partie de la rémunération versée par la société Acvi à M. C…à hauteur de 125 000 euros au titre de l’année 2007, au motif que l’exercice 2008 de la société Acvi durait dix-huit mois, et en ont déduit, compte tenu de la décision d’assemblée générale des actionnaires de la société Acvi fixant sa rémunération à 164 000 euros, qu’ils n’avaient à déclarer au titre de l’année 2008 que la somme de 39 000 euros ainsi que la rémunération de 26 000 euros versée par la société ABC Voyages ; que, toutefois, les sommes portées le 31 décembre 2008 au crédit du compte courant ouvert au nom de M. C…dans les écritures de la société Acvi, dont il était le gérant, doivent être regardées comme ayant été mises à sa disposition à cette date ; que, dès lors, c’est à bon droit que ces sommes ont été réintégrées dans les revenus de l’année 2008 ;
Sur les pénalités :
15. Considérant qu’aux termes de l’article 1729 du code général des impôts : » Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (…) / c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (…) » ;
En ce qui concerne les pénalités appliquées aux distributions effectuées par la société Acvi :
16. Considérant, en premier lieu, que l’administration fait valoir, d’une part, qu’en sa qualité de gérant et associé de la société Acvi, M. C…ne pouvait ignorer la situation débitrice de son compte courant, compte tenu de la fréquence des prélèvements effectués et de l’importance du solde débiteur sur toute la durée de l’exercice 2007, d’autre part, qu’il ne pouvait que se rendre compte du coût du financement de la trésorerie par les banques, nécessité par l’activité de promotion immobilière de la société, et ne pouvait ignorer qu’il utilisait pour ses besoins personnels la trésorerie de la société sans en supporter le coût financier et était conscient de retirer un avantage au détriment de la société Acvi ; que l’administration apporte ainsi la preuve, qui lui incombe, de l’existence d’un manquement délibéré justifiant la pénalité au taux de 40 %, infligée sur le fondement de l’article 1729 du code général des impôts, aux rectifications, en matière de distributions, résultant d’avances consenties sans rémunération par la société Acvi à M. C…; que, dès lors, M. et Mme C…ne sont pas fondés à demander la décharge de cette pénalité ;
17. Considérant, en second lieu, que l’administration fait valoir que, de par sa qualité de gérant et d’associé au sein des sociétés émettrices des factures fictives, M. C…avait connaissance du caractère injustifié des écritures de charges comptabilisées par la société Acvi, qui a ainsi soustrait une partie importante de son résultat à toute imposition et a déduit la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures bien qu’elles ne correspondent à aucune prestation réelle ; qu’elle précise que les écritures de transfert du montant de ces charges au crédit du compte-courant de M. C…ont permis le transfert à son profit d’importantes sommes distraites de cette société et procèdent d’une volonté d’égarer l’administration et de restreindre son pouvoir d’investigation et de contrôle ; que, l’administration fait en outre valoir que les importantes opérations de compensation non justifiées entre les comptes de tiers de la société Acvi et le compte-courant de M.C…, qui se traduisent par la constatation de dettes fictives de la société Acvi au profit de ce dernier, alors que la compensation est interdite s’agissant des créances et dettes non réciproques de diverses structures, que les écritures de compensation entre les sociétés Acvi et LP Immobilier ne sont pas retranscrites dans la comptabilité de la société LP Immobilier et ne se sont traduites par aucun flux financier, attestent d’une intention délibérée de M. C…d’égarer l’administration et de restreindre son pouvoir d’investigation et de contrôle ; que l’administration justifie ainsi l’application de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses appliquée aux distributions résultant de la vérification de comptabilité de la société Acvi ;
En ce qui concerne les pénalités appliquées aux distributions effectuées par la société LP Immobilier :
18. Considérant qu’en faisant valoir le caractère non justifié des écritures d’opérations diverses ayant abouti à la substitution de créanciers dans la comptabilité de la société LP Immobilier, le fait que ces écritures ont eu pour effet de constituer pour la société un passif fictif à l’égard de M. C…et de rendre le compte-courant de ce dernier créditeur, dissimulant de fait les avances faites par la société à son profit, enfin, le fait que les procédés mis en oeuvre attestent d’une intention délibérée de M. C…d’égarer l’administration et de restreindre son pouvoir d’investigation et de contrôle, l’administration justifie l’application de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses appliquée aux distributions résultant de la vérification de comptabilité de la société LP Immobilier ;
19. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C…ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a rejeté le surplus de leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer à concurrence du dégrèvement, en droits et pénalités, de contributions sociales accordé par l’administration fiscale par décision du 10 mai 2017 pour un montant de 35 803 euros au titre de l’année 2007 et de 337 euros au titre de l’année 2008.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme C…est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A…C…et au ministre de l’action et des comptes publics.
Délibéré après l’audience du 18 janvier 2018, à laquelle siégeaient :
– M. Bataille, président de chambre,
– M. Geffray, président-assesseur,
– Mme Chollet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er février 2018.
Le rapporteur,
L. CholletLe président,
F. Bataille
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l’action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
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No16NT01163