Cour administrative d’appel de Nantes, 2e chambre, du 4 décembre 2001, 97NT00042, inédit au recueil Lebon

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Cour administrative d’appel de Nantes, 2e chambre, du 4 décembre 2001, 97NT00042, inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la Cour respectivement, le 10 janvier 1997 et le 18 février 1997, présentés pour le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE (G.F.A.) DE LA GASNERIE, représenté par son gérant en exercice, dont le siège social est …, par la société civile professionnelle « LEGRAND, LEGRAND-LEJOUR », avocat au barreau d’Orléans ;

Le G.F.A. DE LA GASNERIE demande à la Cour :

1 ) d’annuler le jugement n s 95-2014, 95-2107, 95-2189, 96-11 et 96-95 du 15 octobre 1996 par lequel le Tribunal administratif d’Orléans a rejeté ses demandes tendant à l’annulation des arrêtés du préfet de Loir-et-Cher, l’un du 18 juillet 1995 autorisant la société Brûlé Exploitation de Carrières (S.B.E.C.) à exploiter une carrière à Sougé, au lieudit « Les Marchais », l’autre du 25 octobre 1995, rectifiant le premier arrêté ;

2 ) d’annuler lesdits arrêtés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu la loi n 76-663 du 19 juillet 1976 ;

Vu la loi n 93-3 du 4 janvier 1993 ;

Vu le décret n 77-1133 du 21 septembre 1977 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 6 novembre 2001 :

– le rapport de Mme WEBER-SEBAN, premier conseiller,

– les observations de Me CASTAGNOLI, substituant Me CASADEI-JUNG, avocat de la société « S.B.E.C. » ;

– et les conclusions de M. LALAUZE, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le Tribunal administratif d’Orléans n’était pas tenu de répondre, dans le jugement attaqué, à l’ensemble des arguments exposés par les parties à l’appui de leurs moyens ; qu’il résulte de l’instruction que si le GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE (G.F.A.) DE LA GASNERIE a fait valoir, dans sa demande devant le tribunal administratif, que le plan d’aménagement autorisé ne permettait pas de respecter les distances de recul propres à assurer la sécurité des usagers des chemins avoisinant le site de la carrière à exploiter, cet élément ne constituait qu’un argument développé à l’appui du moyen tiré de ce que le projet ne présentait pas les garanties de sécurité nécessaires à la prise en compte des intérêts des usagers de la route ou des chemins d’exploitation ; qu’en répondant, qu’il « ressort de l’étude d’impact que, d’une part, le trafic routier généré par l’activité de la carrière ne s’accroîtra pas notablement, que, d’autre part, des aménagements de la route et d’un accès à la carrière évitant toute circulation dans la commune de Sougé, ont été prévus afin d’exclure tout risque », le tribunal a explicitement et suffisamment répondu au moyen ainsi soulevé et n’a pas, contrairement à ce que soutient le G.F.A. DE LA GASNERIE, entaché d’irrégularité le jugement attaqué ;

Au fond :

Considérant, en premier lieu, que si, en réponse à la demande présentée par la société Brûlé Exploitation de Carrières (S.B.E.C.) en vue d’obtenir l’autorisation d’exploiter une carrière à ciel ouvert de sables et graviers sur le territoire de la commune de Sougé (Loir-et-Cher), l’arrêté du préfet du Loir-et-Cher en date du 18 juillet 1995 a omis de mentionner, en son article 1er fixant le périmètre d’exploitation, une partie de la parcelle ZK 252 correspondant au chemin rural dit « de la Billette aux Marchais », le plan annexé à cet arrêté mentionnait lesdites parcelles en les incluant dans le périmètre du projet soumis à l’enquête publique ; que s’il est, en outre, constant que ce même plan comprenait à tort dans l’emprise de l’opération, la parcelle ZK 54 désignant un chemin d’exploitation qui avait été retiré du projet, il résulte de l’instruction et, notamment, des plans soumis à l’enquête publique que le chemin d’exploitation ZK 54 correspondant à ladite parcelle, ainsi d’ailleurs que le chemin ZK 59, avaient fait l’objet d’un tel retrait à la suite des observations recueillies lors de l’enquête ; que, par suite, les omissions constatées dans l’arrêté du 18 juillet 1995 constituaient, contrairement à ce que soutient le G.F.A. DE LA GASNERIE, non des modifications substantielles au projet présenté par la société « S.B.E.C. », mais de simples erreurs matérielles que le préfet de Loir-et-Cher a pu légalement rectifier, par son arrêté du 25 octobre 1995, sans procéder à une nouvelle enquête publique ;

Considérant, en deuxième lieu, que si le G.F.A. DE LA GASNERIE soutient que l’arrêté du 18 juillet 1995, rectifié par celui du 25 octobre 1995, est affecté d’une erreur en indiquant une superficie totale de l’exploitation autorisée de 9 ha 27 a 44 ca au lieu d’une surface réelle de 9 ha 76 a 14 ca, cette erreur matérielle est sans incidence sur la légalité de l’arrêté attaqué, dès lors qu’il n’existe aucune ambiguïté sur la consistance du terrain d’exploitation, délimité par des parcelles entières à l’exception de la seule partie de 10 a 11 ca du chemin ZK 252 dont la superficie, qui est mentionnée dans l’arrêté rectificatif du 25 octobre 1995, n’est pas contestée ;

Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 2 du décret du 21 septembre 1977 susvisé, le dossier de demande d’autorisation d’exploiter une carrière doit indiquer : « 1 ( …) s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination ou sa raison sociale, sa forme juridique, l’adresse de son siège social ainsi que la qualité du signataire de la demande » ; ( …) 5 Les capacités techniques et financières de l’exploitant ( …) » ; que le 7 de l’article 3 du même décret dispose : « Pour les carrières et les installations de stockage de déchets, un document attestant que le demandeur est le propriétaire du terrain ou a obtenu de celui-ci le droit de l’exploiter ou de l’utiliser » ;

Considérant, d’une part, qu’il résulte de l’instruction que le dossier de demande d’autorisation, déposé au nom de la société « S.B.E.C. », comportait l’ensemble des mentions exigées par les dispositions précitées ; que la circonstance que cette demande ait été signée, non par M. Alain X…, gérant de la S.A.R.L. « S.B.E.C. », mais par M. Maurice X…, actionnaire principal de ladite société, n’était pas de nature à induire en erreur l’administration sur l’identité du pétitionnaire ni à faire obstacle à ce que le préfet de Loir-et-Cher pût s’assurer des capacités techniques et financières, au demeurant non contestées, de la société « S.B.E.C. » ; que, par suite, le G.F.A. DE LA GASNERIE n’est pas fondé à soutenir que l’arrêté attaqué serait entaché d’irrégularité pour ce motif ;

Considérant, d’autre part, que le juge administratif, lorsqu’il se prononce sur l’application de la législation relative aux établissements classés, doit apprécier le mérite des conclusions dont il est saisi au regard des dispositions applicables à date à laquelle il rend sa décision, excepté le cas où les éventuelles modifications législatives ou réglementaires intervenues postérieurement à l’acte attaqué concerneraient les garanties de forme et de procédure qui lui sont attachées, ou le régime des sanctions pouvant être infligées aux contrevenants ; qu’il lui appartient d’apprécier, selon le même principe, les circonstances matérielles des litiges qui lui sont soumis ;

Considérant que le G.F.A. DE LA GASNERIE soutient que le chemin cadastré à la section ZK sous le n 252 a été inclus dans l’assiette de l’exploitation au mépris des règles régissant la propriété, dès lors que le Tribunal administratif d’Orléans a, par jugement du 15 octobre 1995, annulé la délibération du 17 février 1995 du conseil municipal de Sougé décidant la vente à la société « S.B.E.C. » d’une partie de ce chemin ; que, toutefois, d’une part, s’agissant des règles de procédure applicables, le préfet de Loir-et-Cher n’a pas méconnu les dispositions des articles 2 et 3.7 du décret du 21 septembre 1977 modifié, dès lors qu’à la date de l’arrêté attaqué du 18 juillet 1995, la société « S.B.E.C. » avait justifié être propriétaire de l’ensemble des parcelles incluses dans l’emprise du projet de carrière faisant l’objet de la demande d’autorisation ; que, d’autre part, s’agissant des conditions de fond du litige, l’annulation par le même jugement du 15 octobre 1995 de la délibération précitée du 17 février 1995 est sans incidence sur la légalité dudit arrêté du 18 juillet 1995, dès lors qu’il ne résulte pas de l’instruction que la commune, restée propriétaire de la parcelle en cause, se soit opposée à ce que la société « S.B.E.C. » comprenne cette parcelle dans le périmètre d’exploitation de la carrière ; que, par suite, le G.F.A. DE LA GASNERIE ne peut utilement soutenir que le terrain cadastré ZK 252 était exclu du périmètre d’exploitation de la carrière et que les données du dossier soumis à enquête publique auraient été modifiées en raison du partage du site de la carrière en deux parties distinctes ;

Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes de l’article 14.1 de l’arrêté ministériel du 22 septembre 1994 applicable aux exploitations de carrière à ciel ouvert : « Les bords des excavations des carrières à ciel ouvert sont tenus à distance horizontale d’au moins 10 mètres des limites du périmètre sur lequel porte l’autorisation ainsi que de l’emprise des éléments de la surface dont l’intégrité conditionne le respect de la sécurité et de la salubrité publique. De plus, l’exploitation du gisement à son niveau le plus bas est arrêtée à compter du bord supérieur de la fouille à une distance horizontale telle que la stabilité des terrains voisins ne soit pas compromise. Cette distance prend en compte la hauteur totale des excavations, la nature et l’épaisseur des différentes couches présentes sur toute cette hauteur. » ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le G.F.A. DE LA GASNERIE, l’exclusion du chemin cadastré ZK 59 de l’emprise du projet d’exploitation, intervenue en cours d’instruction de la demande de la société « S.B.E.C. », a été matérialisée sur le plan annexé à l’arrêté du 18 juillet 1995, à la suite de l’arrêté rectificatif du 25 octobre 1995 ; qu’en tout état de cause, ce plan n’avait pas pour objet de faire apparaître de manière précise les distances à respecter pour garantir la sécurité aux abords de l’exploitation ; qu’en revanche, ces mesures de sécurité ont fait l’objet de prescriptions détaillées énoncées à l’article 13 de l’arrêté du 18 juillet 1995 attaqué ; qu’ainsi, le G.F.A. DE LA GASNERIE n’est pas fondé à soutenir que ledit arrêté ne tient pas compte de la nécessité d’assurer les distances de recul à partir des limites du chantier ;

Considérant, en dernier lieu, qu’il résulte de l’instruction et notamment, du plan du 1/200ème produit en première instance par le préfet de Loir-et-Cher, que le maintien effectif d’une sortie de la parcelle ZK n 65, appartenant au G.F.A. DE LA GASNERIE, en direction du bourg, est assuré par la voie communale n 8 dite « chemin des communes » longeant la limite sud de ladite parcelle ; que, par suite, le moyen tiré par le requérant de ce que l’intégration partielle du chemin dit « de la Billette » dans le périmètre d’exploitation de la carrière priverait ladite parcelle ZK n 65 lui appartenant d’une desserte vers le bourg de Sougé manque en fait ;

Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le G.F.A. DE LA GASNERIE n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d’Orléans a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 18 juillet 1995 rectifié le 25 octobre 1995, par lequel le préfet de Loir-et-Cher a autorisé la société « S.B.E.C. » à exploiter une carrière à Sougé, au lieudit « Les Marchais » ;

Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant, d’une part, que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer au G.F.A. DE LA GASNERIE la somme de 6 000 F que ce dernier demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant, d’autre part, qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces mêmes dispositions et de condamner le G.F.A. DE LA GASNERIE à payer une somme de 6 000 F à la société « S.B.E.C. » au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Article 1er : La requête du GROUPEMENT FONCIER AGRICOLE DE LA GASNERIE est rejetée.

Article 2 : Le G.F.A. DE LA GASNERIE versera à la société « S.B.E.C. » une somme de six mille francs (6 000 F) au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au G.F.A. DE LA GASNERIE, à la société « S.B.E.C. » et au ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement.


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