Cour de Cassation, Chambre civile 3, du 17 novembre 1999, 98-13.430, Inédit

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Cour de Cassation, Chambre civile 3, du 17 novembre 1999, 98-13.430, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la SMABTP, dont le siège est …,

en cassation d’un arrêt rendu le 20 janvier 1998 par la cour d’appel de Lyon (2e chambre civile), au profit :

1 / de la société Etandex, société anonyme, dont le siège est …,

2 / de la société Etandex, société anonyme, dont le siège est … de Mure,

3 / de la société Réalisations Bâtiments Structures, société anonyme, dont le siège est …,

4 / du syndicat des copropriétaires du volume I de l’ensemble immobilier Place Vendôme, dont le siège est …,

5 / du syndicat des copropriétaires du volume I de l’ensemble immobilier Place Vendôme, pris en la personne de la régie Bornet, dont le siège est …,

6 / de la compagnie Albingia, dont le siège est …,

7 / de la société civile immobilière (SCI) Place Vendôme, dont le siège est c/o société Sorim …,

défendeurs à la cassation ;

La compagnie Albingia a formé, par un mémoire déposé au greffe le 31 août 1998, un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;

La société Etandex a formé, par un mémoire déposé au greffe le 7 septembre 1998, un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal, invoque à l’appui de son recours, deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La compagnie Albingia, demanderesse au pourvoi provoqué, invoque à l’appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

La société Etandex, demanderesse au pourvoi provoqué, invoque à l’appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l’audience publique du 12 octobre 1999, où étaient présents : Mlle Fossereau, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Martin, conseiller rapporteur, MM. Chemin, Villien, Cachelot, Mme Lardet, conseillers, M. Nivôse, Mmes Masson-Daum, Boulanger, conseillers référendaires, M. Baechlin, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Martin, conseiller, les observations de Me Choucroy, avocat de la SMABTP, de la SCP Gatineau, avocat de la société Etandex, de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de la société Réalisations Bâtiments Structures, de la SCP Nicolay et de Lanouvelle, avocat du syndicat des copropriétaires du volume I de l’ensemble immobilier Place Vendôme, de Me Odent, avocat de la SCI Place Vendôme, de Me Parmentier, avocat de la compagnie Albingia, les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, le moyen unique du pourvoi provoqué de la société Etandex et le moyen unique du pourvoi provoqué de la compagnie Albingia, pris en sa première branche, réunis :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Lyon, 20 janvier 1998), statuant en référé, que la société civile immobilière Place Vendôme (la SCI), assurée suivant polices dommages-ouvrage et constructeur non réalisateur par la compagnie Albingia, ayant entrepris la construction d’un groupe d’immeubles vendus en l’état futur d’achèvement, a chargé la société Etandex, assurée par la Société mutuelle d’assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), du lot cuvelage ; que des infiltrations dans un sous-sol et des désordres dans les fosses d’ascenseurs étant apparus, le syndicat des copropriétaires a assigné en réparation la SCI, les constructeurs, puis a conclu aux mêmes fins contre la compagnie Albingia ;

Attendu que les sociétés SMABTP, Albingia et Etandex font grief à l’arrêt d’accueillir la demande, alors, selon le moyen, « 1 ) que l’existence de désordres provenant d’infiltrations d’eau avait été relevée dans le procès-verbal de réception des travaux et que l’expertise n’avait fait qu’en établir les causes, si bien qu’il ne s’agissait pas d’un vice caché engageant la responsabilité décennale du vendeur d’immeuble et des intervenants ; qu’en en jugeant autrement, la cour d’appel a violé les articles 1641, 1792 et 1792-6 du Code civil ; 2 ) que les désordres apparents à la réception et ayant fait l’objet de réserves ne relèvent pas de la garantie décennale des constructeurs ; qu’en considérant que le caractère décennal des désordres, dont le syndicat des copropriétaires demandait la réparation provisionnelle, n’était pas sérieusement contestable, quand ces désordres étaient apparents à la réception et avaient été réservés, la cour d’appel a violé les articles 809 du nouveau Code de procédure civile, 1641, 1792 et 1792-6 du Code civil ; 3 ) que les juges du fond ne peuvent procéder par voie de simple affirmation ;

que si les juges du fond peuvent statuer en matière de référé dès lors qu’ils ne tranchent pas une question de fond rendant la contestation sérieuse, c’est à la condition, lorsqu’une partie invoquait le caractère sérieux de la contestation, de préciser en quoi celle-ci ne serait pas sérieuse, et ne ferait donc pas obstacle à la compétence du juge des référés ; qu’en l’espèce, la société Etandex invoquait l’existence de contestations sérieuses portant tant sur le régime de responsabilité applicable, que sur les désordres tels que relevés par l’expert, ainsi que le diagnostic et les solutions préconisées par celui-ci ; que la cour d’appel, qui s’est contentée d’affirmer que les conclusions expertales n’étaient pas sérieusement contestables, sans à aucun moment justifier ni préciser en quoi elles ne l’étaient pas, a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article 808 du nouveau Code de procédure civile » ;

Mais attendu qu’ayant souverainement retenu, par motifs propres et adoptés, que seule l’expertise judiciaire avait révélé d’autres désordres que l’arrivée d’eau objet de réserves lors de la réception, et permis d’établir que les désordres indissociables de stabilité et d’étanchéité ayant pour origine un défaut de conception générale de l’ouvrage, qui affectaient l’ouvrage et le rendaient impropre à sa destination, étaient réels et non hypothétiques, n’étaient pas connus dans leur étendue, leurs causes et leurs conséquences dommageables à la réception, la cour d’appel en a exactement déduit que l’obligation à réparation de la SCI en sa qualité de vendeur d’immeuble et de la société Etandex, constructeur présumé responsable en application de l’article 1792 du Code civil, n’était pas sérieusement contestable ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi provoqué de la compagnie Albingia, pris en sa deuxième et sa troisième branche :

Attendu que la compagnie Albingia fait grief à l’arrêt d’accueillir la demande du syndicat des copropriétaires, alors, selon le moyen, « d’une part, que, quand l’action de l’assuré contre l’assureur a pour cause le recours d’un tiers, le délai de la prescription biennale ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l’assuré ou a été indemnisé par ce dernier ; qu’une assignation en référé en vue de la nomination d’un expert constitue une action en justice ; qu’en retenant que la compagnie Albingia ne pouvait sérieusement contester sa garantie en sa qualité d’assureur de responsabilité décennale, dès lors que la prescription biennale n’était pas acquise, cet assureur ayant été assigné par son assurée, la SCI Place Vendôme, moins de deux mois après que cette dernière avait été assignée devant le juge des référés par le syndicat des copropriétaires, sans préciser la date de ces assignations et leur objet, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 809 du nouveau Code de procédure civile et L. 114-1 du Code des assurances ; d’autre part, que, quand l’action de I’assuré contre l’assureur a pour cause le recours d’un tiers, le délai de la prescription biennale ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l’assuré ou a été indemnisé par ce dernier ; qu’une assignation en référé en vue de la nomination d’un expert constitue une action en justice ; qu’en décidant que la compagnie Albingia ne pouvait sérieusement contester sa garantie en sa qualité d’assureur de responsabilité décennale, dès lors que la prescription biennale n’était pas acquise, cet assureur ayant été assigné par son assurée, la SCI Place Vendôme, moins de deux mois après que cette dernière avait été assignée devant le juge des référés par le syndicat des copropriétaires, quand, ce faisant, en l’état de l’assignation de la compagnie Albingia datée du 7 décembre 1995, elle retenait vraisemblablement, comme point de départ du délai, I’assignation en référé-provision délivrée le 30 octobre 1995 par le syndicat des copropriétaires à l’encontre de la SCI Place Vendôme, et que ledit syndicat avait précédemment, au mois de mai 1992, assigné cette dernière en référé-expertise, la cour d’appel a violé les articles 809 du nouveau Code de procédure civile et L. 114-1 du Code des assurances » ;

Mais attendu qu’ayant retenu que la prescription n’était pas acquise à la compagnie Albingia, assureur en responsabilité décennale, qui avait été assignée en garantie par son assuré, la SCI, moins de deux mois après que celle-ci ait été elle-même assignée devant le juge des référés par le syndicat des copropriétaires postérieurement au dépôt du rapport d’expertise judiciaire qui seul avait permis d’établir que les désordres étaient de nature à engager la responsabilité décennale de la SCI, la cour d’appel a pu en déduire que la compagnie Albingia devait sa garantie ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi principal :

Attendu que la SMABTP fait grief à l’arrêt d’accueillir l’appel en garantie de la société Etandex, alors, selon le moyen, « qu’elle concluait à la confirmation de l’ordonnance entreprise en ce qu’elle avait dit que l’appel en garantie de son assurée se heurtait à une contestation sérieuse en faisant valoir que l’assurée n’avait jamais régularisé de déclaration de sinistre en responsabilité décennale, si bien qu’elle se trouvait dans l’ignorance des éléments du litige et qu’elle ne pouvait dès lors garantir son assurée ; qu’en condamnant la SMABTP à garantir son assurée au seul motif que cette dernière était engagée sur le plan de la responsabilité décennale, sans même répondre à ce moyen ni constater que l’assurée avait régulièrement et complètement déclaré le sinistre dans les délais, la cour d’appel a violé les articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile » ;

Mais, attendu que la cour d’appel a répondu aux conclusions, qui ne soulevaient pas de moyen de déchéance de garantie, en constatant que la SMABTP avait participé aux opérations d’expertise ayant pour but d’établir la réalité et l’étendue du sinistre et mandaté même un expert pour les suivre en partie ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la SMABTP, la compagnie Albingia et la société Etandex aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne, ensemble, la SMABTP, la compagnie Albingia et la société Etandex à payer à la SCI Place Vendôme et au syndicat des copropriétaires du volume I de l’ensemble immobilier Place Vendôme la somme de 9 000 francs, chacun ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la société Etandex et de la compagnie Albingia ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé à l’audience publique du dix-sept novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf par Mlle Fossereau, conformément à l’article 452 du nouveau Code de procédure civile.


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