CAA de LYON, 6ème chambre – formation à 3, 10/12/2015, 14LY00192, Inédit au recueil Lebon

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CAA de LYON, 6ème chambre – formation à 3, 10/12/2015, 14LY00192, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A…D…a demandé, le 25 février 2010, au tribunal administratif de Lyon :

– de condamner la commune de Rive-de-Gier à l’indemniser des préjudices subis du fait de sa chute du 12 mai 2008 sur le trottoir de la rue Jean Jaurès ;

– d’ordonner une expertise pour déterminer l’étendue de son préjudice ;

– de lui accorder une allocation provisionnelle de 50 000 euros ;

– de condamner ladite commune à lui verser une somme de 1 200 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Par jugement n° 1001168 du 12 juin 2012, le tribunal administratif de Lyon a déclaré la commune de Rive-de-Gier responsable de 80% des conséquences dommageables de la chute dont Mme D…a été victime le 12 mai 2008, a ordonné, avant de statuer sur la demande indemnitaire, qu’il soit procédé à une expertise médicale en vue de déterminer l’étendue du préjudice de MmeD…, a rejeté les conclusions à fin de provision et a réservé jusqu’en fin d’instance les autres droits, moyens et conclusions.

Par jugement n° 1001168 du 5 novembre 2013, le tribunal administratif de Lyon a condamné la commune de Rive-de-Gier :

– à verser à Mme D…une somme de 23 680 euros en réparation des préjudices subis du fait de sa chute et une somme de 800 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative,

– à verser au Régime social des indépendants du Rhône une somme de 119,85 euros au titre des débours de santé pour Mme D…et une somme de 101 euros au titre de l’article 3716-1 du code de la sécurité sociale,

– a mis à la charge de la commune de Rive-de-Gier les frais d’expertise liquidés et taxés à hauteur de 600 euros ;

– a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2014 pour la commune de Rive-de-Gier, elle demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1001168 du 12 juin 2012 du tribunal administratif de Lyon la déclarant responsable à hauteur de 80% des conséquences dommageables de la chute dont Mme D…a été victime le 12 mai 2008 et ordonnant une expertise ;

2°) d’annuler le jugement n° 1001168 du 5 novembre 2013 du tribunal administratif de Lyon la condamnant à verser à Mme D…une somme de 23 680 euros en réparation des préjudices subis du fait de sa chute et une somme de 800 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser au Régime social des indépendants du Rhône une somme de 119,85 euros au titre des débours de santé pour Mme D…et une somme de 101 euros au titre de l’article 376-1 du code de la sécurité sociale, mettant à sa charge les frais d’expertise et rejetant ses conclusions au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) de rejeter la demande de MmeD… ;

4°) de réduire les montants d’indemnisation fixés par le tribunal administratif et de rejeter les demandes indemnitaires du Régime social des indépendants.

5°) de condamner Mme D…à assumer la charge des dépens, dont les frais d’expertise de 600 euros ;

6°) de condamner Mme D…à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

– sa requête introduite avant le 25 janvier 2014 est recevable contre les jugements du 12 juin 2012 et du 5 novembre 2013 dès lors que le délai d’appel applicable aux jugements avant dire droit expire à la fin du délai d’appel qui tranche le fond du litige ;

– sa responsabilité pour défaut d’entretien normal ne peut pas être engagée dès lors que le creux dans lequel Mme D…a chuté était de faible dimension et ce bien que l’on ne puisse en connaître la profondeur exacte et que ce creux n’excédait pas ceux auxquels les usagers de la voie publique doivent s’attendre ;

– les creux de 4 centimètres ne constituent pas un défaut d’entretien normal, la cour administrative de Lyon a pu juger qu’une excavation jusqu’à 10 cm ne constituait pas un défaut d’entretien normal de la voirie ;

– au cas présent, les photographies montrant une dénivellation remplie d’eau ne permettent pas de connaître la profondeur du défaut de la chaussée et les attestations évoquant un trou de 8 à 10 centimètres ne sont pas suffisamment probantes sur l’obstacle ayant fait chuter MmeD… ;

– il n’y a pas de défaut d’entretien normal dès lors que cet obstacle était parfaitement visible pour un piéton attentif, que le trottoir était large, que la luminosité était bonne et que Mme D…connaissait les lieux ;

– en cas de défaut d’entretien normal du trottoir, Mme D…a commis une imprudence fautive exonérant en totalité ou en majeure partie la responsabilité de la commune et que le taux de 80% retenu par le tribunal administratif de responsabilité de la commune ne peut pas être retenu et qu’au maximum ce taux peut être fixé à un tiers des conséquences de l’accident ;

– le montant d’indemnisation retenu par le tribunal administratif est trop élevé sachant que l’expert judiciaire n’a pas pu interroger Mme D…compte tenu de son état de santé ;

– l’expert a estimé que cette chute a eu deux conséquences : la fracture du col fémoral droit et l’accélération de la symptomatologie de dégénérescence cérébrale dont Mme D…souffrait avant les faits et que la consolidation devait être fixée au 30 septembre 2009 ;

– à compter du 8 novembre 2008, Mme D…ayant pu remarcher avec un déambulateur, elle doit être regardée comme s’étant remise de sa fracture ;

– Mme D…souffrait de la maladie d’Alzheimer et son déclin a commencé en novembre 2007 et qu’elle a intégré un EPAHD le 7 juillet 2008 en raison de la diminution de son autonomie dans le cadre de l’évolution lente et progressive de la maladie d’Alzheimer ;

– aucun élément du rapport d’expertise ne permet de dire que l’accélération de la dégénérescence cérébrale aurait été causée par sa chute sur le trottoir ;

– le médecin mandaté par l’assureur de la commune estime que cette chute n’a pas accéléré cette symptomatologie de dégénérescence cérébrale ;

– la consolidation de la fracture doit être fixée au 8 novembre 2008 et non au 30 septembre 2009, que le déficit fonctionnel temporaire total en chirurgie et en réadaptation ne couvre que la période allant du 12 mai 2008 au 6 juillet 2009 et ne doit pas aller jusqu’au 29 septembre comme estimé par l’expert et le tribunal administratif, que ce déficit correspond à 55 jours ; que le taux journalier doit être fixé à 13,31 euros par jour ; que le maximum à accorder pour ce déficit doit s’élever à 733,15 euros ;

– le déficit fonctionnel temporaire partiel doit être évalué pour la période où elle se déplaçait avec un déambulateur en EHPAD sur la base d’une classe III soit environ 50% du 7 juillet 2008 au 7 novembre 2008, date de la consolidation de son état de santé, soit 123 jours à 6,65 euros par jour ; que le maximum à accorder pour ce déficit doit être fixé à 1 551,10 euros ;

– le déficit fonctionnel permanent doit être estimé à 10% et non pas 15% et que compte tenu de l’âge de Mme D…(81 ans au moment des faits), l’indemnisation doit être limitée à 10 000 euros ;

– au titre des souffrances endurées, l’expert a évalué ce poste à 3,5 sur 7 mais sur la base d’une hospitalisation de 506 jours, or cette hospitalisation résulte également de l’évolution progressive de la maladie d’Alzheimer et la jurisprudence administrative pour une évaluation à 3,5 admet une indemnisation sur une fourchette 3500-4000 euros ; que l’indemnisation doit être limitée à 4 000 euros ;

-au titre du préjudice esthétique, du fait d’une évaluation à 1,5 sur 7, l’indemnisation doit être limitée à 1 500 euros ;

– le rapporteur public avait évalué le montant du préjudice à un total de 18 528 euros ;

– la responsabilité de la commune n’étant pas engagée, le régime social des indépendants (RSI) n’a pas droit aux 142,82 euros au titre des dépenses de santé et aux 101 euros de l’indemnité forfaitaire ;

– la somme de 149,82 de débours du régime social des indépendants n’est pas justifiée dès lors que seuls les dates et les montants des frais sont mentionnés par le RSI et qu’il ne justifie pas du lien avec la faute qu’aurait commise la commune ;

– le RSI n’a adressé aucune demande à titre amiable à la commune pour se faire rembourser cette somme de 250,82 euros ;

Par un mémoire enregistré le 14 mars 2014 pour le régime social des indépendants Rhône-Alpes (RSI), il conclut à la confirmation de la responsabilité de la commune de Rive-de-Gier dans l’accident de MmeD…, à la réformation par la voie de l’appel incident du montant des sommes à verser par la commune au RSI et de condamner la commune à lui verser 41 423,22 euros au titre des dépenses de santé versées aux établissements de santé pour Mme D… et à la condamnation de la commune de Rive-de-Gier à lui verser 1 028 euros au titre de l’indemnité forfaitaire visée à l’article L. 376-1 alinéas 5 et 6 du code de la sécurité sociale.

Il soutient que :

– il n’a été avisé de la procédure que lors du jugement avant dire droit sur l’expertise, il a déposé un mémoire le 24 septembre 2012 faisant état d’une créance de 248,52 euros ;

– le montant de la créance lui étant due par la commune doit être portée à 41 423,22 euros ;

– le jugement sur la responsabilité de la commune à hauteur de 80% doit être confirmé ;

– depuis le jugement du 5 novembre 2013, il a pu obtenir la facturation des services hospitaliers en lien direct et certain avec l’accident de Mme D…pour les périodes allant du 12 au 27 mai 2008, du 27 mai 2008 au 30 juin 2008 et du 1er juillet au 8 juillet 2008 ; que les soins pour un montant de 41 423, 22 euros sont en lien direct et certain avec l’accident du 12 mai 2008 ;

– il n’a pas respecté la procédure de l’article L. 316-1 du code de la sécurité sociale car ni les établissements de santé, ni l’assurée, ni le tiers responsable de l’accident ne l’ont informé de la survenance des lésions causées par un tiers ;

– il est bien fondé en cause d’appel à réclamer l’intégralité des prestations servies à l’assuré en lien direct avec l’accident sans que puisse lui être opposée l’absence de réclamation préalable ;

– au titre de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le montant de l’indemnité forfaitaire doit être fixé à 1 028 euros ;

Par ordonnance du 28 octobre 2014, la clôture de l’instruction a été fixée au 25 novembre 2014.

Par un mémoire enregistré le 24 novembre 2014 pour la commune de Rive-de-Gier, elle maintient ses conclusions à fin d’annulation et de réduction des sommes allouées en première instance et ajoute des conclusions à fin d’irrecevabilité de l’ensemble des nouvelles demandes indemnitaires du régime social des indépendants, et des conclusions à fin de limitation des sommes dues au régime social des indépendants aux montants fixés par le tribunal administratif au cas où une responsabilité de sa part serait retenue. Elle modifie ses conclusions au titre des dépens et de l’article L. 761-1 du code de justice administrative en demandant la condamnation solidaire de Mme D…et du régime social des indépendants à payer les dépens et à lui verser 1 000 euros;

Elle soutient que :

– les demandes indemnitaires de 41 423,22 euros et de 1028 euros du régime social des indépendants sont des demandes nouvelles en appel et par suite irrecevables ; de telles demandes de remboursement correspondent en effet à des frais engagés avant le jugement de première instance aussi bien en avant dire-droit et au fond, le tribunal administratif a adressé au RSI la requête de Mme D…le 23 avril 2010 puis par voie administrative le 9 mai 2011, les sommes dépensées en 2008 n’ayant pas été demandées devant le tribunal administratif sont nouvelles et irrecevables en appel ;

– en l’absence de responsabilité de la commune, de telles sommes ne peuvent pas être demandées par le RSI ;

– le RSI ne fait valoir aucune circonstance sur l’impossibilité d’avoir eu connaissance des sommes sont il demande réparation lors de la première instance ;

– le RSI avait connaissance de telles sommes et s’est montré négligent ;

– seule la somme de 250,82 euros pourrait être retenue ;

– la somme de 1 028 euros au titre des dispositions de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale devra être rejetée faute de demande de règlement amiable ;

Par un mémoire enregistré le 23 février 2015 pour le régime social des indépendants Rhône-Alpes, il maintient ses conclusions et ses moyens et ajoute qu’une demande nouvelle peut être accueillie pour la première fois en appel s’il est démontré l’impossibilité d’en avoir eu connaissance au moment du premier jugement et que l’étendue réelle des conséquences dommageables d’un même fait n’est connue que postérieurement au jugement de première instance ;

Il soutient que :

– dans le cadre de la procédure devant les premiers juges, il n’a pas été en mesure de fixer sa créance dès lors qu’il ne connaissait que la créance de 149,82 euros, les autres sommes réclamées ultérieurement ayant été établies au nom de la MGTI (devenue Harmonie Mutuelle) qui est une personne morale distincte du RSI puisque le MGTI est un organisme conventionné auquel le RSI confie le soin d’assurer pour son compte le service des prestations maladie et que les avis sur les sommes à payer qui datent des 17 juin, 17 juillet et 22 juillet 2008 n’ont été communiqués au RSI qu’après le 5 novembre 2013 et n’ont pu être demandés en première instance ;

– le RSI ayant été dans l’impossibilité d’avoir connaissance au jour du jugement rendu par le tribunal administratif de sa véritable créance et de la faire valoir en raison du manque d’information tant des établissements de santé, que de l’assuré que du tiers responsable, il peut en appel pour la première fois demander le remboursement de l’intégralité des prestations servies à l’assurée en lien direct avec l’accident sans que puisse lui être opposé l’absence de réclamation amiable ou le caractère irrecevable d’une demande nouvelle ;

– sa créance de 41 423,22 euros est justifiée avec la production d’un document du 3 avril 2013 pour un montant de 148,92 euros, de la demande au tribunal administratif de 101 euros au titre de l’indemnité forfaitaire, d’un document du 18 septembre 2012 sur l’origine des 149,92 euros, d’un document du 7 mars 2014 fixant la créance à un montant total de 41 423,22 euros par addition des prestations fournies (soins médicaux et hospitalisations du 12 mai 2008 au 29 août 2008) en lien direct avec l’accident, sur les avis des 17 juin, 17 juillet et 22 juillet 2008 des sommes à payer de 19 687,05 euros, de 17 720,5 euros et de 3 685,85 euros ;

– la date de consolidation a été fixée par l’expert au 30 septembre 2009 ;

Par ordonnance du 2 mars 2014, la clôture de l’instruction a été reportée au 30 mars 2015.

Par un mémoire enregistré le 25 mars 2015 pour la commune de Rive-de-Gier, elle maintient ses conclusions.

Elle ajoute que :

– les demandes indemnitaires nouvelles en appel sont irrecevables et que seule une impossibilité avérée peut permettre à un organisme d’augmenter le montant de sa créance en cause d’appel et que tel n’est pas le cas en espèce, le RSI ayant eu connaissance de l’accident avant le 2 juillet 2012 et s’étant montré négligent ;

– les avis des sommes à payer sont datées des 16 juin 2008, 17 juillet 2008 et 22 août 2008 et il est indifférent que ces avis aient été reçus respectivement par le RSI le 3 avril 2013, le 18 septembre 2013 et le 7 mars 2014 ;

Par un mémoire enregistré le 27 mars 2015, l’avocat de Mme D…transmet l’acte de notoriété établi après le décès de Mme D…le 15 octobre 2014 et indique que l’instance est reprise es qualités par ses héritiers M. B…D…et Mme E…D…épouseC… ;

Par ordonnance du 30 mars 2015, la clôture de l’instruction a été reportée au 23 avril 2015.

Par un mémoire enregistré le 21 avril 2015 pour la commune de Rive-de-Gier, elle indique qu’elle a reçu l’information sur le décès de Mme D…et de la reprise de l’instance par ses deux héritiers et maintient ses conclusions à l’encontre de M. B…D…et de Mme E… D…en qualité d’héritiers de MmeD… ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

– le code de la sécurité sociale ;

– l’arrêté du 19 décembre 2014 relatif aux montants de l’indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de Mme Cottier, premier conseiller ;

– les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

– et les observations de Me Pyanet, avocat de la commune de Rive-de-Gier et de Me Neyret, avocat de la caisse du régime social des indépendants.

1. Considérant que, le 12 mai 2008 vers 10h30, MmeD…, alors âgée de 79 ans, a été victime d’une chute sur le trottoir de la rue Jean Jaurès à Rive-de-Gier ; que, par des jugements des 12 juin 2012 et 5 novembre 2013, le tribunal administratif de Lyon a condamné cette commune à réparer les conséquences dommageables résultant de cet accident, à hauteur de 80 %, a rejeté la demande d’allocation provisionnelle présentée par MmeD…, a ordonné une expertise aux fins de déterminer l’étendue des préjudices, a condamné la commune de Rive-de-Gier à verser à Mme D…une somme de 23 680 euros en réparation des préjudices subis du fait de sa chute et une somme de 800 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser au Régime social des indépendants du Rhône (RSI) une somme de 119,85 euros au titre des débours de santé pour Mme D…et une somme de 101 euros au titre de l’article 376-1 du code de la sécurité sociale, a mis à la charge de la commune de Rive-de-Gier les frais d’expertise liquidés et taxés à hauteur de 600 euros et a rejeté le surplus des conclusions des parties ; que la commune de Rive-de-Gier conclut à titre principal à l’annulation desdits jugements et à titre subsidiaire à la réduction des sommes mises à sa charge ; que par un appel incident, le RSI demande que la somme devant lui être payée par la commune de Rive-de-Gier soit portée à 41 423,22 euros au titre des prestations de santé, compte tenu de sa connaissance récente de nouveaux frais engagés pour MmeD…, et qu’une somme de 1 028 euros lui soit versée au titre de l’indemnité forfaitaire visée à l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ; que Mme D…étant décédée le 15 octobre 2014, ses héritiers ont indiqué reprendre l’instance ;

Sur la fin de non recevoir opposée par la commune de Rive de Gier :

2. Considérant que la commune de Rive-de-Gier oppose une fin de non recevoir à l’augmentation des prétentions indemnitaires de la caisse du RSI en appel dès lors que ladite caisse a fixé sa créance devant les premiers juges et que sa négligence dans le calcul de ses débours ne saurait constituer une circonstance lui permettant de rehausser en appel la somme qu’elle demande ; qu’il résulte de l’instruction que la caisse du RSI a demandé en première instance que la commune de Rive-de-Gier soit condamnée, à hauteur de 149,82 euros, à lui restituer ses débours liés aux dépenses de santé induites par la chute de Mme D…; que la caisse du RSI fait valoir qu’elle est recevable à augmenter ses prétentions indemnitaires en appel dès lors qu’elle n’a eu connaissance de l’étendue réelle des conséquences dommageables de cet accident que postérieurement au jugement du 5 novembre 2013, et ce en raison de ce qu’elle a donné certaines opérations de remboursement en sous-traitance à un prestataire indépendant, lequel ne lui a donné que tardivement connaissance des montants effectivement exposés ; qu’il appartenait toutefois à la caisse du RSI, à qui avait été transmise la demande indemnitaire de Mme D…et qui a été notamment mise en cause dans le cadre de l’expertise diligentée par le jugement avant dire droit du 12 juin 2012, de faire toute diligence pour établir avant clôture de l’instruction le montant de la créance dont elle entendait se prévaloir ; que la caisse du RSI, bien qu’ayant été mise à même d’entreprendre les démarches pour connaître l’étendue exacte de sa créance au titre des débours versés pour MmeD…, s’est abstenue de demander en temps utile le remboursement des frais liés aux séjours hospitaliers de Mme D…en lien direct et certain avec cet accident et n’a produit en première instance qu’une créance de 149,82 euros ; que dès lors les conclusions présentées en appel en tant qu’elles portent sur la condamnation de la commune de Rive-de-Gier à lui payer une somme excédant le montant de 149,82 euros, seul montant demandé en première instance, sont irrecevables ;

Sur la responsabilité :

3. Considérant qu’en matière de dommages de travaux publics ayant atteint un usager, il appartient à la victime d’établir l’existence d’un défaut affectant l’ouvrage et d’un lien de causalité direct et certain entre celui-ci et le préjudice ; que pour s’exonérer de la responsabilité qui pèse ainsi sur elle, la collectivité maître d’ouvrage doit, soit établir qu’il n’y a pas de défaut d’entretien, soit démontrer la faute de la victime ou l’existence d’un évènement relevant de la force majeure ;

4. Considérant qu’en date du 12 mai 2008, Mme D…a, sur le trottoir de la rue Jean Jaurès à Rive-de-Gier, fait une chute qu’elle attribue à la présence d’un trou sur le revêtement de l’ouvrage ; qu’elle produit plusieurs photographies des lieux, datées du 19 mai 2008 ; que si la réalité du lien direct entre la chute et cet obstacle n’est pas contestée par la commune de Rive-de-Gier, cette collectivité fait toutefois valoir, d’une part, que le défaut d’entretien normal ne devrait pas être retenu dès lors qu’il n’est pas démontré que la profondeur du trou était significative et atteignait les dix centimètres allégués par la victime et, d’autre part, que ce trou étant visible, MmeD…, qui connaissant les lieux puisqu’elle résidait à proximité, n’a pas fait preuve de l’attention normalement requise d’un piéton ordinairement prudent ; que toutefois il résulte de l’instruction et notamment des témoignages et des photographies présents au dossier que la cavité à l’origine de l’accident présentait des dimensions d’une trentaine de centimètres de long pour une quinzaine de centimètres de large et une dizaine de centimètres de profondeur, et que le danger n’avait fait l’objet d’aucune signalisation ; que dès lors cet obstacle correspondait à un défaut d’entretien normal de la voirie, dont la commune de Rive-de-Gier ne conteste pas avoir la charge ; qu’ainsi ladite commune doit être regardée responsable des dommages subis par MmeD… ;

5. Considérant toutefois qu’il résulte également de l’instruction que le trottoir dont s’agit, bien qu’encombré par des cartons le jour de l’accident, restait encore relativement large ; que le trou n’était pas masqué et que Mme D…connaissait bien les lieux ; que dès lors, l’accident ne peut s’expliquer, au moins partiellement, que par l’attitude de la victime ; que Mme D… a ainsi contribué pour partie à la réalisation des préjudices dont elle demande réparation ; qu’il convient dès lors d’exonérer partiellement la commune de Rive-de-Gier de sa responsabilité ; qu’au regard des circonstances de l’espèce, il y a lieu de laisser 20% des conséquences dommageables de l’accident à la charge de Mme D…;

Sur les préjudices :

Sur les dépenses de la caisse du RSI :

6. Considérant qu’il résulte de ce qui été dit ci-dessus que les conclusions par lesquelles la caisse du RSI demande que l’indemnité que le tribunal administratif a condamné la commune de Rive-de- Gier à lui verser soit portée à une somme supérieure à celle de 149,82 euros qu’elle avait demandée en première instance sont irrecevables ; que d’autre part, compte tenu du partage de responsabilité entre Mme D…et la commune, défini au point 5, la commune de Rive-de-Gier est condamnée à verser 119,85 euros à la caisse du RSI au titre des débours que celle-ci a payés pour le compte de Mme D…;

Sur les préjudices personnels subis par MmeD… :

7. Considérant qu’il résulte de l’instruction, et notamment du rapport d’expertise, que sont exclusivement imputables à cet accident les soins de chirurgie dont a bénéficié l’intéressée, sa rééducation et son placement en EHPAD pour rééducation du 12 mai 2008 au 29 septembre 2009 ; que pour la période débutant au 30 septembre 2009, le placement de Mme D… au Centre d’animation naturel tiré d’occupations utiles (CANTOU) est lié aux seules conséquences de la maladie neuro-dégénérative dont elle souffrait, qui avait été diagnostiquée en 2002 puis stabilisée par traitement médicamenteux jusqu’à sa chute du 12 mai 2008, et qui en raison de cette chute se sont aggravées ;

8. Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme D…a, à la suite de l’accident, présenté une fracture du col fémoral droit et des troubles cérébraux post-traumatiques, post-émotionnels et post-hospitalisation directement imputables à cette chute, qui n’ont été consolidés que le 29 septembre 2009 ; que, du 12 mai 2008, date de sa chute, au 29 septembre 2009, Mme D…a subi une hospitalisation, une opération chirurgicale à fin de pose d’un clou et de matériel d’ostéosynthèse puis a fait l’objet de séances de rééducation pour lui permettre de marcher avec un déambulateur ; qu’elle a aussi été traitée pour des troubles et des désordres neurologiques liés à cette chute ; que MmeD…, avant sa chute le 12 mai 2008, vivait seule à son domicile au 1er étage sans ascenseur, faisait elle-même ses courses, prenait ses repas de midi dans un restaurant administratif ; qu’elle recevait une infirmière pour le suivi de son traitement médicamenteux et mangeait le soir avec l’aide ménagère qui assurait aussi quelques heures de ménage ; que dans de telles circonstances et comme l’expose l’expert désigné par le tribunal administratif de Lyon, MmeD…, en dépit de la maladie diagnostiquée en 2002, mais stabilisée, doit être regardée comme ayant joui avant sa chute d’une autonomie satisfaisante lui permettant de réaliser la très grande majorité des actes du quotidien ; que les souffrances endurées par Mme D…du fait de sa chute et des conséquences de celle-ci, ainsi que son préjudice esthétique, sont respectivement évalués par l’expert à 3,5 et 2 sur une échelle de 7 ; que l’expert relève en outre une accélération, du fait de cette chute, de l’aggravation neurologique de son état antérieur auparavant stabilisé ; que les premiers juges, en retenant 506 jours de déficit fonctionnel temporaire total n’ont pas commis d’erreur quant à la date de la consolidation des conséquences directes de cette chute ; que l’évaluation de ces différents préjudices pour une somme de 29 600 euros, à laquelle ont procédé les premiers juges, n’est ni insuffisante ni excessive ; qu’ainsi les premiers juges ont fait une juste appréciation des préjudices subis par Mme D…en l’évaluant à la somme de 29 600 euros ; que toutefois, compte tenu du partage de responsabilité opéré au point 5 entre la commune de Rive-de-Gier et MmeD…, cette dernière a seulement droit à 23 680 euros ;

Sur l’indemnité prévue par les dispositions de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

9. Considérant qu’aux termes de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2006 relative au financement de la sécurité sociale pour 2007 applicable à la date de la présente décision :  » (…) En contrepartie des frais qu’elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d’assurance maladie à laquelle est affilié l’assuré social victime de l’accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l’organisme national d’assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d’un montant maximum de 910 euros et d’un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (…)  » ; qu’aux termes de l’arrêté du 19 décembre 2014 relatif aux montants de l’indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale :  » Les montants maximum et minimum de l’indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 1 037 € et à 103 € à compter du 1er janvier 2015.  » ;

10. Considérant qu’il résulte des dispositions précitées du neuvième alinéa de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale que le montant de l’indemnité forfaitaire qu’elles instituent est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d’un plafond dont le montant est révisé chaque année par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget ; que le jugement du 5 novembre 2013 du tribunal administratif de Lyon, qui a fixé à 119,85 euros le montant des indemnités dues à la caisse du RSI au titre des débours de santé versés pour MmeD…, a accordé à la caisse, au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion, la somme demandée par le RSI de 101 euros correspondant au plancher fixé par l’arrêté du 7 décembre 2007 alors en vigueur ; que si les plancher et plafond ont été réévalués par la suite, la caisse du RSI ne peut prétendre à une augmentation du montant de l’indemnité forfaitaire de gestion dès lors que ses conclusions tendant à la majoration des sommes qui lui sont dues au titre des débours payés sont rejetées par l’arrêt de ce jour de la cour administrative d’appel ;

11. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la commune de Rive-de-Gier n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon l’a condamnée à verser à Mme D…une indemnité de 23 680 euros en réparation des préjudices subis par cette dernière et au régime social des indépendants Rhône les sommes de 119,85 euros au titre des débours exposés pour Mme D…et de 101 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion ; qu’il en résulte également que, devant le tribunal administratif, le régime social des indépendants Rhône-Alpes avait limité ses conclusions à la condamnation de la commune de Rive-de Gier à lui allouer une indemnité de 149,82 euros ; qu’il ne se prévaut en appel d’aucun chef de préjudice autre que ceux pour la réparation desquels cette somme avait été réclamée non plus que d’une aggravation du préjudice subi ; que les conclusions présentées par ledit régime social devant la cour administrative d’appel tendant à ce que cette indemnité soit portée à la somme de 41 423,22 euros constituent ainsi une demande nouvelle et ne sont, dès lors, pas recevables ; que les conclusions incidentes du régime social des indépendants Rhône-Alpes relatives à l’indemnité forfaitaire de gestion et tendant à la réformation du jugement du tribunal administratif de Lyon du 25 novembre 2013 doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à que soit mise à la charge solidaire de la succession D…et du régime social indépendant Rhône-Alpes (RSI) la somme demandée par la commune de Rive-de-Gier, partie perdante en appel ; qu’il a lieu dans les circonstances de l’espèce de rejeter celles présentées par le régime social indépendant Rhône-Alpes au titre du même article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Rive de Gier et les co


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