Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt et un mars deux mille, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire KARSENTY, les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN, GEORGES et THOUVENIN, de Me de NERVO et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général LAUNAY ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
– X… Antonio,
– Y… Daniel,
contre l’arrêt de la cour d’appel de BOURGES, chambre correctionnelle, en date du 14 janvier 1999, qui les a condamnés, pour homicide involontaire et le second, en outre, pour infraction à la réglementation relative à l’hygiène et la sécurité, à 4 mois d’emprisonnement avec sursis, 3 000 francs d’amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs et les mémoires en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 221-6, alinéa 1, du nouveau Code pénal, L. 263-2-1, L. 231-1, L. 231-2 du Code du travail, 12 du décret du 8 janvier 1965 ainsi que 427 et 593 du Code de procédure pénale ;
» en ce que l’arrêt infirmatif attaqué a retenu les prévenus (MM. Y… et X…, les demandeurs) dans les liens de la prévention du chef d’homicide involontaire sur la personne de Daniel Z…, en outre, pour le dirigeant social, du chef d’infractions à la réglementation sur l’hygiène et la sécurité du travail ;
» aux motifs que, s’agissant des prévenus A… et B…, salariés de la société Martin, ils ne pouvaient décliner leur responsabilité personnelle à partir du moment où leur entreprise avait reçu mission d’assurer la sécurité du chantier ; que M. A…, en sa qualité de directeur d’exploitation, avait préparé le plan d’hygiène et de sécurité et assistait une fois par semaine aux réunions de chantier, tandis que M. B…, chef de chantier, était chargé de la direction de celui-ci et notamment de faire observer les règles de sécurité ; que vainement ces prévenus objectaient-ils que la victime n’avait pas à se trouver dans cette partie du chantier où elle s’était aménagée un vestiaire personnel sans autorisation ; qu’il leur appartenait en effet de veiller à ce que les ouvriers utilisassent les abris spécialement prévus à cet usage, notamment en avertissant la direction de leur entreprise pour ceux d’entre eux qui n’appartenaient pas à la société Martin ; que, s’agissant des prévenus Y… et X…, ils ne pouvaient se prévaloir de la faute qu’aurait commise la victime en s’installant sans autorisation dans un local qui n’était pas destiné à servir de vestiaire dès lors qu’il leur appartenait d’user de leur pouvoir hiérarchique et de veiller à ce qu’elle utilisât les abris provisoires spécialement aménagés pour le personnel ; qu’en ne le faisant pas et en tolérant cette infraction aux règles de sécurité, ils avaient commis une faute directement à l’origine de l’accident ; que, par ailleurs, dès lors qu’ils avaient accepté cet état de fait, les demandeurs devaient veiller à la sécurité des personnels concernés en cet endroit précis du chantier, notamment en donnant les instructions nécessaires à un éclairage correct des lieux ; qu’il ne pouvait être sérieusement soutenu que le lien causal entre l’absence d’éclairage et la réalisation de l’accident n’était pas établi tandis que le drame s’était déroulé dans un sous-sol déjà sombre par nature et alors que la nuit était déjà tombée, de sorte que l’éclairage naturel par la trémie d’ascenseur avait cessé ; que cette deuxième faute était également en rapport direct de causalité avec l’accident ;
» alors que, d’une part, le juge ne pouvait constater que l’entreprise de gros oeuvre avait reçu mission d’assurer la sécurité du chantier, qu’un de ses préposés avait préparé le plan d’hygiène et de sécurité et assistait une fois par semaine aux réunions de chantier tandis qu’un autre était chargé de la direction de celui-ci, notamment de faire observer les règles de sécurité, sans omettre d’en tirer les conséquences, c’est-à-dire que les autres participants à la construction avaient délégué à cette entreprise, pourvue de la compétence nécessaire, leurs pouvoirs s’agissant de l’hygiène et la sécurité des travailleurs, ce qui les exonérait de toute responsabilité pénale ;
» alors que, d’autre part, le juge ne pouvait, sans entacher sa décision d’un défaut de motifs, affirmer péremptoirement que tant le dirigeant de la société chargée du lot électricité que son conducteur de travaux avaient à la fois connu et toléré la faute commise par la victime, ayant consisté à s’installer sans autorisation dans un local qui n’était pas destiné à servir de vestiaire au lieu d’utiliser les abris provisoires spécialement aménagés pour le personne, en sorte qu’ils auraient dû donner des instructions pour un éclairage correct des lieux, en omettant de préciser sur quels éléments de preuve versés aux débats contradictoires et par lui analysés il se serait fondé pour se livrer à de telles constatations » ;
Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments constitutifs, tant matériels qu’intentionnels, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l’allocation, au profit de la partie civile, de l’indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;
D’où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l’article L. 131-6, alinéa 4, du Code de l’organisation judiciaire : M. Gomez président, Mme Karsenty conseiller rapporteur, M. Pinsseau, conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Launay ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.