Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU
NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. B…C…a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 à 2010 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1203621 du 19 novembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 15NT00099 du 19 mai 2016, la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté l’appel que M. C…a formé contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique et un autre mémoire, enregistrés les 19 juillet et 19 octobre 2016 et les 30 mars et 13 juin 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. C…demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes en service extraordinaire,
– les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de M. B…C…;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’à la suite d’un contrôle sur pièces, l’administration fiscale a remis en cause, au titre des années 2008 à 2010, d’une part, le nombre de parts de quotient familial dont M. C…avait bénéficié du fait du rattachement à son foyer fiscal de sa tante, MmeA…, titulaire d’une carte d’invalidité lui reconnaissant un taux d’incapacité à 100 %, ainsi que, d’autre part, la réduction d’impôt pour emploi d’un salarié à domicile. Par un jugement du 19 novembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. C… tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 à 2010. M. C…se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 19 mai 2016 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a rejeté l’appel qu’il a interjeté à l’encontre de ce jugement.
2. Aux termes de l’article 196 A bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : » Tout contribuable peut considérer comme étant à sa charge, au sens de l’article 196, à la condition qu’elles vivent sous son toit, les personnes titulaires de la carte d’invalidité prévue à l’article L. 241-3 du code de l’action sociale et des familles « . Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé leur adoption, que la condition de vie sous le même toit à laquelle est subordonné le bénéfice d’une majoration du quotient familial pour prise à sa charge d’une personne invalide doit uniquement s’apprécier sur la base d’éléments matériels tenant à l’accueil à domicile d’une personne invalide ou aux conditions dans lesquelles, dans l’hypothèse d’une occupation partagée d’un immeuble avec le contribuable, celle-ci peut être regardée, compte tenu notamment de l’agencement de cet immeuble, comme habitant sous le toit de celui-ci. Lorsqu’un contribuable déclare une personne invalide à sa charge en application de ces dispositions, il appartient à l’administration, si elle entend remettre en cause cette déclaration, de produire tous éléments pertinents pour justifier une telle remise en cause. Il incombe alors au contribuable d’apporter en réponse tous éléments de nature à justifier ses prétentions. Le juge doit apprécier la valeur des éléments qui lui sont ainsi fournis par l’administration et par le contribuable.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les lots appartenant à MmeA…, d’une superficie de 110 mètres carrés, se situaient sur différents niveaux de l’immeuble qu’elle occupait avec M.C…, propriétaire du reste de l’immeuble, que les pièces occupées par M. C…et sa tante communiquaient entre elles, qu’un ascenseur avait été installé pour qu’elle puisse accéder à une cuisine installée au sous-sol qui était incluse dans les lots appartenant à M. C…et qu’elle partageait avec lui. Dès lors, en estimant que Mme A…occupait un appartement où elle pouvait vivre de manière autonome, pour juger que la condition de vie sous le même toit n’était pas remplie, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.
4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, M. C…est fondé à demander l’annulation de l’arrêt qu’il attaque.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement à M. C…d’une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt n° 15NT00099 de la cour administrative d’appel de Nantes du 19 mai 2016 est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Nantes.
Article 3 : L’Etat versera à M. C…une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B…C…et au ministre de l’action et des comptes publics.
ECLI:FR:CECHR:2018:401627.20180705