Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 3 juin 2014, 13-83.743, Inédit

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Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 3 juin 2014, 13-83.743, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

– M. Bernard X…,

– La société Entreprise Chanut,

contre l’arrêt de la cour d’appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 7 mai 2013, qui, pour blessures involontaires aggravées et défaut de mesure de protection contre les chutes, a condamné, le premier à 5 000 euros d’amende, la seconde, à 20 000 euros d’amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 8 avril 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel, président, M. Monfort, conseiller rapporteur, M. Beauvais, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de M. le conseiller MONFORT, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU et FATTACCINI, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général CORDIER ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire et le mémoire additionnel produits communs aux demandeurs ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Sandro Y…, maçon-coffreur intérimaire mis à la disposition de la société Entreprise Chanut sur un chantier de rénovation d’un lycée à Bourgoin-Jallieu (Isère), a été blessé lors d’une chute dans la fosse d’une cage d’ascenseur ; qu’à la suite de ces faits, M. X…, directeur technique de la société Entreprise Chanut, titulaire d’une délégation de pouvoirs en matière d’hygiène et de sécurité, et la société personne morale ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel des chefs notamment de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de travail supérieure à trois mois, par la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence, et infraction à la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité ; que les juges du premier degré, après avoir requalifié les faits principaux en blessures involontaires ayant entraîné une incapacité de travail d’une durée inférieure à trois mois, par la violation manifestement délibérée d’une obligation de prudence ou de sécurité, ont retenu les prévenus dans les liens de la prévention ; que ceux-ci, ainsi que le ministère public, ont relevé appel du jugement ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 7, 9, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a écarté le moyen tiré de la prescription en cas de disqualification des faits en contravention ;

 » aux motifs que s’appuyant sur cette requalification, mais négligeant le fait que le tribunal a visé la circonstance aggravante prévue à l’article 222-20 ayant pour effet maintenir une qualification délictuelle, les prévenus invoquent la prescription de l’action publique estimant qu’il ne s’agirait alors que d’une simple contravention ; que l’action publique se prescrit par un délai d’une année en matière de contravention s’il n’a pas été fait pendant ce délai d’acte de poursuite ou d’instruction selon les prévisions de l’article du code de procédure pénale ; qu’il ressort de l’exposé même des divers actes d’enquête et de poursuite réalisés à l’initiative du ministère public et des services de police sous son autorité tel qu’il est repris dans les conclusions des prévenus qu’il ne s’est jamais écoulé plus d’une année entre les divers actes de procédure, ce dont la cour peut se convaincre qu’au vu des différentes réquisitions qui figurent à la procédure ; que le moyen tiré de la prescription ne peut prospérer, même si la cour estimait que les faits devaient être disqualifiés en contravention ;

 » alors que seuls les actes du procureur de la République tendant à la recherche ou la poursuite des infractions à la loi pénale sont interruptifs de prescription ; que pour avoir valeur interruptive, l’acte doit révéler, au regard des circonstances dans lesquelles il a été délivré, la volonté, après certaines vérifications, de mettre en mouvement l’action publique ; que tel ne peut être le cas de simples notes du parquet adressées pour l’une à l’avocat de la partie civile afin de l’informer que les services de police n’avaient été destinataires d’aucune plainte de son client, et pour l’autre au commissariat pour simple transmission de la procédure, de tels actes ne mettant pas en évidence une volonté du parquet de mettre en mouvement l’action publique, mais une simple volonté de se tenir informé des suites de l’accident du 19 septembre 2007 ; qu’en écartant l’exception de prescription sur le fondement de simples notes du parquet non interruptives de prescription, quand le premier acte interruptif de prescription avait été accompli le 17 novembre 2008, date d’audition de M. A…, soit plus d’un an après la date de l’accident, la cour d’appel a méconnu les textes et principes susvisés et privé sa décision de base légale  » ;

Attendu que, pour rejeter l’exception soulevée par les prévenus qui soutenaient que l’action publique était prescrite par suite de la requalification opérée par le tribunal, qui avait donné aux faits une nature contraventionnelle, et qu’un délai de plus d’un an s’était écoulé entre la date de l’accident et celle du premier acte de poursuite, l’arrêt retient notamment qu’en visant la circonstance aggravante prévue par l’article 222-20 du code pénal, tenant à la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence, les juges ont maintenu la qualification délictuelle des faits, nonobstant l’existence d’une incapacité de travail inférieure à trois mois ;

Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 4741-1, L. 4741-2 et R. 4534-6 du code du travail, 121-2, 121-3, 222-20 du code pénal, 459, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois avec violation manifestement délibérée d’une obligation légale ou réglementaire de sécurité ;

 » aux motifs qu’en droit le délit de blessures involontaires prévu et réprimé par l’article 222-19 du code pénal, si les blessures ont entraîné une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois (ou la contravention de blessures involontaires, prévue et réprimée par l’article R. 625-2 du code pénal, si les blessures ont entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois), combiné avec les dispositions de l’article 121-3 auxquelles il renvoie suppose, la maladresse, l’imprudence, l’inattention, la négligence, ou le manquement à une obligation légale ou réglementaire de prudence ou de sécurité, lorsque l’auteur n’a pas accompli les diligences normales compte tenu de ses missions, de ses fonctions ou de ses compétences, ainsi que de ses pouvoirs et moyens à sa disposition ; que l’article 2 de l’article 222-19 du code pénal prévoit une circonstance aggravante lorsque les blessures sont causées par une violation manifestement délibérée d’une obligation légale ou réglementaire de prudence ou de sécurité ; que l’article 222-20 du code pénal réprime de peine délictuelle moins sévère les blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail d’une durée inférieure ou égale à trois mois, si elles résultent d’une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence et de sécurité imposée par la loi ou le règlement ; qu’en outre, la personne physique qui n’est pas à l’origine directe du dommage mais a seulement contribué à sa réalisation ou omis de prendre les mesures propres à l’éviter, doit avoir commis pour être pénalement responsable soit une violation manifestement délibérée d’une obligation légale ou réglementaire de sécurité, soit une faute caractérisée exposant autrui à un risque qu’il ne pouvait ignorer ; qu’en droit aussi, une personne morale peut, par application combinée des articles 121-2, 221-7, 222-19 et 222-21 du code pénal être déclarée pénalement responsable du délit de blessures involontaires commis par ses organes ou représentants agissant pour son compte ; qu’en droit enfin, l’article R. 4534-6 du code du travail actuel, reprenant à droit constant les dispositions anciennement prévues par l’article 7 du décret 65-48 du 8 janvier 1965 relatif aux travaux du bâtiment, dispose que les orifices des puits, des galeries d’une inclinaison de plus de 45°, et les ouvertures telles que celles qui sont prévues pour le passage des ascenseurs, ou telles que les trémies de cheminées ou les trappes pouvant exister dans le plancher d’une construction ainsi que dans les planchers des échafaudages, passerelles ou tout autres installations sont clôturées : soit par un garde corps placé à une hauteur de 90 cm et une plinthe d’une hauteur minimale de 15 cm, soit par un plancher provisoire jointif convenablement fixé, soit par tout autre dispositif équivalent ; (¿) que, sur la poursuite pour blessures involontaires ; qu’il est constant que même si après sa chute, la partie civile a pu laisser croire à ceux venus à son secours, qu’elle paraissait blessée légèrement puisqu’elle se serait extraite pratiquement seule du trou au fond duquel elle était tombée, il n’en demeure pas moins que conduite à l’hôpital par les sapeurs pompiers à toutes fins utiles après la mise en place par ceux-ci d’un collier cervical, il est apparu qu’elle présentait une fracture de la cinquième vertèbre cervicale qui a nécessité une intervention chirurgicale le lendemain ; qu’il y a bien eu une incapacité totale de travail d’au moins 48 heures pendant le temps de l’hospitalisation en relation causale avec la chute, mais le certificat médical, établi par le chirurgien présente une ambiguïté sur le sens à donner au sigle « ITTP » qui ne permet pas d’avoir la certitude que cette incapacité totale de travail a duré plus de trois mois, de sorte que c’est avec raison que le tribunal a disqualifié les faits en blessures n’ayant pas entraîné d’incapacité supérieure ou égale à trois mois ; (¿) ; que la responsabilité de la personne morale ; qu’il est constant que la fosse de l’ascenseur quelle que soit sa profondeur exacte (60 cm au moins mais plutôt 80 cm, voire un mètre) n’était équipée d’aucune mesure de protection ; que, d’ailleurs, devant la cour, M. X…explique que les ouvriers utilisaient une poulie, installée dans la cage même destinée à recevoir l’ascenseur pour monter les moellons du rez-de-chaussée vers les étages, de sorte que même pendant cette manoeuvre le trou de la fosse restait dépourvu de protection et qu’une fois la palette de moellons évacuée, il n’y a eu aucune protection mise en place avant l’accident ; qu’il est donc vain de prétendre que pendant le temps au moins où cette palette était présente, elle constituait une protection équivalente ; qu’il ressort de l’ensemble des déclarations des uns et des autres qu’aucune protection n’a jamais été envisagée au rez-de-chaussée pour protéger la chute dans la fosse, M. X…ayant dit lors de l’une de ses auditions que les protections n’étaient pas mises en place pour des trous d’une profondeur inférieure à 1, 30 m ; qu’en cela, il y a bien eu une méconnaissance des prescriptions réglementaires de sécurité rappelées ci-dessus, telles que prévues précédemment dans le décret du 8 janvier 1965 et désormais intégrées dans le code du travail, imparfaitement connues puisque ce texte ne subordonne pas la protection à une profondeur déterminée à l’avance et que de plus il est du simple bon sens qu’un trou dans un plancher même de faible profondeur doive être protégé ; que cette méconnaissance et cette négligence qui sont en relation causale avec la chute dans le trou sans protection sont imputables en l’espèce à M. X…qui reconnaît loyalement devant la cour que pour la phase du chantier en cours lors de l’accident, l’équipe d’ouvriers sur place relevait directement de son autorité sans intermédiaire de chef de chantier ou de conducteur de travaux ; qu’il disposait d’une délégation de pouvoirs étendus, bénéficiant d’un salaire convenable proche de 6 000 euros nets par mois à l’époque, était pourvu d’une compétence technique et d’une expérience reconnue et avait reçu délégation pour exercer le pouvoir disciplinaire sur le personnel d’encadrement placé sous ses ordres et pouvait décider des investissements nécessaires dans l’hypothèse où des installations d’hygiène ou du matériel de sécurité viendraient à manquer aux conducteurs de travaux ; qu’il avait la charge de mettre en place les réunions de formation et d’information nécessaires à la prévention des risques recensés, de superviser l’action des conducteurs de travaux et des chefs de chantier en matière de prévention et de prévoir les installations de sécurité ; que les circonstances mêmes de l’accident montrent qu’il y a eu un manquement en matière de sécurité et négligence qui lui sont imputables, faute notamment de savoir clairement quelles sont les obligations réglementaires aussi élémentaires, faute d’avoir clairement désigné lors de la reprise du travail du chef d’équipe M. Z…qui de celui-ci ou de M. A… qui l’avait remplacé pendant son absence disposait de l’autorité sur l’équipe d’ouvriers et faute de s’être assuré que le travail pouvait être organisé en sécurité permanente tant pendant l’opération de la montée des moellons que pendant le temps où il n’y avait aucune activité utilisant la cage d’ascenseur inoccupé, ce qui a pour conséquence d’engager la responsabilité pénale de la personne morale dont il apparaît être un représentant qualifié, ayant agi dans l’exercice de ses fonctions pour le compte de celle-ci ; que le jugement qui a retenu la responsabilité pénale de la personne morale mérite d’être confirmé ; que la question relative à la circonstance aggravante de violation manifestement délibérée d’une obligation de prudence ou de sécurité prévue à l’article 220-20 du code pénal est subordonnée à l’appréciation de celle-ci en la personne de M. X…ci-après ; que la responsabilité de la personne physique ; que pour que la responsabilité pénale de M. X…personne physique soit retenue, il faut démontrer à son égard non seulement une négligence ou inobservation d’une obligation réglementaire de sécurité comme celle qui vient d’être relevée ci-dessus, mais encore une violation manifestement délibérée d’une telle obligation ou une faute caractérisée exposant autrui à un risque grave qui ne pouvait être ignoré ; que M. X…, malgré sa qualification professionnelle d’ingénieur en génie civil, et son expérience dans une entreprise du bâtiment méconnaissait les règles élémentaires de sécurité pour obturer ou protéger les trous dans un plancher quel que soit leur profondeur, et en laissant les ouvriers se servir de la cage d’ascenseur sans protection pour la commodité du chantier lors de l’approvisionnement des moellons d’un étage à l’autre, a bien en cela commis une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité ainsi qu’une faute caractérisée exposant autrui à un risque qu’il ne pouvait ignorer ; qu’il s’ensuit qu’il a été déclaré coupable avec raison des faits qui lui ont été reprochés ; que cette déclaration de culpabilité sur la violation manifestement délibérée d’une obligation de prudence ou de sécurité a pour effet d’entraîner la responsabilité pénale de la personne morale quant à la circonstance aggravante prévue à l’article du 222-20 code pénal ; que le jugement sera confirmé quant aux déclarations de culpabilité ; que, sur l’emploi de travailleurs sur un chantier de bâtiment sans mesures de protection contre les chutes des personnes ; qu’il ressort de ce qui précède que ce délit a bien été commis également ;

 » 1°) alors que les juges du fond sont tenus de répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont ils sont régulièrement saisis ; que dans leurs conclusions d’appel régulièrement déposées, les prévenus faisaient valoir qu’ils ne pouvaient être condamnés sur le fondement de l’article 222-20 du code pénal réprimant les blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail d’une durée inférieure ou égale à trois mois par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, dans la mesure où les dispositions de l’article R. 4534-6 du code du travail prétendument violées relevaient, d’une obligation générale de sécurité, laissant au chef d’entreprise toute latitude dans la mise en oeuvre du dispositif de protection destiné à empêcher les chutes de personnes, ne correspondant pas à l’obligation « particulière » exigée par les articles 222-20 et 121-3 du code pénal ; qu’en condamnant néanmoins les prévenus du chef de blessures involontaires aggravées sans qu’aucun motif ne vienne s’expliquer, ne serait-ce que pour l’écarter, sur le caractère particulier ou non de l’obligation résultant des dispositions de l’article R. 4534-6 du code du travail, la cour d’appel a violé les dispositions précitées et privé sa décision de toute base légale en s’abstenant de répondre à un argument déterminant des conclusions des prévenus ;

 » 2°) alors que le caractère délibéré de la violation d’une obligation particulière de sécurité ne peut résulter de la seule constatation de cette violation ; que pour affirmer que M. X…a commis une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité, la cour d’appel se contente de constater que ce dernier a méconnu les prescriptions réglementaires de sécurité pour obturer ou protéger les trous dans un plancher quelle que soit leur profondeur, en laissant les ouvriers se servir de la cage d’ascenseur sans protection pour la commodité du chantier lors de l’approvisionnement des moellons d’un étage à l’autre ; qu’en déduisant ainsi le caractère délibéré de la violation litigieuse de la seule constatation de celle-ci, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen ;

 » 3°) alors que la faute caractérisée est une faute d’une particulière intensité supposant, pour être retenue, la constatation d’un comportement blâmable et inadmissible ; que la seule constatation de la violation d’une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement est insuffisante à retenir l’existence d’une telle faute ;

qu’en se bornant à déduire de la seule constatation de la méconnaissance des prescriptions réglementaires de sécurité pour protéger les trous dans un plancher quelle que soit leur profondeur, l’existence cumulative d’une faute caractérisée, par ailleurs non visée à l’acte de poursuite, sans qu’aucune des constatations de l’arrêt attaqué n’ait établi la réunion de ses conditions cumulatives d’application tenant non seulement à l’extrême gravité de la faute, mais encore à l’exposition d’autrui à un risque d’une particulière gravité ainsi qu’à la connaissance de ce risque par le prévenu, la cour d’appel n’a pas davantage justifié sa décision au regard des textes visés au moyen ;

 » 4°) alors que l’absence de toute faute qualifiée du représentant de la personne morale prive nécessairement de tout fondement la condamnation prononcée à l’égard de la personne morale du chef de blessures involontaires par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement ; que la cassation qui ne manquera pas d’intervenir sur ce point en faveur de M. X…entraînera par conséquent nécessairement la cassation de la condamnation de la société Chanut du chef de blessures involontaires aggravées  » ;

Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments les infractions dont elle a déclaré les prévenus coupables ;

D’où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, préliminaire, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs manque de base légale ;

 » en ce que l’arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois avec violation manifestement délibérée d’une obligation légale ou réglementaire de sécurité ;

 » aux motifs que ¿ que les prévenus n’avaient nullement pu se méprendre sur ce qui leur était reproché et avaient pu efficacement assurer leur défense ; qu’il en était de même quant au délit de blessures involontaires, étant précisé que la requalification opérée par le tribunal est dans le débat l’article 222-20 du code pénal, non visé à l’acte de poursuite, mais retenu par le tribunal repose sur la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité dont la formulation était utilisée dans toutes citations comme constituant la circonstance aggravante du délit prévu et réprimé par l’article 222-19 du code pénal dûment visé ;

 » alors que s’il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c’est à la condition que le prévenu ait été en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée ; qu’il est établi en l’espèce que, cités à comparaître du chef de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail de plus de trois mois par la violation d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement sur le fondement de l’article 222-19 du code pénal, le tribunal a procédé à une requalification des faits dans le cadre de son délibéré, en condamnant les prévenus du chef de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois avec violation manifestement délibérée d’une obligation légale ou réglementaire de sécurité sur le fondement de l’article 222-20 du même code ; qu’il résulte des mentions du jugement comme des pièces de la procédure que la possibilité de cette requalification n’a pas été évoquée lors des débats à l’audience de sorte que ni le prévenu, ni la défense, n’ont été mis en mesure de s’expliquer sur la requalification, celle-ci ayant été opérée dans le secret du délibéré et découverte par les prévenus lors de la lecture du jugement dactylographié ; qu’en se bornant néanmoins à affirmer que la requalification opérée par le tribunal était dans le débat, alors même que les prévenus n’avaient pas été invités à se défendre sur cette nouvelle qualification, la cour d’appel a méconnu les articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l’homme et 388 du code de procédure pénale ainsi que le principe susvisé  » ;

Attendu que, pour écarter l’exception de nullité soulevée par les prévenus qui soutenaient qu’ils n’avaient pas été en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification de blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à trois mois par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en prononçant ainsi, et dès lors que la requalification effectuée par les premiers juges et sur laquelle les prévenus ont pu s’expliquer devant les juges du second degré, n’a opéré aucun changement des éléments constitutifs de l’infraction de blessures involontaires poursuivie, seule la durée de l’incapacité de travail étant en débat, la cour d’appel n’a méconnu aucun des textes visés au moyen ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trois juin deux mille quatorze ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

ECLI:FR:CCASS:2014:CR02303


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