Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 2 juillet 2012) que la societé Gartel (la société), copropriétaire, a assigné le syndicat des copropriétaires de la résidence Garabel (le syndicat) en remboursement de charges et payement de dommages-intérêts ; que le syndicat a formé une demande reconventionnelle en payement de charges arrêtées au 4ème trimestre 2009 ; que par jugement définitif du 27 octobre 2009, le tribunal a rejeté les demandes de la société et ordonné la réouverture des débats afin de permettre au syndicat de rectifier les comptes conformément à la clé de répartition des charges d’ascenseur ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu qu’ayant relevé que la société avait été déboutée de sa demande en remboursement de charges de gardiennage, d’électricité, d’eau et d’équipements contre l’incendie par le jugement du 27 octobre 2009, la cour d’appel a retenu, à bon droit, que la société ne saurait réitérer cette demande sous la forme d’une demande en payement de dommages-intérêts ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Mais, sur le premier moyen :
Vu l’article 1382 du code civil, ensemble l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Attendu que, pour infirmer le jugement entrepris et rejeter la demande en payement de dommages-intérêts de la société, l’arrêt retient que celle-ci ne saurait se voir allouer des dommages-intérêts en raison d’appels inexacts de charges d’ascenseurs ;
Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le syndicat n’avait pas engagé sa responsabilité pour défaut d’entretien des parties communes, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il rejette la demande en paiement de dommages-intérêts de la société, l’arrêt rendu le 2 juillet 2012, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Garabel 1 & 2 – 28 avenue du 19 Mars 1962 78370 Plaisir aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Garabel 1 & 2 – 28 avenue du 19 Mars 1962 78370 Plaisir à payer à la société Gartel la somme de 3 000 euros ; rejette la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence Garabel 1 & 2 – 28 avenue du 19 Mars 1962 78370 Plaisir ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille quatorze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Gartel
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR, en infirmant le jugement, rejeté les demandes indemnitaires formées par la SCI GARTEL à l’encontre du syndicat des copropriétaires de la résidence GARABEL 1 & 2 ;
AUX MOTIFS QUE « le syndic est tenu d’appliquer la répartition des charges telle que figurant au règlement de copropriété tant que la clause de répartition suivant les tantièmes n’a pas été remise en cause par une décision judiciaire ; qu’il résulte du règlement de copropriété que les millièmes de charges de copropriété incombant à la SCI GARTEL en ce qui concerne les ascenseurs sont de millièmes pour le bâtiment B ; que le règlement de copropriété place les charges relatives aux ascenseurs dans les parties communes générales de l’immeuble et non dans des parties communes spéciales ; que l’ensemble des copropriétaires, qu’ils soient du bâtiment A ou du bâtiment B, participent en fonction de leurs millièmes aux charges des ascenseurs des bâtiments A et B ; que c’est à bon droit que le syndicat des copropriétaires réclame à la SCI GARTEL la paiement de ses charges d’ascenseur sur la base de 1.297/5.044 millièmes et non de 1.237/5.044 millièmes, comme l’a énoncé à tort le jugement entrepris ; que, dans ces conditions, la SCI GARTEL ne saurait se voir allouer des dommages et intérêts en raison d’appel inexacts de ses charges d’ascenseurs » (arrêt pp. 5 et 6) ;
ALORS QUE le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation de l’immeuble et l’administration des parties communes ; qu’il est responsable des dommages causés aux copropriétaires par ses carences dans l’exercice de sa mission ; que, dans ses conclusions (pp. 13 à 18), la SCI GARTEL exposait qu’à défaut de prendre en compte, dans le calcul des charges lui incombant, les dépenses qu’elle avait été contrainte d’exposer pour assurer la conservation et l’entretien de l’ascenseur du bâtiment A, le syndicat des copropriétaires lui devait, en tout état de cause, réparation du préjudice qu’elle avait subi du fait de sa carence à assurer la conservation et l’entretien de cette partie commune de la copropriété et qui l’avait obligée à supporter financièrement seule ces dépenses ; qu’en se fondant, pour rejeter la demande indemnitaire de la SCI, sur des motifs inopérants tirés de ce que la SCI ne pouvait se voir allouer « des dommages et intérêts en raison d’appels inexacts de ses charges d’ascenseurs », sans rechercher, comme l’y invitait la SCI, si le syndicat des copropriétaires n’avait pas engagé sa responsabilité à son égard, du fait de ses carences fautives dans la gestion des parties communes, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil, ensemble l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR, en infirmant le jugement, rejeté les demandes indemnitaires formées par la SCI GARTEL à l’encontre du syndicat des copropriétaires de la résidence GARABEL 1 & 2 ;
AUX MOTIFS QUE « déboutée définitivement de sa demande en remboursement de charges de gardiennage, d’électricité, d’eau et d’équipements contre l’incendie, la SCI GARTEL ne saurait utilement réitérer cette demande sous la forme d’une demande de dommages et intérêts » (arrêt p. 6) ;
ALORS QUE l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement ; que, s’il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci, il ne peut néanmoins se voir opposer l’autorité de la chose jugée lorsque sa nouvelle demande présente un fondement juridique et un objet différents ; qu’en retenant, pour rejeter la demande indemnitaire de la SCI GARTEL, qu’elle avait été déboutée définitivement de sa demande en remboursement de charges de gardiennage, d’électricité, d’eau et d’équipements contre l’incendie, et ne pouvait donc réitérer cette demande sous la forme d’une demande de dommages et intérêts, quand la première demande de la SCI, rejetée par le jugement du 27 octobre 2009, invoquait une violation du règlement de copropriété par le syndicat des copropriétaires qui appelait, au titre des frais de gardiennage, d’électricité, d’eau et d’équipements contre l’incendie, des charges que la SCI estimait indues et qu’elle refusait de payer, tandis que la seconde demande était fondée sur la responsabilité du syndicat des copropriétaires, qui n’avait pas fait le nécessaire pour entretenir les parties communes du bâtiment A, et avait ainsi causé à la SCI GARTEL un préjudice dont elle demandait réparation, ce dont il résultait que les deux demandes avaient des fondements et des objets différents, et que l’autorité de la chose jugée sur la première demande ne pouvait être opposée à la SCI au titre de sa seconde demande, la cour d’appel a violé l’article 1351 du code civil.
ECLI:FR:CCASS:2014:C300380