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Toute commande de prestation logicielle devrait être matérialisée par un contrat sous peine de se retrouver dans un imbroglio juridique.
En l’espèce, il n’était justifié d’aucun contrat passé entre les sociétés Ubique et Domino’s Pizza quant à l’application d’une solution logicielle à l’ensemble des points de vente de l’enseigne.
En l’absence de tout engagement contractuel de la société Domino’s Pizza, aucun manquement n’a pu lui être reproché en lien avec l’accord donné sur l’estimation budgétaire d’une installation logicielle au sein de ses points de vente.
La société Ubique a recherché la responsabilité contractuelle de la société Domino’s Pizza, lui reprochant d’avoir manqué à ses obligations contractuelles en abandonnant sans motif le projet de mise en place du système de traçabilité alimentaire ‘Qualiboo’ dans ses laboratoires et points de vente.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que l’engagement pris par la société Domino’s Pizza portait sur la validation d’une ‘estimation budgétaire’ qui n’était que provisoire, le côut définitif dépendant du type de contrat choisi par le point de vente, auquel la facturation devait être adressée.
Contrairement à ce que soutient la société Ubique, il n’est pas possible de considérer que la société Domino’s Pizza a donné son accord sur le prix dès lors, d’une part que ce dernier dépend d’un choix sur une prestation essentielle d’assistance qui ne lui incombe pas, d’autre part que le prix doit être réglé, après choix d’un contrat, par le point de vente, étant observé qu’il n’est pas justifié ni même allégué que la société Domino’s Pizza ait reçu mandat des différents points de vente pour donner son accord sur le prix provisoire.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, il apparaît que l’estimation budgétaire ne correspondait qu’à un accord pré-contractuel sur un budget provisoire, sans qu’il en résulte un accord sur une chose (imprécise puisque le choix de l’assistance n’est pas défini) et sur un prix indéfini.
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D’APPEL DE VERSAILLES 12e chambre ARRET DU 29 SEPTEMBRE 2022 N° RG 22/00550 – N° Portalis DBV3-V-B7G-U7B5 AFFAIRE : S.A.S. DOMINO’S PIZZA FRANCE C/ SAS UBIQUE … Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Janvier 2022 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE N° Chambre : 4 N° RG : 2018F01081 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : à : Me Martine DUPUIS Me Anne-Laure DUMEAU RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LE VINGT NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX, La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre : S.A.S. DOMINO’S PIZZA FRANCE RCS Nanterre n° 421 415 803 [Adresse 2] Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 2267970 – Représentant : Me Sandrine RICHARD, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1820 APPELANTE **************** SAS UBIQUE venant aux droits de la Société ITAQUE consécutivement à la transmission universelle de patrimoine en date du 03 Mars 2020 RCS Nanterre n° 519 395 206 [Adresse 3] [Localité 4] S.E.L.A.R.L. FHB prise en la personne de Me [W] [V], ès-qualités de commissaire à l’exécution du plan de la société UBIQUE [Adresse 1] [Localité 5] S.C.P. B.T.S.G. prise en la personne de Maitre [D] [F], ès-qualités de mandataire judiciaire de la société UBIQUE [Adresse 1] [Localité 5] Représentant : Me Anne-laure DUMEAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 628 – N° du dossier 43009 Représentant : Me Virginie NEBOT, Plaidant, avocat au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 358 INTIMEES **************** Composition de la cour : En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 09 Juin 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique MULLER, Conseiller chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur François THOMAS, Président, Madame Véronique MULLER, Conseiller, Monsieur Patrice DUSAUSOY, Magistrat honoraire, Greffier f.f., lors des débats : Madame Patricia GERARD, EXPOSE DU LITIGE La société Itaque – devenue la société Ubique suite à une transmission universelle de patrimoine du 3 mars 2020 – est spécialisée dans la création, l’édition, la location et la commercialisation de logiciels de caisse et de traçabilité alimentaire. En 2012, la société Domino’s pizza France (ci-après la société Domino’s Pizza) a souhaité mettre en place un système d’information et de traçabilité alimentaire au sein de ses entrepôts logistiques. Les sociétés Itaque et Domino’s pizza se sont rapprochées afin d’entamer des négociations pour la mise en place du système de traçabilité alimentaire « Qualiboo ». En juillet et novembre 2012, la société Itaque a émis des estimations budgétaires sur lesquelles la société Domino’s Pizza a donné son accord. Le 12 décembre 2013, la société Itaque a adressé un devis à la société Domino’s pizza relatif au laboratoire de [Localité 6] portant sur l’installation du système « Qualiboo », suivi d’une facture d’acompte sur commande, pour un montant total de 12.510 euros hors taxes, soit 14.961,96 euros TTC. Cette facture a été réglée par la société Domino’s pizza. Le 9 avril 2014, la société Itaque a livré du matériel au laboratoire de [Localité 6]. A compter du mois de mai 2014, la société Domino’s pizza a cessé tout contact avec la société Itaque. Par courrier recommandé du 20 janvier 2015, la société Itaque a relancé la société Domino’s pizza afin d’obtenir les informations lui permettant d’exécuter ses prestations, s’étonnant de son silence depuis de nombreux mois. Par courrier recommandé du 20 novembre 2017, la société Itaque a adressé une mise en demeure à la société Domino’s pizza aux termes de laquelle elle lui demandait de lui faire part sans délai de ses intentions. Par acte du 7 juin 2018, la société Itaque a assigné la société Domino’s pizza devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de la voir condamnée à lui payer la somme de 1.776.246,40 euros à titre de dommages et intérêts du fait du manquement de la société Domino’s Pizza à ses obligations. Par jugement du 26 décembre 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a arrêté un plan de redressement judiciaire à l’égard de la société Itaque et a nommé : — la société FHB prise en la personne de M. [W] [V], ès qualités de commissaire à l’exécution du plan, — la société BTSG prise en la personne de M. [D] [F], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Ubique. Par jugement du 21 janvier 2022, le tribunal de commerce de Nanterre a : — Condamné la société Domino’s pizza à restituer à la société Ubique venant aux droits de la société Itaque les matériels suivants : — un AirPort Express 802.11 n Wi-Fi P/N : MP321Z/A Model A1264 et le câble secteur bipolaire EU 220V (50-16000-220) associé; — le câble secteur d’une des imprimantes Intermec PF8 // TT 203dpi ; — le pistolet filaire HERON-G D130 USB ; Ce, dans le mois suivant la signification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, pendant 3 mois, le tribunal se réservant la possibilité de liquider l’astreinte, déboutant la société Ubique du surplus de sa demande ; — Fixé la créance de la société Domino’s pizza au passif de la société Ubique à la somme de 7.665 euros ; — Débouté la société Ubique et ses représentants de leurs demandes au titre des laboratoires de [Localité 7] et [Localité 6] ; — Débouté la société Domino’s pizza de ses demandes de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive et d’amende civile ; Avant dire droit, — Nommé M. [D] [R], avec pour mission de : — Convoquer les parties, les entendre en leurs dires et explications ; — Se faire remettre toutes les pièces qu’il estimera nécessaires à l’accomplissement de sa mission ; — Entendre tous sachants ; — Sur la base de l’estimation budgétaire en date du 11 juillet 2012, sur laquelle la société Domino’s pizza a donné son accord le 25 septembre 2013, évaluer, pour 214 points de vente, sur une période de 36 mois (comprise entre le 25 septembre 2013 et le 25 septembre 2016), la marge d’exploitation (différence entre la chiffre d’affaires et l’ensemble des coûts fixes et variables relatifs au projet litigieux) perdue par la société Ubique venant aux droits de la société Itaque, à la suite de la non installation du système de traçabilité qualiboo ; — Fournir plus généralement tous renseignements utiles qui permettront à la juridiction du fond qui sera ultérieurement saisie de statuer ; — Autorisé l’expert à s’adjoindre le concours de tout sapiteur intervenant dans une spécialité distincte de la sienne ; — Dit que l’expert, en concertation avec les parties, définira un calendrier prévisionnel de ses opérations à l’issue de sa première réunion d’expertise ; — Dit que l’expert, préalablement au dépôt de son rapport définitif, devra rédiger et adresser aux parties une note de synthèse en laissant à celles-ci un délai d’au moins un mois pour y répondre et établir leurs dires récapitulatifs auxquels l’expert répondra, le cas échéant, dans son rapport final ; — Fixé à 3.000 euros la provision à consigner par société Ubique venant aux droits de la société Itaque, dans le mois du prononcé de la présente ordonnance (sic), au greffe de ce tribunal, faute de quoi la désignation de l’expert sera caduque ; — Dit que l’expert pourra, s’il estime la provision insuffisante, présenter dans un délai de deux mois, à compter de la consignation, une estimation de ses frais et rémunération, permettant au tribunal d’ordonner éventuellement le versement d’une provision complémentaire ; — Dit que, si les parties ne viennent pas à composition, le rapport de l’expert devra être déposé au greffe de ce tribunal dans un délai de six mois à compter de la consignation de la provision et, dans l’attente de ce dépôt, inscrit l’affaire au rôle des mesures d’instruction; — Dit que le contrôle de l’expertise sera effectué par le juge chargé du contrôle des mesures d’instruction ; — Sursis à statuer sur le quantum du préjudice relatif aux points de vente ; — Dit qu’il appartiendra à la partie la plus diligente de faire rétablir l’instance par le dépôt de conclusions en ouverture de rapport d’expertise ; — Réservé les frais et dépens ; — Ordonné l’exécution provisoire. Par déclaration du 27 janvier 2022, la société Domino’s pizza a interjeté appel du jugement. PRÉTENTIONS DES PARTIES Par dernières conclusions notifiées le 8 juin 2022, la société Domino’s pizza France demande à la cour de : — Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre en ce qu’il a : — Fixé la créance de la société Domino’s pizza au passif de la société Ubique à la somme de 7.665 euros ; — Débouté la société Ubique et ses représentants de leurs demandes au titre des laboratoires de [Localité 7] et [Localité 6] ; — Infirmer le jugement en ce qu’il a : — Condamné la société Domino’s pizza à restituer à la société Ubique venant aux droits de la société Itaque les matériels suivants : — un AirPort Express 802.11 n Wi-Fi P/N : MP321Z/A Model A1264 et le câble secteur bipolaire EU 220V (50-16000-220) associé; — le câble secteur d’une des imprimantes Intermec PF8 // TT 203dpi ; — le pistolet filaire HERON-G D130 USB ; Ce, dans le mois suivant la signification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, pendant 3 mois, le tribunal se réservant la possibilité de liquider l’astreinte, déboutant la société Ubique du surplus de sa demande ; — Débouté la société Domino’s pizza de ses demandes de dommages et intérêts au titre de la procédure abusive et d’amende civile ; Avant dire droit, — Nommé M. [D] [R], Avec pour mission de (….: mission rappelée plus avant) — Sursis à statuer sur le quantum du préjudice relatif aux points de vente ; — Dit qu’il appartiendra à la partie la plus diligente de faire rétablir l’instance par le dépôt de conclusions en ouverture de rapport d’expertise ; — Réservé les frais et dépens ; — Ordonné l’exécution provisoire ; Statuant à nouveau, A titre principal, — Déclarer la société Domino’s pizza recevable et bien fondée en l’ensemble de ses demandes, fins, et prétentions ; — Débouter la société Ubique, la société FHB, prise en la personne de M. [W] [V], en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan des sociétés Itaque et Ubique ainsi que la société B.T.S.G., prise en la personne de M. [D] [F], en sa qualité d’administrateur judiciaire des sociétés Itaque et Ubique de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ; — Juger n’y avoir lieu à expertise ; — Condamner la société Ubique, au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de la procédure abusive ; — Condamner la société Ubique à payer la somme de 3.000 euros au titre d’une amende civile au titre de la procédure abusive; A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour retenait, en dépit de l’absence de préjudice certain subi par la société Ubique, qu’une indemnisation doit intervenir : — Juger n’y avoir lieu à expertise ; — Juger que l’indemnisation ne pourra qu’être limitée au nombre de points de vente succursales Domino’s pizza existant au jour des discussions, et non au nombre de points de vente exploités par ses franchisés, qui sont des commerçants indépendants auxquels la société Domino’s pizza n’aurait pas pu imposer le prestataire la société Itaque ; En tout état de cause, — Condamner la société Ubique à payer à la société Domino’s pizza la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance. Par dernières conclusions notifiées le 8 juin 2022, la société Ubique, venant aux droits de la société Itaque, la société FHB prise en la personne de M. [W] [V], ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de la société Ubique, et la société BTSG prise en la personne de M. [D] [F], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Ubique, demandent à la cour de : — Confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a : — Retenu que la société Domino’s pizza avait commis une faute en lien de causalité avec le préjudice subi par la société Itaque au droit de laquelle vient la société Ubique ; En tant que de besoin, — Juger que la société Domino’s pizza a commis une faute en lien de causalité avec le préjudice subi par la société Itaque au droit de laquelle vient la société Ubique ; — Condamné la société Domino’s pizza à restituer à la société Ubique les matériels suivants, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, pendant 3 mois : — un AirPort Express 802.11 n Wi-Fi P/N : MP321Z/A Model A1264 et le câble secteur bipolaire EU 220V (50-16000-220) associé ; — le câble secteur d’une des imprimantes Intermec PF8 // TT 203dpi ; — le pistolet filaire HERON-G D130 USB ; A défaut de restitution en nature, condamner la société Domino’s Pizza à régler la somme de 414,86 euros correspondant à la valeur dudit matériel et à récupérer à ses frais le matériel livré, — Débouté la société Domino’s pizza de ses demandes de dommages et intérêts et d’amende civile ; Accueillant l’appel incident de la société Ubique, — Infirmer la décision rendue en ce qu’elle a fixé au passif de la société Ubique la somme de 7.665 euros la créance de la société Domino’s pizza et rejet des demandes reconventionnelles (sic) ; Statuant à nouveau, — Débouter la société Domino’s pizza de l’intégralité de ses demandes à ce titre ; — Condamner la société Domino’s pizza à payer à la société Ubique la somme de 1.776.246,40 euros à titre de dommages et intérêts ; Subsidiairement, — Confirmer la décision en ce qu’elle a ordonné une expertise judiciaire et surseoir à statuer sur le montant du préjudice dans l’attente du dépôt du rapport ; En tout état de cause, — Condamner la société Domino’s pizza à régler à la société Ubique la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; — Condamner la société Domino’s pizza paiement des entiers dépens. Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile. MOTIFS DE LA DÉCISION La société Ubique recherche la responsabilité contractuelle de la société Domino’s Pizza, lui reprochant d’avoir manqué à ses obligations contractuelles en abandonnant sans motif le projet de mise en place du système de traçabilité alimentaire ‘Qualiboo’ dans ses laboratoires et points de vente. La société Domino’s Pizza soutient pour sa part, qu’hormis le devis accepté concernant le site de [Localité 6], elle n’a conclu aucun contrat avec la société Ubique, de sorte qu’elle était libre de ne pas poursuivre le projet envisagé. Elle fait valoir que les autres documents signés correspondent à de simples estimations budgétaires qui ne contiennent aucun engagement de sa part. Avant de s’interroger sur l’éventuel manquement de la société Domino’s Pizza à ses obligations contractuelles, et dès lors que l’existence même d’un tel contrat est contestée, il convient de s’interroger sur la nature des relations entre les deux sociétés. 1 – sur la nature des relations entre les sociétés Domino’s Pizza et Ubique La société Ubique soutient que les négociations ont abouti à la signature de trois propositions qui ont été acceptées par la société Domino’s Pizza, ces acceptations emportant conclusion d’un accord sur la chose et sur le prix, de sorte que les documents signés, à savoir les ‘estimations budgétaires’, constituent bien des contrats de vente et prestations de services. Elle fait valoir que le projet portait bien sur une installation dans tous les points de vente de la société Domino’s Pizza, de sorte que sa délimitation était tout à fait précise. Elle affirme qu’un franchiseur peut tout à fait imposer un prestataire à ses franchisés, de sorte qu’il est évident que la société Domino’s Pizza a contracté avec la société Ubique pour l’ensemble de son réseau. Elle ajoute que la société Domino’s Pizza n’a jamais résilié les contrats de sorte qu’en mettant unilatéralement un terme à ses engagements, elle a commis une faute. La société Domino’s Pizza soutient que les documents qu’elle a signés ne contiennent aucun engagement de sa part pour l’installation de la solution Qualiboo, dès lors qu’il n’existe pas d’accord sur les éléments essentiels du contrat envisagé, et que les indications tarifaires ne sont qu’estimatives, ce qui ne constitue pas un accord sur un prix définitif. Elle fait valoir que l’estimation budgétaire relative à ‘l’enseigne Domino’s Pizza’ ne porte en réalité que sur le ‘site pilote de [Localité 7]’ (devenu le site de [Localité 6]), et qu’elle ne prévoyait un déploiement de la solution que de manière hypothétique si le test sur ce laboratoire se révélait satisfaisant. Elle soutient que les parties envisageaient uniquement un test, sans autre engagement, ce qui ressort de la mention ‘le cas échéant’. S’agissant de l’estimation budgétaire relative aux ‘points de vente’, elle fait valoir que ce document est très imprécis et qu’il ne vise pas les éléments essentiels d’un contrat, dès lors qu’il ne liste pas les points de vente concernés, qu’il n’a jamais été question d’un chiffrage de près de 2 millions d’euros, et que la durée de l’engagement n’est pas précisée. Elle soutient qu’aucun accord ne pouvait intervenir tant que le test sur le laboratoire pilote n’était pas réalisé, et que sa décision finale n’était pas prise. Elle relève différentes mentions des documents qui mettent en évidence le caractère incertain de son engagement final. Elle rappelle enfin que ses franchisés sont des commerçants indépendants et qu’elle pouvait uniquement leur proposer la solution Qualiboo, à charge pour eux de contracter directement avec la société Ubique s’ils le souhaitaient. ***** Les documents signés entre les parties sont les suivants : — document intitulé ‘estimation budgétaire traçabilité pour points de vente Domino’s Pizza’, daté du 11 juillet 2012, signé le 25 septembre 2013 par la société Domino’s Pizza, avec la mention manuscrite ‘bon pour accord’, — document intitulé ‘estimation budgétaire traçabilité pour l’enseigne Domino’s Pizza’, daté du 9 novembre 2012, signé le 25 septembre 2013 par la société Domino’s Pizza, avec la mention manuscrite ‘bon pour accord’, — document intitulé ‘estimation budgétaire traçabilité laboratoire de [Localité 6] Domino’s Pizza’, non daté, signé le 8 novembre 2013 par la société Domino’s Pizza, avec la mention manuscrite ‘bon pour accord’. A la suite de cette dernière estimation, la société Ubique a établi un devis le 12 décembre 2013 d’un montant de 29.923,92 euros, sur lequel la société Domino’s Pizza a réglé un acompte de 14.961,96 euros (soit 12.510 euros HT). Les parties s’accordent pour dire que le projet de traçabilité Qualiboo portait sur une installation, d’une part dans les deux laboratoires Domino’s Pizza situés à [Localité 6] et [Localité 7] (objet de l’estimation intitulée ‘enseigne Dominos’Pizza’), d’autre part dans les différents points de vente. Il ressort ainsi des documents précités que la société Ubique a établi trois estimations budgétaires, la première concernant les ‘points de vente’, la seconde intitulée ‘enseigne Domino’s Pizza’ concernant les laboratoires, et la troisième concernant plus particulièrement le laboratoire de [Localité 6]. 1-1- sur l’estimation budgétaire traçabilité pour points de vente Domino’s Pizza’, datée du 11 juillet 2012 Cette ‘estimation budgétaire’ comporte en deuxième page un courrier explicatif de la société Ubique précisant notamment l’intérêt d’équiper les points de vente Domino’s Pizza avec le système Qualiboo. Il est mentionné : ‘ce chaînage ”de l’arborescence traçabilité” s’effectue par un portail WEB auquel s’abonnent les points de vente (accès permanent accordé aux sites de production et à la direction d’enseigne). L’abonnement comprend la plateforme logicielle en liaison avec les sites de production et le siège ainsi qu’un dispositif sans fil de pointage codes à barre. Cet abonnement mensuel (accès SAS) est facturé 260 euros HT aux points de vente et intègre la mise en place, l’assistance et la programmation complète de la solution. (…). je reste à votre entière disposition pour toute question ou tout point complémentaire à aborder dans le cadre du projet.’ (Souligné par la cour) Il est notamment précisé dans les pages suivantes : — la solution matérielle proposée (à savoir une connexion internet vers l’application Qualiboo, une douchette sans fil connectée à l’ordinateur, une liaison internet déjà existante), — les étapes de mise en oeuvre, — les prestations d’assistance : il est précisé : ‘ ces prestations d’assistance peuvent être incorporées dans deux types de contrats : intervention à J+2, intervention à J+1 (si demande d’intervention effectuée avant 12 heures). En option, il existe les extensions suivantes possibles: accès à l’assistance 7/7 8 h/19h ou 7/7 8 h/21h.’ (Souligné par la cour) Ainsi que le relève la société Domino’s Pizza, cette estimation est assez imprécise, notamment en ce qu’il n’est fait aucune référence aux points de vente concernés, et que la durée de l’engagement n’est pas précisée. Il résulte de cette estimation que l’accord donné par la société Domino’s Pizza porte, pour l’essentiel, sur une prestation de services incluant un accès à un logiciel avec ‘mise en place, programmation complète et assistance’, outre la vente du dispositif de pointage de codes barre. La cour relève que parmi les prestations ‘mise en place, programmation complète et assistance’, les deux premières sont réalisées une seule fois au démarrage, tandis que la prestation assistance a vocation à durer dans le temps. Force est toutefois de constater que cette prestation qui constitue ainsi un des éléments essentiels du contrat n’est pas définie puisqu’il est renvoyé à un choix entre deux types de contrat, à savoir soit une intervention à J+2, soit une intervention à J+1, outre les possibilités d’option, de sorte que l’on ignore au final quel serait le prix définitif des prestations. En outre et surtout, il est précisé que ce sont les points de vente qui s’abonnent directement, l’abonnement mensuel (accès SAS) étant facturé 260 euros HT ‘aux points de vente’ et non pas à la société Domino’s Pizza. Il résulte de l’ensemble de ces éléments que l’engagement pris par la société Domino’s Pizza portait sur la validation d’une ‘estimation budgétaire’ qui n’était que provisoire, le côut définitif dépendant du type de contrat choisi par le point de vente, auquel la facturation devait être adressée. Contrairement à ce que soutient la société Ubique, il n’est pas possible de considérer que la société Domino’s Pizza a donné son accord sur le prix dès lors, d’une part que ce dernier dépend d’un choix sur une prestation essentielle d’assistance qui ne lui incombe pas, d’autre part que le prix doit être réglé, après choix d’un contrat, par le point de vente, étant observé qu’il n’est pas justifié ni même allégué que la société Domino’s Pizza ait reçu mandat des différents points de vente pour donner son accord sur le prix provisoire. Au regard de l’ensemble de ces éléments, il apparaît que l’estimation budgétaire ne correspondait qu’à un accord pré-contractuel sur un budget provisoire, sans qu’il en résulte un accord sur une chose (imprécise puisque le choix de l’assistance n’est pas défini) et sur un prix indéfini. Il n’est donc justifié d’aucun contrat passé entre les sociétés Ubique et Domino’s Pizza quant à l’application de la solution à l’ensemble des points de vente. En l’absence de tout engagement contractuel de la société Domino’s Pizza, aucun manquement ne peut lui être reproché en lien avec l’accord donné sur l’estimation budgétaire relative aux points de vente. La société Ubique sera déboutée des demandes formées à ce titre, notamment en réparation de son préjudice qu’elle évalue à 1.751.119,20 euros, le jugement étant donc infirmé en ce qu’il a considéré que la société Dominos’s Pizza avait manqué à ses obligations à ce titre, et ordonné une expertise quant au préjudice allégué par la société Ubique. 1-2- sur l”estimation budgétaire traçabilité pour l’enseigne Domino’s Pizza’, datée du 9 novembre 2012, et l”estimation budgétaire traçabilité ‘laboratoire de [Localité 6]’ L’ ‘estimation budgétaire pour l’enseigne Domino’s Pizza’ comporte en deuxième page un courrier explicatif de la société Ubique précisant notamment : ‘l’objectif principal que nous avons redéfini ensemble est de permettre à Navision d’intégrer les données de Qualiboo afin de former un ERP bénéficiant des informations produits les plus détaillées qui soient. C’est à dire que Qualiboo devient le module arborescence de traçabilité amont et aval de Navision. Cette intégration requiert des développements spécifiques que nous vous détaillons au chapitre 2. Ces développements sont requis pour la phase de tests et coûtent 14.500 euros en temps homme/machine. Ce coût est déductible du projet global. (…) Enfin, et à titre indicatif, vous trouverez à la suite de la documentation produit un macro planning vous permettant d’intégrer les délais prévisionnels d’installation pour chaque site que vous projetteriez d’intégrer au projet, dont le site qui remplacera l’actuel atelier de [Localité 7]. Ces éléments doivent permettre de définir le contexte d’une future mise en production sur le site pilote de [Localité 7] afin de valider le bon fonctionnement des éléments présentés et le cas échéant de déployer cette solution sur les exploitations Domino’s Pizza concernées par le projet.’ (Souligné par la cour) La cour rappelle ici que cette estimation ‘enseigne Domino’s Pizza’ concerne en réalité les deux laboratoires de [Localité 7] et [Localité 6]. Il résulte du courrier précité, et des documents contenus dans l’estimation, que la société Domino’s Pizza disposait déjà d’un logiciel intitulé Navision (contenant des informations sur les produits, les fournisseurs, les préparations et les stocks) et que le nouveau logiciel Qualiboo devait être ‘intégré’ au système ancien Navision, ce qui nécessitait des développements spécifiques et une phase de test. C’est dans ces conditions que les parties ont évoqué une : ‘future mise en production sur le site pilote de [Localité 7] afin de valider le bon fonctionnement des éléments présentés et le cas échéant de déployer cette solution sur les exploitations Domino’s Pizza concernées par le projet.’ Ainsi que le soutient la société Domino’s Pizza, l’accord donné sur l’estimation budgétaire ne portait pas sur un projet ferme et définitif, mais au contraire sur une mise en production sur un site pilote, et le cas échéant sur un déploiement de la solution sur les autres exploitations Domino’s Pizza. L’engagement pris par la société Domino’s Pizza dans l”estimation budgétaire’ devait donc se décliner en deux temps, en premier lieu l’engagement relatif au site pilote, et en second lieu, après validation du bon fonctionnement des éléments présentés, le déploiement, le cas échéant de la solution sur les autres exploitations Domino’s Pizza. C’est dans ces conditions que la société Ubique a établi l’estimation budgétaire complémentaire intitulée ‘laboratoire de [Localité 6]’ (en lieu et place du laboratoire de [Localité 7]). La cour observe que le budget prévisionnel figurant dans cette estimation ‘laboratoire de [Localité 6]’ est strictement identique au budget inclus dans l’estimation ‘enseigne Domino’s Pizza’. A la suite des deux estimations budgétaires, l’une pour l ‘enseigne Domino’s Pizza’, l’autre pour ‘laboratoire de [Localité 6]’, la société Ubique a établi un devis, le 12 décembre 2013, pour le laboratoire de Nantes, pour un montant global de 29.923,92 euros (devis accepté par la société Domino’s Pizza, par le versement d’un acompte de 14.961,96 euros). Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société Domino’s Pizza s’est engagée, de manière ferme, sur la mise en place de la solution Qualiboo sur le laboratoire de [Localité 6], et de manière conditionnelle, après validation du bon fonctionnement, sur le second laboratoire et les autres exploitations Domino’s Pizza (dont les points de vente qui ne pouvaient être équipés que si le bon fonctionnement du site pilote était validé, et à la condition supplémentaire que les points de vente s’abonnent au système). La société Domino’s Pizza a donc bien conclu un contrat portant sur l’installation de la solution Qualiboo sur un laboratoire ([Localité 6]), et elle s’est également engagée, de manière conditionnelle, pour l’installation du second laboratoire et des autres exploitations. 2 – sur le manquement de la société Domino’s Pizza à ses obligations contractuelles, s’agissant de la rupture du contrat portant sur l’installation des laboratoires Après signature du devis du 12 décembre 2013 (laboratoire de [Localité 6]), les parties se sont rencontrées le 27 janvier 2014, puis la société Ubique a livré du matériel le 9 avril 2014. Considérant qu’il s’agissait ‘vraisemblablement’ d’une erreur, la société Domino’s Pizza a souhaité restituer ce matériel à la société Ubique, ce que celle-ci a refusé, indiquant que ce matériel correspondait au contraire ‘aux accords commerciaux intervenus’, ajoutant qu’elle restait ‘dans l’attente du planning de déploiement des équipes.’ (Courriel du 16 avril 2014). Les courriels ultérieurs adressés par la société Ubique à la société Domino’s Pizza sont restés sans réponse, et cette dernière a cessé tout contact avec la société Ubique. Pour justifier de la cessation de toute relation contractuelle, la société Domino’s Pizza soutient que la société Ubique n’a effectué aucune prestation. Il est inexact de prétendre que la société Ubique n’a réalisé aucune prestation dès lors qu’elle a livré à la société Domino’s Pizza certains matériels que celle-ci a réceptionnés, avant de proposer leur restitution. Force est ainsi de constater que la société Ubique a commencé l’exécution de sa prestation et que ce n’est que du fait de la société Domino’s Pizza qui ne répondait à aucune de ses demandes (plusieurs courriels de mai à septembre 2014), qu’elle s’est trouvée dans l’impossibilité d’exécuter le contrat. Dès lors qu’elle avait signé le contrat relatif au laboratoire de [Localité 6] et s’était engagée, au moins de manière conditionnelle, sur le laboratoire de [Localité 7], la société Domino’s Pizza était liée par le contrat qu’elle devait exécuter jusqu’à son terme, notamment en laissant la société Ubique installer la solution Qualiboo, et en payant les prestations commandées. En tentant de restituer le matériel qu’elle avait cependant commandé, et en s’abstenant de répondre aux relances de la société Ubique pour l’installation de la solution Qualiboo dans les laboratoire de [Localité 6] et [Localité 7], la société Domino’s Pizza a fait obstacle à l’exécution des contrats et manqué à ses obligations contractuelles. La cour dira dès lors que la société Domino’s Pizza a commis une faute en faisant obstacle à l’exécution les contrats souscrits les 25 septembre 2013 (estimation budgétaire traçabilité pour l’enseigne Domino’s Pizza) et 12 décembre 2013 (devis laboratoire de [Localité 6]). 3 – sur la réparation du préjudice subi par la société Qualiboo du fait du manquement de la société Domino’s Pizza aux obligations contractuelles résultant des estimations budgétaires ‘enseigne Domino’s’ et ‘laboratoire de [Localité 6]’ La société Ubique sollicite réparation de son préjudice du fait du manquement de la société Domino’s Pizza à ses obligations contractuelles. Elle sollicite à ce titre, d’une part la confirmation du jugement en ce qu’il a ordonné la restitution du matériel livré, d’autre part réparation de son préjudice constitué de la perte de marge brute qu’elle aurait obtenue sur les deux laboratoires si la société Domino’s Pizza n’avait pas rompu le contrat de manière fautive. Elle sollicite en outre l’infirmation du jugement qui a fixé la créance de la société Domino’s Pizza à la somme de 7.665 euros. La société Domino’s Pizza s’oppose à ces demandes. Elle soutient en premier lieu qu’elle a bien restitué le matériel qui lui avait été livré. Elle sollicite ensuite la confirmation du jugement en ce qu’il a fixé sa créance au passif du redressement de la société Ubique à la somme de 7.665 euros correspondant à des sommes indûment perçues (acompte réglé, après déduction du matériel livré). Elle soutient enfin que la société Ubique ne rapporte pas la preuve d’un quelconque préjudice en lien de causalité avec la prétendue faute qui lui est reprochée. Elle rappelle, d’une part n’avoir signé de devis que pour un laboratoire, d’autre part qu’aucune prestation n’a jamais été réalisée par la société Ubique. 3-1- sur la demande de restitution du matériel La société Domino’s Pizza soutient avoir restitué le matériel le 30 juillet 2019 ainsi que cela ressort d’un courriel du transporteur attestant de cette livraison. Il n’est toutefois justifié d’aucun bordereau de livraison signé de la société Ubique, de sorte que ce document ne permet pas de rapporter la preuve de la restitution, ce d’autant plus que la société Domino’s Pizza indique avoir ensuite acquis du matériel identique pour satisfaire à l’injonction de restitution prononcée par le tribunal de commerce, et l’avoir fait livrer à la société Ubique. La société Ubique soutient toutefois que les éléments finalement restitués en mai 2022 ne correspondent pas aux modèles livrés en mars 2014. Contrairement à ce qu’elle soutient, la société Domino’s Pizza ne justifie pas de l’achat des nouveaux matériels, ni qu’ils correspondent aux modèles initialement livrés par la société Ubique, ainsi que mentionnés sur le bon de livraison établi par cette société le 27 mars 2014. Il est ainsi établi que la société Domino’s Pizza n’a pas restitué le matériel qui lui avait été livré en mars 2014. Elle soutient que ce dernier n’est toutefois plus en sa possession, de sorte qu’il convient d’ordonner une restitution en valeur, la société Ubique justifiant de celle-ci à hauteur de 414,86 euros. La société Domino’s Pizza sera donc condamnée au paiement de cette somme. Le jugement sera infirmé en ce qu’il a ordonné la restitution du matériel. 3-2- sur la demande indemnitaire formée par la société Ubique La société Ubique sollicite réparation de son préjudice constitué de la perte de marge brute qu’elle aurait obtenue si elle avait procédé à l’installation de la solution Qualiboo dans les deux laboratoires comme cela était prévu au contrat. Elle calcule la perte de marge brute à partir du montant prévu au contrat, duquel elle déduit l’achat de matériel et 10% de marge sur le poste maintenance. Elle soutient que c’est bien l’inexécution fautive du contrat par la société Domino’s Pizza qui l’a privée de la possibilité d’obtenir cette marge. Elle sollicite à ce titre paiement de la somme de 20.213,10 euros pour le laboratoire de [Localité 7], et la somme de 4.914,10 euros pour le laboratoire de [Localité 6] (après déduction de l’acompte déjà versé). La société Domino’s Pizza s’oppose à cette demande, faisant observer que les pièces comptables ne sont pas signées, que les frais invoqués ne sont pas justifiés, que les bons de commandes et factures ne correspondent pas. Elle rappelle en outre, d’une part n’avoir signé de devis que pour un seul laboratoire, d’autre part qu’aucune prestation n’a jamais été réalisée par la société Ubique. Elle indique enfin que le calcul de marge brute est infondé et incohérent,critiquant l’attestation d’expert comptable produite à ce titre. *** Il convient en premier lieu de rappeler que deux contrats ont été conclus, l’un définitif (installation du site pilote du laboratoire de [Localité 6]), l’autre conditionnel (laboratoire de [Localité 7]). En faisant obstacle à l’exécution des contrats qu’elle avait cependant souscrits, la société Domino’s Pizza a empêché la société Ubique de percevoir le prix fixé, caractérisant ainsi son préjudice (limité à la perte de marge) en lien de causalité avec la faute imputée à la société Domino’s Pizza. Toutefois, s’agissant du laboratoire de [Localité 7], et au regard du caractère conditionnel de l’obligation de la société Domino’s Pizza à cet égard, le préjudice s’analyse nécessairement en une perte de chance pour la société Ubique de pouvoir réaliser une marge. Il n’en reste pas moins que la rupture fautive du contrat est bien en lien de causalité directe avec cette perte de chance de pouvoir réaliser une marge. * sur le préjudice subi par la société Ubique s’agissant du laboratoire de [Localité 6] La société Ubique fait valoir que sa perte de marge brute s’élève, pour le laboratoire de [Localité 6], à la somme de 17.414,10 euros, dont elle accepte de déduire le montant de l’acompte versé par la société Domino’s Pizza à hauteur de 12.510 euros, de sorte qu’elle sollicite paiement d’une somme de 4.914,10 euros (en réalité 4.904,10 euros suite à une erreur de calcul). Pour aboutir à cette somme, la société Ubique reprend le montant HT du devis, soit 25.020 euros, dont elle déduit la somme de 5.671 euros au titre des achats de matériel, et la somme de 1.934,90 euros au titre de la marge affectée à la maintenance. La marge brute correspond à la différence entre le chiffre d’affaires global et les coûts liés directement à la réalisation du produit ou de la prestation. Ainsi que le fait observer la société Domino’s Pizza, il est dès lors peu compréhensible de calculer la marge sur certains postes seulement (matériel et maintenance) alors même que les autres postes (logiciels, formation) génèrent également des coûts. L’attestation de l’expert comptable produite aux débats, particulièrement imprécise, n’apporte aucun élément de réponse sur ce point. Si l’on devait suivre le calcul opéré par la société Ubique, cela aboutirait à retenir un taux de marge brute de près de 70% (17.414 euros de marge sur un chiffre d’affaires de 25.020 euros) ce qui n’est pas explicité, et n’apparaît pas réaliste. La cour évaluera donc le taux de marge de la société Ubique à 50%, de sorte que la marge brute perdue, du fait des manquements contractuels de la société Domino’s Pizza, peut être évaluée à 12.510 euros. Le préjudice de la société Ubique sur le site de [Localité 6] peut ainsi être évalué à 12.510 euros. Tenant compte du fait que la société Domino’s Pizza a déjà réglé cette somme au titre de l’acompte, la cour dira que la somme de 12.510 euros ainsi versée à titre d’acompte restera acquise à la société Ubique en réparation du préjudice subi. * sur le préjudice subi par la société Ubique s’agissant du laboratoire de [Localité 7] La société Ubique fait valoir que sa perte de marge brute s’élève, pour le laboratoire de [Localité 7], à la somme de 20.213,10 euros, dont elle sollicite paiement. Pour aboutir à cette somme, la société Ubique reprend le montant de l’estimation budgétaire, soit 29.260 euros, dont elle déduit la somme de 6.801 euros au titre des achats de matériel, et la somme de 2.245,90 euros au titre de la marge affectée à la maintenance. Ainsi qu’il a été vu plus avant le taux de marge appliqué par la société Ubique est inexpliqué et irréaliste, de sorte qu’il convient d’appliquer un taux de marge de 50%, la marge brute perdue pouvant ainsi être évaluée à 14.630 euros. Au regard du caractère conditionnel du contrat sur le laboratoire de [Localité 7] dont l’exécution supposait la validation des tests préalables sur le laboratoire de [Localité 6], il convient de retenir, pour la société Ubique une perte de chance de pouvoir bénéficier de sa marge brute à hauteur de 50%, soit un préjudice évalué à 7.315 euros. La société Domino’s Pizza sera donc condamnée au paiement de cette somme en réparation du préjudice subi par la société Ubique du fait des manquements de la société Domino’s Pizza. Le jugement sera infirmé de ce chef. 3-3- sur la demande de fixation de créance au passif de la société Ubique La société Domino’s Pizza sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a considéré que la société Ubique n’avait pas effectué la prestation sur le site de [Localité 6] alors même qu’elle avait reçu paiement d’un acompte de 12.510 euros, ce paiement constituant un paiement indû devant être restitué à la société Domino’s Pizza après déduction du matériel à hauteur de 50%, aboutissant ainsi à un paiement indû de 7.665 euros. Le tribunal a ainsi fixé la créance de la société Domino’s Pizza au passif du redressement de la société Ubique, à hauteur de cette somme. La société Ubique sollicite l’infirmation du jugement sur ce point, dès lors que la société Domino’s Pizza l’a placée dans l’impossibilité d’exécuter ses prestations et que la rupture du contrat lui est imputable. Il a déjà été tenu compte, plus avant, de la somme de 12.510 euros correspondant à l’acompte versé par la société Domino’s Pizza, ce qui a fait l’objet d’une compensation avec le préjudice subi par la société Ubique, de sorte qu’il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de fixation de créance, le jugement étant infirmé de ce chef. 4 – sur la demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive Dès lors qu’il est fait droit, même partiellement, aux demandes formées par la société Ubique, la procédure qu’elle a intentée ne peut être qualifiée d’abusive, de sorte que les demandes formées à ce titre par la société Domino’s Pizza seront rejetées. 5 – Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile : Le jugement sera infirmé en ce qu’il a réservé les frais et dépens. La société Domino’s Pizza qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel. Il est équitable d’allouer à la société Ubique une indemnité de procédure de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel. PAR CES MOTIFS La cour, statuant par arrêt contradictoire, Infirme, en toutes ses dispositions, le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 21 janvier 2022, Et statuant à nouveau, Dit que la société Domino’s Pizza a commis une faute en faisant obstacle à l’exécution des contrats souscrits les 25 septembre 2013 (estimation budgétaire traçabilité pour l’enseigne Domino’s Pizza) et 12 décembre 2013 (devis laboratoire de [Localité 6]), Condamne la société Domino’s Pizza à payer à la société Ubique la somme de 414,86 euros correspondant à la valeur du matériel non restitué, Dit que la somme de 12.510 euros versée par la société Domino’s Pizza à la société Ubique, à titre d’acompte pour le laboratoire de [Localité 6], lui restera acquise en réparation du préjudice subi du fait des manquements de la société Domino’s Pizza à ses obligations au titre de ce laboratoire, Condamne la société Domino’s Pizza à payer à la société Ubique la somme de 7.315 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait des manquements de la société Domino’s Pizza à ses obligations au titre du laboratoire de [Localité 7], Rejette toutes autres demandes, Condamne la société Domino’s Pizza à payer à la société Ubique la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, Condamne la société Domino’s Pizza aux dépens de première instance et d’appel. Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Le greffier Le président, | |