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Texte intégral
La Commission constitutionnelle provisoire,
Vu les articles 59 et 91 de la Constitution ;
Vu l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu l’ordonnance du 13 octobre 1958 relative à l’élection des députés à l’Assemblée nationale ;
Vu le décret n° 58-1021 du 30 octobre 1958 ;
Vu la requête présentée pour le sieur Lafay (Bernard), demeurant à Paris, 123, rue de Longchamp, ladite requête enregistrée le 10 décembre 1958 au secrétariat de la Commission constitutionnelle provisoire et tendant à ce qu’il plaise à la Commission statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé les 23 et 30 novembre 1958, dans la 23e circonscription du département de la Seine, pour la désignation d’un député à l’Assemblée nationale ;
Vu les observations en défense présentées par le sieur Vaschetti, député, lesdites observations enregistrées le 23 décembre 1958 au secrétariat de la Commission ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Ouï le rapporteur en son rapport ;
Sur les griefs tirés des irrégularités constatées dans les procédés de propagande électorale :
1. Considérant qu’il résulte de l’instruction que plusieurs des candidats en présence ont procédé, dans l’ensemble de la circonscription, à l’apposition de nombreuses affiches de propagande électorale en, dehors des panneaux réglementairement affectés à cet usage ; que certaines des affiches du sieur Lafay ont été lacérées ou recouvertes par des affiches d’autres candidats ; que ces faits constituent tant des violations des prescriptions de l’article 17 de l’ordonnance du 13 octobre 1958 et du décret du 30 octobre 1958 que des agissements tendant à gêner la propagande électorale du requérant ;
2. Mais, Considérant qu’il résulte également de l’instruction que le sieur Lafay a eu lui-même recours à des procédés de propagande irréguliers soit par apposition d’affiches en méconnaissance des dispositions du décret susmentionné du 30 octobre 1958, soit en distribuant publiquement et gratuitement, sous la forme d’un supplément à un périodique, un tract exclusivement destiné à la défense de sa candidature, soit enfin en adressant ou en faisant adresser aux électeurs de la circonscription, en sus des circulaires réglementaires, des brochures anonymes. et des lettres tendant aux mêmes fins ;
3. Considérant qu’il n’est pas établi, dans ces conditions, que les diverses irrégularités aient nui particulièrement à la seule candidature du sieur Lafay ;
Sur le grief tiré d’une manoeuvre dirigée contre le requérant par le sieur Breton :
4. Considérant qu’il résulte de l’instruction que le sieur Breton, candidat au premier tour des élections législatives dans la 23e circonscription du département de la Seine, a fait état, au cours de la campagne électorale de sa qualité de “secrétaire général du groupe municipal du Centre national des Indépendants” qu’il a, dans la présentation typographique des bulletins et affiches imprimés à son nom, utilisé ce titre en vue d’apparaître aux yeux des électeurs, comme ayant reçu l’investiture du Centre national des Indépendants, alors que, seul, le sieur Lafay avait reçu l’investiture de cette formation politique ; que ces agissements doivent être regardés comme une manoeuvre tendant à fausser le sens de sa candidature et à induire les électeurs en erreur ;
5. Mais, Considérant que, dès le 6 novembre 1958, le secrétaire général du Centre national des Indépendants avait dénoncé ladite manoeuvre et dans une lettre circulaire adressée par voie postale aux électeurs inscrits dans la 23e circonscription, précisé que le sieur Breton n’avait aucun droit à se réclamer, de l’investiture de ladite formation, dont il a d’ailleurs été exclu le 26 novembre 1958 ; que, dès lors, il n’est pas établi que la manoeuvre susmentionnée ait exercé sur les opérations électorales, tant au premier qu’au second tour de scrutin, une influence suffisante pour en modifier les résultats ;
Sur les griefs tirés des imputations diffamatoires portées contre le sieur Lafay :
6. Considérant, d’une part, que le sieur Lafay soutient qu’il a été victime d’une “campagne de diffamation systématique” qui se serait manifestée tant par l’apposition de “papillons” sur ses affiches que par la diffusion de tracts anonymes ;
7. Considérant que s’il résulte de l’instruction que certaines des inscriptions dont fait état le requérant sont injurieuses, elles ne revêtent pas cependant le caractère d’imputations diffamatoires ; que, si l’un des tracts dont il se plaint peut être regardé comme contenant de telles imputations, il n’est pas établi que ce tract ait reçu une large diffusion ni par suite, que son envoi à certains électeurs ait exercé sur les opérations électorales une influence suffisante pour cri modifier le résultat ;
8. Considérant, d’autre part, que le sieur Lafay allègue qu’une agence de presse aurait faussement annoncé qu’une plainte avait été déposée contre lui pour lacération d’affiches et propagande illégale ; par plusieurs candidats ; que la publication de cette information aurait été de nature à porter préjudice au requérant ;
9. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le sieur Vaschetti a, par citation directe engagé le 21 novembre 1958 des poursuites contre le sieur Lafay, nominativement désigné ; qu’ainsi, et bien que l’information litigieuse ait été inexacte en ce qui concerne le nombre des auteurs de ces poursuites, elle n’a pas constitué une manœuvre dirigée contre le requérant ;
Sur les griefs tirés des candidatures des sieurs Hemmerdinger et Toniatti :
10. Considérant d’une part, que le fait que la circulaire officielle adressée par le candidat Hemmerdinger ait été pour partie consacrée à dissuader les électeurs de porter leurs suffrages sur le sieur Lafay ne peut, en l’absence d’imputations diffamatoires, être regardés comme une manœuvre ;
11. Considérant, d’autre part ; que si le sieur Hemmerdinger, qui n’avait pas recueilli au premier tour de scrutin un nombre de voix suffisamment élevé pour faire acte de candidature au second tour, ne pouvait, en raison de cette situation se désister formellement en faveur d’un des candidats du deuxième tour de scrutin, aucune disposition législative ou réglementaire ne lui interdisant de recommander aux électeurs de voter pour le sieur Vaschetti ;
12. Considérant, enfin, que le sieur Toniatti s’était, après avoir fait acte de candidature, retiré avant le premier tour de scrutin et avait engagé les électeurs à porter leurs suffrages sur le sieur Breton ; qu’en admettant même que le fait qu’il ait mis les panneaux d’affichage électoral qui lui étaient affectés à la disposition de ce candidat et utilisé une circulaire réglementaire en sa faveur, constitue une irrégularité au sens du décret du 30 octobre 1958, il ne résulte pas de l’instruction qu’une telle irrégularité ait exercé une influence sur le résultat des opérations électorales ;
13. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le sieur Lafay n’est pas fondé à demander l’annulation de l’élection législative à laquelle il a été procédé dans la 23e circonscription de la Seine ;
Décide :
Article premier :
La requête susvisée du sieur Lafay est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l’Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
ECLI:FR:CC:1959:58.95.AN