Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S 3ème chambre 3ème section No RG : 05/11085 No MINUTE : Assignation du : 20 Juillet 2005 Expéditions exécutoires délivrées le :
JUGEMENT rendu le 15 Mars 2006
DEMANDEUR Monsieur Bruno X… 3 rue Rodier 75009 PARIS représenté par Me Philippe DENQUIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E.916 DÉFENDERESSE S.A.R.L. EDITIONS DE LODI 48 rue de Montmartre 75002 PARIS représentée par Me Laurent CARETTO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire D413 COMPOSITION DU TRIBUNAL Elisabeth BELFORT, Vice-Président, signataire de la décision Agnès THAUNAT, Vice-Président Pascal MATHIS, Juge
assistée de Marie-Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision DEBATS A l’audience du 28 Février 2006 tenue publiquement JUGEMENT Prononcé publiquement Contradictoirement en premier ressort FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES: Le 1er mars 2002, Monsieur Bruno X… et le société EDITIONS DE LODI ont conclu un contrat d’édition portant sur un ouvrage intitulé « NAPOLÉON HISTOIRE D’UNE LÉGENDE » qui est paru en mars 2003 dans une collection de luxe illustrée. La société EDITIONS DE LODI a republié l’ouvrage sous une forme modifiée et dans une édition de poche sous le titre « Dictionnaire illustré NAPOLÉON Histoire d’une légende ». Par assignation en date du 20 juillet 2005, Monsieur Bruno X… reproche à la société EDITIONS DE LODI d’avoir commis des actes de contrefaçon de son oeuvre en publiant ce dernier ouvrage, sollicite une mesure de retrait ainsi que la somme de 20 000 ç en réparation de l’atteinte portée à ses droits moraux et celle de 3 000 ç par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, le tout sous le bénéfice de l’exécution provisoire. Par conclusions du 9 décembre 2005 la société EDITIONS DE LODI fait valoir qu’au terme de l’article 1-3 du contrat Monsieur Bruno X… a cédé les droits de
reproduction pour toutes les éditions et notamment de poche, pour laquelle il a été rémunéré et reconventionnellement sollicite la somme de 2000ç au titre des frais irrépétibles. Suivant écritures du 10 janvier 2006, Monsieur Bruno X… maintient ses demandes en expliquant qu’il n’a jamais consenti à la nouvelle édition qui possède une iconographie réduite et qui diffère par les pages de titre et la suppression de certains passages de l’ouvrage initial. Monsieur Bruno X… sollicite de plus une mesure de publicité. SUR QUOI
SUR LA CONTREFAOEON Attendu que l’article 1-3 du contrat d’édition stipule que :
« Sous réserve du droit moral du cédant et du droit de citation, et à l’exception des droits d’adaptation audiovisuelle qui font l’objet ce même jour d’un contrat écrit sur un document distinct, conformément à l’article « 9T597(57) » (sic) du 1er juillet 1995, la cession comporte pour l’éditeur le droit de traiter en tous pays, pour l’exercice de l’intégralité des droits de reproduction, de représentation et d’adaptation autre qu’audiovisuelle, et notamment à titre énumératif pour : a) toutes autre éditions : ordinaires, de luxe, illustrée, populaire de clubs, de poche, etc. … Et, généralement, toute diffusion, reproduction ou adaptation par tout procédé actuel ou à venir, autre qu’audiovisuel. L’éditeur aura donc seul qualité pour négocier à ces divers titres au nom des parties et au mieux de leurs intérêts. L’auteur s’engage à communiquer à l’éditeur toutes propositions qu’il recevra ayant trait à des opérations de telle nature. »
Attendu que cet article confère à l’éditeur le droit de traiter au nom de l’auteur et au mieux de ses intérêts et sous réserve de son droit moral avec des tiers souhaitant reproduire ou adapter l’oeuvre en livre de poche. Attendu par contre qu’il ne lui confère pas le
droit de procéder à des modifications de l’oeuvre ni à des adaptations sans autorisation de l’auteur. Attendu que le tribunal relève que l’article 2 du contrat qui n’est pas invoqué en défense, et pour autant qu’il soit valable, point que les parties n’ont pas soumis au tribunal, stipule que :
« Le format, la présentation, les chiffres de tirage, le prix de vente et les frais de publicité afférents au lancement des volumes seront déterminés par l’éditeur. » Attendu que cet article ne saurait valablement permettre à l’éditeur de modifier l’oeuvre qui fait l’objet du contrat d’édition laquelle comporte le choix des illustrations conformément à l’article 9 alinéa 2 du contrat qui stipule :
« L’auteur devra fournir pour le 31 mai 2002 une disquette Macintosh ou PC ainsi qu’une sortie papier d’environ 600000 signes ainsi que les documents (gravures, dessins, photos) destinés à illustrer l’ouvrage. Un texte de 4ème de couverture et un argumentaire. » Attendu qu’en reproduisant sans autorisation une édition amputée de la majeure partie de son iconographie, d’une partie du texte, le dernier cahier de l’ouvrage comprenant un extrait du « Médecin de campagne » de Balzac et des pages de titre, la société défenderesse a commis des actes de contrefaçon. SUR LES MESURES RÉPARATRICES Attendu qu’une mesure d’interdiction sera prononcée dans les termes du dispositif. Attendu que l’auteur sollicite la somme de 20 000 ç à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à son droit moral. Attendu que les actes de contrefaçon concernent une édition en format de poche, donc d’une certaine ampleur, et portent particulièrement atteinte à l’intégrité de l’oeuvre du fait notamment de l’appauvrissement de l’iconographie ; qu’il convient de retenir dans ces conditions la somme de 10000 ç à titre de réparation du préjudice moral enduré par l’auteur. Attendu qu’à titre de complément
de réparation, il convient d’autoriser la publication du dispositif du présent jugement aux frais de la société défenderesse dans les termes du dispositif. SUR LES FRAIS IRREPETIBLES Attendu que l’équité commande d’allouer au demandeur qui triomphe la somme de 3 000 ç par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. SUR L’EXÉCUTION PROVISOIRE
Attendu que l’exécution provisoire sera prononcée compte tenu des données du litige.
SUR LES DEPENS Attendu que la société défenderesse qui succombe supportera les dépens. PAR CES MOTIFS Le Tribunal, Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort et sous le bénéfice de l’exécution provisoire Dit qu’en reproduisant sous une forme altérée et en format de poche l’oeuvre de Monsieur Bruno X… intitulée « NAPOLÉON HISTOIRE D’UNE LÉGENDE » sans son autorisation la société EDITIONS DU LOTI a porté atteinte aux droits moraux de l’auteur et a commis des actes de contrefaçon. En conséquence, Fait interdiction à la société EDITIONS DU LOTI de poursuivre la commercialisation de l’ouvrage de poche intitulé « Dictionnaire illustré NAPOLÉON Histoire d’une légende » passé un délai de deux mois suivant la signification du présent jugement et ce sous astreinte de 100 ç par infraction constatée au delà de ce délai. Dit que le tribunal se réserve expressément le pouvoir de liquider l’astreinte prononcée en application de l’article 35 de la loi no 91-650 du 9 juillet 1991 modifié par l’article 3 de la loi no 92-644 du 13 juillet 1992. Condamne la société EDITIONS DU LOTI à payer à Monsieur Bruno X… la somme de 10 000 ç à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à son droit moral. Autorise Monsieur Bruno X… a faire publier aux frais de la société EDITIONS DU LOTI le dispositif de la présente décision dans deux publications de son choix, les frais restant à la charge de la
société EDITIONS DU LOTI ne pouvant excéder la somme de globale de 8 000 ç hors taxe. Condamne la société EDITIONS DU LOTI à payer à Monsieur Bruno X… la somme de 3 000 ç par application de l’article 700 du nouveau code deCondamne la société EDITIONS DU LOTI à payer à Monsieur Bruno X… la somme de 3 000 ç par application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Condamne la société EDITIONS DU LOTI aux dépens dont distraction au profit de Maître Philippe DENQUIN Avocat, pour la part dont il a fait l’avance sans en avoir reçu provision par application des dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile. Fait et jugé à Paris le 15 Mars 2006 Le Greffier Le Président