Your cart is currently empty!
En matière de marques viticoles, les titres de noblesse couramment utilisés dans le domaine des boissons alcoolisées sont sans caractère distinctif particulier en la matière.
Le signe Duc de Calo ne constituant pas la reproduction identique de la marque antérieure, il convient, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, de se fonder sur l’impression d’ensemble produite par les marques, en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants afin de rechercher s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du consommateur moyen avec la marque Marquis de Calo.
Les deux marques en conflit étant des marques commerciales de même nature, visant des produits identiques et similaires et présentant une architecture commune, elles sont susceptibles d’être perçues comme des déclinaisons de vins provenant d’une même exploitation ou d’exploitations commercialement liées. En effet, en matière de marques vinicoles, la pratique des ‘seconds vins’ produits à partir de jeunes vignes d’un domaine renommé est très courante, de sorte que la marque DUC DE CALO est susceptible d’être perçue comme un ‘second vin’ du MARQUIS DE CALO.
Le risque de confusion comprend le risque d’association, le consommateur percevant le cas échéant qu’il est en présence de deux marques différentes, mais leur attribue tout de même une origine commerciale commune, considérant qu’elles ne sont que des déclinaisons.
En l’occurrence, les signes en cause présentent des similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles, qui créent de très importantes ressemblances d’ensemble.
Les dénominations CALO et CALO constituent les éléments distinctifs et dominants au sein des signes en cause. Les séquences MARQUIS DE- et DUC DE- qui viennent les introduire, sont en effet des titres de noblesse couramment utilisés dans le domaine des boissons alcoolisées et sans caractère distinctif particulier en la matière. Il en résulte que la comparaison des signes permet d’établir des ressemblances d’ensemble et que la prise en compte de leurs éléments distinctifs et dominants renforce leur similarité.
Il en résulte ainsi un important risque de confusion par association, d’autant que la SCEA MARQUIS DE CALO bénéficie d’une certaine connaissance auprès du public.
_______________________________________________________________________________
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 17 MAI 2022
N° de rôle : N° RG 21/02099 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-MBPQ
Y Y épouse X
c/
S.C.E.A. B C-D
Nature de la décision : AU FOND
Décision déférée à la cour : décision rendue le 12 mars 2021 par le Directeur de l’Institut National de la Propriété Industrielle de COURBEVOIE (NL 20-0053) suivant recours en date du 09 avril 2021
DEMANDERESSE :
Y Y épouse X
née le […] à […]
de nationalité Chinoise
demeurant […]
représentée par Maître Thomas PERINET de la SELARL QUESNEL ET ASSOCIES, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Vincent MAURIAC de la SELARL MAURIAC AVOCATS, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX
DEFENDERESSE :
S.C.E.A. B C-D, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis Domaine de C – 33180 SAINT ESTEPHE
représentée par Maître Valérie JANOUEIX de la SCP BATS – LACOSTE – JANOUEIX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Eric AGOSTINI de la SELARL ERIC AGOSTINI ET ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX
EN PRESENCE DE : INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE, pris en la personne de son Directeur Général domicilié en cette qualité au siège social sis […]
régulièrement convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception
représenté par Madame Marianne CANTET, juriste, munie d’un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 05 avril 2022 en audience publique, devant la cour composée de :
Roland POTEE, président,
Vincent BRAUD, conseiller,
Bérengère VALLEE, conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Véronique SAIGE
Ministère Public :
L’affaire a été communiquée au Ministère Public qui a fait connaître son avis le 14 mars 2022.
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Le 15 juillet 2020, la SCEA B de C-D a formé une demande en nullité enregistrée sous la référence NL 20-0053 contre la marque verbale ‘DUC DE CALO’ n°15/4198735 déposée le 23 juillet 2015.
L’enregistrement de cette marque, dont Mme Y X est titulaire a été publié au BOPI 2015-46 du 13 novembre 2015.
La demande en nullité est formée à l’encontre d’une partie des produits pour lesquels la marque contestée est enregistrée, à savoir :
‘ Classe 32 : bières ;
Classe 33 : boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; cidres ; digestifs (alcools et liqueurs) ; vins ; spiritueux ; vins d’appellation d’origine protégée ; vins à indication géographique protégée’.
La demanderesse invoquait un motif relatif de nullité, se fondant sur une atteinte à la marque française antérieure n°11 3 879 656, déposée le 7 décembre 2011, enregistrée le 30 mars 2012 et portant sur le signe verbal MARQUIS DE CALO, destinée à distinguer les produits de la classe 33 : ‘Vins d’Appellation d’Origine Protégée Saint-Estèphe provenant du B C-D’.
Par décision du 12 mars 2021, l’INPI a :
– déclaré justifiée la demande en nullité NL 20-0053,
– déclaré partiellement nulle la marque n°15/4198735 pour les produits suivants : ‘bières ; boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; cidres ; digestifs (alcools et liqueurs) ; vins ; spiritueux ; vins d’appellation d’origine protégée ; vins à indication géographique protégée’.
Par déclaration enregistrée au greffe le 9 avril 2021, Mme Y épouse X a formé un recours contre la décision rendue par l’INPI.
Par conclusions déposées le 8 juillet 2021, elle demande à la cour de :
– réformer dans son intégralité la décision rendue par le directeur général de l’INPI le 12 mars 2021 n° NL 20-0053/MCR,
Et statuant à nouveau :
– déclarer irrecevable la demande en nullité de la SCEA B C D à l’encontre de la marque verbale française verbale française DUC DE CALO n°4198735,
– à défaut et en tout état de cause, débouter la SCEA B C D de toutes ses demandes fins et conclusions,
En conséquence :
– condamner la SCEA DE B C D à verser à Mme Y X la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Mauriac Avocats,
– condamner la SCEA DE B C D aux entiers dépens.
Par conclusions déposées le 5 octobre 2021, la SCEA du B C-D demande à la cour de :
– juger que la marque Duc de Calo n° 15 4198735 porte atteinte à la marque MARQUIS DE CALO n° 11 3879656 en tant qu’elle en constitue la contrefaçon par imitation,
– confirmer purement et simplement en toutes ses dispositions la décision NL 20-0053/MCR du 12 mars 2021 de M.le directeur général de l’INPI,
– condamner Mme Y X à payer à la SCEA de B C-D la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’art. 700 du code de procédure civile.
Par courrier transmis au greffe le 20 octobre 2021, le directeur général de l’INPI a présenté ses observations, dans lesquelles il considère que la demande en nullité était bien recevable, qu’en l’espèce le consommateur de vin ne correspond pas nécessairement à un public averti, connaisseur de vin et apte à éviter toute confusion, et que l’existence d’un risque de confusion doit donc être appréciée au regard du grand public français composé de consommateurs d’attention moyenne. Sur la comparaison des produits, l’INPI indique que les vins, même d’AOC différents, ou provenant d’exploitations différentes doivent êtres considérés comme identiques ou à tout le moins très similaires dès lors qu’ils appartiennent à la même catégorie générale des ‘vins’, de sorte que les produits en cause sont identiques ou similaires. Sur la comparaison des signes, l’INPI retient que les signes en cause présentent des similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles générant d’importantes ressemblances d’ensemble qui sont renforcées par la prise en compte de leurs éléments distinctifs et dominants. L’Institut estime qu’il existe un risque de confusion par association entre les signes, renforcé par la grande proximité des produits en cause et la notoriété de la marque antérieure.
Le 14 mars 2022, le ministère public a formulé un avis conforme à la décision de l’INPI.
L’affaire a été fixée à l’audience collégiale du 5 avril 2022.
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 22 mars 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité de la demande en nullité
Aux termes de l’article R.716-1, alinéa 2, du code de la propriété intellectuelle, la demande en nullité de marque comprend :
‘1° L’identité du demandeur ;
2° Le cas échéant, les indications propres à établir l’existence, la nature, l’origine et la portée des droits antérieurs invoqués ;
3° Les références de la marque contestée, ainsi que l’indication des produits ou services visés par la demande en nullité ou en déchéance ;
4° L’exposé des moyens sur lesquels repose la demande en nullité (…) ;
5° La justification du paiement de la redevance prescrite ;
6° Le cas échéant, sauf lorsqu’il a la qualité de conseil en propriété industrielle ou d’avocat, le pouvoir du mandataire, ce pouvoir pouvant être adressé à l’Institut dans le délai d’un mois’.
Aux termes de l’article L.711-3 I. 1° et 2° du même code dans sa version issue de l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019 :
‘I.-Ne peut être valablement enregistrée et, si elle est enregistrée, est susceptible d’être déclarée nulle une marque portant atteinte à des droits antérieurs ayant effet en France, notamment :
1° Une marque antérieure :
a) Lorsqu’elle est identique à la marque antérieure et que les produits ou les services qu’elle désigne sont identiques à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée ;
b) Lorsqu’elle est identique ou similaire à la marque antérieure et que les produits ou les services qu’elle désigne sont identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est protégée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association avec la marque antérieure ;
2° Une marque antérieure enregistrée ou une demande de marque sous réserve de son enregistrement ultérieur, jouissant d’une renommée en France ou, dans le cas d’une marque de l’Union européenne, d’une renommée dans l’Union, lorsque la marque postérieure est identique ou similaire à la marque antérieure, que les produits ou les services qu’elle désigne soient ou non identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée ou demandée et lorsque l’usage de cette marque postérieure sans juste motif tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ou qu’il leur porterait préjudice ;’.
L’article L.711-4 a) dans sa version issue de la loi n°92-597 du 1er juillet 1992, abrogé par l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019, prévoyait que : ‘Ne peut être adopté comme marque un signe portant atteinte à des droits antérieurs, et notamment :
a) à une marque antérieure enregistrée ou notoirement connue au sens de l’article 6 bis de la convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle’.
L’article L.713-3 ancien, également dans sa version issue de la loi n°92-597 du 1er juillet 1992 disposait quant à lui :
‘Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public :
a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ;
b) L’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement’.
En l’espèce, la requérante fait grief à la décision de l’INPI d’avoir déclaré recevable la demande en nullité, alors que la marque contestée a été déposée le 23 juillet 2015 et que la SCEA B C D a fondé sa demande sur des dispositions plus récentes, issues de l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019.
La SCEA B C D fait valoir en réponse que les textes applicables exigent que la demande comprenne l’exposé des moyens sur lesquels elle repose et non l’indication impérative des visas des dispositions invoquées, et que les dispositions découlant de l’ordonnance de 2019 ne présentent aucune différence de fond avec celles de la loi de 1992.
S’il est exact que la marque contestée a été déposée le 23 juillet 2015, soit antérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 13 novembre 2019, et que la demande en nullité devait dès lors être appréciée au regard des dispositions du code de la propriété intellectuelle antérieures à cette ordonnance, l’INPI relève à juste titre que les dispositions combinées des articles L.711-4 et L.713-3 anciens dans leur version issue de la loi du 1er juillet 1992, sont parfaitement équivalentes à celles de l’article L.711-3 dans sa version actuelle, issue de l’ordonnance du 13 novembre 2019. La substitution de visas dans la demande de nullité n’affectait donc pas la validité des moyens développés par la SCEA de B C D.
Il ressort en effet sans équivoque de la demande en nullité, produite par l’INPI, que la SCEA de B C D sollicitait la nullité de la marque DUC DE CALO, sur le fondement de l’atteinte à sa marque antérieure MARQUIS DE CALO.
En outre, cette demande en nullité comprend bien l’exposé des moyens sur lesquels elle repose, conformément aux exigences de l’article R.716-1 lequel n’exige pas que les visas soient mentionnés à peine d’irrecevabilité.
C’est en conséquence à bon droit que l’INPI a statué sur le bien-fondé de la demande en nullité formée par la SCEA de B C D, l’estimant recevable.
Sur le public pertinent
Mme Y X reproche au directeur de l’INPI d’avoir considéré que les produits des marques en cause s’adressent au grand public français, doté d’un degré d’attention normal, alors que selon elle, la marque antérieure invoquée par la société B C D est destinée à distinguer des produits de nature strictement vitivinicole, domaine pour lequel le public référent n’est pas le grand public français mais plutôt le consommateur averti, habitué à distinguer entre elles des marques souvent composées, pour partie, des mêmes termes. Elle estime dès lors qu’en l’espèce, le consommateur averti accorde une attention particulière aux marques en conflit et est apte à les différencier, ceci contribuant à éliminer tout risque de confusion.
Cependant et ainsi que le souligne l’INPI, il est constant que le consommateur de vin ne correspond pas nécessairement à un public averti, connaisseur de vin et apte à éviter toute confusion, alors que le marché du vin concerne de plus en plus un large public, notamment par la commercialisation de vin en grandes surfaces et par internet, à l’échelon tant national qu’international.
A cet égard, il importe peu que le vin provenant du B C D, 3ème grand cru classé 1855, soit commercialisé entre 30 et 40 euros la bouteille, tandis que les boissons commercialisées par Mme Y sont vendues environ 5 euros la bouteille, dès lors que ces produits s’adressent au grand public français, lequel a accès dans les mêmes lieux ou selon les mêmes modalités, à des vins et spiritueux d’appellations et de gammes différentes.
En conséquence, c’est à juste titre que l’INPI a procédé à l’appréciation du risque de confusion entre les signes en cause au regard du grand public français, lequel est composé de consommateurs d’attention moyenne.
Sur la comparaison des produits
Il résulte de l’article L.713-3 ancien précité qu’est notamment interdite, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public, l’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement.
Mme Y X reconnaît l’identité de certains produits comme les ‘vins ; vins d’appellation d’origine protégée ; vins à indication géographique protégée’ avec les ‘vins d’appellation d’origine protégée Saint-Estèphe provenant du B C D’. Cependant, la requérante estime que les produits ‘bières ; boissons alcoolisées (à l’exception des bières) ; cidres ; digestifs (alcools et liqueurs) ; spiritueux’ et les ‘vins d’appellation d’origine protégée Saint-Estèphe provenant du B C D’ ne sont pas fortement similaires, mais simplement similaires.
La SCEA de B C D fait valoir que la simple similitude des produits est une condition suffisante permettant de prononcer la nullité d’une marque en application de l’article L.713 ancien.
En l’espèce, pour apprécier la similitude entre les produits, l’INPI rappelle qu’il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre ces produits et services, tels que désignés dans l’enregistrement de la marque et non au regard de l’usage réel ou supposé qui peut en être fait. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation, ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire.
Ainsi, concernant les ‘vins ; vins d’appellation d’origine protégée ; vins à indication géographique protégée’ visés par la marque attaquée, la grande proximité voire l’identité de ces produits avec les ‘Vins d’Appellation d’Origine Protégée Saint-Estèphe provenant du B C D’ de la marque antérieure n’est pas contestable, en ce que les seconds produits entrent dans la catégorie, plus générale, des premiers.
Il est en effet constant que des vins, même d’AOC différentes, ou provenant d’exploitations différentes, doivent être considérés comme identiques ou à tout le moins très similaires dès lors qu’ils appartiennent à la même catégorie générale des vins.
En conséquence, les produits en cause étant tous des boissons alcoolisées, vins ou spiritueux, ils sont identiques ou similaires.
Sur la comparaison des signes
La requérante soutient que le signe de la marque contestée DUC DE CALO et celui de la marque antérieure MARQUIS DE CALO ne partagent que quatre lettres, présentent des différences notables et qu’il n’y aucune raison que le public pertinent fasse abstraction des vocables ‘DUC DE’ et ‘MARQUIS DE’, le titre de marquis étant situé après celui de duc dans la hiérarchie des titres de noblesses. Mme Y X fait également valoir que phonétiquement, la marque contestée est constituée de quatre syllabes, là où la marque antérieure en compte cinq.
En l’espèce, la marque invoquée à l’appui de la demande en nullité est la marque verbale MARQUIS DE CALO, tandis que la marque critiquée est la marque verbale DUC DE CALO.
Le signe critiqué ne constituant pas la reproduction identique de la marque antérieure, il convient, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en cause, de se fonder sur l’impression d’ensemble produite par les marques, en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants afin de rechercher s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du consommateur moyen.
Il sera précisé que ce risque de confusion comprend le risque d’association, le consommateur percevant le cas échéant qu’il est en présence de deux marques différentes, mais leur attribue tout de même une origine commerciale commune, considérant qu’elle ne sont que des déclinaisons.
1. Sur l’impression d’ensemble des signes
Les signes en présence ont une présentation et une structure commune, étant tous deux exclusivement verbaux et composés de trois mots. Il démarrent en effet tous les deux par un titre de noblesse, à savoir MARQUIS pour la marque antérieure et DUC pour la demande contestée, suivi de la préposition DE et d’une dénomination visuellement et phonétiquement particulièrement proche, à savoir C et CALO.
Les dénominations C et CALO sont de longueur équivalente (4 et 5 lettres) et comportent 4 lettres identiques placées dans le même ordre en attaque, ce qui leur confère une physionomie très similaire. Les dénominations C et CALO se prononcent au surplus selon un même rythme, soit en deux temps avec des sonorités d’attaque identiques et finales très proches, de sorte que la différence phonétique tenant à la prononciation de -ON et -O reste très peu perceptible pour le public.
Enfin, au plan intellectuel, les signes en présence évoquent tous deux un personnage portant un titre de noblesse.
Il ne saurait dès lors être valablement soutenu que la différence de placement dans la hiérarchie nobiliaire des titres MARQUIS et DUC sont de nature à créer des différences entre les signes en cause qui pourraient supplanter l’extrême similarité entre les dénominations C et CALO.
Ainsi, il est démontré que les signes en cause présentent des similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles, qui créent de très importantes ressemblances d’ensemble.
2. Sur les éléments distinctifs et dominants des signes
Il est manifeste en l’espèce que les dénominations CALO et C constituent les éléments distinctifs et dominants au sein des signes en cause. Les séquences MARQUIS DE- et DUC DE- qui viennent les introduire, sont en effet des titres de noblesse couramment utilisés dans le domaine des boissons alcoolisées et sans caractère distinctif particulier en la matière.
Il en résulte que la comparaison des signes permet d’établir des ressemblances d’ensemble et que la prise en compte de leurs éléments distinctifs et dominants renforce leur similarité.
Sur l’appréciation globale du risque de confusion
Les deux marques en conflit étant des marques commerciales de même nature, visant des produits identiques et similaires et présentant une architecture commune, elles sont susceptibles d’être perçues comme des déclinaisons de vins provenant d’une même exploitation ou d’exploitations commercialement liées. En effet, en matière de marques vinicoles, la pratique des ‘seconds vins’ produits à partir de jeunes vignes d’un domaine renommé est très courante, de sorte que la marque DUC DE CALO est susceptible d’être perçue comme un ‘second vin’ du B C D.
Il en résulte ainsi un important risque de confusion par association, d’autant que la SCEA B C D produit en pièce n°8 plusieurs extraits de sites internet spécialisés, de nature à démontrer que sa marque antérieure MARQUIS DE CALO bénéficie d’une certaine connaissance auprès du public, ce que la requérante ne conteste pas.
À ce titre, il est constant, contrairement à ce que soutient celle ci, que la connaissance d’une marque sur le marché contribue à renforcer sa distinctivité et lui ouvre une protection plus étendue.
En conséquence de l’ensemble de ces éléments, les ressemblances importantes entre les signes en cause, la grande proximité des produits et la notoriété de la marque antérieure, caractérisent le risque de confusion par association des marques pour le consommateur d’attention moyenne.
Le recours formé par Mme Y X à l’encontre de la décision du directeur de l’INPI devra par conséquent être rejeté.
La SCEA du B C-D est fondée à obtenir de la requérante une indemnité de 3.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
– Rejette le recours formé par Mme Y Y épouse X contre la décision du directeur de l’INPI du 12 mars 2021 ;
– Condamne Mme Y Y épouse X à payer à la SCEA du B C-D une indemnité de 3.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamne Mme Y Y épouse X aux dépens ;
– Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre recommandée avec demande d’avis de réception par le greffe de la cour aux parties à l’instance et au directeur général de l’INPI.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,