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Le caractère distinctif d’un signe doit s’apprécier par rapport aux produits désignés dans l’enregistrement et par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, en se plaçant à la date du dépôt.
Si les deux signes « CREA » et « DESIGN » ont un lien avec l’aménagement intérieur, le signe CREADESIGN pris dans son ensemble est parfaitement arbitraire pour désigner les ‘faux plafonds et faux murs (non métalliques), matériaux de construction non métalliques, revêtements de murs, de parois, de plafonds non métalliques pour la construction’, n’ayant aucune signification dans le langage courant pour le public pertinent, professionnel ou consommateur s’intéressant aux matériaux de construction et d’aménagement intérieurs. La demande de nullité de la marque de ce chef a été rejetée.
_________________________________________________________________________________________________________________________
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 1
ARRET DU 18 MAI 2022
Numéro d’inscription au répertoire général : 20/08680 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB7NI
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Juin 2020 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre – 2ème section – RG n° 16/16700
APPELANTE
S.A.S. NORMALU
Société au capital de 1 202 005 euros
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de MULHOUSE sous le numéro 946 750 635
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[…]
[…]
Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
Assistée de Me Laurent LEVY de la SELAS LEXINGTON AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0485 et Me Marie LIENS, avocat au barreau de PARIS, toque J049
INTIMÉES
ASSOCIATION ARCHITECTURE Z A
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[…]
[…]
Représentée par Me X Y de l’AARPI BIRD & BIRD AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : R255
Assistée de Me Claire-Amélie BRATEL de l’AARPI BIRD & BIRD AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : R255 S.A.R.L. AZIMUT
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de STRASBOURG sous le numéro 331 397 224
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[…]
[…]
Représentée par Me X Y de l’AARPI BIRD & BIRD AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : R255
Assistée de Me Claire-Amélie BRATEL de l’AARPI BIRD & BIRD AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : R255
Société VESTA DESIGN LTD
Société de droit estonien
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
LAO 12-1
[…]
ESTONIE
Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1119
Assistée de Me Emmanuel DE MARCELLUS et Me Camille BOILLET, tous deux de la SELARL DE MARCELLUS & DISSER Société d’Avocats, avocats au barreau de PARIS, toque : A0341, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre et Mme Françoise BARUTEL, conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.
Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre
Mme Françoise BARUTEL, conseillère
Mme Déborah BOHÉE, conseillère.
Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON
ARRÊT :
Contradictoire•
• par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
• signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 5 juin 2020 ;
Vu l’appel interjeté à l’encontre dudit jugement le 6 juillet 2020 par la société Normalu;
Vu les dernières conclusions numérotées 6 remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 24 février 2022 par la société Normalu, appelante et intimée incidente ;
Vu les dernières conclusions numérotées 4 remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 28 février 2022 par la société Vecta Design, intimée et appelante incidente ;
Vu les dernières conclusions numérotées 3 remises au greffe et notifiées, par voie électronique, le 21 février 2022 par l’association Architecture Z A (ATI) et la société Azimut, intimées ;
Vu l’ordonnance de clôture du 1er mars 2022′;
SUR CE, LA COUR,
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
Il sera simplement rappelé que la société Normalu conçoit, fabrique et commercialise sous la marque Barrisol une gamme de produits de fausses parois et faux plafonds. Elle indique avoir mis au point un système innovant de toiles tendues rétroéclairées et/ou acoustiques permettant la réalisation de plafonds et caissons lumineux dont les caractéristiques sont à la fois esthétiques et fonctionnelles.
La société Vecta Design est une société estonienne fondée en 2006. Elle se présente comme le premier fabricant professionnel de plafonds tendus dans les pays baltes.
La société Azimut se présente comme une petite entreprise de conception et pose de solutions de plafonds tendus et de toiles tendues à destination de professionnels et de particuliers en Alsace et en Lorraine.
L’association ATI indique avoir été fondée par un petit groupe d’entreprises spécialisées dans l’étude et la pose de plafonds tendus. L’objet de l’association est de porter à la connaissance du public, notamment via son site internet www.ati-tendu.com, les différentes solutions de plafonds tendus existant sur le marché ainsi que leurs avantages respectifs.
La société Normalu a déposé trois brevets :
– un brevet français FR n°2.985.298 (FR 298) intitulé « fausse paroi rétro- éclairée » déposé le 30 décembre 2011 et délivré le 10 janvier 2014 ;
– un brevet européen EP 553 n° EP-B1-2.610.553 (EP 553) désignant la France intitulé « fausse paroi rétro-éclairée » déposé le 18 décembre 2012 sous priorité du brevet FR 298, auquel il s’est substitué), et délivré le 8 mars 2017 ;
– un brevet européen n° EP-2.659.071 (EP 071) désignant la France intitulé « dispositif de fausse paroi à triple épaisseur » déposé le 30 décembre 2011 et délivré le 20 mai 2015.
Elle est par ailleurs titulaire de la marque verbale de l’Union européenne CREADESIGN n°008802647 enregistrée le 28 juin 2010 et désignant notamment en classe 19 les produits suivants : Armatures non métalliques pour la construction; cloisons non métalliques; faux plafonds et faux murs (non métalliques); matériaux de construction non métalliques; profilés non métalliques de fixation de toiles ou films pour faux plafonds ou faux murs; plafonds non métalliques; plafonds-tendus, notamment plafonds-tendus décorés par flocage; revêtements de murs, de parois, de plafonds non métalliques pour la construction.
La société Normalu indique qu’elle a découvert sur le site internet de l’association ATI dont est membre la société Azimut, que cette dernière importait en France des profilés «AL 21 » de la société Vecta Design pour réaliser des caissons lumineux qu’elle commercialise auprès du public.
Ayant réalisé des opérations de saisie-contrefaçon le 19 septembre 2016 au siège de la société Azimut, puis le 24 novembre 2016 au siège de la société Atoudecor, la société Normalu, estimant que le caisson lumineux fabriqué et offert à la vente par la société Azimut et le profilé « AL21 » de la société Vecta Design reproduisaient certaines des revendications de ses brevets, a assigné les sociétés Vecta Design, Azimut et l’association ATI par actes des 15 octobre 2016 et 16 décembre 2016.
Par jugement rendu le 5 juin 2020 dont appel, le tribunal judiciaire de Paris a :
Prononcé la nullité des revendications 1, 2 et 4 du brevet français n°2.985.298 pour défaut de nouveauté,
Prononcé la nullité de l’ensemble des revendications de la partie française du brevet européen EP 2.610.553 pour insuffisance de description,
Prononcé la nullité des revendications 1, 2 et 6 de la partie française du brevet européen EP-2.659.071 pour défaut d’activité inventive,
Dit que la décision sera inscrite au registre national des brevets et au registre européen des brevets à l’initiative de la partie la plus diligente une fois la décision devenue définitive, aux frais de la société Normalu,
Débouté la société Normalu de l’ensemble de ses demandes sur le fondement de la contrefaçon des brevets FR 2.985.298, EP 2.610.553 et EP 2.659.071,
Rejeté les demandes subsidiaires à l’action en contrefaçon de brevet de la société Normalu fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire,
Dit que la société Normalu est recevable en son action en contrefaçon de la marque verbale de l’Union européenne CREADESIGN n°008802647,
Dit que la société Vecta Design est irrecevable en ses demandes reconventionnelles relatives à la validité de la marque verbale de l’Union européenne CREADESIGN n°008802647 (défaut de distinctivité et défaut d’usage sérieux) pour les produits :
– En classe 11 : appareils et installations d’éclairage, diffuseurs d’éclairage, dispositifs de protection pour l’éclairage, lampes d’éclairage, plafonniers, réflecteurs de lampes, tubes lumineux ou opaques pour l’éclairage, luminaires en matières plastiques (succédanés du tissu), paravents d’éclairage.
– En classe 19 : armatures non métalliques pour la construction, cloisons non métalliques, profilés non métalliques de fixation de toiles ou films pour faux plafonds ou faux murs, plafonds non métalliques, plafonds-tendus, notamment plafonds-tendus décorés par flocage.
– En classe 27 : revêtements de sols non en matière Z; toile ou film non en matière Z pour faux plafonds ou faux murs; tentures pour murs ou plafonds non en matière Z.
Rejeté les demandes de la société Vecta Design fondées sur l’absence de distinctivité et le défaut d’usage sérieux de la marque CREADESIGN n°008802647,
Rejeté les demandes de la société Normalu fondées sur la contrefaçon de la marque verbale de l’Union européenne CREADESIGN n°008802647,
Rejeté les demandes subsidiaires à l’action en contrefaçon de marque de la société Normalu fondées sur la concurrence déloyale et parasitaire,
Dit qu’en publiant sur son site internet 3 photographies émanant de supports promotionnels de la société Normalu ou de son site internet www.Barrisol.com, la société Vecta Design a commis des actes de concurrence déloyale à l’égard de la société Normalu,
Condamné la société Vecta Design à payer à la société Normalu une somme de 3 000 euros au titre du préjudice d’image,
Rejeté les demandes formulées par la société Normalu à l’encontre de l’association ATI sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire,
Rejeté les demandes formulées par les sociétés Vecta Design et Azimut et l’association ATI à l’encontre de la société Normalu sur le fondement de la procédure abusive,
Dit n’y avoir pas lieu d’examiner l’action en garantie dirigée contre les sociétés Vecta Design et Azimut,
Dit n’y avoir pas lieu d’ordonner le retrait des trois photographies litigieuses du site internet de la société Vecta Design,
Rejeté les demandes de publication,
Condamné la société Normalu à payer à la société Azimut et à l’association ATI ensemble la somme de 30.000 euros et à payer à la société Vecta Design la somme de 85.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamné la société Normalu aux dépens dont distraction au profit de Maître Emmanuel de Marcellus pour ce qui concerne la société Vecta Design et dont distraction au profit de Maître X Y pour ce qui concerne la société Azimut et l’association ATI,
Dit n’y avoir lieu d’ordonner l’exécution provisoire.
A la suite de sa déclaration d’appel du 6 juillet 2020, la société Normalu a pris la décision de renoncer aux brevets FR 298 et EP 553. Ses requêtes à ces fins ont été acceptées le 14 octobre 2021 par l’INPI et le 22 octobre 2021 par l’OEB.
La société Normalu a par ailleurs déposé devant l’OEB une requête en limitation le 16 juin 2021, acceptée par l’Office le 16 septembre 2021, et publiée le 10 novembre 2021 au Bulletin Européen des Brevets.
Sur les chefs non contestés en appel
Le prononcé de la nullité des revendications des brevets français 2 985 298 et européens 2 610 553 est sans objet, la société Normalu ayant renoncé auxdits brevets.
L’irrecevabilité des demandes reconventionnelles relative au défaut de distinctivité et au défaut d’usage sérieux de la marque pour divers produits des classes 11, 19 et 27 n’est pas contestée en appel.
Présentation du brevet EP 071
L’invention, intitulée « Dispositif de fausse paroi à triple épaisseur », est un dispositif destiné à être fixé sur une paroi telle qu’un mur ou un plafond [002].
Le paragraphe [0005] du brevet EP071 explique que ‘si ces dispositifs de fausse paroi comportant un panneau avec une unique nappe tendue permettent un grand nombre de réalisations, il s’avère aujourd’hui nécessaire de pouvoir proposer des panneaux comportant au moins trois nappes tendues s’étendant parallèlement, ceci dans le but de créer des fausses parois présentant des performances d’absorption acoustiques accrues ou encore des ensembles lumineux générant un effet esthétique nouveau’.
La description précise que ‘L’invention vise donc à répondre à ce besoin en proposant des dispositifs de panneau dont les éléments profilés constituant le châssis du panneau permettent d’accueillir trois nappes tendues ou plus’ [007] et qu’elle ‘a pour objet un caisson lumineux selon la revendication 1, et un ensemble acoustiquement absorbant selon la revendication 7″ [008].
La revendication 1 telle que limitée porte désormais sur un caisson lumineux, et non sur un dispositif de fausse paroi, tout comme les revendications 2 à 5 du brevet EP 071qui sont dépendantes.
Une nouvelle revendication 6, dépendante de l’une quelconque des revendications 1 à 5, enseigne que les nappes translucides ou transparentes tendues sont réalisées en polychlorure de vinyle.
Une nouvelle revendication indépendante 7 a été ajoutée visant un « ensemble acoustiquement absorbant » comprenant le dispositif de fausse paroi.
Enfin, de nouvelles revendications 8 à 13, dépendantes de cette revendication 7, ont été ajoutées.
Les revendications dans leur version telle que limitée sont les suivantes :
– revendication 1′: «’Caisson lumineux comprenant un dispositif de fausse paroi comportant un panneau formé d’au moins une nappe (19) translucide ou transparente tendue fixée à la base d’un châssis, ledit châssis étant constitué par l’assemblage d’éléments profilés (1) formant ses côtés, dans lequel : – chaque élément profilé (1) du châssis présente une section droite rectangulaire, triangulaire ou en triangle rectangle tronqué avec une première face supérieure (11), une base (12) opposée à ladite première face supérieure (11), une seconde face externe (13) et une troisième face interne (14), en regard de la seconde face externe (13) ; caractérisé en ce que : – le caisson lumineux comprend au moins trois nappes (19) translucides ou transparentes tendues formant une triple épaisseur de nappes translucides ou transparentes ; et – chaque profilé (1) comporte au moins trois logements (15,16,17) destinés chacun à recevoir une bordure périphérique (18) d’une desdites au moins trois nappes (19) translucides ou transparentes tendues, un premier logement (15) situé à proximité de la première face supérieure (11) du profilé (1), un second logement (16) situé à proximité de la base (12) dudit profilé (1) et au moins un troisième logement (17), dit intermédiaire, situé entre la première face supérieure (11) et la base (12) et aménagé dans la face interne (14) du profilé (1), lesdits logements (15,16,17) de réception de la bordure périphérique (18) d’une nappe translucide ou transparente (19) tendue étant intégrés dans l’épaisseur du profilé (1), entre la face interne (14) et la face externe (13) et le troisième logement (17) comporte un double épaulement, c’est-à-dire un épaulement (20) de part et d’autre de l’ouverture du logement (17).’»
– revendication 2′: «’Caisson lumineux selon la revendication 1 caractérisé en ce que les logements (15,16,17) de réception de la bordure périphérique (18) d’une nappe translucide ou transparente (19) présentent une section droite globalement rectangulaire, ouverte sur un côté’».
– revendication 3′: «’Caisson lumineux selon l’une quelconque des revendications 1 à 2 caractérisé en ce que le premier logement (15) et le second logement (16) comportent un double épaulement, c’est-à-dire un épaulement (20) de part et d’autre de l’ouverture desdits logements’».
– revendication 4′: Caisson lumineux selon l’une quelconque des revendications 1 à 3 caractérisé en ce que le premier logement (15) et le troisième logement (17) débouchent sur la face interne (14), et le second logement (16) débouche sur la base (12)’».
– revendication 5′: Caisson lumineux selon l’une quelconque des revendications 1 à 3 caractérisé en ce que le premier logement (15), le second logement (16) et le troisième logement (17) débouchent sur la face interne (14)’».
– revendication 6′: «’Caisson lumineux selon l’une quelconque des revendications 1 à 5 caractérisé en ce que lesdites au moins trois nappes (19) translucides ou transparentes tendues sont réalisées en polychlorure de vinyle’».
– revendication 7′: «’Ensemble acoustiquement absorbant comprenant un dispositif de fausse paroi comportant un panneau formé d’au moins une nappe (19) tendue fixée à la base d’un châssis, ledit châssis étant constitué par l’assemblage d’éléments profilés (1) formant ses cotés, dans lequel :
– chaque élément profilé (1) du châssis présente une section droite rectangulaire, triangulaire ou en triangle rectangle tronqué avec une première face supérieure (11), une base (12) opposée à ladite première face supérieure (11), une seconde face externe (13) et une troisième face interne (14), en regard de la seconde face externe (13) ;
– l’ensemble acoustiquement absorbant comprend au moins trois nappes (19) tendues formant une triple épaisseur de nappes ; et
– chaque profilé (1) comporte au moins trois logements (15,16,17) destinés chacun à recevoir une bordure périphérique (18) d’une desdites au moins trois nappes (19) tendues, un premier logement (15) situé à proximité de la première face supérieure (11) du profilé (1), un second logement (16) situé à proximité de la base (12) dudit profilé (1) et au moins un troisième logement (17), dit intermédiaire, situé entre la première face supérieure (11) et la base (12) et aménagé dans la face interne (14) du profilé (1), lesdits logements (15,16,17) de réception de la bordure périphérique (18) d’une nappe (19) tendue étant intégrés dans l’épaisseur du profilé (1), entre la face interne (14) et la face externe (13) et le troisième logement (17) comporte un double épaulement, c’est-à-dire un épaulement (20) de part et d’autre de l’ouverture du logement (17)’».
– revendication 8′: «’Ensemble acoustiquement absorbant selon la revendication 7 caractérisé en ce que les logements (15,16,17) de réception de la bordure périphérique (18) d’une nappe (19) présentent une section droite globalement rectangulaire, ouverte sur un côté’».
– revendication 9′: «’Ensemble acoustiquement absorbant selon l’une quelconque des revendications 7 à 8 caractérisé en ce que le premier logement (15) et le second logement (16) comportent un double épaulement, c’est-à-dire un épaulement (20) de part et d’autre de l’ouverture desdits logements’».
– revendication 10′: «’Ensemble acoustiquement absorbant selon l’une quelconque des revendications 7 à 9 caractérisé en ce que le premier logement (15) et le troisième logement (17) débouchent sur la face interne (14), et le second logement (16) débouche sur la base (12).’»
– revendication 11′: «’Ensemble acoustiquement absorbant selon l’une quelconque des revendications 7 à 10 caractérisé en ce que le premier logement (15), le second logement (16) et le troisième logement (17) débouchent sur la face interne (14)’».
– revendication 12′: «’Ensemble acoustiquement absorbant selon l’une quelconque des revendications 7 à 11 caractérisé en ce que lesdites au moins trois nappes (19) tendues comportent des micro-perforations’».
– revendication 13′: «’Ensemble acoustiquement absorbant selon l’une quelconque des revendications 7 à 12 caractérisé en ce que lesdites au moins trois nappes (19) tendues sont réalisées en polychlorure de vinyle’».
Le brevet comporte en outre une unique figure.
Sur la nullité pour extension de la protection du brevet après limitation
La société Vecta Design soutient en premier lieu que le brevet avant limitation couvrait un dispositif de fausse paroi et non un caisson lumineux ni un ensemble acoustiquement absorbant ; que la limitation a étendu la portée de la protection en la déplaçant vers une invention non explicitement revendiquée ; que cette extension de la protection est contraire au principe d’une limitation. Elle demande la nullité du brevet limité de ce chef.
La société Normalu objecte que le brevet délivré revendiquait un dispositif A (fausse paroi) et l’utilisation du dispositif A pour réaliser un dispositif B (caisson lumineux) alors que le brevet après limitation revendique le dispositif B comprenant le dispositif A. Elle ajoute que la portée du brevet a été limitée puisque la revendication 1 avant limitation protégeait tout dispositif de fausse paroi alors que la revendication limitée protège seulement les dispositifs de fausse paroi dans des caissons lumineux ou des ensembles acoustiquement absorbants.
Conformément à l’article 138 §1 c) de la Convention sur le brevet européen (CBE), le brevet européen peut être déclaré nul si ‘l’objet du brevet européen s’étend au-delà du contenu de la demande telle qu’elle a été déposée’.
L’article 123(3) de la CBE énonce que le brevet européen ne peut être modifié de façon à étendre la protection qu’il confère.
Enfin, l’article L. 613-25 (d) du code de la propriété intellectuelle dispose que le brevet est déclaré nul si, après limitation, l’étendue de la protection conférée par le brevet a été accrue.
En l’espèce, il est constant qu’avant limitation la revendication 1 qui est la revendication principale du brevet EP 071 visait un ‘dispositif de fausse paroi’ alors que la revendication 1 telle que limitée vise un ‘caisson lumineux comprenant un dispositif de fausse paroi’, de sorte que l’objet même de la protection, qui était initialement un dispositif de fausse paroi, et qui, après limitation, est un caisson lumineux comprenant un dispositif de fausse paroi, a été modifié. Il est également flagrant que cette modification accroît la portée du brevet, le caisson lumineux n’étant pas revendiqué dans le brevet avant limitation, et ne figurant dans la revendication dépendante 6 que comme une utilisation possible de l’invention ‘utilisation d’un dispositif de fausse paroi selon l’une quelconque des revendications 1 à 5 pour la réalisation de caissons lumineux’.
De même, la revendication 7 du brevet tel que limité est une revendication indépendante portant sur un ‘ensemble acoustiquement absorbant comprenant un dispositif de fausse paroi’ alors que le brevet tel que délivré ne revendiquait pas un ensemble acoustiquement absorbant mais seulement, dans le cadre d’une revendication dépendante, une ‘utilisation d’un dispositif de fausse paroi selon l’une quelconque des revendications 1 à 5 pour la réalisation d’ensemble acoustiquement absorbants’, cette modification de l’objet du brevet ne constituant pas davantage une limitation mais bien un accroissement de sa portée.
Il s’ensuit que la partie française du brevet européen EP 071 limité doit être annulée pour extension de sa portée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens de nullité.
Les demandes de la société Normalu sur le fondement de la contrefaçon du brevet EP 071 seront dès lors rejetées, et le jugement confirmé sur ce point.
Sur la demande subsidiaire en concurrence déloyale et parasitisme
La société Normalu soutient que les intimées ont créé de manière fautive une confusion dans l’esprit du public en proposant des copies serviles du caisson lumineux Normalu protégé par le brevet EP 071 dans les produits de sa gamme Lumière Acoustic ; que le profilé AL 21 a la même couleur grise de type aluminium naturel, en coupe, avec des nappes accrochées aux logements, pareillement au Nanoperf de Normalu ; que le caisson a la même forme rectangulaire, les mêmes proportions ainsi que le même cadre et les mêmes nappes de couleur blanche diffusant une lumière blanche ; que ces éléments ne sont pas dictés par une exigence technique, une grande variation de formes, épaisseurs et couleurs étant possibles ; que cette recherche de confusion est d’autant plus manifeste que Vecta Design n’a pas hésité à reproduire des photographies sur son site internet de projets de Normalu laissant penser que ce sont ses propres réalisations.
Elle ajoute que les dispositifs de caisson lumineux Normalu sont le fruit d’un travail de recherche ayant nécessité des investissements aboutissant à des techniques innovantes, et que les sociétés Vecta Design et Azimut ont profité sans bourse délier du savoir-faire et des investissements de Normalu, et se sont donc placées dans son sillage.
La concurrence déloyale et le parasitisme sont pareillement fondés sur l’article 1240 du code civil mais sont caractérisés par l’application de critères distincts, la concurrence déloyale l’étant au regard du risque de confusion, considération étrangère au parasitisme qui requiert la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique copie une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir faire, d’un travail intellectuel et d’investissements. Ces deux notions doivent être appréciées au regard du principe de la liberté du commerce et de l’industrie qui implique qu’un produit qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit ou par l’existence d’une captation parasitaire, circonstances attentatoires à l’exercice paisible et loyal du commerce.
En l’espèce, la société Normalu se borne à alléguer que les caissons en cause auraient les mêmes dimensions et les mêmes épaisseurs sans le démontrer, le simple fait qu’ils aient une forme rectangulaire, qui correspondent à la grande majorité des plafonds sur lesquels les caissons sont suspendus, ne pouvant être considéré comme fautif, pas plus que le choix banal d’un encadrement de couleur gris aluminium, ou celui de nappes de couleur blanche, couleur qui permet de diffuser la lumière, dont la couleur blanche correspond à celle des ampoules utilisées. Le grief de concurrence déloyale formé à l’encontre des sociétés Vecta Design et Azimut, à titre subsidiaire aux faits de contrefaçon de brevet, n’est donc pas caractérisé, le jugement sera confirmé de ce chef.
En outre, en se bornant à produire une attestation de la directrice opérationnelle déclarant que le dispositif de fausses parois a fait l’objet d’une déclaration pour le crédit impôt recherches d’un montant de 30 000 euros sans justifier d’une quelconque notoriété de ses produits ni démontrer la faute qu’aurait commise la société Vecta Design, le seul fait de s’inspirer de produits concurrents non protégés par un droit de propriété intellectuelle n’étant pas en soi fautif, la société Normalu échoue à caractériser des faits de parasitisme. Les demandes formées de ce chef à titre subsidiaire seront rejetées, et le jugement confirmé sur ce point.
Sur la marque verbale de l’Union européenne CREADESIGN
Sur la recevabilité de l’action en contrefaçon
La société Vecta Design soutient que la société Normalu, ayant formé une demande additionnelle en contrefaçon de marque plus d’un an après l’avoir assignée en contrefaçon de brevet et concurrence déloyale, invoque de nouveaux faits qui ne se rattachent pas à sa demande principale et originelle dès lors qu’elles ne concernent pas les mêmes produits.
La société Normalu répond que ses demandes sont liées entre elles par un lien suffisant puisqu’elles visent toutes deux à faire constater que la société Vecta Design tente de profiter indûment de ses investissements, qu’il s’agisse de ses innovations techniques ou de ses éléments identitaires et promotionnels.
Ainsi que l’a jugé le tribunal par des motifs que la cour adopte, dans la mesure où les faits allégués de contrefaçon de marque concernent des ‘faux plafonds et faux murs, matériaux de construction non métalliques, revêtements de murs, de parois, de plafonds non métalliques pour la construction’ visés dans la classe 19, produits qui sont identiques ou similaires à ceux qui étaient incriminés au titre de la contrefaçon de brevet, il existe un lien suffisant entre la demande initiale et la demande additionnelle. La demande en contrefaçon de marque est donc recevable. Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la validité de la marque CREADESIGN
La société Vecta Design expose que les produits visés par le dépôt de la marque litigieuse sont des produits ayant trait aux métiers du design et de la décoration d’intérieur; que les termes accolés ‘CREA’ et ‘DESIGN’ sont impropres à rendre le signe CREADESIGN arbitraire pour désigner des produits tels que des toiles floquées de plafonds tendus dès lors que les deux termes qui la composent sont descriptifs, le terme ‘CREA’ étant perçu comme une référence à la création et le terme ‘DESIGN’ évoquant l’objet ou la destination des produits couverts par la marque.
En réponse, la société Normalu indique que l’analyse de la distinctivité doit porter sur l’ensemble du signe constituant la marque et non sur chacun de ses éléments pris séparément, et ajoute que le signe CREADESIGN est un néologisme n’ayant aucune signification dans le langage courant.
C’est par de justes motifs approuvés par la cour que le tribunal, après avoir notamment rappelé que le caractère distinctif d’un signe doit s’apprécier par rapport aux produits désignés dans l’enregistrement et par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, en se plaçant à la date du dépôt, a jugé que si les deux signes « CREA » et « DESIGN » ont un lien avec l’aménagement intérieur, le signe CREADESIGN pris dans son ensemble est parfaitement arbitraire pour désigner les ‘faux plafonds et faux murs (non métalliques), matériaux de construction non métalliques, revêtements de murs, de parois, de plafonds non métalliques pour la construction’, n’ayant aucune signification dans le langage courant pour le public pertinent, professionnel ou consommateur s’intéressant aux matériaux de construction et d’aménagement intérieurs. La demande de nullité de la marque de ce chef sera dès lors rejetée, et le jugement confirmé sur ce point.
Sur la déchéance de la marque CREADESIGN
La société Vecta Design soutient que la société Normalu ne fait pas la démonstration d’un usage sérieux de sa marque CREADESIGN pour les produits ‘faux plafonds et faux murs, matériaux de construction non métalliques, revêtements de murs, de parois, de plafonds non métalliques pour la construction’ visés dans la classe 19.
Elle soutient que le signe est utilisé pour une gamme de différents produits, sans qu’il soit possible d’attribuer la marque à un produit en particulier, et que les preuves d’usages versés au débat ne remplissent pas la fonction de la marque, qui est de distinguer des produits particuliers aux yeux de la clientèle.
La société Normalu répond que les produits « CREADESIGN » sont des revêtements vinyle pour murs, plafonds, mobiliers et luminaires et qu’elle verse au débat des documents de nature à justifier selon elle du caractère sérieux de l’usage de sa marque, notamment des brochures commerciales, bons de commande et catalogues à destination du public.
C’est par des motifs pertinents approuvés par la cour que le tribunal après avoir notamment rappelé que la preuve de l’exploitation peut être rapportée par tous moyens, et que la période de référence à prendre en considération pour l’appréciation de la déchéance est en l’espèce celle allant du 17 mai 2013 au 17 mai 2018, laquelle n’est pas discutée par les parties, et après avoir listé notamment les brochures produites par la société Normalu pour les années 2014, 2015,2016, 2017et 2018 présentant les revêtements CREADESIGN pour plafonds, mobiliers et diffuseurs d’éclairage, ainsi que les tarifs, bons de commande et les factures datés de 2013 à 2018 afférents auxdits produits, a jugé que les pièces produites démontrent à l’évidence l’utilisation du signe litigieux afin de désigner à titre de marque les produits visés. La demande de déchéance des droits de la société Normalu sur la marque CREADESIGN sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef.
Sur la contrefaçon de la marque CREADESIGN
La société Normalu soutient que les produits en cause sont identiques dès lors que les dalles incriminées sont des revêtements de murs, de parois, de plafonds non métalliques pour la construction, permettant de réaliser des faux plafonds et faux murs couverts par la marque CREADESIGN. Elle estime que les deux signes en cause sont hautement similaires, le signe ‘CREA’ commun aux deux signes étant dominant dans la marque ‘CREADESIGN’ de sorte qu’il résulte de la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle entre les signes que le risque de confusion est avéré, la clientèle étant conduite à attribuer une origine commune aux produits commercialisés par Normalu et ceux commercialisés par Vecta Design.
La société Vecta Design conteste la similarité des produits en cause en faisant valoir que les produits incriminés sont des dispositifs de miroirs décoratifs à fixer sur un plafond, produits décoratifs sans lien avec les matériaux de construction visés par la marque. Elle ajoute que l’impression d’ensemble des signes en cause est très différente, excluant tout risque de confusion.
La cour rappelle qu’en application de l’article 9 § 1 du règlement (CE) n 2017/1001 du 14 juin 2017 l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour des produits ou services lorsque :
a) ce signe est identique à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques à ceux pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée ;
b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque.
La cour constate que le signe incriminé ‘VECTA MIRROR CREA’ figure une fois en page 13 d’un catalogue et une fois en page 12 d’un autre catalogue de la société Vecta Design ainsi qu’il résulte du procès-verbal de constat sur internet du 18 août 2017 et du catalogue versé au débat.
Les produits en cause, d’un côté des dispositifs de toiles tendues et de miroirs à fixer sur un plafond ou sur un mur, d’autre part des ‘faux plafonds et faux murs (non métalliques), matériaux de construction non métalliques, revêtements de murs, de parois, de plafonds non métalliques pour la construction’ sont des produits similaires relatifs à des aménagements de faux plafonds ou faux murs ayant notamment une fonction décorative.
Sur un plan visuel les signes ont en commun le terme CREA, peu distinctif en matière d’aménagement et de décoration, qui n’est cependant pas placé dans la même position, en attaque dans la marque revendiquée et en finale dans les signes incriminés. Ils se distinguent par le fait que les signes incriminés comportent aussi en attaque les termes VECTA, qui est arbitraire, et MIRROR, aisément compris comme évoquant un miroir. Les signes donc visuellement différents.
Ils se distinguent aussi sensiblement par leur prononciation compte tenu de leurs différences de longueur, d’attaque et de finale.
Conceptuellement ils sont différents, la marque invoquée renvoyant en général au monde du design alors que le signe incriminé se rapporte plus spécifiquement aux miroirs.
Il s’ensuit que, malgré la similarité des produits en cause, le consommateur concerné ne pourra se méprendre sur leurs origines respectives, et ne sera pas conduit, au vu des différences relevées, à penser que ces signes proviennent d’une même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion n’étant pas caractérisé, les demandes sur le fondement de la contrefaçon de marque seront rejetées et le jugement confirmé de ce chef.
Sur la concurrence déloyale et parasitaire à titre subsidiaire
A titre subsidiaire, la société Normalu soutient que grâce à la très haute similarité des signes et à leur association systématique dans l’esprit du public, la société Vecta Design, concurrente directe, a profité de la renommée de Normalu dans le domaine du plafond tendu, marché de niche partagé par peu d’acteurs, de la large connaissance par le public du produit « CREADESIGN » ainsi que de l’image de qualité attachée à Normalu et à ses produits.
La société Normalu ne démontre cependant aucun risque de confusion fautif, les signes en cause étant différents ainsi qu’il vient d’être démontré, ni ne prouve les investissements qu’elle aurait engagés ou la notoriété qu’elle aurait acquise dont la société Vecta aurait indûment profité. Ses demandes à titre subsidiaire sur le fondement de la concurrence déloyale et du parasitisme seront donc rejetées, et le jugement confirmé de ce chef.
Sur les faits distincts de concurrence déloyale et parasitaire
La société Normalu reproche à la société Vecta Design d’avoir diffusé sur son site internet vectadesign.com, pour promouvoir sa propre activité, trois photographies de projets d’aménagement qu’elle a elle-même réalisés sans préciser que ces réalisations ne sont pas les siennes, en laissant penser que ce sont ses propres réalisations, créant ainsi un risque de confusion. Elle estime que la société Vecta Design a ainsi tenté de capter à son profit sa clientèle, et demande de la condamner à ce titre à lui payer la somme de 100 000 euros.
Elle soutient en outre que l’association ATI assure la promotion de la société Azimut et met en avant auprès du public les caissons lumineux contrefaisants. Elle lui reproche d’avoir assuré la diffusion et la promotion des activités contrefaisantes de ses membres et estime avoir subi un préjudice justifiant l’octroi d’une indemnité de 10 000 euros.
La société Vecta Design répond que les photographies litigieuses lui ont été communiquées par son fournisseur italien, qu’il n’est pas prouvé qu’elles sont attribuables à la société Normalu et qu’elles ont vocation à présenter des plafonds tendus installés dans des lieux publics sans qu’à aucun moment la société Vecta Design se soit prétendue l’auteur de ces réalisations ; qu’elle a retiré ces clichés sans que cela constitue la reconnaissance d’une faute, et que ces photographies qui figuraient parmi des dizaines d’autres n’ont entraîné aucune captation de clientèle.
L’association ATI prétend que la société Normalu ne démontre pas qu’elle ferait la promotion de faux plafonds AL21 objet du présent litige, et en tout état de cause qu’elle n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle.
La cour rappelle que la concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de liberté du commerce qui implique qu’un signe qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, et que le parasitisme consiste pour un opérateur économique à tirer profit d’une valeur économique d’autrui lui procurant un avantage concurrentiel injustifié, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements, en se plaçant dans son sillage et en profitant indûment de la notoriété acquise ou des investissements consentis.
En l’espèce les 3 photographies litigieuses qui sont exploitées sur les supports promotionnels et le site internet de la société Normalu avec la mention Barrisol qui est la marque de commercialisation des produits de la société Normalu, se retrouvent sur le site internet vectadesign.com au sein de la rubrique ‘lieux publics’. C’est par de justes motifs que le tribunal a jugé que même si ces photographies figurent au milieu de plusieurs dizaines d’autres photographies de toiles tendues dans des lieux publics, le consommateur visé peut cependant être amené à croire que ces trois réalisations effectuées par la société Normalu, et qui figurent sur le site Vecta Design, proviennent d’entreprises économiquement liées de sorte que le risque de confusion induit est caractérisé.
C’est également à juste titre que le tribunal a retenu que seul un préjudice d’image, résultant de ce risque de confusion, était avéré et a justement évalué sa réparation à un montant de 3 000 euros. Il n’y a pas lieu enfin, ainsi que l’a jugé le tribunal, d’ordonner le retrait des photographies litigieuses alors qu’il n’est pas contesté que ces photographies, que la société Vecta Design a retirées, n’y figurent plus depuis plusieurs années. Le jugement sera également confirmé sur ce point.
S’agissant des demandes formées à l’encontre de l’association ATI, en l’absence d’actes de contrefaçon de brevet et de marque retenus à l’encontre des sociétés Vecta Design et Azimut, le fait que l’association ATI présente sur son internet des solutions textiles intérieures comprenant des plafonds tendus Vecta Design installés par la société Azimut n’est pas fautif. Les demandes en concurrence déloyale et parasitaire formées par la société Normalu de ce chef à l’encontre de l’association ATI seront rejetées et le jugement confirmé sur ce point.
Sur la demande reconventionnelle en procédure abusive
La société Vecta Design soutient que la présente action de la société Normalu est fautive dès lors qu’elle l’a privée d’un marché sur le territoire français et qu’il lui sera difficile de conquérir une nouvelle clientèle à l’issue de cette procédure. Elle demande par conséquent la condamnation de la société Normalu à lui verser la somme de 150.000 euros.
La société Azimut et l’association ATI font valoir que la procédure est également abusive à leur égard, la société Normalu ayant décidé de renoncer à deux de ses brevets et de présenter une requête en limitation du troisième après trois jeux de conclusions en appel aux fins de désorganiser la défense ainsi que ses concurrents sur le marché. Elles demandent en réparation la somme de 50.000 euros chacune.
La société Normalu répond qu’elle n’a fait que défendre la validité de titres qui lui ont été délivrés ; qu’aucun abus ne peut découler en soi de la décision d’user des prérogatives de limitation d’un brevet ; qu’il n’y a pas d’intention de nuire. Elle sollicite donc la confirmation du jugement qui a rejeté les demandes sur ce fondement, et le débouté des sociétés Vecta Design et Azimut et de l’association ATI de ce chef.
L’accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit, ce n’est que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles que le fait d’agir en justice ou d’exercer une voie de recours légalement ouverte est susceptible de constituer un abus. Or, les sociétés Vecta Design et Azimut et l’association ATI ne démontrent pas la faute commise par la société Normalu qui aurait fait dégénérer en abus son droit d’agir en justice, l’intéressée ayant pu légitimement se méprendre sur l’étendue de ses droits. Le jugement sera confirmé de ce chef, et leur demandes additionnelles en appel sur ce fondement seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement sauf en ce qu’il a prononcé la nullité des revendications 1, 2 et 6 de la partie française du brevet EP 2 659 071 pour défaut d’activité inventive,
Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,
Prononce la nullité de la partie française du brevet EP 2 659 071 pour extension de sa portée après limitation,
Dit que la décision sera inscrite au registre national des brevets et au registre européen des brevets à l’initiative de la partie la plus diligente, une fois la décision devenue définitive, aux frais de la société Normalu ;
Rejette les demandes des sociétés Vecta Design et Azimut et de l’association ATI sur le fondement de la procédure abusive ;
Condamne la société Normalu aux dépens d’appel et vu l’article 700 du code de procédure civile la condamne à payer à la société Vecta Design la somme de 50 000 euros, à la société Azimut et à l’association ATI, la somme globale de 40 000 euros, au titre des frais irrépétibles d’appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE