Canal + privée de sa marque « Canal Vod »
Canal + privée de sa marque « Canal Vod »
Ce point juridique est utile ?

Le refus du dépôt de la marque « Canal Vod » par la société Canal+ a été confirmé en appel.  L’INPI avait notifié au déposant une objection provisoire à enregistrement l’avisant que l’objet de sa demande était susceptible de tomber partiellement sous le coup des dispositions des articles L.711-1 et L.711-2 du code de la propriété intellectuelle aux motifs que le signe déposé n’était pas susceptible de distinguer les produits et services susvisés de ceux d’une autre entreprise et qu’il pouvait servir à en désigner une caractéristique.

Association et canal et vod

L’association dans la demande d’enregistrement contestée de ces deux termes, canal et vod, sera perçue comme désignant une bande de fréquence, ou une chaîne de télévision proposant, à la demande du client, d’accéder aux produits sollicités, soit des produits ou services correspondant ou similaires à ceux visés par cette demande d’enregistrement, la société Groupe Canal + reconnaissant du reste que cette association évoque les produits et services concernés.

La juxtaposition de ces termes sera comprise par le public comme une chaîne proposant des vidéos, ou des films à la location, et ses services annexes, et n’est pas de nature à permettre au consommateur moyennement avisé de distinguer les services proposés sous ce signe de ceux proposés par un diffuseur concurrent.

Marque descriptive refusée au dépôt   

Une marque constituée d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive des caractéristiques de ces produits et services, sauf s’il existe un écart perceptible entre le mot et la simple somme des éléments qui la composent, ce qui suppose soit que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, en sorte qu’il prime la somme desdits éléments, soit que le mot est entré dans le langage courant et y a acquis une signification qui lui est propre, en sorte qu’il est désormais autonome par rapport aux éléments qui le composent.

En l’espèce l’association du terme canal avec une abréviation anglaise vod’ n’apparait pas, par sa construction, de nature à créer une impression distincte des produits et services désignés.

Acquisition du caractère distinctif par l’usage

S’agissant de l’acquisition du caractère distinctif de l’usage du signe, la notoriété de la marque canal + n’est pas contestée, et il est également produit une enquête réalisée en 2007 pour établir la renommée du signe Canal.

Pour autant, le fait que le terme canal soit placé en position d’attaque ne saurait suffire à établir son caractère dominant au sein du signe canal vod, et à conférer une distinctivité à la marque composée de ce signe canal suivi de vod.

Le caractère distinctif de la marque acquis par l’usage qui en est fait signifie que la marque est apte à identifier le produit pour lequel est demandé l’enregistrement comme provenant d’une entreprise déterminée et donc apte à distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises.

Or, il n’est pas justifié de l’usage du signe ‘canal vod’, de sorte que ce signe n’a pu acquérir une distinctivité par l’usage qui en est fait.

En effet, les pièces produites n’établissent pas l’acquisition de la distinctivité par l’usage du signe ‘canal vod’, étant rappelé que l’acquisition du caractère distinctif par l’usage d’une marque s’apprécie au jour de son dépôt.

L’usage d’une marque sous une forme modifiée

Si la société Groupe Canal + soutient que l’usage d’une marque sous une forme modifiée doit être pris en compte pour déterminer si le signe tel que déposé a acquis une distinctivité du fait de son usage, il convient que les formes d’usage n’altèrent pas le caractère distinctif de la marque.

En l’espèce, l’usage du signe canal, qui est un des deux éléments composant le signe canal vod, ne peut servir à revendiquer l’acquisition du caractère distinctif par l’usage du signe ‘canal vod’ ; ce alors qu’au surplus, lorsqu’il est associé au signe vod, canal possède alors son sens de ‘bande de fréquences destinée aux émissions de radio et de télévision’.

S’agissant de marques composées de mots, comme celle qui fait l’objet du litige, un éventuel caractère distinctif doit être constaté non seulement pour chacun des termes pris séparément mais également pour l’ensemble qu’ils composent.

En l’espèce, le signe verbal dont l’enregistrement est sollicité est ‘canal vod’, il est composé de l’association des deux signes canal et vod.

Il est justifié que, sur le site internet Larousse, le terme canal a notamment comme définition, au titre du canal radioélectrique, ‘bande de fréquences destinée aux émissions de radio et de télévision’, et il est reconnu par les parties que le terme vod est l’abréviation anglaise de ‘video on demand’, soit vidéo à la demande, terme qui sera compris du public français.

L’exigence de distinctivité

L’article 3 de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques, article listant notamment les motifs de refus ou de nullité, indique que sont refusées à l’enregistrement ou sont susceptibles d’être déclarées nuls s’ils sont enregistrés les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

L’article L712-7 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version applicable au moment des faits, indiquait notamment que la demande d’enregistrement est rejetée si le signe ne peut constituer une marque par application des articles L. 711-1 et L. 711-2.

L’article L711-1 du code de la propriété intellectuelle prévoyait notamment que ‘la marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.

Peuvent notamment constituer un tel signe :

a) Les dénominations sous toutes les formes telles que : mots, assemblages de mots, noms patronymiques et géographiques, pseudonymes, lettres, chiffres, sigles ;’…

Enfin, l’article L711-2 spécifiait que ‘le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés.

Sont dépourvus de caractère distinctif :

a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service;

b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ;…

Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c, être acquis par l’usage’

S’agissant de marques composées de mots, comme celle qui fait l’objet du litige, un éventuel caractère distinctif doit être constaté non seulement pour chacun des termes pris séparément mais également pour l’ensemble qu’ils composent.

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

12e chambre

ARRET DU 27 JANVIER 2022

N° RG 21/00153 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UH6Y

AFFAIRE :

S.A. GROUPE CANAL +

C/

Organisme LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE

Décision déférée à la cour : Décision rendu le 10 Décembre 2020 par l’Institut National de la Propriété Industrielle de COURBEVOIE CEDEX

LE VINGT SEPT JANVIER DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

S.A. GROUPE CANAL + société anonyme à Directoire et Conseil de surveillance, au

capital de 100.000.000,00 euros, immatriculée au registre du

commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro 420 624

477, prise en la personne de son représentant légal, Maxime

X, directeur général, domicilié en cette qualité audit

siège,

[…]

[…]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 2165020 –

Représentant : Me Bérénice DEUTSCH de l’AARPI HOYNG ROKH MONEGIER VERON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0512

REQUERANT

****************

Organisme LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE

[…]

[…]

représenté par Madame Caroline LE PELTIER, chargée de mission

AUTRE PARTIE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue en audience publique le 2 novembre 2021, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés devant Monsieur François THOMAS, président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur François THOMAS, président,

Mme Véronique MULLER, conseiller,

Monsieur Bruno NUT, conseiller,

greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE

Après avis du ministère uublic à qui le dossier a été préalablement soumis à Monsieur Fabien BONAN, avocat général, qui a présenté des observations écrites.

EXPOSE DU LITIGE

Le 5 août 2016, la société Groupe Canal+ a déposé à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) une demande d’enregistrement n°16/4 292 131 portant sur le signe verbal ‘Canal VOD’ destiné à distinguer notamment les produits et services suivants :

« décodeurs, appareils et instruments pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction, le stockage, le cryptage, le décryptage, la transformation, le traitement du son ou des images ; appareils de communications et de télécommunications ; appareils et instruments audiovisuels, de télécommunication, de télématique ; téléviseurs ; télécommandes ; magnétophones ; magnétoscopes ; caméras ; antennes, antennes paraboliques ; enceintes, amplificateurs ; ordinateurs, écrans d’ordinateur, claviers d’ordinateurs, périphériques

d’ordinateurs ; clés usb ; modems ; décodeurs ; encodeurs ; dispositifs (appareils) d’accès et de contrôle d’accès à des appareils de traitement de l’information ; appareils d’authentification destinés à des réseaux de télécommunication ; appareils d’embrouillage de signaux et de désembrouillage de signaux et de retransmissions ; terminal numérique ; films vidéo ; cédérom, disques acoustiques, disques digital vidéo (DVD), disques vidéo et audio, disques numériques ; disques magnétiques ; disques optiques ; bandes vidéo ; lecteurs de Cédérom, de disques digital vidéo, de disques digital, de disques magnétiques, de disques vidéo et audio, de disques numériques, de disques acoustiques ; cartes magnétiques, cartes à puce ; lecteurs de cartes ; moniteurs de réception de données sur réseau informatique mondial ; appareils pour le traitement de l’information ; satellites à usage scientifique et de télécommunication ; cartes à mémoire ou à microprocesseur ; guide électronique de programmes de télévision et de radio ; appareils et instruments de programmation et de sélection de programmes de télévision ; appareils et instruments de télévision interactive; écrans de télévision ; logiciels (programmes enregistrés) ; câbles à fibre optique et câbles optiques ; batteries et piles électriques ; applications logicielles informatiques téléchargeables ; fichiers de musique téléchargeables ; fichiers d’images téléchargeables ; programmes informatiques pour télévision interactive » ; ‘services de télécommunications ; services de communications par terminaux d’ordinateurs ou par fibre optique ; communications radiophoniques, télégraphiques, téléphoniques ou visiophoniques, par télévision, par baladeur, par baladeur vidéo, par visiophone, par vidéographie interactive, par vidéophonie ; télédiffusion ; services de transmission d’informations par voie télématique ; transmission de messages, de télégrammes, d’images, de vidéos, de dépêches ; transmission d’informations par téléscripteur ; télétransmission ; émissions télévisées, émissions radiophoniques ; diffusion de programmes par satellite, par câble, par réseaux informatiques (notamment par Internet), par réseaux radiophoniques, par réseaux r a d i o t é l é p h o n i q u e s e t p a r v o i e h e r t z i e n n e ; d i f f u s i o n d e p r o g r a m m e s a u d i o , a u d i o v i s u e l s , cinématographiques, de multimédia, de textes et/ou d’images (fixes ou animées) et/ou de sons musicaux ou non, de sonneries, à usage interactif ou non ; services d’affichage électronique (télécommunications) ; location d’appareils de télécommunication ; location d’appareils et d’instruments de télématique à savoir téléphones, télécopieurs, appareils pour la transmission des messages, Modem ; location d’antennes et de paraboles ; location de dispositifs d’accès (appareils) à des programmes interactifs audiovisuels ; location de temps d’accès à des réseaux de télécommunication ; services de téléchargement de jeux vidéo, de données numérisées ; communications (transmissions) sur réseau informatique mondial ouvert (Internet) ou fermé

(Intranet) ; services de téléchargement en ligne de films et autres programmes audio et audiovisuels ; services de transmission de programmes et de sélection de chaînes de télévision ; services de fourniture d’accès à un réseau informatique ; services de fourniture de connexion à des services de télécommunication, à des services Internet et à des bases de données ; services d’acheminement et de jonction pour télécommunication ; services de raccordement par télécommunication à un réseau informatique ; services de transmission et réception d’images vidéo via l’Internet par le biais d’un ordinateur ou d’un téléphone mobile ; services téléphoniques ; transmission de fichiers numériques ; transmission de données en flux continu [streaming] ; transmission de séquences vidéo à la demande ; transmission de sons et images par satellite ou par réseau multimédia interactif » ; « divertissement ; divertissements radiophoniques et télévisés sur tout support à savoir téléviseur, ordinateur, baladeur, baladeur vidéo, assistant personnel, téléphone mobile, réseaux informatiques, Internet ; location de vidéogrammes, de films, d’enregistrements phonographiques, de bandes vidéo ; location de films cinématographiques ; location d’appareils de projection de cinéma, de décodeurs,

d’encodeurs, et de tout appareil et instrument audiovisuel, de postes de radio et de télévision, d’appareils audio et vidéo, de cameras, de baladeurs, baladeurs vidéo, de décors de théâtre ; mise à disposition en ligne de musique non téléchargeable ; mise à disposition en ligne de vidéos non téléchargeables ; services de divertissement interactif ».

Le 25 novembre 2016, l’Institut a notifié au déposant une objection provisoire à enregistrement l’avisant que l’objet de sa demande était susceptible de tomber partiellement sous le coup des dispositions des articles L.711-1 et L.711-2 du code de la propriété intellectuelle aux motifs que le signe déposé n’était pas susceptible de distinguer les produits et services susvisés de ceux d’une autre entreprise et qu’il pouvait servir à en désigner une caractéristique.

Le 4 janvier 2016, comme elle y était invitée, la société Groupe Canal + a présenté des observations contestant le bien-fondé de la notification.

Le 4 septembre 2018, l’INPI a notifié un projet de décision maintenant son objection, et la société Groupe

Canal + a présenté des observations en réponse.

Par décision du 10 décembre 2020, le Directeur général de l’INPI a :

– Rejeté la demande d’enregistrement n°16/4 292 131 pour les produits et services suivants : « décodeurs, appareils et instruments pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction, le stockage, le cryptage, le décryptage, la transformation, le traitement du son ou des images ; appareils de communications et de télécommunications ; appareils et instruments audiovisuels, de télécommunication, de télématique ; téléviseurs ; télécommandes ; magnétophones ; magnétoscopes ; caméras ; antennes, antennes paraboliques ; enceintes, amplificateurs ; ordinateurs, écrans d’ordinateur, claviers d’ordinateurs, périphériques

d’ordinateurs ; clés usb ; modems ; décodeurs ; encodeurs ; dispositifs (appareils) d’accès et de contrôle d’accès à des appareils de traitement de l’information ; appareils d’authentification destinés à des réseaux de télécommunication ; appareils d’embrouillage de signaux et de désembrouillage de signaux et de retransmissions ; terminal numérique ; films vidéo ; cédérom, disques acoustiques, disques digital vidéo (DVD), disques vidéo et audio, disques numériques ; disques magnétiques ; disques optiques ; bandes vidéo ; lecteurs de Cédérom, de disques digital vidéo, de disques digital, de disques magnétiques, de disques vidéo et audio, de disques numériques, de disques acoustiques ; cartes magnétiques, cartes à puce ; cartes à puce électroniques; lecteurs de cartes ; moniteurs de réception de données sur réseau informatique mondial ; appareils pour le traitement de l’information ; satellites à usage scientifique et de télécommunication ; cartes à mémoire ou à microprocesseur ; guide électronique de programmes de télévision et de radio; appareils et instruments de programmation et de sélection de programmes de télévision ; appareils et instruments de télévision interactive ; écrans de télévision ; logiciels (programmes enregistrés) ; câbles à fibre optique et câbles optiques ; batteries et piles électriques ; applications logicielles informatiques téléchargeables ; fichiers de musique téléchargeables ; fichiers d’images téléchargeables ; programmes informatiques pour télévision interactive » ; ‘services de télécommunications ; services de communications par terminaux d’ordinateurs ou par fibre optique ; communications radiophoniques, télégraphiques, téléphoniques ou visiophoniques, par télévision, par baladeur, par baladeur vidéo, par visiophone, par vidéographie interactive, par vidéophonie ; télédiffusion ; services de transmission d’informations par voie télématique ; transmission de messages, de télégrammes, d’images, de vidéos, de dépêches ; transmission d’informations par téléscripteur ; télétransmission ; émissions télévisées, émissions radiophoniques ; diffusion de programmes par satellite, par câble, par réseaux informatiques (notamment par Internet), par réseaux radiophoniques, par réseaux radiotéléphoniques et par voie hertzienne ; diffusion de programmes audio, audiovisuels, cinématographiques, de multimédia, de textes et/ou d’images (fixes ou animées) et/ou de sons musicaux ou non, de sonneries, à usage interactif ou non ; services d’affichage électronique (télécommunications) ; location d’appareils de télécommunication ; location d’appareils et d’instruments de télématique à savoir téléphones, télécopieurs, appareils pour la transmission des messages, Modem ; location d’antennes et de paraboles ; location de dispositifs d’accès (appareils) à des programmes interactifs audiovisuels ; location de temps d’accès à des réseaux de télécommunication ; services de téléchargement de jeux vidéo, de données numérisées ; communications (transmissions) sur réseau informatique mondial ouvert (Internet) ou fermé (Intranet) ; services de téléchargement en ligne de films et autres programmes audio et audiovisuels ; services de transmission de programmes et de sélection de chaînes de télévision ; services de fourniture d’accès à un réseau informatique ; services de fourniture de connexion à des services de télécommunication, à des services Internet et à des bases de données ; services d’acheminement et de jonction pour télécommunication ; services de raccordement par télécommunication à un réseau informatique ; services de transmission et réception d’images vidéo via l’Internet par le biais d’un ordinateur ou d’un téléphone mobile ; services téléphoniques ; transmission de fichiers numériques ; transmission de données en flux continu [streaming] ; transmission de séquences vidéo à la demande ; transmission de sons et images par satellite ou par réseau multimédia interactif » ; « divertissement ; divertissements radiophoniques et télévisés sur tout support à savoir téléviseur, ordinateur, baladeur, baladeur vidéo, assistant personnel, téléphone mobile, réseaux informatiques, Internet; location de vidéogrammes, de films, d’enregistrements phonographiques, de bandes vidéo ; location de films cinématographiques ; location d’appareils de projection de cinéma, de décodeurs, d’encodeurs, et de tout appareil et instrument audiovisuel, de postes de radio et de télévision, d’appareils audio et vidéo, de cameras, de baladeurs, baladeurs vidéo, de décors de théâtre ; mise à disposition en ligne de musique non téléchargeable ; mise à disposition en ligne de vidéos non téléchargeables ; services de divertissement interactif»,

– déclaré que la marque sera enregistrée pour les autres produits et services figurant dans la demande.

Au motif que le signe ‘Canal VOD’ est simplement descriptif de tels produits et services.

Le 8 janvier 2021, le requérant a formé un recours devant la cour d’appel de Versailles.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernier mémoire notifié le 29 septembre 2021, la société Groupe Canal+ demande à la cour de:

– Annuler la décision du Directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle du 10 décembre 2020 ayant rejeté partiellement la demande d’enregistrement n°16/4 292 131 pour les produits et services suivants :

« décodeurs, appareils et instruments pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction, le stockage, le cryptage, le décryptage, la transformation, le traitement du son ou des images ; appareils de communications et de télécommunications ; appareils et instruments audiovisuels, de télécommunication, de télématique ; téléviseurs ; télécommandes ; magnétophones ; magnétoscopes ; caméras ; antennes, antennes paraboliques ; enceintes, amplificateurs ; ordinateurs, écrans d’ordinateur, claviers d’ordinateurs, périphériques

d’ordinateurs ; clés usb ; modems ; décodeurs ; encodeurs ; dispositifs (appareils) d’accès et de contrôle d’accès à des appareils de traitement de l’information ; appareils d’authentification destinés à des réseaux de télécommunication ; appareils d’embrouillage de signaux et de désembrouillage de signaux et de retransmissions ; terminal numérique ; films vidéo ; cédérom, disques acoustiques, disques digital vidéo (DVD), disques vidéo et audio, disques numériques ; disques magnétiques ; disques optiques ; bandes vidéo ; lecteurs de Cédérom, de disques digital vidéo, de disques digital, de disques magnétiques, de disques vidéo et audio, de disques numériques, de disques acoustiques ; cartes magnétiques, cartes à puce ; lecteurs de cartes ; moniteurs de réception de données sur réseau informatique mondial ; appareils pour le traitement de l’information ; satellites à usage scientifique et de télécommunication ; cartes à mémoire ou à microprocesseur ; guide électronique de programmes de télévision et de radio ; appareils et instruments de programmation et de sélection de programmes de télévision ; appareils et instruments de télévision interactive; écrans de télévision ; logiciels (programmes enregistrés) ; câbles à fibre optique et câbles optiques ; batteries et piles électriques ; applications logicielles informatiques téléchargeables ; fichiers de musique téléchargeables ; fichiers d’images téléchargeables ; programmes informatiques pour télévision interactive » ; ‘services de télécommunications; services de communications par terminaux d’ordinateurs ou par fibre optique; communications radiophoniques, télégraphiques, téléphoniques ou visiophoniques, par télévision, par baladeur, par baladeur vidéo, par visiophone, par vidéographie interactive, par vidéophonie ; télédiffusion ; services de transmission d’informations par voie télématique ; transmission de messages, de télégrammes, d’images, de vidéos, de dépêches ; transmission d’informations par téléscripteur ; télétransmission ; émissions télévisées, émissions radiophoniques ; diffusion de programmes par satellite, par câble, par réseaux informatiques (notamment par Internet), par réseaux radiophoniques, par réseaux r a d i o t é l é p h o n i q u e s e t p a r v o i e h e r t z i e n n e ; d i f f u s i o n d e p r o g r a m m e s a u d i o , a u d i o v i s u e l s , cinématographiques, de multimédia, de textes et/ou d’images (fixes ou animées) et/ou de sons musicaux ou non, de sonneries, à usage interactif ou non ; services d’affichage électronique (télécommunications) ; location d’appareils de télécommunication ; location d’appareils et d’instruments de télématique à savoir téléphones, télécopieurs, appareils pour la transmission des messages, Modem ; location d’antennes et de paraboles ; location de dispositifs d’accès (appareils) à des programmes interactifs audiovisuels ; location de temps d’accès à des réseaux de télécommunication ; services de téléchargement de jeux vidéo, de données numérisées ; communications (transmissions) sur réseau informatique mondial ouvert (Internet) ou fermé

(Intranet) ; services de téléchargement en ligne de films et autres programmes audio et audiovisuels ; services de transmission de programmes et de sélection de chaînes de télévision ; services de fourniture d’accès à un réseau informatique ; services de fourniture de connexion à des services de télécommunication, à des services Internet et à des bases de données ; services d’acheminement et de jonction pour télécommunication ; services de raccordement par télécommunication à un réseau informatique ; services de transmission et réception d’images vidéo via l’Internet par le biais d’un ordinateur ou d’un téléphone mobile ; services téléphoniques ; transmission de fichiers numériques ; transmission de données en flux continu [streaming] ; transmission de séquences vidéo à la demande ; transmission de sons et images par satellite ou par réseau multimédia interactif » ; « divertissement ; divertissements radiophoniques et télévisés sur tout support à savoir téléviseur, ordinateur, baladeur, baladeur vidéo, assistant personnel, téléphone mobile, réseaux informatiques, Internet ; location de vidéogrammes, de films, d’enregistrements phonographiques, de bandes vidéo ; location de films cinématographiques ; location d’appareils de projection de cinéma, de décodeurs,

d’encodeurs, et de tout appareil et instrument audiovisuel, de postes de radio et de télévision, d’appareils audio et vidéo, de cameras, de baladeurs, baladeurs vidéo, de décors de théâtre ; mise à disposition en ligne de musique non téléchargeable ; mise à disposition en ligne de vidéos non téléchargeables ; services de divertissement interactif ».

– Condamner le Directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle à supporter les entiers dépens.

Par mémoire reçu par lettre recommandée avec accusé de réception du 4 octobre 2021, le Directeur général de l’INPI considère que la décision déférée est bien fondée.

Par avis du 8 juillet 2021, le ministère public demande à la cour d’annuler la décision entreprise.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 mai 2021, les parties ont été convoquées à l’audience du 2 novembre 2021 à 9h.

MOTIVATION

La société Groupe Canal + indique être un acteur majeur du paysage médiatique international et explique qu’un grand nombre de ses produits sont distribués sous une appellation comprenant le signe ‘Canal’, en référence à la forme abrégée de sa dénomination. Elle expose exploiter un service de location de films sous le nom ‘Canal VOD’ et avoir procédé au dépôt de deux demandes d’enregistrement de marques françaises, l’une pour le signe semi-figuratif, l’autre pour le signe verbal Canal VOD, ce dernier étant l’objet de l’instance.

Elle rappelle les critères d’appréciation de la distinctivité, et que l’acquisition du caractère distinctif par l’usage, qui suppose la preuve d’un usage continu, peut être rapportée par tout moyen. Elle fait état de la distinctivité intrinsèque du signe Canal VOD et de chacun des deux éléments qui le composent, ajoute que la combinaison des deux termes est inhabituelle et que le public associera Canal VOD à la marque notoire Canal.

Elle relève que la marque semi-figurative correspondante a été enregistrée.

Elle fait état de l’acquisition de la distinctivité du signe par l’usage, soulignant le fait qu’elle exerce ses activités sous le nom commercial ‘Canal’, qui contribue à établir cette acquisition, la très forte renommée du signe Canal dans le signe en cause permettant au consommateur d’identifier l’origine des produits et services.

Elle affirme que la distinctivité accrue de l’élément canal bénéficie au signe dans son ensemble, l’élément VOD étant complémentaire et évocateur du service offert par Canal +.

L’INPI rappelle les textes applicables, et l’exigence de distinctivité du signe déposé comme marque, qui doit être apte à distinguer les produits de ceux d’un autre opérateur économique.

Il relève que le terme canal désigne une bande de fréquence destinée aux émissions de radio et de télévision, et vod est l’abréviation de ‘video on demand’ en anglais, et que la demande d’enregistrement de marque est déposée pour des produits et services consistant en du matériel audiovisuel et informatique destiné à permettre l’accès à des programmes audiovisuels, de sorte que la juxtaposition des deux signes ‘canal’ et ‘vod’ sera perçue comme désignant une chaîne proposant des produits audiovisuels à la demande et les services associés, et n’est pas apte à identifier l’origine du produit. Il avance que le terme n’est pas arbitraire au regard des services visés, qu’il désigne une caractéristique de ces services de sorte qu’il n’est pas distinctif, même si l’association de ces deux termes n’est pas courante.

Il relève, s’agissant de l’acquisition de la distinctivité par l’usage, que la société Groupe Canal + fournit des éléments sur la chaîne Canal +, ou sur le terme Canal utilisé seul, mais non sur le signe Canal Vod, de sorte que ce dernier signe ne peut bénéficier de la distinctivité acquise par les autres. Il souligne que la seule présence du signe Canal dans la demande de marque contestée ne la distingue pas des autres acteurs du marché audiovisuel, et qu’il n’est pas justifié d’un usage du signe déposé, de sorte qu’il ne peut y avoir d’acquisition de la distinctivité par l’usage.

***

L’article 3 de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres sur les marques, article listant notamment les motifs de refus ou de nullité, indique que sont refusées à l’enregistrement ou sont susceptibles d’être déclarées nuls s’ils sont enregistrés les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

L’article L712-7 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version applicable au moment des faits, indiquait notamment que la demande d’enregistrement est rejetée si le signe ne peut constituer une marque par application des articles L. 711-1 et L. 711-2.

L’article L711-1 du code de la propriété intellectuelle prévoyait notamment que ‘la marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.

Peuvent notamment constituer un tel signe :

a) Les dénominations sous toutes les formes telles que : mots, assemblages de mots, noms patronymiques et géographiques, pseudonymes, lettres, chiffres, sigles ;’…

Enfin, l’article L711-2 spécifiait que ‘le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque

s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés.

Sont dépourvus de caractère distinctif :

a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service;

b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ;…

Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c, être acquis par l’usage’

S’agissant de marques composées de mots, comme celle qui fait l’objet du litige, un éventuel caractère distinctif doit être constaté non seulement pour chacun des termes pris séparément mais également pour l’ensemble qu’ils composent.

En l’espèce, le signe verbal dont l’enregistrement est sollicité est ‘canal vod’, il est composé de l’association des deux signes canal et vod.

Il est justifié que, sur le site internet Larousse, le terme canal a notamment comme définition, au titre du canal radioélectrique, ‘bande de fréquences destinée aux émissions de radio et de télévision’, et il est reconnu par les parties que le terme vod est l’abréviation anglaise de ‘video on demand’, soit vidéo à la demande, terme qui sera compris du public français.

La demande est présentée pour des produits et services comme du matériel informatique et audiovisuel destiné à la télécommunication, à la diffusion de programmes audio, audiovisuels, cinématographiques, de multimédia, par satellite, par câble, par réseaux informatiques, de la location à des services de téléchargement en ligne de films et autres programmes audio et audiovisuels, des services de transmission de programmes et de sélection de chaînes de télévision ; elle vise aussi des services de fourniture de connexion à des bases de données, de la transmission de fichiers numériques et de données en flux continu [streaming], de la transmission de séquences vidéo à la demande, de la location de vidéogrammes, de films, d’enregistrements phonographiques, de bandes vidéo, de la location de films cinématographiques, de la mise à disposition en ligne de vidéos non téléchargeables, et des services de divertissement interactif.

Il s’agit donc de produits et services permettant notamment l’accès à des programmes audiovisuels.

L’association dans la demande d’enregistrement contestée de ces deux termes, canal et vod, sera perçue comme désignant une bande de fréquence, ou une chaîne de télévision proposant, à la demande du client, d’accéder aux produits sollicités, soit des produits ou services correspondant ou similaires à ceux visés par cette demande d’enregistrement, la société Groupe Canal + reconnaissant du reste que cette association évoque les produits et services concernés.

La juxtaposition de ces termes sera comprise par le public comme une chaîne proposant des vidéos, ou des films à la location, et ses services annexes, et n’est pas de nature à permettre au consommateur moyennement avisé de distinguer les services proposés sous ce signe de ceux proposés par un diffuseur concurrent.

Il est à rappeler qu’une marque constituée d’un mot composé d’éléments dont chacun est descriptif de caractéristiques des produits ou services pour lesquels l’enregistrement est demandé est elle-même descriptive des caractéristiques de ces produits et services, sauf s’il existe un écart perceptible entre le mot et la simple somme des éléments qui la composent, ce qui suppose soit que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, en sorte qu’il prime la somme desdits éléments, soit que le mot est entré dans le langage courant et y a acquis une signification qui lui est propre, en sorte qu’il est désormais autonome par rapport aux éléments qui le composent.

En l’espèce l’association du terme canal avec une abréviation anglaise vod’ n’apparait pas, par sa construction, de nature à créer une impression distincte des produits et services désignés.

Le fait que la marque semi-figurative ‘canal vod’ n°164 298 418 a été enregistrée, alors que les éléments verbaux sont les mêmes, ou que d’autres marques de la société Groupe Canal + existent reprenant une partie de son nom commercial, ne peut justifier que soient écartés les critères d’appréciation de la distinctivité.

S’agissant de l’acquisition du caractère distinctif de l’usage du signe, la notoriété de la marque canal + n’est pas contestée, et il est également produit une enquête réalisée en 2007 pour établir la renommée du signe Canal.

Pour autant, le fait que le terme canal soit placé en position d’attaque ne saurait suffire à établir son caractère dominant au sein du signe canal vod, et à conférer une distinctivité à la marque composée de ce signe canal suivi de vod.

Le caractère distinctif de la marque acquis par l’usage qui en est fait signifie que la marque est apte à identifier le produit pour lequel est demandé l’enregistrement comme provenant d’une entreprise déterminée et donc apte à distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises.

Or, il n’est pas justifié de l’usage du signe ‘canal vod’, de sorte que ce signe n’a pu acquérir une distinctivité par

l’usage qui en est fait.

En effet, les pièces produites n’établissent pas l’aquisition de la distinctivité par l’usage du signe ‘canal vod’, étant rappelé que l’acquisition du caractère distinctif par l’usage d’une marque s’apprécie au jour de son dépôt.

Si la société Groupe Canal + soutient que l’usage d’une marque sous une forme modifiée doit être pris en compte pour déterminer si le signe tel que déposé a acquis une distinctivité du fait de son usage, il convient que les formes d’usage n’altèrent pas le caractère distinctif de la marque. En l’espèce, l’usage du signe canal, qui est un des deux éléments composant le signe canal vod, ne peut servir à revendiquer l’acquisition du caractère distinctif par l’usage du signe ‘canal vod’ ; ce alors qu’au surplus, lorsqu’il est associé au signe vod, canal possède alors son sens de ‘bande de fréquences destinée aux émissions de radio et de télévision’.

Au vu de ce qui précède, la décision du directeur général de l’INPI est fondée, et la société Groupe Canal + verra son recours rejeté.

PAR CES MOTIFS

Statuant par décision contradictoire,

Rejette le recours de la société Groupe Canal + à l’encontre de la décision du directeur général de l’INPI du 10 décembre 2020, ainsi que toute autre demande,

Dit que la décision sera notifiée, par lettre recommandée avec accusé de réception et par les soins du greffe, à la société Groupe Canal + ainsi qu’au directeur général de l’INPI.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, le président,


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