Contrat de mannequin cabine : du CDD au CDI

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Contrat de mannequin cabine : du CDD au CDI
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L’absence de preuve du surcroît d’activité par l’employeur emporte requalification des CDD de mannequin cabine en CDI.

Un modèle a été engagé par la société Faith Connexion (convention collective nationale des industries de l’habillement) en qualité de mannequin cabine au cours de la période du 7 octobre 2013 au 30 décembre 2016 par 32 contrats de travail à durée déterminée mentionnant tous comme motif de recours un accroissement temporaire d’activité.

Aux termes de l’article L. 1242-2 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas limitativement énumérés parmi lesquels un accroissement temporaire d’activité. Il résulte de l’article L. 1242-12 du même code que le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. L’énonciation du motif dans le contrat de travail fixe les limites du litige et il appartient à l’employeur de justifier de sa réalité.

En l’espèce, les contrats de travail mentionnaient comme motif de recours à ce type de contrat un accroissement temporaire d’activité. Or, aucun élément produit aux débats ne démontrait la réalité de ce motif de recours. Le modèle a obtenu des juridictions la requalification de ses CDD en CDI.   

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 5

ARRÊT DU 01 JUILLET 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/00624 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B4ZTL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Juin 2017 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 17/01378

APPELANTE

Madame Z X

[…]

[…]

Représentée par Me Caroline HEUSELE, avocat au barreau de PARIS, toque : B513

INTIMEES

Me Y B de la SELARL FIDES – Mandataire liquidateur de la Société FAITH CONNEXION

Représenté par Me Annaël BASHAN substituant Me Nicolas BILLON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0411

Association UNEDIC AGS CGEA IDF OUEST

[…]

92300 LEVALLOIS-PERRET

Représenté par Me Leslie DELMAS substituant Me Florence ROBERT DU GARDIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0061

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Mai 2021, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Catherine BRUNET, présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre,

Madame Nelly CAYOT, Conseillère

Madame Lydie PATOUKIAN, Conseillère

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

— contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— signé par Madame Catherine BRUNET, Présidente et par Madame Cécile IMBAR, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Mme Z X a été engagée par la société Faith Connexion en qualité de mannequin cabine au cours de la période du 7 octobre 2013 au 30 décembre 2016 par 32 contrats de travail à durée déterminée mentionnant tous comme motif de recours un accroissement temporaire d’activité.

La société Faith Connexion occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles qui étaient soumises à la convention collective nationale des industries de l’habillement.

Considérant notamment que ses contrats de travail à durée déterminée devaient être requalifiés en un contrat de travail à durée indéterminée et que la résiliation judiciaire du contrat de travail devait être prononcée, Mme X a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 24 février 2017 qui, par jugement du 28 juin 2017 auquel la cour renvoie pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes, a débouté la société de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et a condamné Mme X au paiement des dépens.

Mme X a interjeté appel de ce jugement le 18 décembre 2017.

Une ordonnance de clôture est intervenue le 6 janvier 2020, l’affaire étant fixée à l’audience du 11 février 2020. A la demande d’une partie, elle a été renvoyée à l’audience du 12 mai 2020.

Par jugement du 11 mars 2020, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Faith Connexion et a désigné notamment la SCP D prise en la personne de Maître C D, en qualité d’administrateur judiciaire ainsi que la SELARL FIDES en la personne de Maître B Y en qualité de mandataire judiciaire.

Par ordonnance du 20 mai 2020, le magistrat chargé de la mise en état a révoqué l’ordonnance de clôture et a renvoyé l’affaire à la mise en état pour mise en cause des organes de la procédure collective.

Par assignations du 24 juin 2020, Mme X a appelé en intervention forcée la SCP D prise

en la personne de Maître C D, en qualité d’administrateur judiciaire et l’Unédic Délégation Unique AGS CGEA ; par assignation du 25 juin 2020, elle a également appelé en intervention forcée la SELARL FIDES en la personne de Maître B Y en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 18 juin 2020, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Faith Connexion et a désigné la SELARL FIDES en la personne de Maître B Y en qualité de liquidateur de la société Faith Connexion, la mission en qualité d’administrateur judiciaire de la SCP D en la personne de Maître C D étant maintenue.

Le 17 juillet 2020, la société Faith Connexion et la SELARL FIDES en la personne de Maître B Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion ont transmis et notifié des conclusions par le réseau privé virtuel des avocats (RPVA).

Par assignation du 16 septembre 2020 transmise et notifiée par le RPVA, Mme X a assigné en intervention forcée la SELARL FIDES en la personne de Maître B Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion, cette assignation comportant des conclusions auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l’article 455 du code de procédure civile aux termes desquelles elle demande à la cour d’infirmer le jugement et de, statuant à nouveau :

— dire et juger que les contrats de travail a durée déterminée doivent être requalifiés en un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel ;

— fixer au passif de la société Faith Production les sommes suivantes :

* 7 727 euros au titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 772 euros au titre des congés payés sur préavis,

* 2 320 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

* 3 863 euros à titre d’indemnité de requalification,

* 8 413,75 euros à titre de rappel de salaire sur le taux horaire,

* 841,37 euros au titre des congés payés afférents,

* 19 315 euros outre les congés payés afférents à hauteur de 1 931 euros à titre de rappel de salaire pour les mois de juillet, août 2014 et mars, août 2015 et août 2016,

* 1 931 euros au titre des congés payés afférents,

* 3 863 euros à titre de dommages intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

* 42 500 euros à titre de licenciement sans cause reelle et sérieuse (12 mois de salaire),

* 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— les entiers dépens ;

— intérêt légal et capitalisation des intérêts ;

— remise de la lettre de licenciement, de l’attestation Pôle emploi et du certificat de travail conformes sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document ;

— réserver à la cour d’appel la liquidation éventuelle de l’astreinte ;

— condamner la société Faith Connexion aux entiers dépens ;

— dire la décision opposable à l’ags cgea.

Par conclusions transmises et notifiées par le RPVA le 17 juillet 2020 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l’article 455 du code de procédure civile, la société Faith Connexion et la société FIDES prise en la personne de Maître B Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion demandent à la cour de :

A titre principal :

— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Madame X de l’ensemble de ses demandes ;

— prononcer la mise hors de cause de la SCP D, prise en la personne de Monsieur C D, compte tenu de la conversion des opérations de redressement en liquidation judiciaire ;

En conséquence :

— débouter Madame X de l’ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire,

— limiter la demande de dommages et intérêts de Madame X à l’octroi de six mois de salaires prévus par l’ancien article L. 1235-3 du code du travail, soit la somme de 23 178 euros ;

En tout état de cause,

— condamner Madame X à verser à la société FIDES, prise en la personne de Maître B Y, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Faith Connexion, la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions transmises et notifiées par le RPVA le 24 septembre 2020 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l’article 455 du code de procédure civile, l’Unedic Délégation AGS CGEA IDF Ouest demande à la cour de :

— confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel en ce qu’il a débouté Madame X de l’ensemble de ses demandes ;

En conséquence :

— débouter Madame X de l’intégralité de ses demandes ;

— condamner Madame X aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire,

Sur la garantie de l’AGS :

— dire et juger que s’il y a lieu à fixation, la garantie de l’AGS ne pourra intervenir que dans les

limites de la garantie légale ;

— dire et juger que la garantie prévue suivant les dispositions de l’article L. 3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens de l’article L. 3253-8 du code du travail, les astreintes, dommages et intérêts mettant en ‘uvre la responsabilité de droit commun de l’employeur ou l’article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie ;

— dire et juger que la garantie de l’AGS ne pourra excéder, toutes créances avancées pour le compte du salarié confondues, l’un des trois plafonds des cotisations maximum du régime d’assurance chômage conformément aux dispositions des articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail ;

— statuer ce que de droit quant aux frais d’instance ‘ dont les dépens ‘ sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’AGS.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 avril 2021.

MOTIVATION

Sur la mise hors de cause de la SCP D, prise en la personne de Monsieur C D

La SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y, es qualités de liquidateur de la société Faith Connexion sollicite la mise hors de cause de la SCP D, prise en la personne de Monsieur C D compte tenu de la conversion des opérations de redressement en judiciaire en liquidation judiciaire de la société Faith Connexion.

Compte tenu du prononcé de la liquidation judiciaire de la société Faith Connexion et du maintien de la mission de la SCP D, prise en la personne de Monsieur C D, en qualité d’administrateur judiciaire uniquement pour accomplir les actes liés la cession, il y a lieu de mettre cette société hors de cause.

Sur la requalification des contrats de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée

Mme X soutient que les contrats de travail à durée déterminée doivent être requalifiés en un contrat de travail à durée indéterminée car l’activité de mannequinat ne relève pas d’un secteur d’activité dans lequel il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée, son emploi répondait aux besoins permanents de l’entreprise, le motif du recours à ce type de contrat, surcroît exceptionnel d’activité, n’existe en réalité pas, aucune pièce n’est produite au soutien de ce surcroît d’activité et il ne peut pas être justifié d’un surcroît d’activité toutes les semaines pendant plus de trois ans à l’exception des mois d’août. Elle ajoute qu’elle a travaillé au cours de périodes n’ayant pas fait l’objet d’un contrat de travail à durée déterminée.

La SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y, es qualités de liquidateur de la société Faith Connexion soutient que Mme X n’occupait pas un poste durable et permanent au sein de la société, sa présence en tant que mannequin cabine n’étant requise qu’occasionnellement et de manière ponctuelle, elle ne se maintenait pas à la disposition de la société et exerçait la même activité pour d’autres sociétés, les contrats conclus étaient séparés de plusieurs jours ou semaines. Elle fait valoir que compte tenu de la particularité de ce secteur d’activité, le recours aux contrats dits d’usage devrait être permis ce qui n’est pas le cas et qu’il n’est pas possible de recourir à un mannequin cabine par un contrat de travail à durée déterminée, la prestation de travail correspondant à un temps de travail inférieur à 24 heures par semaine.

L’Unédic Délégation AGS CGEA IDF Ouest s’associe aux explications et à l’argumentation développées par le liquidateur.

Aux termes de l’article L. 1242-2 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas limitativement énumérés parmi lesquels un accroissement temporaire d’activité. Il résulte de l’article L. 1242-12 du même code que le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. L’énonciation du motif dans le contrat de travail fixe les limites du litige et il appartient à l’employeur de justifier de sa réalité.

En l’espèce, les contrats de travail mentionnent comme motif de recours à ce type de contrat un accroissement temporaire d’activité. Aucun élément produit aux débats ne démontre la réalité de ce motif de recours. Dès lors, les contrats de travail à durée déterminée seront requalifiés en un contrat de travail à durée indéterminée conformément aux dispositions de l’article L. 1245-1 du même code sans qu’il soit besoin d’examiner d’autres moyens.

Par application des dispositions de l’article L. 1245-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, il est dû à Mme X une indemnité de requalification qui ne peut pas être inférieure à un mois de salaire. Compte tenu du nombre de contrats de travail à durée déterminée conclus et de la durée de la période d’emploi, la cour fixe à 3 863 euros le montant de l’indemnité de requalification.

La décision des premiers juges sera infirmée sur ces chefs de demande.

Sur la rupture de la relation contractuelle

Mme X soutient que l’employeur devait lui fournir du travail et qu’en l’absence de convocation à un entretien préalable et de lettre de licenciement évoquant un motif de licenciement, la rupture du contrat de travail est dénuée de cause réelle et sérieuse.

Dans le corps de ses conclusions, Mme X ajoute que ‘la demande de résiliation judiciaire (…) est parfaitement justifiée (…)’.

La SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y, ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion fait valoir que Mme X ne démontre pas avoir subi un préjudice au-delà de celui couvert par les six mois de salaire de l’article L. 1235-3 du code du travail.

L’AGS soutient qu’en l’absence de contrat de travail à durée indéterminée, la demande de résiliation judiciaire est dépourvue d’objet. Elle conclut au débouté de Mme X de ses demandes au titre des indemnités de rupture et d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en faisant valoir pour cette dernière que la salariée ne justifie pas d’un préjudice à ce titre.

Aux termes de l’article 954 du code de procédure civile, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif. Il n’y a donc pas lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire et il convient de statuer sur les demandes formulées dans le dispositif au titre d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

L’employeur qui à l’expiration d’un contrat de travail à durée déterminée intervenue en l’espèce le 30 décembre 2016, ultérieurement requalifié en contrat à durée indéterminée, ne fournit plus de travail et ne paie plus les salaires, est responsable de la rupture qui s’analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En application de l’article L. 1245-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, par l’effet de la requalification des contrats à durée déterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée

irrégulier.

En conséquence, conformément aux dispositions de la convention collective applicable et des articles L. 1234-5 et L. 1234-1 du code du travail, il est dû à Mme X qui avait acquis une ancienneté de plus de deux ans, la somme de 7 727 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 772 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés afférents, sommes non contestées en leur montant par le liquidateur et l’AGS et dont le montant est exact.

Par application de l’article 43 de la convention collective, il lui est dû une indemnité de licenciement de 2 320 euros, montant qu’elle sollicite.

Aux termes de l’article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et qu’il n’y a pas réintégration du salarié dans l’entreprise, il est octroyé au salarié à la charge de l’employeur une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme X, de son âge, 43 ans, de son ancienneté, 3 ans, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu’ils résultent des pièces et des explications fournies étant précisé que Mme X produit une notification de Pôle emploi du 24 janvier 2017 indiquant une fin d’indemnisation, il y a lieu de lui allouer, en application de l’article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, une somme de 27 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La décision des premiers juges sera infirmée sur ces chefs de demande.

Sur l’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement

Mme X fait valoir qu’elle n’a pas été convoquée à un entretien préalable et qu’elle n’a pas reçu de lettre de licenciement.

La SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y, ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion, soutient que cette indemnité ne se cumule pas avec l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et qu’il appartient à la salariée de justifier d’un préjudice à ce titre.

L’AGS fait valoir qu’à défaut de contrat de travail à durée indéterminée, aucune procédure de licenciement ne devait être suivie et que les deux indemnités ne se cumulent pas.

Aux termes de l’article L. 1235-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

En l’espèce, la cour ayant retenu que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, Mme X sera déboutée de sa demande d’indemnité pour non respect de la procédure de licenciement.

La décision des premiers juges sera confirmée sur ce chef de demande.

Sur le rappel de salaire au titre du taux horaire

Mme X soutient qu’étant engagée par un contrat de travail à durée indéterminée, l’employeur ne pouvait pas réduire sa rémunération de près de la moitié à compter du mois de mai 2016. Elle fait

valoir qu’il lui a été indiqué qu’à défaut d’accord de sa part, la relation contractuelle se terminerait.

La SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y, ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion soutient qu’aucune contrainte n’a été exercée à l’encontre de Mme X et qu’en vertu de la libre intention des parties et de leur plein consentement, il convient de débouter Mme X de sa demande de rappel de salaire à ce titre.

L’AGS fait valoir que Mme X a signé les contrats de travail à durée déterminée stipulant une rémunération moindre de sorte qu’elle doit être déboutée de sa demande à ce titre.

Mme X a été engagée par un premier contrat de travail à durée déterminée du 7 octobre 2013 stipulant une rémunération nette de 80 euros puis par des contrats de même nature jusqu’au mois de mai 2016 stipulant une rémunération brute horaire de 79 euros, les contrats ultérieurs stipulant une rémunération brute horaire de 52,50 euros.

La requalification des contrats de travail à durée déterminée ne porte que sur le terme du contrat. Mme X a signé les contrats de travail à durée déterminée qui stipulaient une rémunération inférieure à celle stipulée par les contrats de travail antérieurs et elle ne démontre pas l’existence d’un vice du consentement.

Dès lors, elle sera déboutée de sa demande de rappel de salaire à ce titre.

La décision des premiers juges sera confirmée.

Sur le rappel de salaire au titre des mois pour lesquels aucun contrat de travail à durée déterminée n’a été conclu

Mme X soutient qu’étant engagée par un contrat de travail à durée indéterminée, la société ne pouvait pas s’abstenir de lui fournir du travail au cours des mois de juillet, août 2014, mars, août 2015 et août 2016.

La SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y, ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion soutient que les contrats de travail à durée déterminée étaient réguliers.

L’AGS fait valoir que Mme X ne justifie pas s’être maintenue à la disposition de la société Faith Connexion et qu’au contraire, il résulte des pièces produites qu’elle travaillait pour d’autres marques et qu’il lui est arrivée de décliner des propositions d’activité.

Il convient de rappeler que la requalification des contrats de travail à durée déterminée ne porte que sur le terme du contrat. Il appartient dès lors au salarié qui sollicite un rappel de salaire pour les périodes intertitielles de démontrer qu’il s’est maintenu à la disposition de l’employeur au cours de ces périodes.

Mme X ne justifie pas s’être maintenue à la disposition de son employeur pendant ces périodes. Dès lors, elle sera déboutée de sa demande de rappel de salaire à ce titre.

La décision des premiers juges sera confirmée sur ces chefs de demande.

Sur la garantie de l’Unedic Délégation AGS CGEA IDF Ouest

Il sera rappelé que l’Unedic Délégation AGS CGEA IDF Ouest doit sa garantie dans les limites légales, le présent arrêt lui étant opposable.

Sur le cours des intérêts

En application des articles 1153 et 1153-1 du code civil, recodifiés sous les articles 1231-6 et 1231-7 du même code par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les créances salariales produisent intérêt au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de jugement soit le 5 mars 2017 jusqu’au 11 mars 2020, date du jugement d’ouverture de la procédure collective qui interrompt le cours des intérêts conformément aux dispositions de l’article L. 622-28 du code du commerce et, par application du même article, les créances indemnitaires ne produisent pas intérêt au taux légal. La capitalisation des intérêts sera ordonnée conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil, devenu l’article 1343-2 du même code, dès lors qu’ils seront dus pour une année entière et jusqu’au 11 mars 2020.

Sur la remise des documents

Il sera ordonné à la SELARL FIDES prise en la personne de Maître Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion de remettre à Mme X une attestation Pôle emploi, un certificat de travail sans qu’il n’y ait lieu à prononcer une astreinte. Il n’y a pas lieu d’ordonner la remise d’une lettre de licenciement.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Partie perdante, la SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion sera condamnée au paiement des dépens. Le jugement sera infirmé en ce qu’il a mis les dépens à la charge de Mme X.

La SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion sera condamnée à payer à Mme X la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la décision des premiers juges étant infirmée en ce que la salariée a été déboutée de sa demande à ce titre et confirmée en ce que la société Faith Connexion a été déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles. La SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion sera déboutée de sa demande formulée en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

MET hors de cause la SCP D, prise en la personne de Monsieur C D, ès qualités d’administrateur judiciaire de la société Faith Connexion,

INFIRME le jugement sauf en ce qu’il a débouté Mme Z X de ses demandes au titre d’un rappel de salaire et d’une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, en ce qu’il a débouté la société Faith Connexion de sa demande au titre des frais irrépétibles et en ce qui concerne les dépens,

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

REQUALIFIE les contrats de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée,

FIXE la créance de Mme Z X à valoir au passif de la procédure collective de la société Faith Connexion aux sommes suivantes :

—  7 727 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

—  772 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés afférents ;

—  2 320 euros à titre d’indemnité de licenciement,

avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de jugement soit le 5 mars 2017 jusqu’au 11 mars 2020, date du jugement d’ouverture de la procédure collective, et capitalisation de ceux-ci dès lors qu’ils seront dus pour une année entière, ce jusqu’au 11 mars 2020 ;

FIXE la créance de Mme Z X à valoir au passif de la procédure collective de la société Faith Connexion aux sommes suivantes :

—  3 863 euros à titre d’indemnité de requalification ;

—  27 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

sans intérêts au taux légal ;

CONFIRME le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant,

RAPPELLE que l’Unedic Délégation AGS CGEA IDF Ouest doit sa garantie dans les limites légales,

Ordonne à la SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion de remettre à Mme Z X une attestation Pôle emploi et un certificat de travail conformes à la présente décision,

Dit n’y avoir lieu à astreinte,

CONDAMNE la SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion à payer à Mme Z X la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

CONDAMNE la SELARL FIDES prise en la personne de Maître B Y ès qualités de liquidateur de la société Faith Connexion aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


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