Doit être ordonnée la suppression d’un dispositif de pré-enseigne publicitaire installé en violation des dispositions du code de l’environnement interdisant d’apposer une publicité ou une pré-enseigne dans un parc naturel régional en agglomération, d’apposer une publicité ou une pré-enseigne ne comportant pas les références du responsable, et d’installer un dispositif publicitaire non lumineux au sol dans une agglomération de moins de 10 000 habitants ne faisant pas partie d’une unité urbaine de plus de 100 000 habitants.
En l’espèce, le dispositif en litige comporte un panneau avec le logo d’une chaîne de restauration rapide et une flèche indiquant la direction d’un établissement de cette chaîne, fixé à un support scellé au sol.
Eu égard à son contenu, le panneau constitue, au sens des dispositions de l’article L. 581-3 du code de l’environnement précité, une pré-enseigne. Contrairement à ce que soutient la société Espace Image, eu égard à son emplacement, en bordure d’une voie de circulation automobile et à l’écart des habitations, le principal objet du dispositif supportant ce panneau est de toute évidence, de recevoir des publicités ou des pré-enseignes.
Par ailleurs, il ressort des énonciations de l’arrêté du 11 janvier 2018 que le préfet, après avoir décrit le dispositif constitué par la pré-enseigne et son support, a mis en demeure la société Espace Image de le supprimer et de remettre les lieux dans leur état initial, ce qui impliquait, sans équivoque, que l’intéressée procède à l’enlèvement, à la fois du panneau et de son support scellé au sol. Enfin, il est constant que la société Espace Image s’est bornée à procéder, dans le délai qui lui était imparti par la mise en demeure, à l’enlèvement du panneau, et que le dispositif supportant ce panneau est demeuré en place pendant la période du 1er au 28 février 2018.
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
CAA de NANCY
1ère chambre
29 décembre 2021
N° 19NC02552, Inédit au recueil Lebon
Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Espace Image a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d’annuler l’arrêté du 1er mars 2018 par lequel le préfet du Haut-Rhin a prononcé à son encontre une amende administrative d’un montant de 1 500 euros en raison de l’installation d’une pré-enseigne sur le territoire de la commune de Munster, d’annuler l’arrêté du 11 janvier 2018 par lequel le même préfet l’a mise en demeure de supprimer ce dispositif, et d’annuler l’arrêté du 13 mars 2018 par lequel le même préfet a mis en recouvrement une astreinte d’un montant de 5 769,42 euros au bénéfice de la commune de Munster.
Par des jugements nos 1802050, 1802220 et 1802538 du 5 juin 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l’arrêté du 13 mars 2018 et rejeté le surplus des conclusions à fin d’annulation de la société Espace Image.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 6 août 2019 et le 17 novembre 2021, la ministre de la transition écologique demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement nos 1802050, 1802220 et 1802538 du tribunal administratif de Strasbourg du 5 juin 2019 en tant qu’il a prononcé l’annulation de l’arrêté du 13 mars 2018 ;
2°) de rejeter les conclusions aux fins d’annulation présentées par la société Espace Image devant le tribunal.
Elle soutient que :
– le tribunal a omis de statuer sur l’un des moyens soulevés par le préfet en défense ;
– contrairement à ce qu’a retenu le tribunal, l’obligation de remise en état des lieux dans leur état initial, prévue par l’arrêté du 11 janvier 2018, impliquait la dépose, non seulement de la pré-enseigne en infraction, mais également du dispositif supportant cette pré-enseigne.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 janvier 2020, la société Espace Image conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l’Etat en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– l’illégalité de l’arrêté du 11 janvier 2018, pris sans que la procédure contradictoire préalable prévue par les articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l’administration n’ai été respectée, prive de base légale l’arrêté du 13 mars 2018 ;
– aucune astreinte ne peut être mise à sa charge dès lors que, conformément aux dispositions de l’article L. 581-3 du code de l’environnement, il lui incombait seulement de procéder à la dépose de la pré-enseigne en litige, et non, en outre, à celle du dispositif supportant cette pré-enseigne.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code de l’environnement ;
– le code des relations entre le public et l’administration ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Rees, président,
– et les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 11 janvier 2018, le préfet du Haut-Rhin a mis en demeure la société Espace Image de supprimer un dispositif de pré-enseigne à double face, scellé au sol en bordure de la route départementale 417, sur le territoire de la commune de Munster. Par un arrêté du 1er mars 2018, le même préfet a mis à la charge de l’intéressée une amende administrative d’un montant de 1 500 euros. Par un arrêté du 13 mars 2018, le même préfet a mis en recouvrement une astreinte d’un montant de 5 769,42 euros, au titre de l’absence de mise en conformité du dispositif de pré-enseigne pendant la période du 1er au 28 février 2018. Par un jugement du 5 juin 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les demandes de la société Espace Image tendant à l’annulation des arrêtés des 11 janvier et 1er mars 2018, et a annulé l’arrêté du 13 mars 2018. La ministre de la transition écologique doit être regardée comme relevant appel de ce jugement en tant qu’il a prononcé cette annulation et mis à la charge de l’Etat une somme à verser à l’intimée en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur le moyen d’annulation retenu par le tribunal :
2. Le tribunal a annulé l’arrêté contesté, qui prononce la mise en recouvrement de l’astreinte en raison du défaut de mise en conformité du dispositif litigieux en raison du non-respect de la mise en demeure du 11 janvier 2018, au motif que la société a intégralement exécuté cette mise en demeure dans le délai qui lui était imparti.
3. Aux termes de l’article L. 581-3 du code de l’environnement : » Au sens du présent chapitre : / 1° Constitue une publicité, à l’exclusion des enseignes et des pré-enseignes, toute inscription, forme ou image, destinée à informer le public ou à attirer son attention, les dispositifs dont le principal objet est de recevoir lesdites inscriptions, formes ou images étant assimilés à des publicités ; / (…) 3° Constitue une pré-enseigne toute inscription, forme ou image indiquant la proximité d’un immeuble où s’exerce une activité déterminée « . Aux termes de l’article L. 581-19 de ce code : » Les pré-enseignes sont soumises aux dispositions qui régissent la publicité. Les dispositions relatives à la déclaration prévue par l’article L. 581-6 sont applicables aux pré-enseignes dans des conditions, notamment de dimensions, précisées par décret en Conseil d’Etat « . Aux termes de l’article L. 581-6 de ce code : » L’installation, le remplacement ou la modification des dispositifs ou matériels qui supportent de la publicité sont soumis à déclaration préalable auprès du maire et du préfet dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat « . Enfin, aux termes de l’article L. 581-27 de ce code, alors applicable : » Dès la constatation d’une publicité, d’une enseigne ou d’une pré-enseigne irrégulière au regard des dispositions du présent chapitre ou des textes réglementaires pris pour son application, et nonobstant la prescription de l’infraction ou son amnistie, l’autorité compétente en matière de police prend un arrêté ordonnant, dans les quinze jours, soit la suppression, soit la mise en conformité avec ces dispositions, des publicités, enseignes ou pré-enseignes en cause, ainsi que, le cas échéant, la remise en état des lieux « . Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l’assimilation à des publicités des dispositifs dont le principal objet est d’en recevoir constitue une règle applicable également aux pré-enseignes et que, par suite, lorsqu’un dispositif supportant une pré-enseigne et ayant pour objet principal d’en recevoir ou de recevoir une publicité est implanté en méconnaissance des dispositions qui régissent la publicité, la mise en demeure prévue par l’article L. 581-27 doit englober, outre la pré-enseigne, ce dispositif.
4. Le dispositif en litige comporte un panneau avec le logo d’une chaîne de restauration rapide et une flèche indiquant la direction d’un établissement de cette chaîne, fixé à un support scellé au sol. Eu égard à son contenu, le panneau constitue, au sens des dispositions de l’article L. 581-3 du code de l’environnement précité, une pré-enseigne. Contrairement à ce que soutient la société Espace Image, eu égard à son emplacement, en bordure d’une voie de circulation automobile et à l’écart des habitations, le principal objet du dispositif supportant ce panneau est de toute évidence, de recevoir des publicités ou des pré-enseignes. Par ailleurs, il ressort des énonciations de l’arrêté du 11 janvier 2018 que le préfet, après avoir décrit le dispositif constitué par la pré-enseigne et son support, a mis en demeure la société Espace Image de le supprimer et de remettre les lieux dans leur état initial, ce qui impliquait, sans équivoque, que l’intéressée procède à l’enlèvement, à la fois du panneau et de son support scellé au sol. Enfin, il est constant que la société Espace Image s’est bornée à procéder, dans le délai qui lui était imparti par la mise en demeure, à l’enlèvement du panneau, et que le dispositif supportant ce panneau est demeuré en place pendant la période du 1er au 28 février 2018. Par suite, la ministre est fondée à soutenir que c’est à tort que, pour annuler l’arrêté du 13 mars 2018, le tribunal s’est fondé sur le moyen tiré de ce que l’astreinte est sans objet au motif que la mise en demeure du 11 janvier 2018 a été entièrement exécutée dans le délai imparti.
5. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par la société Espace Image, tant devant le tribunal administratif que devant elle.
Sur les autres moyens soulevés par la société Espace Image :
6. Pour ordonner la suppression du dispositif en litige, le préfet s’est borné à constater la violation des dispositions du code de l’environnement interdisant d’apposer une publicité ou une pré-enseigne dans un parc naturel régional en agglomération, d’apposer une publicité ou une pré-enseigne ne comportant pas les références du responsable, et d’installer un dispositif publicitaire non lumineux au sol dans une agglomération de moins de 10 000 habitants ne faisant pas partie d’une unité urbaine de plus de 100 000 habitants, sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l’espèce. En application des dispositions de l’article L. 581-27 du code de l’environnement précité, le préfet était tenu, après avoir constaté cette violation, de mettre en demeure la société Espace Image de retirer le dispositif en litige. Dès lors, les moyens tirés de ce que la société Espace Image n’aurait pas été mise à même de présenter ses observations préalablement à l’intervention de l’arrêté du 11 janvier 2018, et de ce que qu’elle n’aurait pas été informée du montant de l’astreinte dont elle serait redevable au cas où elle n’y déférerait pas, ne peuvent qu’être écarté comme inopérants.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la ministre est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé l’arrêté du 13 mars 2018. Par suite, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la régularité de ce jugement, elle est fondée à en demander l’annulation, ainsi que le rejet de la demande présentée par la société Espace Image devant le tribunal sous le n° 1802538.
Sur les frais de l’instance :
8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante à la présente instance.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement nos 1802050, 1802220 et 1802538 du tribunal administratif de Strasbourg du 5 juin 2019 est annulé en tant qu’il a prononcé l’annulation de l’arrêté du préfet du Haut-Rhin du 13 mars 2018.
Article 2 : Les conclusions de la demande n° 1802538 présentée par la société Espace Images devant le tribunal administratif de Strasbourg sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la société Espace Images tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la transition écologique et à la société Espace Image.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.