Licence d’exploitation de site internet : attention à la clause de sortie

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Licence d’exploitation de site internet : attention à la clause de sortie
Ce point juridique est utile ?

Les licences d’exploitation de sites internet (location longue durée) stipulent le plus souvent une clause pénale rendant particulièrement onéreuse toute sortie anticipée.

Une avocate a été condamnée à payer à son prestataire toutes les échéances restant dues en raison d’une résiliation anticipée fautive du contrat. La juridiction a souligné que cette dernière en sa qualité de professionnelle particulièrement avertie, ne pouvait ignorer les conséquences de l’absence de réserve lors de la réception de son site.

Par ailleurs, l’avocate n’avait pas sollicité la vérification de la signature apposée sur le procès-verbal de réception, n’arguait pas d’un faux, ne tirait aucune conséquence des doutes qu’elle a émis sur la signature apposée au bas du procès-verbal de réception.  

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRET DU 19 NOVEMBRE 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/18716 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAYHE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Septembre 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 17/15607

APPELANTE

Madame J-B X, exerçant la profession d’avocate

[…]

[…]

représentée par Me C D de la SELARL JRF & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075,

assistée de Me Raphael MORENON, avocat plaidant du barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SARL WEB IPRO

prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

[…]

immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Versailles sous le numéro 502 664 915

assistée de Me Aude BARATTE de l’AARPI BASS – MAZON – STERU – BARATTE, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : D1029

PARTIE INTERVENANTE

SELARL FIDES, prise en la personne de G H I, ès qualités de mandataire judiciaire de Madame J-B X

[…]

[…]

N’ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Juin 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Marie-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre.

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 804 du code de procédure civile.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre

M. Denis ARDISSON, Président de la chambre

Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.

ARRÊT :

— réputé contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Mme Marie-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCEDURE

La société WEB IPRO a pour activité le conseil en systèmes informatiques.

Madame J-B X exerce la profession d’avocate au Barreau de Paris.

Les parties ont conclu le 31 mars 2016 un premier contrat de licence d’exploitation de site internet portant :

— création d’un site internet avec 2 noms de domaine : www.abv-avocats.com et, si disponible, : www.abv-avocats.fr

— sept rubriques : Accueil, le Cabinet, Action de Groupe, Droit Immobilier, Droit Bancaire, Presse, F.A.Q., Honoraires, Contact soit 9 pages Internet

— un hébergement pour la capacité totale du site chez OVH

— le référencement du site sur les principaux moteurs de recherche : Google, Yahoo, Bing,

— une prestation d’assistance téléphonique

— un module de statistiques

— la charte graphique : 1850 euros HT

— un forfait de mise en ligne : 490 euros HT

— la rédaction web pour 9 pages

Le contrat prévoyait un règlement en 48 mensualités d’un montant TTC de 346,80 euros TTC.

Un second contrat de licence d’exploitation était signé le 7 juin 2016 ajoutant trois nouvelles prestations :

— la rédaction Web pour 5 pages, pour un montant de 600 ‘ HT,

— la réalisation d’une vidéo d’entreprise, pour un montant de 750 ‘ HT,

— les frais de mise en ligne de la vidéo, pour un montant de 304 ‘ HT.

Le procès-verbal de réception du site internet www.abv-avocats.fr a été signé par Madame J-B X le 5 décembre 2016 aux termes duquel elle a déclaré en sa qualité de Cliente : ‘ avoir vérifié la conformité du site internet à la fiche technique et à ses besoins, avoir vérifié la mise en ligne du site internet à l’adresse précitée, en avoir contrôlé le bon fonctionnement, en conséquence, accepter le site internet et les prestations sans restriction ni réserve.’

La mensualité de mai 2017 n’ayant pas été réglée, la société WEB-IPRO écrivait à Madame J-B X par lettre recommandée du 22 mai 2017 :

‘ Nous ne comprenons pas les raisons pour lesquelles, alors qu’il était convenu que la société WEB IPRO gère votre nom de domaine www.abv-avocats.com et procède à l’hébergement du site auprès de la société OVH, vous avez unilatéralement décidé le 21 avril 2017 de reprendre cette gestion et de ne plus diriger votre domaine vers les serveurs de WEB IPRO ( OVH)

Votre nom de domaine pointe depuis le 21 avril dernier vers les serveurs de la société WIX. Il en résulte que vous avez souhaité que votre nom de domaine ne renvoie plus vers le site internet réalisé par WEB IPRO mais vers votre ancien site internet réalisé par un tiers.

Dans la mesure où votre second nom de domaine www.abv-avocats.fr est redirigé vers le.com, conformément à ce que nous avions convenu lors de la signature du contrat le 7 juin 2016, ce second nom de domaine renvoie également vers votre ancien site internet.

A ce jour et depuis le 21 avril dernier, le site internet réalisé par WEB IPRO, conformément au contrat précité n’est plus accessible des internautes de votre fait.

En procédant de la sorte, sans nous en informer et sans solliciter le moindre conseil de notre part, vous réduisez à néant notre travail de construction de votre site et, surtout, notre travail de référencement. (…)

Vous devez donc considérer la présente comme une mise en demeure de régler sans délai à la société WEB IPRO la somme de 526,80 euros TTC augmentée de l’indemnité prévue à l’article 10 des conditions générales que vous avez acceptées soit 40 euros HT( 48 euros TTC) (…)

Nous vous rappelons qu’aux termes de l’article 18 des conditions générales nous pouvons résilier le contrat de plein droit si cette mise en demeure reste infructueuse (…) Sans préjudice des dommages et intérêts prévus à l’article 8-10 in fine (…)’

Par acte d’huissier de justice délivré le 13 novembre 2017, la SARL WEB IPRO a fait assigner Madame X devant le tribunal de grande instance de Paris en paiement à titre principal de la somme de 22 652,40 euros au titre des sommes dues outre les intérêts et pénalités de retard au taux légal majoré de 5 points et 40 euros par facture impayée à parfaire au jour du jugement ainsi que la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le jugement entrepris, prononcé le 10 septembre 2019 assorti de l’exécution provisoire a:

Prononcé la résiliation du contrat conclu entre WEB IPRO et MadameAnne-B X le 7 juin 2016 aux torts de Madame J-B X

Condamné Madame Anne-B X à régler à la société WEB IPRO la somme de

14 926 euros avec intérêts au taux légal majoré de 5 points à compter de la présente décision;

Condamné Madame Anne-B X à régler à la société WEB IPRO la somme de

5 000 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

Condamné Madame Anne-B X à régler à la société WEB IPRO la somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

Madame J-B X a interjeté appel selon déclaration reçue au greffe de la cour le 8 octobre 2019.

Madame J-B X a été placée en redressement judiciaire par jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 10 octobre 2019, publié au BODACC le 27 octobre 2019.

La société WEB IPRO a déclaré sa créance au passif du redressement judiciaire par lettre recommandée reçue le 12 décembre 2019 à hauteur des sommes suivantes :

— Principal (mensualités impayées au titre du contrat entre le mois de mai 2017 et le mois de décembre 2020, outre la clause pénale) : 24.022,28 euros

— Dommages et intérêts : 5.000 euros

— Article 700 CPC : 4.000 euros

— Intérêts de retard : mémoire

— Dépens : mémoire

Soit un total de 33.022,28 euros outre les intérêts.

Par acte délivré le 18 mai 2020, la société WEB IPRO a assigné en intervention forcée la SELARL FIDES prise en la personne de Maître G Perdrière I, désignée par le jugement en qualité de mandataire judiciaire.

Par conclusions d’appelant n°4 signifiées via le réseau privé virtuel des avocats le 17 mars 2021 Madame J-B X demande à la cour de :

Vu les dispositions de l’article 1219 du Code civil,

Vu les dispositions des articles 1134 et 1184 du Code civil applicables lors de la souscription des contrats,

Vu les pièces versées aux débats,

Recevoir Madame X en son appel et la déclarer bien fondée,

Réformer le jugement du 10 septembre 2019 et ce faisant,

Constater la gravité des manquements commis par la société WEB IPRO,

En conséquence,

Juger que Madame J-B X est bien fondée à soulever l’exception

d’inexécution à l’encontre de la société WEB IPRO,

Prononcer la résiliation du contrat aux torts de la société WEB IPRO à compter du 1er avril

2017,

Condamner la société WEB IPRO à verser à Madame J-B X la somme de

10.410,20 ‘ au titre des échéances réglées à ce jour,

Condamner la société WEB IPRO à rembourser à Madame J-B X la somme de 1.264,80′ TTC au titre des prestations de vidéo qui n’ont pas été réalisées,

Condamner la société WEB IPRO à verser à Madame J-B X la somme de 10.000 ‘ à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices occasionnés par ces fautes,

Subsidiairement :

Débouter la société WEB IPRO des demandes qu’elle présente au titre de la clause pénale, au titre des échéances impayées au jour de la résiliation et au titre de la totalité des échéances restant à courir jusqu’à la fin du contrat, ou à défaut :

Réduire à de plus justes proportions les demandes que la société WEB IPRO présente au

titre de la clause pénale, au titre des échéances impayées au jour de la résiliation et au

titre de la totalité des échéances restant à courir jusqu’à la fin du contrat,

En tout état de cause :

Débouter la société WEB IPRO de ses demandes fin et conclusions ;

Condamner la société WEB IPRO à verser à Madame X 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Condamner la société WEB IPRO en tous les dépens dont distraction au profit de Maître

C D

Par conclusions signifiées via le réseau privé virtuel des avocats le 10 mars 2021 la société WEB IPRO demande à la cour de :

Vu les articles 1134 et 1184 du Code civil, tels qu’applicables au jour de la conclusion du contrat

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a résilié le contrat litigieux aux torts de Madame X, avec effet au 10 septembre 2019,

Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé des condamnations à l’encontre de Madame X en raison de la procédure collective ouverte à l’encontre de cette dernière,

Statuant à nouveau,

Fixer la créance de la société WEB IPRO au passif de Madame X à la somme de 33.022,28 euros, outre les intérêts au taux légal majoré de 5 points sur la somme de 15.277,20 euros à compter du 10 septembre 2019 et les entiers dépens de première instance et d’appel.

En toute hypothèse,

Débouter Madame X de toute demande, fin et conclusion contraire.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 18 mars 2021 et l’affaire plaidée à l’audience du 9 juin 2021.

SUR QUOI,

LA COUR :

Sur l’exception d’inexécution

1- Madame J-B X fait grief au jugement de n’avoir pas pris la mesure des fautes commises par la société WEB IPRO à laquelle elle impute en premier lieu la mise en ligne du site internet le 5 décembre ‘2017 en considérant l’accord tacite de sa Cliente alors que l’appelante n’a jamais reçu ces mails qui ont été perdus à la suite d’un grave dysfonctionnement survenu le 9 décembre 2016, tandis que la mise en ligne non autorisée du site a révélé une difficulté majeure liée à la publication d’informations grossièrement erronées tenant à la référence à la spécialisation du cabinet en matière d’action de groupe, alors que maître X n’est titulaire d’aucun certificat de spécialisation et qu’en outre la spécialisation ‘Actions de groupe’ n’existe pas.

*****

La société WEB IPRO justifie avoir transmis par mail à Madame X le 15 juin 2016 à 11 heures 17, un audit sémantique destiné à recenser les mots clés pour améliorer le positionnement du site sur les moteurs de recherche formalisé par une liste dans laquelle figurait notamment les mots ‘ Action de groupe’ et ‘Avocat Action de groupe’.

Madame X y répondait le même jour à 14 heures 37 : ‘ Je viens de prendre connaissance de votre recherche. Je vous propose de vérifier les mots : défiscalisation, prêts, TEG ( taux effectif global) prêts toxiques, prêt ‘helvert-immo’, prêt francs-suisse, class action, qui sont au coeur des trois actions groupées que nous menons.’

Le 16 juin 2016 Madame X transmettait par courriel à WEB IPRO le texte de la présentation de son activité ainsi rédigé:

‘ Bonjour et bienvenue dans mon cabinet

Je l’ai créé en 1991 aprés avoir prêté serment en 1987.

Au départ, mon activité était orientée en droit des affaires et droit immobilier. A cette occasion, j’ai travaillé sur des projets très innovants notamment le concept de quartier intelligent dont je suis devenue partenaire mais aussi pour les bénéficiaires de servitudes d’utilité publique qui souhaitaient en faire bénéficier les opérateurs de télécom pour déployer leurs réseaux de fibre.

En 2003, j’ai choisi de compléter ma formation par des études de psychologie pendant quatre ans auprès du CIFP (Centre lnterdisciplinaire de Formation à la Psychothérapie Relationnelle). Dans le même temps, je me suis initiée a la médiation.

C’est alors que j’ai décidé de me consacrer exclusivement au droit immobilier. Je suis intervenue pour les professionnels comme pour les particuliers.

Cette activité m’a conduit à m’intéresser au droit bancaire puisqu’il est rare qu’il y ait immobilier sans prêt.

C’est dans ce cadre que je suis intervenue dans des dossiers de défiscalisation et prêts toxiques traités en actions de groupe.

Mon action se fait aujourd’hui exclusivement au profit de particuliers, acquéreurs, emprunteurs ou investisseurs et exclusivement pour leurs problémes d’acquisition, emprunts, investissements défiscalisés ou non. .

J’ai acquis désormais une réelle expérience de ces affaires complexes qui posent des problèmes spécifiques et font subir des préjudices singuliers, menées le plus souvent en actions de groupe qui posent des problémes particuliers.

Pour prendre davantage soin de nos clients et les procédures judiciaires ne réglant qu’une partie des affres qu’ils subissent, je suis en train de monter avec une psychothérapeute, des groupes de parole spécialement dédiés à cette problématique.

Pour parler de nos valeurs qui ne sont pas un vain mot pour nous, de nos engagements et de notre détermination à vous aider, je laisse la parole à Francois Guerrand, Président d’Adipajo, Association de défense des intérêts des propriétaires d’Ambre, Z, A et E F qui nous a fait le grand honneur d’accepter de témoigner au profit des victimes du prêt helvet-immo que nous défendons.

Je reste bien entendu a votre disposition pour vous défendre’.

Il suit de cette présentation, jamais remise en cause ultérieurement par Madame X, que l’appelante, contrairement à ce qui est soutenu, a expressément mis en exergue dans la présentation de son activité professionnelle destinée à être mise en ligne, son rôle actif dans les actions menées dans les dossiers de prêt Helvet Immo après avoir soumis les mots clés

‘ Class action’ à la vérification de la société WEB IPRO pour le référencement du cabinet d’avocat.

Le 29 août 2016 le texte de présentation mis en forme par WEB IPRO était soumis par mail présentant Maître X comme une ‘ spécialiste de l’action de groupe’ en présentant le cabinet comme étant ‘ Spécialisé dans les actions de masse en faveur des personnes ayant contracté des prêts toxiques comme le prêt Helvet Immo’ et définissant l’action de groupe par référence à la terminologie anglaise ‘ Class Action’.

Par le même mail, WEB IPRO invitait Madame X à valider et/ou apporter une modification à ces textes ce à quoi celle-ci n’apportait aucun commentaire.

Le 15 septembre 2016 WEB IPRO informait Madame X en ces termes :

‘ Conformément au délai annoncé dans notre courriel ci-dessous en date du 24/10/2016 et n’ayant pas reçu de réponse de votre part, nous considérons toutes les pages de votre site internet comme validées et passons immédiatement à la suite de votre projet Web.

Naturellement, vous pourrez apporter ultérieurement des corrections si vous le souhaitez.’

Madame X qui invoque une panne de réception de ses emails à partir du 6 décembre 2016, ne s’explique pas sur l’absence de réponse à ce message qui apparaît comme lui ayant été envoyé le 15 septembre 2016 et alors qu’elle a signé le 5 décembre 2016, le procès-verbal de réception aux termes duquel elle a déclaré :

‘Avoir vérifié la conformité du site internet à la fiche technique et à ses besoins

Avoir vérifié la mise en ligne du Site internet à l’adresse précitée

En avoir contrôlé le bon fonctionnement

En conséquence, accepter le site Internet et les prestations sans restriction ni

réserve’.

Madame X ne peut donc imputer comme une faute à WEB IPRO d’avoir utilisé les mots ‘Action de groupe’ et ‘spécialisation’ dans la rédaction finale de la présentation de l’activité mise en ligne alors qu’elle a induit l’emploi de cette expression en faisant référence à sa traduction anglaise pour l’identification des compétences de son cabinet sur le web, qu’elle a expressément souligné, dans le message adressé au Prestataire le 15 juin 2016, que l’expression ‘Class action’ , est l’une des expressions ‘ au coeur des trois actions groupées que nous menons ‘ et qu’elle n’a enfin émis aucune observation à l’encontre de l’emploi tant de cette expression traduite en français qu’ à l’encontre des mots ‘ spécialiste’ ou ‘ spécialisation’, à la réception du texte final dont WEB IPRO justifie de l’envoi sur la messagerie de l’appelante le 29 août 2016 et qu’elle ne démontre pas ultérieurement avoir d’une quelconque manière mis en garde la société WEB IPRO contre l’emploi de cette expression.

Il n’est pas inutile d’observer que Madame X est avocate, qu’ elle est en cette qualité particulièrement avertie sur les conséquences de l’absence de réserve à la réception de prestations et alors que ne contestant pas la réception de la facture le 22 décembre 2016 faisant suite à la mise en ligne du site, elle ne démontre pas davantage, là encore, avoir réagi.

Madame X ne saurait donc prospérer en ces moyens tenant à la mise en ligne non autorisée du site internet.

2- Madame X fait également grief à la société WEB IPRO de n’avoir pas respecté les conditions de formes prévues à l’article 4-2 du contrat tenant aux mentions devant figurer sur le procès-verbal de réception relatives au nom de domaine mais ce moyen n’est pas sérieux quand il apparaît que le nom de domaine figure sur le procès-verbal comme étant www.abv-avocats.fr, et quand par ailleurs les mentions relatives au menu de navigabilité, à la page contact et/ou aux coordonnées du client n’ont qu’une valeur indicative destinée à permettre la vérification de la conformité du site livré aux attentes contractuelles, objectif qui est en l’espèce satisfait par les indications du procès-verbal relatives à la vérification de la conformité du site internet à la fiche technique, aux besoins du client, à la vérification de la mise en ligne du site internet à l’adresse précitée et au contrôle de son bon fonctionnement.

Madame X ne saurait donc prospérer en ce moyen tenant au non respect des conditions de forme du procès-verbal de réception.

3-Madame X soutient également que l’absence de réserves émises à l’appui du procès-verbal de réception fait la preuve qu’elle ne peut être l’auteur de la signature dès lors qu’ayant apporté un grand soin à la réalisation de ce site, elle a formulé de nombreuses remarques dont WEB IPRO n’a pas tenu compte tandis qu’elle n’a été informée du contenu du site que par le délégué général de l’association agrée CLCV qui avait lancé une action de groupe dans le cadre de laquelle intervenait Maître X.

Elle observe par ailleurs ‘ si la signature recueillie par le prestataire sur le procès-verbal de réception est bien de la main de Madame X, ‘ il est vraisemblable que cette signature a été recueillie dans un autre but – peut-être lors de la présentation de l’ébauche du site le 7 juin 2016″ – et alors que WEB IPRO avait tout intérêt à faire signer le procès-verbal de réception à sa cliente dès lors que la résiliation postérieure à la signature lui ouvrait contractuellement droit au recouvrement de 100 % des sommes dues.

******

Cependant les nombreux messages échangés par les parties entre le mois de juin et le mois de décembre 2016 font la preuve du suivi diligent exercé par la société WEB IPRO pour répondre aux attentes exprimées par l’appelante, définir son périmètre d’activité, présenter les actions menées par son cabinet, vérifier les mots clés de référencement ce qui explique l’absence de réserves formulées à la réception.

Par ailleurs Madame X qui ne sollicite pas la vérification de la signature apposée sur le procès-verbal de réception et n’argue pas d’un faux, ne tire aucune conséquence des doutes qu’elle émet sur la signature apposée au bas du procès-verbal de réception quand au demeurant la cour constate que la signature manuscrite qui y figure est identique à celle apposée au bas du contrat signé le 7 juin 2016 et à celles apposées au bas de chaque maquette du site présentées sur format papier à Madame X à l’appui de la réception.

Madame X ne saurait donc prospérer en son moyen tiré de la remise en cause de sa signature.

4-Madame X impute à WEB IPRO un manquement à son obligation de reprendre le contenu de l’ancien site hébergé par la société WIX dont le nom de domaine était géré par OVH entraînant la suppression fautive des adresses mails et des emails le 6 décembre 2016

*****

La société WEB IPRO rappelle, sans être utilement contredite sur ce point par l’appelante, qu’en vertu du contrat liant les parties, la Prestataire n’était contact administratif (facturation et technique) d’OVH qu’en ce qui concerne le service « nom de domaine » de Maître X, et n’avait jamais été désigné contact concernant le service « emails » fourni par OVH à Maître X laquelle avait de manière constante la possibilité de se désigner elle-même en qualité de contact ou de désigner un tiers.

Cependant et alors que la société WEB IPRO démontre qu’elle n’avait aucun pouvoir de gestion relativement au service emails, cette dernière justifie cependant avoir fait diligence au-delà du périmètre contractuel de son intervention en mettant en relation Madame X avec l’hébergeur la société OVH pour tenter de trouver une solution à la perte des emails

Ainsi WEB IPRO écrivait le 9 décembre 2016 à Madame X :

« Le conseiller d’OVH m’a indiqué qu’il devrait prendre contact avec votre cabinet en début d’ après-midi afin de procéder à l’installation du back-up de vos emails. Je viens de raccrocher avec eux. Ils viennent de me confirmer qu’ils étaient en relation avec votre cabinet pour vous transmettre les éléments demandés. »

Le 12 décembre 2016, OVH répondait à WEB IPRO :« Je vous confirme qu’un mail de demande d’informations complémentaires a bien été envoyé ce 12/12/2016 en fin de matinée, afin de savoir quels sont les comptes mails concernés par le backup à réaliser pour le domaine « avb-avocats.fr »

De plus, il est également demandé à quel endroit il faut copier lesdits mails.

Nous n’avons toujours pas eu de retour quant à cette demande afin de pouvoir faire le nécessaire à notre niveau. »

Il n’est donc démontré aucune faute à l’encontre de WEB IPRO dans la perte des emails quand il est au demeurant démontré que le Prestataire a satisfait à l’ensemble de ses obligations contractuelles et a régulièrement appliqué les clauses contractuelles article 4-3 et 4-4, lui imposant, dans l’hypothèse d’un refus abusif du client, de procéder par voie de lettre recommandée pour obtenir la résiliation du contrat aux torts de ce dernier.

Par conséquent Madame J-B X sera déboutée de son appel et le jugement infirmé seulement en ce qu’il a prononcé une condamnation, la créance de la société WEB IPRO ne pouvant faire l’objet que d’une fixation à hauteur de la somme de 526,87 x 37 mensualités impayées = 19 494,19 euros avec intérêts au taux légal majoré de 5 points sur la somme de 14 926 euros à compter du jugement et à compter du présent arrêt pour le surplus conformément à l’article 10-4 du contrat le jugement étant confirmé de ce chef .

5- La clause pénale

Le tribunal a rejeté l’application de la clause pénale dans les motifs du jugement et celle-ci a manifestement été mentionnée par suite d’une erreur de plume dans le dispositif du jugement et il n’y a pas lieu de statuer sur l’application de la clause pénale, la société WEB IPRO n’étant pas appelante incidente du chef.

6- Les dommages et intérêts

La société WEB IPRO sollicite la confirmation du jugement qui lui a alloué une somme de

5 000 euros pour compenser la perte de chance de percevoir les mensualités du contrat du fait de la résiliation imputable à Madame X.

Le préjudice imputable à la résiliation abusive du contrat par Madame X est caractérisé par la privation de la trésorerie probable qui aurait bénéficié à l’entreprise en conséquence des revenus du contrat.

Il a été justement évalué à la somme de 5 000 euros et le jugement sera confirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement en ce qu’il est entré en voie de condamnation à l’encontre de Madame J-B X et sur le quantum des créances ;

Statuant à nouveau de ces seuls chefs :

Fixe les créances de la société WEB IPRO ainsi qu’il suit :

Principal : 19 494,19 euros avec intérêts au taux légal majoré de 5 points sur la somme de 14 926 euros, à compter du jugement, et à compter du présent arrêt pour le surplus du principal ;

Dommages et intérêts : 5 000 euros ;

Frais irrépétibles de première instance : 3 500 euros ;

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de redressement judiciaire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,


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