Insertion publicitaire : validation de la maquette facultative
Insertion publicitaire : validation de la maquette facultative

En l’absence de dispositions contractuelles contraires, le support n’est pas tenu  contractuellement de faire parvenir une maquette à l’annonceur, ayant en outre déjà honoré une autre commande dans les mêmes conditions.

En l’espèce, la société ADP (annonceur) n’a adressé aucun courrier à la société Nessia (support) portant sur une quelconque inexécution du contrat, ni préalablement sous la forme d’une éventuelle demande de signature d’un bon à tirer, ni postérieurement sur le contenu de l’annonce.

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 10

ARRÊT DU 17 MAI 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/11105 –��N° Portalis 35L7-V-B7D-CABH5

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Avril 2019 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY – RG n° 2018F01399

APPELANTE

SAS NESSIA

Ayant son siège social […]

[…]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me David TRUCHE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0647

INTIMEE

SA AEROPORTS DE PARIS

Ayant son siège social […]

[…]

N° SIRET : 552 016 628

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Alexis WERL de la SELEURL Alexis WERL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0062

Représentée par Me Laurent AYACHE de la SELEURL LAURENT AYACHE SELARL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0062, substitué par Me Nisrin ABELIN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Mars 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Stanislas de CHERGÉ, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

Monsieur Stanislas de CHERGÉ, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Edouard LOOS, Président, et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La Sas Nessia a pour activité le conseil pour les affaires et autres conseils de gestion, dont l’édition de magazines.

La Sa Aéroports de Paris (ADP) est chargée de la construction, de l’aménagement, de l’exploitation et du développement d’installation aéroportuaires.

La société Nessia a proposé à différents élus locaux et organismes publics ou semi-publics de réaliser l’édition d’un magazine local financé par l’achat d’espaces publicitaires par les différents commerçants du secteur considéré.

A ce titre, la société ADP a signé un bon de commande le 07 septembre 2017 ayant pour objet l’insertion d’une page de publicité dans le magazine « L’Economie en Val d’Oise » et un autre bon de commande le 15 novembre 2017 ayant pour objet l’insertion d’une page de publicité dans le numéro spécial « EPT07 ‘ Aulnay-sous-Bois, Drancy, Dugny, […], Le Blanc-Mesnil, Sevran, Tremblay-en France, Villepinte».

La société Nessia a émis deux factures de 13 200 euros Ttc le 29 novembre 2017 et de 14 400 euros Ttc le 20 décembre 2017, soit un montant total de 27 600 euros Ttc.

Le 23 mai 2018, la société Nessia a mis en demeure la société ADP, ainsi que la société Havas Media France en qualité de mandataire-payeur de la société ADP, de régler la somme de 27 600 euros Ttc.

Par ordonnance rendue le 20 septembre 2018, le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre a dit n’y avoir lieu à référé et renvoyé les parties au fond.

Par acte d’huissier du 4 octobre 2018, la société Nessia a assigné en paiement la société ADP devant le tribunal de commerce de Bobigny.

Par jugement du 23 avril 2019, le tribunal de commerce de Bobigny a :

— débouté la société Nessia de sa demande au titre de la facture n°FC5433 d’un montant de 13 200 euros ;

— condamné la société ADP à payer à la société Nessia la somme de 10 000 euros au titre de la facture n° FC5449 du 20 décembre 2017 ;

— débouté la société Nessia de toutes ses autres demandes ;

— condamné la société ADP aux dépens ;

— liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 74,54 euros Ttc.

Par déclaration du 27 mai 2019, la société Nessia a interjeté appel du jugement.

Par ordonnance de médiation du 16 septembre 2019, le conseiller de la mise en état a désigné le CMAP de Paris pour trouver une solution au conflit. Par courrier du 29 juin 2020, le médiateur désigné a fait savoir que la mission de médiation n’a pas permis de trouver un accord entre les parties.

Par dernières conclusions du 15 octobre 2020, la société Nessia demande à la cour de :

Vu les articles 1103 et 1104, subsidiairement les articles 1240 et suivants du code civil,

— déclarer recevable et bien fondée la société Nessia en toutes ses demandes, fins, moyens et conclusions ;

— confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bobigny le 23 avril 2019 en ce qu’il a condamné la société ADP à payer à la société Nessia la somme de 10.000 euros au titre de la facture n° FC 5449 du 20 décembre 2017 ;

— infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bobigny le 23 avril 2019 en ce qu’il a débouté la société Nessia de ses demandes de condamnation à paiement de la somme de 13.200 euros au titre de sa facture n° FC 5433, de la pénalité contractuelle afférente et d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau :

— condamner la société ADP à payer à la société Nessia la somme de 13.200 euros au titre sa facture n° FC 5433 ;

— condamner la société ADP à payer à la société Nessia la somme de 1.320 euros au titre de la pénalité prévue en cas de recouvrement judiciaire par les conditions générales de la société Nessia ;

— condamner la société ADP à payer à la société Nessia la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure pour la procédure de première instance ;

— condamner la société ADP à payer à la société Nessia la somme de 6.000 euros au titre l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel ;

— condamner la société ADP aux dépens de l’instance d’appel.

Par dernières conclusions du 17 février 2021, la société ADP demande à la cour de :

Vu notamment les articles 1103 et 1104, subsidiairement les articles 1240 et suivants du code civil,

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société Nessia sa demande au titre de la facture n° FC5433 d’un montant de 13.200 euros Ttc,

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Aéroports de Paris à payer à la société Nessia une somme de 10.000 euros au titre de sa facture n° FC5449 d’un montant de 14.400 euros Ttc,

Statuant à nouveau sur ce point,

— débouter la société Nessia de l’intégralité de ses demandes,

En tout état de cause,

— condamner la société Nessia à payer à la société Aéroports de Paris une somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société Nessia aux entiers dépens de première instance et d’appel.

SUR CE,

La société Nessia fait valoir, en ce qui concerne la facture de 14 400 euros Ttc du 20 décembre 2017, qu’elle conteste toute faute de sa part, le logo lui ayant été communiqué par la société ADP. Elle est néanmoins consciente d’une difficulté liée à la parution d’un ancien logo et se contente de la somme allouée en première instance. Sur le fondement des articles 1103 et 1104 du code civil, la société ADP s’est engagée de manière définitive et irrévocable à payer les sommes en cause pour l’ordre d’insertion d’une page de publicité dans le magazine « EPT07 ‘ Aulnay-sous-Bois, Drancy, Dugny, […], Le Blanc-Mesnil, Sevran, Tremblay-en-France, Villepinte » (facture n°FC 5433 du 15 novembre) ; la société ADP ne peut remettre en cause de manière unilatérale ce contrat en ne souhaitant plus faire paraître la publicité.

La société ADP fait valoir que la facture n° FC 5449 du 20 décembre 2017 n’est pas due en raison du manquement de la société Nessia à ses obligations contractuelles, la société Nessia n’a pas adressé la maquette de son annonce à la société ADP. S’agissant de l’insertion d’une page de publicité au profit d’ADP dans un numéro spécial « EPT07 ‘ Aulnay-sous-Bois, Drancy, Dugny, […], Le Blanc-Mesnil, Sevran, Tremblay-en France, Villepinte » (facture n°FC 5433 du 15 novembre), la société Nessia n’a jamais procédé à la parution dudit magazine. En raison d »une analyse juridique sur la régularité de la passation de l’ordre d’insertion, celle-ci a expressément demandé à la société Nessia de ne pas réaliser l’insertion publicitaire concernant la société ADP. En tout état de cause, la société Nessia ne peut être rémunérée au titre de cette facture dans la mesure où la prestation n’ a jamais été exécutée et ne le sera jamais.

Ceci étant exposé,

A/ Sur le bon de commande du 07 septembre 2017 et la facture de 14 400 euros Ttc du 20 décembre 2017

Le bon de commande du 07 septembre 2017 mentionne que la société ADP « donne son accord pour paraître dans le magazine de l’Economie en Val d’Oise» ; « visuel idem corporate ADP » sur une page intérieure. Il mentionne également comme observations : « envoyer BC + facture + justif. ». Selon les conditions générales, « le bon de commande tient lieu de facture. Il vaut contrat et engage de manière définitive et irrévocable l’annonceur qui a souscrit, qui a l’obligation de fournir tous les éléments nécessaires à l’insertion (‘) ; dans tous les cas, l’annonceur dispose d’un délai de 5 jours à compter de la réception du bon à tirer pour formuler toute observation ou toute demande de correction».

Il n’est pas contesté que l’annonce a été insérée par la société Nessia dans le magazine « l’Economie en Val d’Oise » du 4e trimestre 2017.

La société ADP fait valoir à ce jour que l’annonce publiée ne mentionne pas le logo correct de sa société et l’existence d’un préjudice lié à l’atteinte à son image, le logo inséré n’ayant plus court depuis 18 mois au moment de la parution.

Mais la société ADP n’a adressé aucun courrier à la société Nessia portant sur une quelconque inexécution du contrat, ni préalablement sous la forme d’une éventuelle demande de signature d’un bon à tirer, ni postérieurement sur le contenu de l’annonce. En outre, la facture de 14 400 euros Ttc du 20 décembre 2017 n’a pas été réglée uniquement en raison de dysfonctionnements administratifs entre les sociétés Havas Media et Nessia (courriel du 15 mars 2018 : « merci de nous infirmer des raisons s’y opposant ») et non pas en raison d’une opposition de la société ADP.

Si celui qui se prétend libéré doit justifier le fait qui a produit l’extinction de son obligation, la société ADP ne justifie ni l’inexécution fautive du contrat par la société Nessia, ni l’existence d’un préjudice qui serait lié à son image. En particulier, la société Nessia n’était pas tenue contractuellement de faire parvenir une maquette à l’annonceur, ayant en outre déjà honoré une autre commande le 1er juin 2016 dans les mêmes conditions.

De son côté, la société Nessia ne conteste pas son erreur de logo et demande que le paiement de la facture de 14 400 euros Ttc du 20 décembre 2017 soit réduit à la somme de 10 000 euros.

C’est donc à juste titre que les premiers juges ont condamné la société ADP à payer à la société Nessia la somme de 10 000 euros au titre de la facture du 20 décembre 2017.

Le jugement déféré sera confirmé sur ce chef.

B/ Sur le bon de commande du 15 novembre 2017 et la facture de 13 200 euros Ttc du 29 novembre 2017

Le bon de commande du 15 novembre 2017 mentionne que la société ADP « donne son accord pour paraître dans l’édition spéciale de « EPT07 ‘ Aulnay-sous-Bois, Drancy, Dugny, […], Le Blanc-Mesnil, Sevran, Tremblay-en France, Villepinte» sur une surface d’une page. Selon les conditions générales, « le bon de commande tient lieu de facture. Il vaut contrat et engage de manière définitive et irrévocable l’annonceur qui a souscrit, qui a l’obligation de fournir tous les éléments nécessaires à l’insertion (‘) Le signataire de l’ordre d’insertion reste en toute circonstance tenu pour responsable de l’exécution du contrat et de sa continuité ».

Le contrat étant formé par la rencontre d’une offre et d’une acceptation, avec la volonté de s’engager manifestée par les parties, la cour retiendra dans les débats que, par courrier en date du 09 mars 2018, soit quatre mois avant la date de parution envisagée par son cocontractant, la société ADP a enjoint à ce dernier de « stopper toute publication concernant le groupe Aéroports de Paris, cette décision étant à effet immédiat ».

Mais la société Nessia ne peut valablement être considérée comme ayant donné son acquiescement en ne faisant pas paraître cette insertion. Les conditions générales du bon de commande, qui a valeur contractuelle de facture, stipulent en effet que « les ordres de souscription conserveront leur plein effet même dans l’hypothèse d’un retard accusé par la publication quelle que soit la cause et la durée » et que la société ADP est « engagée de manière définitive et irrévocable ». Il n’existe de ce point de vue aucune clause relative à des modalités de résiliation.

La société ADP, annonceur défaillant, ne pouvait s’exonérer de ses obligations contractuelles, quelles que soient les circonstances, sauf à proposer une éventuelle modalité de sortie à son cocontractant, ce qu’elle n’a pas fait.

C’est donc à tort que les premiers juges ont relevé que la société Nessia « n’était pas dans l’obligation de faire paraître cette insertion » et mentionné son acquiescement pour la débouter de ses demandes.

Il en résulte que la société ADP doit être condamnée à payer à la société Nessia la somme de 13 200 euros Ttc.

La pénalité contractuelle de 10 %, soit la somme de 1 320 euros, manifestement excessive, sera modérée à la somme de 40 euros.

La somme totale due sera en conséquence chiffrée à 13 240 euros.

Le jugement déféré sera infirmé sur tous ces chefs.

La solution du litige conduira au rejet des autres demandes, dépourvues de justification.

PAR CES MOTIFS :

La cour

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu’il a débouté la société Nessia de sa demande au titre de la facture n° FC5433 en date du 29 novembre 2017 d’un montant de 13 200 euros ;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société Aéroports de Paris à payer à la société Nessia la somme de 13 240 euros Ttc ;

REJETTE toute autre demande ;

CONDAMNE la société Aéroports de Paris à payer à la société Nessia la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Aéroports de Paris aux dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS


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