Your cart is currently empty!
Une clause de non concurrence doit être interprétée strictement. Une telle clause est nulle si elle interdit au salarié vis à vis de son ancien employeur de travailler pour quelque fonction que ce soit, pour tout prestataire de services informatiques, quel que soit son domaine d’activité spécifique, qu’il soit client de l’entreprise ou non, l’interdiction apparaissant ainsi trop générale.
En l’occurrence, en prenant en compte les spécificités de l’emploi du salarié, la SARL Delsys justifie certes d’un intérêt légitime à restreindre la liberté de travail du salarié, en lien avec la nécessité de conserver sa clientèle dans un domaine concurrentiel, mais ne justifie pas de circonstances imposant qu’il soit apporté une restriction aussi importante que celle déclinée aux termes de cette clause.
Au demeurant, si la clause est limitée dans le temps à six mois à compter de la fin du préavis, elle n’est pas de façon claire limitée dans l’espace puisqu’il est stipulé que « Ces interdictions visent tout le territoire (ou tous les territoires) du secteur sur lequel (ou lesquels) vous avez exercé votre activité, au sein de notre société » même si « Ce secteur est initialement le territoire de la région Île-de-France ».
Aux termes de l’article L. 1121-1 du code du travail en effet, « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».
Une clause de non-concurrence n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte l’obligation pour l’employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives.
A toutes fins utiles, la clause litigieuse était rédigée comme suit :
« 12. Remise de documents et non concurrence
Les fonctions qui vous sont confiées vous font un devoir et une obligation de ne jamais tenter de détourner les clients de la société à votre profit ou au profit d’un tiers quelconque.
Vous vous engagez, en particulier, à ne pas vous intéresser directement ou indirectement à la clientèle de la société, même si vous faites l’objet de sa part de sollicitations spontanées.
En cas de départ, à quelque époque et pour quelque cause que ce soit :
1. vous vous engagez expressément à remettre à la société toutes pièces, documents, livres, clefs, correspondances, appartenant soit à la société, soit à ses clients.
2. Vous vous interdisez, sauf accord préalable et notifié par écrit de la direction :
– d’entrer, pour quelque fonction que ce soit, au service d’un client de la société ou d’une société ayant un objet social similaire à celui de la société (société concurrente) ;
– de créer, directement ou indirectement, une autre exploitation de même objet ou d’une partie seulement de l’objet social de la société ;
– de participer directement ou indirectement, à l’activité d’une telle exploitation sous quelque forme que ce soit.
3. Vous vous engagez expressément à ne pas entrer directement ou indirectement au service d’un client direct ou indirect (prestation via un partenaire de Delsys), pour lequel vous avez travaillé ou chez qui Delsys vous a présenté.
4. Vous vous engagez expressément à ne pas solliciter ni débaucher directement ou indirectement, un collaborateur de Delsys, pour le compte d’une société tierce.
. Ces interdictions visent tout le territoire (ou tous les territoires) du secteur sur lequel (ou lesquels) vous avez exercé votre activité, au sein de notre société.
. Ce secteur est initialement le territoire de la région Île-de-France.
. Ces interdictions interviennent à compter du jour de la fin du préavis payé, que celui-ci soit effectué ou non. Cependant, en cas de préavis abrégé d’un commun accord, l’interdiction prendra effet à compter de la date de fin de ce préavis.
. Durée de ces interdictions : 6 mois à la date de départ de notre société.
Cette clause pourra être levée par Delsys :
. Soit dans les trente jours calendaires suivant la date de réception de votre courrier de rupture du contrat de travail,
. Soit dans les trente jours calendaires suivant la date de rupture de votre contrat de travail par l’employeur.
En cas de levée de la clause, vous ne pouvez pas alors prétendre au versement de l’indemnité compensatrice décrite ci-dessous.
En contrepartie de la clause de non-concurrence
Cette obligation de non-concurrence fera l’objet d’une indemnité compensatrice à hauteur de 25% de votre dernier salaire brut mensuel normal (sur la base des 12 derniers mois), c’est à dire hors indemnités de congés payés, hors primes et hors indemnités de transport, au prorata temporis, pendant une période de six mois, après votre départ de Delsys.
Le versement de cette indemnité est conditionné à la fourniture chaque mois d’un justificatif attestant de votre nouvelle situation : attestation d’emploi de votre nouvel employeur ou en cas de non emploi attestation de versements Assedic ou à défaut attestation sur l’honneur.
Dans le cas où vous ne respecteriez pas la clause de non-concurrence définie ci-dessus et sans préjudice des dommages-intérêts qui pourront vous être réclamés pour concurrence déloyale, vous devrez verser dans les trente jours à la société, ou faire verser par votre nouvel employeur, une indemnité égale au total de la rémunération brute majorée de 55%, que vous aurez perçue au cours de vos six derniers mois de présence dans la société.
Le paiement de cette indemnité ne porte pas atteinte aux droits que la société se réserve expressément de vous poursuivre en remboursement du préjudice pécuniaire et moral effectivement subi et de faire ordonner sous astreinte la cessation de l’activité concurrentielle. »
________________________________________________________________________________________________________________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
6e chambre
ARRET DU 25 MARS 2021
N° RG 18/02279 – N° Portalis DBV3-V-B7C-SMDZ
AFFAIRE :
Société DELSYS
C/
Y X
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 03 Mai 2018 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT
N° Chambre :
N° Section : E
N° RG : 15/01974
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Vincent COLLIER
Me Stéphane VACCA
Me Jacques PEROTTO
le : 26 mars 2021
LE VINGT CINQ MARS DEUX MILLE VINGT ET UN,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Société DELSYS
N° SIRET : 353 498 884
[…]
[…]
Représentée par Me Vincent COLLIER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0287
APPELANTE
****************
Monsieur Y X
né le […] à […]
de nationalité Tunisienne
[…]
[…]
[…]
Représenté par Me Stéphane VACCA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0795
Société MARGO CONSEIL
N° SIRET : 482 713 005
[…]
[…]
Représentée par : Me Jacques PEROTTO de la SELARL ALERION SOCIETE D’AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0126
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 04 Février 2021 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Isabelle VENDRYES, Président,
Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,
Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,
Greffier lors des débats : Mme Elodie BOUCHET-BERT,
Rappel des faits constants
La SARL Delsys, dont le siège social est situé à Fontenay-aux-Roses dans les Hauts-de-Seine, est spécialisée dans l’ingénierie informatique et l’assistance technique informatique. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, dite Syntec.
M. Y X, né le […], a été engagé par cette société selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 5 mai 2014, en qualité d’ingénieur position 1.2 coefficient 100 non cadre, moyennant une rémunération annuelle de 34 000 euros brut sur une base de douze mois.
M. X a démissionné de cet emploi par courrier du 3 juillet 2015.
Il est par la suite entré au service de la société Margo Conseil en qualité d’ingénieur confirmé, coefficient 130 avec un statut de cadre pour une rémunération annuelle de 40 000 euros brut.
La SARL Delsys a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt pour non-respect de la clause de non-concurrence de son ancien salarié, par requête reçue au greffe le 18 novembre 2015.
La décision contestée
Par jugement contradictoire rendu le 3 mai 2018, la section encadrement du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt a :
— mis la société Margo Conseil hors de cause,
— débouté la SARL Delsys de l’intégralité de ses demandes,
— condamné la SARL Delsys à verser la somme de 2 835, 32 euros à M. X au titre de quatre mois de prime de clause de non-concurrence,
— condamné la SARL Delsys à verser la somme de 283,32 euros au titre de congés payés sur le montant de la prime de non-concurrence à M. X,
— condamné la SARL Delsys à verser à M. X la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— condamné la SARL Delsys à verser à la société Margo Conseil la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— débouté M. X du surplus de ses demandes,
— débouté la société Margo Conseil du surplus de ses demandes,
— ordonné l’exécution provisoire conformément à l’article R. 1454-28 du code du travail,
— mis les dépens à la charge de la SARL Delsys.
La procédure d’appel
La SARL Delsys a interjeté appel du jugement par déclaration du 16 mai 2018 enregistrée sous le numéro de procédure 18/02279.
Prétentions de la SARL Delsys, appelante
Par conclusions adressées par voie électronique le 20 février 2019, la SARL Delsys conclut à l’infirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande à la cour d’appel, statuant de nouveau, de condamner solidairement M. X et la société Margo Conseil à lui payer la somme totale de 34 285 euros au titre de la violation de la clause de non-concurrence.
L’appelante sollicite en outre les intérêts de retard au taux légal à compter de la saisine du bureau de conciliation et d’orientation, leur capitalisation et la condamnation solidaire de M. X et de la société Margo Conseil à lui payer une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Prétentions de M. X, intimé
Par conclusions adressées par voie électronique le 11 septembre 2018, M. X conclut à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris excepté en ce qui concerne la condamnation au titre des frais irrépétibles et demande donc à la cour d’appel de :
à titre principal,
— débouter la SARL Delsys de l’intégralité de ses demandes,
à titre subsidiaire,
— réduire la clause pénale de la clause de non-concurrence à la somme de 1 euro en application de l’article 1231-5 du code civil.
Elle sollicite en outre une somme de 3 480 euros pour la procédure de première instance et une somme de 3 000 euros pour la procédure d’appel en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Prétentions de la SAS Margo Conseil, intimée
Par conclusions adressées par voie électronique le 22 janvier 2019, la SAS Margo Conseil conclut à la confirmation en toutes ses dispositions du jugement entrepris et demande donc à la cour d’appel de :
à titre principal,
— la mettre hors de cause et rejeter la demande de condamnation de la SARL Delsys,
à titre subsidiaire,
— juger qu’elle n’a pas violé la clause de non-concurrence prévue dans le contrat de travail de M. X,
— débouter la SARL Delsys de sa demande indemnitaire,
à titre infiniment subsidiaire,
— réduire le montant de la clause pénale à 1 euro,
— condamner la SARL Delsys solidairement avec M. X à lui verser 1 euro (demande ainsi retenue après correction d’une erreur matérielle rectifiée lors des débats).
Elle sollicite une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions respectives, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
Par ordonnance rendue le 13 janvier 2021, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 4 février 2021.
MOTIFS DE L’ARRÊT
Sur la clause de non-concurrence
La clause litigieuse est ainsi libellée :
« 12. Remise de documents et non concurrence
Les fonctions qui vous sont confiées vous font un devoir et une obligation de ne jamais tenter de détourner les clients de la société à votre profit ou au profit d’un tiers quelconque.
Vous vous engagez, en particulier, à ne pas vous intéresser directement ou indirectement à la clientèle de la société, même si vous faites l’objet de sa part de sollicitations spontanées.
En cas de départ, à quelque époque et pour quelque cause que ce soit :
1. vous vous engagez expressément à remettre à la société toutes pièces, documents, livres, clefs, correspondances, appartenant soit à la société, soit à ses clients.
2. Vous vous interdisez, sauf accord préalable et notifié par écrit de la direction :
– d’entrer, pour quelque fonction que ce soit, au service d’un client de la société ou d’une société ayant un objet social similaire à celui de la société (société concurrente) ;
– de créer, directement ou indirectement, une autre exploitation de même objet ou d’une partie seulement de l’objet social de la société ;
– de participer directement ou indirectement, à l’activité d’une telle exploitation sous quelque forme que ce soit.
3. Vous vous engagez expressément à ne pas entrer directement ou indirectement au service d’un client direct ou indirect (prestation via un partenaire de Delsys), pour lequel vous avez travaillé ou chez qui Delsys vous a présenté.
4. Vous vous engagez expressément à ne pas solliciter ni débaucher directement ou indirectement, un collaborateur de Delsys, pour le compte d’une société tierce.
. Ces interdictions visent tout le territoire (ou tous les territoires) du secteur sur lequel (ou lesquels) vous avez exercé votre activité, au sein de notre société.
. Ce secteur est initialement le territoire de la région Île-de-France.
. Ces interdictions interviennent à compter du jour de la fin du préavis payé, que celui-ci soit effectué ou non. Cependant, en cas de préavis abrégé d’un commun accord, l’interdiction prendra effet à compter de la date de fin de ce préavis.
. Durée de ces interdictions : 6 mois à la date de départ de notre société.
Cette clause pourra être levée par Delsys :
. Soit dans les trente jours calendaires suivant la date de réception de votre courrier de rupture du contrat de travail,
. Soit dans les trente jours calendaires suivant la date de rupture de votre contrat de travail par l’employeur.
(…)
En cas de levée de la clause, vous ne pouvez pas alors prétendre au versement de l’indemnité compensatrice décrite ci-dessous.
En contrepartie de la clause de non-concurrence
Cette obligation de non-concurrence fera l’objet d’une indemnité compensatrice à hauteur de 25% de votre dernier salaire brut mensuel normal (sur la base des 12 derniers mois), c’est à dire hors indemnités de congés payés, hors primes et hors indemnités de transport, au prorata temporis, pendant une période de six mois, après votre départ de Delsys.
Le versement de cette indemnité est conditionné à la fourniture chaque mois d’un justificatif attestant de votre nouvelle situation : attestation d’emploi de votre nouvel employeur ou en cas de non emploi attestation de versements Assedic ou à défaut attestation sur l’honneur.
Dans le cas où vous ne respecteriez pas la clause de non-concurrence définie ci-dessus et sans préjudice des dommages-intérêts qui pourront vous être réclamés pour concurrence déloyale, vous devrez verser dans les trente jours à la société, ou faire verser par votre nouvel employeur, une indemnité égale au total de la rémunération brute majorée de 55%, que vous aurez perçue au cours de vos six derniers mois de présence dans la société.
Le paiement de cette indemnité ne porte pas atteinte aux droits que la société se réserve expressément de vous poursuivre en remboursement du préjudice pécuniaire et moral effectivement subi et de faire ordonner sous astreinte la cessation de l’activité concurrentielle. »
Contestant cette clause, M. X soutient d’abord que celle-ci n’est ni valide, ni opposable aux motifs qu’elle n’est pas indispensable à la protection des intérêts légitimes de la SARL Delsys, qu’elle est si générale qu’elle lui interdit de travailler dans tout domaine dans l’informatique, qu’enfin les sociétés Delsys et Margo Conseil n’exercent pas d’activités concurrentes. Il soutient ensuite, que Delsys et Margo Conseil ne sont pas concurrentes dès lors que Margo Conseil n’est pas et n’a jamais été cliente de Delsys, que les deux sociétés n’ont pas d’objet social similaire, qu’elles ne visent pas la même cible et qu’elles ne se concurrencent pas, n’ayant pas le même positionnement métier. Il ajoute encore que la SARL Delsys n’a jamais eu accès aux clients de Margo Conseil, que les deux sociétés n’ont pas suivi le même développement, que ses fonctions chez Margo Conseil sont différentes et qu’enfin, il estime avoir parfaitement le droit de démissionner de Delsys pour un poste et des fonctions plus intéressants.
Le salarié contestant à la fois la validité de la clause et son application, il y a lieu d’examiner en premier lieu la question de la validité.
Une clause de non-concurrence n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte l’obligation pour l’employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives.
Aux termes de l’article L. 1121-1 du code du travail en effet, « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché ».
M. X rappelle qu’il a été engagé par la SARL Delsys en qualité d’ingénieur débutant chargé de faire du développement et de la recherche pour les clients. Il souligne que la clause lui interdit de travailler en tant qu’ingénieur informaticien chez des clients de la SARL Delsys mais également dans le domaine de la finance de marché, comme cela est le cas chez Margo Conseil.
Le salarié explique qu’en qualité d’ingénieur en informatique, il était spécialisé dans la finance de marchés, que la SARL Delsys lui avait promis qu’il travaillerait pour ce secteur d’activité mais que cela n’a pas été le cas, la société n’étant même pas référencée dans ce domaine, que par l’intermédiaire d’une amie, il a postulé chez Margo Conseil, au sein de laquelle il lui était offert la possibilité de poursuivre sa carrière en finance de marchés, la société étant référencée auprès de grandes banques d’investissement, il lui était possible de suivre des formations en finance tandis qu’une rémunération annuelle supérieure de 10 000 euros supérieure à celle de Delsys lui était proposée.
Il souligne que le fait de ne pas effectuer le préavis intéressait la SARL Delsys, qui a accepté sans discuter, car il était alors en inter-contrats, donc non affecté chez un client et donc sans prestations facturées.
La SARL Delsys explique quant à elle qu’elle a pour objet toutes activités ayant trait à l’ingénierie informatique et à l’assistance technique informatique, qu’elle propose des compétences en assistance technique informatique sur les nouvelles technologies dans le domaine des études et du développement. Elle souligne que, même si elle n’est pas spécialisée dans un domaine particulier, elle peut accéder à des clients chez lesquels elle n’est pas référencée et donc accéder à des missions dans le domaine de la finance de marché entre autres.
La société Margo Conseil rappelle qu’elle est spécialisée dans les algorithmes de finance de marché, que selon son site internet, elle est « la première société de conseil française en finance de marché front office, et expert de tous les métiers de la finance et de l’IT » alors que la SARL Delsys a pour activité le développement d’infrastructures réseaux, clés en main.
Aux termes de la clause de non-concurrence ci-dessus rappelée, il est interdit à M. X de : « tenter de détourner les clients de la société à (son) profit ou au profit d’un tiers quelconque, de s’intéresser directement ou indirectement à la clientèle de la société, d’entrer, pour quelque fonction que ce soit, au service d’un client de la société ou d’une société ayant un objet social similaire à celui de la société (société concurrente), d’entrer directement ou indirectement au service d’un client direct ou indirect (prestation via un partenaire de Delsys), pour lequel (il a) travaillé ou chez qui Delsys (l’)a présenté ».
Compte tenu des termes de la clause, qui doivent être interprétés strictement, il sera retenu que M. X s’interdit vis à vis de son ancien employeur de travailler pour quelque fonction que ce soit, pour tout prestataire de services informatiques, quel que soit son domaine d’activité spécifique, qu’il soit client de l’entreprise ou non, l’interdiction apparaissant ainsi générale.
En prenant en compte les spécificités de l’emploi du salarié, la SARL Delsys justifie certes d’un intérêt légitime à restreindre la liberté de travail du salarié, en lien avec la nécessité de conserver sa clientèle dans un domaine concurrentiel, mais ne justifie pas de circonstances imposant qu’il soit apportée une restriction aussi importante que celle déclinée aux termes de cette clause.
Au demeurant, si la clause est limitée dans le temps à six mois à compter de la fin du préavis, elle n’est pas de façon claire limitée dans l’espace puisqu’il est stipulé que « Ces interdictions visent tout le territoire (ou tous les territoires) du secteur sur lequel (ou lesquels) vous avez exercé votre activité, au sein de notre société » même si « Ce secteur est initialement le territoire de la région Île-de-France ».
Conformément à la demande principale de M. X, la clause de non-concurrence insérée dans le contrat de travail qu’il a signé avec la SARL Delsys, doit être déclarée nulle.
La SARL Delsys sera en conséquence déboutée de sa demande tendant à la condamnation solidaire de M. X et de la société Margo Conseil à lui payer la somme de 34 285 euros au titre de la violation de la clause de non-concurrence, par confirmation du jugement entrepris.
Il sera toutefois infirmé en ce qu’il a condamné le SARL Delsys à verser à M. X une somme équivalente à quatre mois d’indemnité de non-concurrence compte tenu de la nullité retenue.
Sur les dépens et les frais irrépétibles de procédure
La SARL Delsys, qui succombe dans ses prétentions, supportera les dépens de première instance et d’appel, en application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Elle sera en outre condamnée à payer à M. X une indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, que l’équité et la situation économique respective des parties conduisent à arbitrer à la somme de 2 000 euros.
Elle sera également condamnée à payer à la société Margo Conseil une somme de 1 000 euros sur le même fondement.
La SARL Delsys sera déboutée de sa demande présentée sur le même fondement.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt le 3 mai 2018, excepté en ce qu’il a condamné la SARL Delsys à verser à M. X la somme de 2 835, 32 euros au titre de quatre mois de prime de clause de non-concurrence, outre la somme de 283,32 euros à titre de congés payés,
Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,
DÉBOUTE M. Y X de sa demande au titre de quatre mois de prime de clause de non-concurrence outre les congés payés afférents,
CONDAMNE SARL Delsys à payer à . Y X une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE SARL Delsys à payer à société Margo Conseil une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE la SARL Delsys de sa demande présentée sur le même fondement,
CONDAMNE la SARL Delsys au paiement des entiers dépens.
Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Isabelle Vendryes, présidente, et par Mme Élodie Bouchet-Bert, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT