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Pour certaines professions, l’usage (voir l’interdiction) du téléphone mobile au travail doit être encadré par le règlement intérieur.
L’employeur d’une auxiliaire de crèche n’a pu lui reprocher l’usage de son téléphone portable pendant les heures de garde, car ne produisant pas le règlement intérieur faisant état de l’interdiction d’en faire usage de celui-ci durant les heures de travail. En outre, deux attestations de deux anciennes salariées, indiquaient que la direction leur demandait de faire usage de leurs téléphones personnels afin de photographier les enfants accueillis. Enfin, il résultait de la lettre de licenciement que l’employeur indiquait que la directrice a écrit un SMS à la salariée pour la convoquer à un entretien.
L’employeur ayant nécessairement connaissance que la salariée était au travail lorsque la directrice lui a écrit un SMS puis lui a répondu, il n’est pas fondé à lui reprocher d’en avoir fait usage sur son lieu de travail, dès lors qu’il utilisait lui-même le téléphone personnel de la salariée pour communiquer avec elle durant ses heures de travail.
Au surplus, l’employeur n’apportait aucun élément permettant de démontrer qu’un moyen de communication professionnel était à la disposition de la salariée lui permettant de contacter la direction alors qu’elle était seule dans la micro-crèche. Ce grief ne peut en conséquence être retenu.
Pour rappel, il résulte des dispositions des articles R. 2324-43-1 du code de la santé publique que les micro-crèches, telles que mentionnées au 4° de l’article R. 2324-17 du même code, sont soumis à l’obligation d’avoir au minimum deux membres de personnel encadrant directement les enfants dès lorsqu’ils accueillent quatre enfants ou plus. Ainsi, jusqu’à trois enfants, une micro-crèche est autorisée à n’avoir recours qu’à un seul membre de personnel encadrant directement les enfants.
La gravité des faits fautifs reprochés à Mme X n’était pas telle qu’elle rendait impossible son maintien dans l’entreprise. Toutefois, le fait pour la salariée d’avoir laissé sans surveillance un enfant dormant dans le dortoir de la micro-crèche dont elle était seule en charge, en rejoignant sa collègue de travail située dans la micro-crèche attenante, constitue un manquement à ses obligations contractuelles justifiant son licenciement pour une cause réelle et sérieuse, par infirmation du jugement déféré de ce chef.
Pour rappel, selon les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, énoncée dans une lettre notifiée au salarié. Cette lettre, qui fixe les limites du litige doit exposer des motifs précis et matériellement vérifiables, permettant au juge d’en apprécier la réalité et le sérieux.
Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.
Il est de principe que la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de l’intéressé au sein de l’entreprise même pendant la durée du préavis. La mise en oeuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits fautifs mais le maintien du salarié dans l’entreprise est possible pendant le temps nécessaire pour apprécier le degré de gravité des fautes commises. L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.
La gravité de la faute s’apprécie en tenant compte du contexte des faits, de l’ancienneté du salarié et des conséquences que peuvent avoir les agissements du salarié et de l’existence ou de l’absence de précédents disciplinaires.
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section A
ARRÊT DU MARDI 22 JUIN 2021
Appel d’une décision (N° RG 18/00012) rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Vienne en date du 15 janvier 2020 suivant déclaration d’appel du 13 Février 2020
APPELANTE :
Madame X
née le […] à […]
de nationalité Française
[…]
[…]
représentée par Me Véronique GARCIA GOMEZ, avocat au barreau de GRENOBLE,
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/002106 du 20/02/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de GRENOBLE),
INTIMEE :
S.A.S. LES BAMBINS DE FOUR, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège,
[…]
[…]
[…]
représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant,
et par Me Thibault ROULLET de la SCP ELATHA, avocat au barreau de LYON substitué par Me Raphaëlle NEGRELLO, avocat au barreau de LYON, plaidante,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Philippe SILVAN, Conseiller faisant fonction de président
Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère
Mme Magali DURAND-MULIN, Conseillère
DÉBATS :
A l’audience publique du 18 Mai 2021,
Mme Valéry CHARBONNIER, conseiller chargée du rapport, assistée de Mme Carole COLAS, greffier, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.
Puis l’affaire a été mise en délibéré au 22 Juin 2021, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L’arrêt a été rendu le 22 Juin 2021.
Exposé du litige :
Mme X a été embauchée par la SAS Les Bambins de Four sous contrat à durée indéterminée à compter du 20 janvier 2014 en qualité d’auxiliaire de micro-crèche.
Par courrier remis en main propre et envoyé par lettre recommandée avec avis de réception en date du 24 mars 2017, Mme X s’est vu notifier une mise à pied à titre conservatoire.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 29 mars 2017, Mme X a été convoquée à un entretien préalable.
L’entretien préalable a été déplacé au 10 avril 2017, par courrier recommandé avec avis de réception en date du 5 avril 2017.
Le 24 avril 2017, Mme X s’est vu notifier son licenciement pour faute grave.
Le 5 janvier 2018, Mme X a saisi le Conseil de prud’hommes de Vienne pour contester le bien-fondé de son licenciement et obtenir les indemnités afférentes.
Par jugement du 15 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Vienne a :
— Dit et jugé que le licenciement pour faute grave de Mme X repose sur une cause réelle et sérieuse,
— En conséquence,
— Dit et jugé mal fondées les demandes de Mme X,
— Débouté Mme X de l’intégralité de ses demandes,
— Débouté la SAS Les Bambins de Four de sa demande reconventionnelle,
— Laissé à la charge de Mme X les entiers dépens de l’instance.
Mme X a fait appel de ce jugement le 13 février 2020.
A l’issue de ses conclusions du 4 juin 2020, Mme X demande de :
— Voir réformer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Vienne le 15 janvier 2020,
— Statuant à nouveau,
— Dire et juger que le licenciement de Mme X ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,
— En conséquence,
— Voir condamner la société Les Bambins de Four à lui payer les sommes suivantes :
o 16 000 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
o 1 312,16 € à titre d’indemnité de licenciement,
o 3 082,47 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
o 308,25 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
o 386,17 € à titre de rappel de salaire sur la période de mise à pied à titre conservatoire,
o 38,62 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
— Voir ordonner que les sommes allouées porteront intérêt à cause au taux légal depuis la saisine du conseil de prud’hommes,
— Voir condamner la société Les Bambins de Four aux entiers dépens de première instance et d’appel.
A l’issue de ses conclusions du 24 juillet 2020, la SAS Les Bambins de Four demande de :
— Confirmer le jugement de première instance par le conseil de prud’hommes de Vienne le 15 janvier 2020 en tout point sauf en ce qu’il l’a déboutée de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— Débouter Mme Y de l’ensemble de ses demandes,
— Condamner Mme Y à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.
La clôture a été prononcée le 27 avril 2021.
SUR QUOI :
Sur le bien-fondé du licenciement :
Moyens des parties :
Mme X fait valoir que la preuve de ce qu’elle aurait laissé un enfant dont elle avait la responsabilité sans surveillance n’est pas rapportée par l’employeur, qu’en effet, si elle est bien sortie un instant à l’extérieur en portant un enfant dans les bras, afin de prévenir une de ses collègues située dans la micro-crèche attenante pour qu’elle la remplace, ne se sentant pas bien, elle a continué à surveiller l’enfant endormi par la fenêtre, ce qu’elle démontre par la production de photographies, qu’ainsi, elle n’a ainsi pas manqué à son obligation de surveillance.
Mme X ajoute qu’elle s’est retrouvée dans la situation de devoir sortir, parce que l’employeur n’a pas respecté la réglementation relative au nombre de salariés par enfants, qu’elle a ainsi été contrainte de travailler sans pause pendant onze heures, de 8h à 19h00, ayant accepté de faire des heures supplémentaires pour remplacer une collègue malade, et s’est retrouvée seule dans la crèche à partir de 17h, qu’en outre, il était de pratique courante que les employés fassent des allers-retours entre les deux micro-crèches et sortent ainsi à l’extérieur, ce qui était connu et admis par l’employeur. Mme X soutient que son employeur ne peut lui reprocher d’avoir consulté son téléphone portable, alors qu’il l’a convoquée par SMS à un entretien pendant ses heures de travail, que l’envoi de SMS avait pour but de la déstabiliser et de l’insécuriser pendant son temps de travail, et qu’en outre les salariés étaient invités à utiliser leur téléphone personnel dans le cadre de leur activité pour être joints par les parents, faire des photos des évènements festifs organisés pour les enfants, mais également pour recevoir les instructions de travail adressées par la directrice ou son adjointe.
La SARL Les Bambins de Four soutient que Mme X a laissé seul et sans surveillance un enfant dans la micro crèche qui était sous sa garde pour aller s’entretenir avec l’une de ses collègues travaillant dans une micro-crèche adjacente, que la salariée ne conteste pas avoir quitté les lieux, que Mme X ne pouvait sortir tout en continuant de surveiller l’enfant dans le dortoir, tel que cela ressort d’un plan des lieux qu’elle verse aux débats, qu’il est en effet impossible de voir l’intérieur des dortoirs de l’extérieur, les fenêtres étant occultées par des rideaux, qu’en outre, en discutant avec une collègue, elle n’était pas en mesure d’entendre les éventuels pleurs d’un enfant à l’intérieur du dortoir. La SAS Les bambins de Four ajoute qu’elle a parfaitement respecté la réglementation en vigueur, la salariée pouvant rester seule dans les locaux de la crèche avec deux enfants, que la salariée ne démontre pas qu’elle n’a pas été en mesure de prendre de pauses durant sa journée de travail, que l’envoi du SMS n’était pas de nature à déstabiliser la salariée, n’appelait pas de réponse immédiate, et ne justifiait pas qu’elle abandonne la surveillance d’un enfant pour aller voir sa collègue, et que dans tous les cas, Mme X ne démontre pas s’être sentie mal.
Sur ce,
Selon les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, énoncée dans une lettre notifiée au salarié. Cette lettre, qui fixe les limites du litige doit exposer des motifs précis et matériellement vérifiables, permettant au juge d’en apprécier la réalité et le sérieux.
Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.
Il est de principe que la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de l’intéressé au sein de l’entreprise même pendant la durée du préavis. La mise en oeuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits fautifs mais le maintien du salarié dans l’entreprise est possible pendant le temps nécessaire pour apprécier le degré de gravité des fautes commises. L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.
La gravité de la faute s’apprécie en tenant compte du contexte des faits, de l’ancienneté du salarié et des conséquences que peuvent avoir les agissements du salarié et de l’existence ou de l’absence de précédents disciplinaires.
Aux termes de la lettre de licenciement du 24 avril 2017, la SAS Les bambins de Four reproche à Mme X de s’être absentée pendant vingt minutes de la micro-crèche dont elle assurait la surveillance en laissant un bébé couché dans son lit seul à l’intérieur pour discuter avec une employée de la micro-crèche attenante d’un SMS reçu de la part de la directrice, l’employeur reprochant également à la salariée d’avoir fait usage de son téléphone privé.
S’agissant de l’usage du téléphone portable privé par la salariée, la SAS Les bambins de Four ne produit pas le règlement intérieur faisant état de l’interdiction d’en faire usage durant les heures de travail. En outre, Mme X produit deux attestations de deux anciennes salariées, Mme Z et Mme A qui, toutes les deux, indiquent que la direction leur demandait de faire usage de leurs téléphones personnels afin de photographier les enfants accueillis. Enfin, il résulte de la lettre de licenciement que l’employeur indique que la directrice a écrit un SMS à Mme X pour la convoquer à un entretien, et qu’elle lui a réécrit un nouvel SMS après que Mme X lui eut répondu. L’employeur ayant nécessairement connaissance que Mme X était au travail lorsque la directrice lui a écrit un SMS puis lui a répondu, il n’est pas fondé à lui reprocher d’en avoir fait usage sur son lieu de travail, dès lors qu’il utilisait lui-même le téléphone personnel de la salariée pour communiquer avec elle durant ses heures de travail.
Au surplus, la SAS Les bambins de Four n’apporte aucun élément permettant de démontrer qu’un moyen de communication professionnel était à la disposition de Mme X, lui permettant de contacter la direction alors qu’elle était seule dans la micro-crèche. Ce grief ne peut en conséquence être retenu.
S’agissant du reproche d’avoir laissé seul un enfant qui dormait dans le dortoir en quittant la micro-crèche pour rejoindre une collègue travaillant dans la micro-crèche attenante, Mme X ne conteste pas être sortie de la micro-crèche dans laquelle elle était le seul membre du personnel présent depuis 17 heures avec un enfant dans les bras en laissant un autre enfant dormir seul dans le dortoir, afin de rejoindre l’une de ses collègues qui travaillait dans la micro-crèche attenante. Eu égard aux conséquences que l’absence de surveillance directe d’un enfant en bas âge peut avoir, le seul fait d’avoir quitté les locaux dans lesquels se trouvait l’enfant, peu important la possibilité ou non de surveiller l’enfant de l’extérieur, constitue un fait fautif.
S’agissant du degré de gravité de la faute commise, l’existence d’un détachement entre les deux micro-crèches, visible sur les photographies produites par la salariée, rendait impossible pour Mme X de voir et de surveiller l’enfant laissé dans le dortoir de sa micro-crèche lorsqu’elle se tenait devant la porte de la deuxième micro-crèche.
Il résulte des dispositions des articles R. 2324-43-1 du code de la santé publique que les micro-crèches, telles que mentionnées au 4° de l’article R. 2324-17 du même code, sont soumis à l’obligation d’avoir au minimum deux membres de personnel encadrant directement les enfants dès lorsqu’ils accueillent quatre enfants ou plus. Ainsi, jusqu’à trois enfants, une micro-crèche est autorisée à n’avoir recours qu’à un seul membre de personnel encadrant directement les enfants.
En conséquence, la SAS Les bambins de Four n’a pas manqué à ses obligations en laissant Mme X seule dans la micro-crèche pour surveiller deux enfants à partir de 17h00.
Si la SAS Les bambins de Four n’apporte aucun élément permettant de retenir que Mme X a bien pu bénéficier d’une pause le 17 mars 2017, conformément aux dispositions de l’article L. 3121-16 du code du travail, cet élément est inopérant s’agissant du comportement reproché à Mme X d’avoir laissé seul un enfant dans le dortoir.
Enfin, s’agissant de l’état de Mme X, qui allègue qu’elle s’est sentie mal après avoir reçu le SMS de sa directrice, Mme B, atteste que lorsque Mme X est arrivée devant la fenêtre de sa micro-crèche, elle avait l’air mal, qu’elle s’est effondrée en pleurs après qu’elle lui eut ouvert la fenêtre et lui eut demandé comme elle allait, que son état était en lien avec sa convocation à un entretien par la directrice, et qu’elle continuait de pleurer et de s’agiter lorsque Mme B l’eut par la suite rejoint dans sa micro-crèche.
En revanche, Mme X ne produit aucun élément permettant à la cour de se convaincre que son état, après avoir reçu le SMS de la directrice, était tel qu’elle n’avait d’autre choix que de sortir pour solliciter l’aide de sa collègue de travail, la salariée ne soutenant au demeurant pas qu’elle ne se sentait plus en mesure d’assurer la surveillance des enfants dont elle avait la charge, et ayant, en outre, toujours la possibilité de faire usage de son téléphone portable personnel en cas d’urgence si nécessaire.
Compte tenu des circonstances dans lesquelles se sont produits les faits reprochés à Mme X, et notamment la durée de la journée de travail, de l’absence de pause, de l’utilisation par l’employeur du téléphone personnel de la salariée pour la convoquer à un entretien alors qu’elle était en poste, et de l’absence d’antécédent disciplinaire, il y a lieu de retenir que la gravité des faits fautifs reprochés à Mme X n’était pas telle qu’elle rendait impossible son maintien dans l’entreprise.
Le juge doit rechercher si ces faits, à défaut de caractériser une faute grave, comme le prétend l’employeur, ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Le fait pour Mme X d’avoir laissé sans surveillance un enfant dormant dans le dortoir de la micro-crèche dont elle était seule en charge, en rejoignant sa collègue de travail située dans la micro-crèche attenante, constitue un manquement à ses obligations contractuelles justifiant son licenciement pour une cause réelle et sérieuse, par infirmation du jugement déféré de ce chef.
Selon l’article L. 1234-9 du code du travail, dans sa version applicable au litige, le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.
Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.
L’article R. 1234-2 du même code, dans sa version applicable au litige, dispose que l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d’ancienneté.
Mme X avait une ancienneté de trois ans et de cinq mois au moment de son licenciement, et
percevait un salaire mensuel brut moyen de 1 543,71 euros.
En conséquence, la SAS Les bambins de Four sera condamnée à lui verser la somme de 1 054,87 euros à titre d’indemnité légale de licenciement, par infirmation du jugement déféré.
La SAS Les bambins de Four sera également condamnée à lui payer la somme de 3 082,47 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 308,25 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents, ces sommes n’étant pas contestées par la SAS Les bambins de Four.
Enfin, Mme X est bien fondée à obtenir la condamnation de la SAS Les bambins de Four à lui payer un rappel de salaire de 386,17 euros sur la période de la mise à pied à titre conservatoire, outre 38,62 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents.
Sur le surplus des demandes :
Le jugement de première instance sera infirmé sur les dépens et confirmée sur les frais irrépétibles, la SAS Les bambins de Four ayant été déboutée de sa demande formulée à ce titre.
La SAS Les bambins de Four, partie perdante, sera déboutée de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
Mme X ne formulant aucune demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de cet article au titre de la première instance et en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
INFIRME le jugement du Conseil de prud’hommes de Vienne du 15 janvier 2020 sauf en ce qu’il a débouté la SAS Les bambins de Four de sa demande reconventionnelle formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
DIT que les faits reprochés à Mme X ne sont pas constitutifs d’une faute grave,
DIT que le licenciement de Mme X est justifié par une cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE la SAS Les bambins de Four à payer à Mme X les sommes suivantes :
— 386,17 euros sur la période de la mise à pied à titre conservatoire, outre 38,62 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
— 3 082,47 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 308,25 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,
— 1 054,87 euros à titre d’indemnité légale de licenciement.
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,
CONDAMNE la SAS Les bambins de Four aux dépens de première instance et d’appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Mme Valery CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente , pour le Président empêché, et par Madame Carole COLAS, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE LA CONSEILLERE FAISANT FONCTION DE PRESIDENTE