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La diffusion sans anonymisation d’une décision administrative ne porte pas atteinte à la vie privée en l’absence de risque particulier pour les personnes concernées, la décision ne comportant pas de données à caractère personnel sensible ou relatives à une condamnation pénale. Il ne peut dès lors être fait droit à la demande de la personne concernée au titre d’une atteinte à la vie privée par la publication de l’article faisant état de cette décision administrative (radiation/sanction d’un fonctionnaire pour des faits délictueux).
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 30 MARS 2021
N° RG 20/00189 – N° Portalis DBWA-V-B7E-CEYC
Y
X
MINISTERE PUBLIC (PROCUREUR GENERAL
AUTRE
Décision déférée à la cour : Ordonnance Référé, du Président du Tribunal Judiciaire de FORT DE FRANCE, décision attaquée en date du 09 Juin 2020, enregistrée sous le n° 20/00056
APPELANTS :
Monsieur C Y
[…]
[…]
Représenté par Me C CONSTANT, avocat au barreau de MARTINIQUE
Madame D E
[…]
[…]
Représentée par Me C CONSTANT, avocat au barreau de MARTINIQUE
INTIMÉ :
Monsieur F X
[…]
[…]
Représenté par Me Alban alexandre COULIBALY, avocat au barreau de MARTINIQUE
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 29 Janvier 2021 sur le rapport de Madame G H, devant la cour composée de:
Président : Madame G H, Présidente de chambre
Assesseur : Marjorie LACASSAGNE, Conseillère
Assesseur : Claire DONNIZAUX, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière lors des débats : Mme B PIERRE-GABRIEL,
Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l’arrêt fixée au 30 Mars 2021 ;
MINISTERE PUBLIC :
L’affaire a été communiquée au Ministère Public, représenté par Mme F. REYREAUD, Vice procureure placée, qui a fait connaître son avis.
ARRÊT : Contradictoire
prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’alinéa 2 de l’article 450 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE
Autorisé par ordonnance en date du 18 février 2020, monsieur F X a assigné en référé par actes du 19 février 2020, devant le président du tribunal judicaire de Fort de France monsieur C Y et madame D E, sur le fondement des articles 9 et 9-1 du Code civil, 6§2 et 8 de la CEDH, 12 de la déclaration universelle des droits de l’homme, 1240 du Code civil et 809 du code de procédure civile aux fins de dire que les articles publiés sur le site Montray Kreyol et dénoncés dans la requête portent atteinte à sa vie privée.
Monsieur C Y est directeur de la publication du site Montray Kreyol et auteur de certains des articles visés. Madame D E est présidente de l’association Dikte Kreyol qui gère le site Montray Kreyol.
Par ordonnance en date du 9 juin 2020, la présidente par délégation du tribunal jubilaire de Fort de France, statuant en référé a statué comme suit:
— Rejetons l’exception de nullité de l’assignation pour défaut de motivation.
— Déclarons nulle l’assignation à défaut de respecter les prescriptions de l’article 53 de Ia loi du 29 Juillet 1881 applicable devant la juridiction civile, pour l’ensemble des incriminations requalifiées en diffamation au sens de l’article 29 de ladite loi.
— Rejetons la fin de non-recevoir tirée de la prescription,
— Disons que les publications incriminées publiées sur le site Montray Kreyol des 26 novembre 2019,
30 novembre 2019, 18 décembre 2019 et 04 décembre 2019 portent atteinte à la présomption d’innocence de Monsieur F X,
En conséquence,
— Enjoignons à Monsieur C Y en qualite d’auteur et directeur de publication de Montray Kreyol et Madame D E en qualité de présidente de l’Association Dikte Kreyol gérant le site internet Montray Kreyol de diffuser dans un délai maximal de 72 heures après la signification de la présente ordonnance, un communiqué, en page supérieure du site Montray Kreyol immédiatement accessible et visible, sans qu’aucune mention n’y soit ajoutée, en police de caractère ‘ verdana’ de taille 12 de couleur noire sur fond blanc, en dehors de tout encart publicitaire, et qui devra rester accessible et visible sur le site Montray Kreyol pendant une durée de UN mois :
Précédé de la mention
‘COMMUNIQUE JUDICIAIRE » en lettres capitales de taille 14
Et libellé comme suit :
‘Par ordonnance de référé du 09 juin 2020, le Président du Tribunal de Justice de Fort-de-France a condamné M. C Y, en qualité de directeur de publication et auteur de plusieurs articles anonymes publiés sur le site internet Montray Kreyol ainsi que Madame D E en qualité de présidente de l’Association Dikte Kreyol gérant le site internet Montray Kreyol, pour avoir écrit et publié sur le site plusieurs articles portant atteinte à la présomption d’innocence de Monsieur F X et a ordonné la diffusion du présent communiqué »
Disons que injonction sera assortie d’une astreinte de 500 Euros par jour, durant lequel le communiqué ne serait pas publié, passé un délai de 72 heures à compter de la signification de l’ordonnance et ce pendant une durée de 02 mois.
Déboutons Monsieur F X de son action au titre de l’atteinte portée à sa vie privée,
Déboutons Monsieur C Y et Madame D E es qualité de présidente de l’Association Dikte Kreyol de leurs demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Condamnons Monsieur C J et Madame D E es qualité de présidente de l’Association Dikte Kreyol à payer à Monsieur F X la somme de 1500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Déboutons Monsieur C Y et Madame D E es qualité de présidente de l’Association Dikte Kreyol de leurs demandes d’indemnités formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamnons Monsieur C Y et Madame D E es qualité de présidente de l’Association Dikte Kreyol aux entiers dépens.
Rappelons que la présente ordonnance bénéficie de l’exécution provisoire de droit ‘
Monsieur C Y et madame D E ont limité la portée de leur appel dans les limites de ce qui est indiqué dans leur déclaration aux chefs de la décision les condamnant, au rejet de l’exception de nullité de l’assignation et au rejet de la fin de non-recevoir tirée de la prescription.
Dans leurs dernières conclusions communiquées par voie électronique le 31 juillet 2020, ils
demandent à la cour de statuer comme suit :
— Infirmer l’ordonnance querellée.
— Dire que l’assignation est nulle pour défaut de visa des dispositions règlementaires en matière de référé.
— Dire qu’au jour du délibéré de l’ordonnance la prescription était acquise pour les articles de novembre et décembre 2019.
— Dire que les appelants n’ont pas porté atteinte à la présomption d’innocence de M. X au travers des articles publiés en novembre et décembre 2019.
— Condamner M. X à payer aux appelants 4.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Se fondant notamment sur les articles 4 et 56 du code de procédure civile, ils soutiennent que l’assignation visant l’article 809 du code de procédure civile correspondant à la communication des affaires gracieuses, l’assignation est dénuée de tout fondement juridique. Ils font valoir qu’il appartenait au premier juge de constater l’acquisition de la prescription de trois mois prévue par l’article 65 de la loi sur la presse qui était dépassée, plus de trois mois s’étant écoulés entre le 19 février 2019 et le jour du délibéré de l’ordonnance.
Quant à l’atteinte à la présomption d’innocence ils rappellent que l’intimé a fait l’objet d’une radiation de la fonction publique par décision du CNESER qui est devenue définitive le pourvoi ayant été rejeté. Le premier juge s’est lancé dans une vision subjective et non objective pour considérer qu’il y avait atteinte à la présomption d’innocence et la décision doit être infirmée, les articles incriminés s’inscrivant dans le cadre du droit à la liberté d’expression et du droit d’information.
Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 24 août 2020, monsieur F X forme appel incident et demande à la cour de statuer comme suit :
Vu l’assignation ;
Vu les pièces du dossier ;
Vu l’article 9 du Code civil, l’article 8 de la CEDH, l’article 12 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’article 1240 du Code civil ;
Vu l’article 9-1 du code civil, l’article 6§2 de la CEDH ;
Vu l’article 835 du Code de procédure civile.
[…]
Débouter les appelants de toutes leurs demandes.
Confirmer l’ordonnance du 9 juin 2020 en ce qu’elle a jugé que les appelants ont porté atteinte à la présomption d’innocence de l’intimé.
Dire et juger que, portent atteinte à la présomption d’innocence de l’intimé, les publications suivantes sur le site Montray Kreyol de Novembre-décembre 2019 et juin 2020 :
— 30/11/201(http://www.montraykreyol.org/article/jugement-du-cneser-considerant-que-m-F-logssah-a-percu-des-remunerations-non-autorisees)(pièce 1 : publication par Montray Kreyol le 30/11/2019 de la décision du CNESER du 18/09/2018)
— 04/12/201(http://www.montraykreyol.org/article/notification-du-rejet-du-pourvoi-en-cassation-de-F-X)(pièce 2 : publication par Montray Kreyol le 04/12/2019 de la décision du Conseil d’État du 25/11/2019)
— 01/12/2019 (http://www.montraykreyol.org/article/les-factures-bidons-de-lex-ceregmia)(pièce 3 : article publié sur Montray Kreyol le 01/12/2019 mettant en ligne un reportage télé du 07/01/ 2016)
— 26/11/201 (http://www.montraykreyol.org/article/les-pourvois-en-cassaton-des-trois-chefs-de-lex-ceregmia-definitivement-rejetes),(pièce 4 : publication de Montray Kreyol du 26/11/2019 relative à la décision du Conseil d’État du 25/11/2019)
— 10/06/202(http://www.montraykreyol.org/article/delocalisons-delocalisons-il-en-restera-toujours-quelque-chose(pièce 39 : Publication de M. Y sur Montray Kreyol du 10/06/2020)
— 11/06/202(http://www.montraykreyol.org/article/F-X-revoque-a-vie-de-la-fonction-publique-est-presume-innocent-dans-le-scandale)(pièce 40 : Publication de Montray Kreyol du 11/06/2020)
— 14/06/202(http://www.montraykreyol.org/article/justice-sous-les-cocotiers-presomption-dinnocence-ou-exemption-de-culpabilite)(pièce 41 : Publication de M. Y su Montray Kreyol du 14/06/2020)
— 24/06/202(https://www.montraykreyol.org/article/pendant-ce-temps-la-les-empoisonneurs-au-chlordecone-les-revoques-de-la-fonction-publique-d)u (pièce 42 : Publication de Montray Kreyol du 24/06/2020)
— 30/06/2020 (https://www.montraykreyol.org/article/A-case-prison-ceregmia-case-fiesta)(pièce 43 : Publication de Montray Kreyol du 30/06/2020)
Ordonner :
– l’arrêt, dès la signification de l’ordonnance, de toute publication nouvelle, sous quelque support que ce soit, présentant la culpabilité de l’intimé comme acquise s’agissant des faits pour lesquels il a été mis en examen, sous astreinte de 5000 euros par infraction et ce, jusqu’à ce que la justice se prononce de façon irrévocable sur les faits pour lesquels l’intimé est poursuivi;
– la suppression, 72 heures après la signification de l’ordonnance, sous astreinte de 5000 euros par jour de retard, de toutes les publications dénoncées par l’intimé comme portant atteinte à sa présomption d’innocence ;
— la diffusion, à compter de 72 heures après la signification de l’ordonnance, sous astreinte de 5000 euros par jour de non-publication sous la forme spécifiée, sur www.montraykreyol.org, d’un communiqué, en page supérieure du site, immédiatement accessible et visible, sans qu’aucune mention n’y soit ajoutée, en police Verdana, de taille 12, de couleur noire sur fond blanc, en dehors de tout encart publicitaire, et qui devra rester accessible sur le site jusqu’à ce que la justice se prononce de façon irrévocable sur les faits pour lesquels l’intimé est poursuivi;
— ce communiqué doit être précédé de la mention : ‘COMMMUNQUE JUDICIAIRE’, en lettres capitales, police Verdana, de taille 14, et libellé comme suit :
– « Par ordonnance du (date de l’ordonnance) le Président de la Chambre civile de la Cour d’appel de Fort-de-France a condamné M. C Y, directeur de publication du site Montray Kreyol et auteur de plusieurs articles, anonymes comme non anonymes sur le site, ainsi que Madame D E, présidente de l’Association Dikte Kreyol qui gère le site Montray Kreyol, pour avoir publié sur ce site plusieurs articles portant atteinte à la présomption d’innocence de Monsieur F X et a ordonné la diffusion du présent communiqué ».
Dire et juger que les appelants ont proféré une menace de mort contre l’intimé, matérialisée par leur publication du 16 Avril 2018 (pièce 6).
(pièce 6 : article du site-web Montray Kreyol du 16/04/2018)
Ordonner :
– l’arrêt, dès la signification de l’ordonnance, de toute publication nouvelle, sous quelque support que ce soit, proférant une menace de mort contre l’intimé, sous astreinte de 5000 euros par infraction;
— la diffusion, à compter de 72 heures après la signification de l’ordonnance, sous astreinte de 5000 euros par jour de non-publication sous la forme spécifiée, sur www.montraykreyol.org, d’un communiqué, en page supérieure du site, immédiatement accessible et visible, sans qu’aucune mention n’y soit ajoutée, en police Verdana, de taille 12, de couleur noire sur fond blanc, en dehors de tout encart publicitaire, et qui devra rester sur le site pendant UN AN ;
— ce communiqué doit être précédé de la mention : ‘COMMMUNQUE JUDICIAIRE’, en lettres capitales, police Verdana, de taille 14, et libellé comme suit :
– « Par ordonnance du (date de l’ordonnance) le Président de la Chambre civile de la Cour d’appel de Fort-de-France a condamné M. C Y, directeur de publication du site Montray Kreyol et auteur de plusieurs articles, anonymes comme non anonymes sur le site, ainsi que Madame D E, présidente de l’Association Dikte Kreyol qui gère le site Montray Kreyol, pour avoir publié sur ce site un article dans laquelle est proférée une menace de mort contre Monsieur F X et a ordonné la diffusion du présent communiqué ».
Dire et juger que l’assignation de l’intimé respectait les prescriptions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881.
Infirmer l’ordonnance du 09 juin 2020 en ce qu’elle a jugé le contraire.
Dire et juger que sont diffamatoires pour l’intimé, les publications du site Montray Kreyol de Novembre-décembre 2019, notamment des 26/11/2019 (pièce 4), 30/11/2019 (pièce 1), 01/12/2019 (pièce 3), 04/12/2019 (pièce 2) ;
Ordonner :
– l’arrêt, dès la signification de l’ordonnance, de toute publication nouvelle diffamatoire à l’égard de l’intimé, sous astreinte de 5000 euros par infraction;
— la diffusion, à compter de 72 heures après la signification de l’ordonnance, sous astreinte de 5000 euros par jour de non-publication sous la forme spécifiée, sur www.montraykreyol.org, d’un communiqué, en page supérieure du site, immédiatement accessible et visible, sans qu’aucune mention n’y soit ajoutée, en police Verdana, de taille 12, de couleur noire sur fond blanc, en dehors de tout encart publicitaire, et qui devra rester ainsi sur le site durant UN AN;
— ce communiqué doit être précédé de la mention : ‘COMMMUNQUE JUDICIAIRE’, en lettres capitales, police Verdana, de taille 14, et libellé comme suit :
– « Par ordonnance du (date de l’ordonnance) le Président de la Chambre civile de la Cour d’appel de Fort-de-France a condamné M. C Y, directeur de publication du site Montray Kreyol et auteur de plusieurs articles, anonymes comme non anonymes sur le site, ainsi que Madame D E, présidente de l’Association Dikte Kreyol qui gère le site Montray Kreyol, pour avoir publié sur ce site plusieurs articles diffamatoires à l’égard de Monsieur F X et a ordonné la diffusion du présent communiqué ».
4) SUR L’ATTEINTE AU DROIT À L’IMAGE
Infirmer l’ordonnance du 9 juin 2020 en ce qu’elle a jugé que les appelants n’ont pas porté atteinte au droit l’image de l’intimé ;
Dire et juger que, portent atteinte au droit l’image de l’intimé les publications suivantes sur le site Montray Kreyol :
— 06/10/201(https://www.montraykreyol.org/article/une-cellule-daide-psychologique-mise-en-place-pour-julie-fremont-et-ses-acolytes’page=7)(pièce 13 : Publication de Montray Kreyol du 06/10/2016)
— 06/02/201(https://www.montraykreyol.org/article/apres-K-A-les-mafieux-du-ceregmia-presentent-leurs-excuses-aux-antillais)(pièce 30 : Publication de Montray Kreyol du 06/02/2017 attaquant le requérant)
— 08/03/201(https://www.montraykreyol.org/article/le-peuple-martinique-doit-se-mettre-debout-contre-la-corruption)(pièce 7 : Publication de Montray Kreyol du 08/03/2018 mettant en ligne une vidéo accusant le requérant)
— 14/06/202(http://www.montraykreyol.org/article/justice-sous-les-cocotiers-presomption-dinnocence-ou-exemption-de-culpabilite)(pièce 41 : Publication de M. Y su Montray Kreyol du 14/06/2020)
Ordonner :
– l’arrêt, dès la signification de l’ordonnance, de toute publication nouvelle, sous quelque support que ce soit, portant atteinte au droit à l’image de l’intimé, sous astreinte de 5000 euros par infraction;
— la diffusion, à compter de 72 heures après la signification de l’ordonnance, sous astreinte de 5000 euros par jour de non-publication sous la forme spécifiée, sur www.montraykreyol.org, d’un communiqué, en page supérieure du site, immédiatement accessible et visible, sans qu’aucune mention n’y soit ajoutée, en police Verdana, de taille 12, de couleur noire sur fond blanc, en dehors de tout encart publicitaire, et qui devra rester ainsi sur le site durant UN AN;
— ce communiqué doit être précédé de la mention : ‘COMMMUNQUE JUDICIAIRE’, en lettres capitales, police Verdana, de taille 14, et libellé comme suit :
– « Par ordonnance du (date de l’ordonnance) le Président de la Chambre civile de la Cour d’appel de Fort-de-France a condamné M. C Y, directeur de publication du site Montray Kreyol et auteur de plusieurs articles, anonymes comme non anonymes sur le site, ainsi que Madame D E, présidente de l’Association Dikte Kreyol qui gère le site Montray Kreyol, pour avoir publié sur ce site plusieurs articles portant atteinte au droit à l’image de Monsieur F X et a ordonné la diffusion du présent communiqué ».
5) SUR L’ATTEINTE À LA VIE PRIVÉE
Infirmer l’ordonnance du 9 juin 2020 en ce qu’elle a jugé que les appelants n’ont pas porté atteinte à la vie privée de l’intimé ;
Dire et juger que, portent atteinte à la vie privée de l’intimé, les publications suivantes sur le site Montray Kreyol :
— 06/10/201(https://www.montraykreyol.org/article/une-cellule-daide-psychologique-mise-en-place-pour-julie-fremont-et-ses-acolytes’page=7)(pièce 13 : Publication de Montray Kreyol du 06/10/2016)
— 17/07/201(http://www.montraykreyol.org/article/reconversion-express-2-des-revoques-de-lex-ceregmia-retrouvent-du-travail’)(pièce 8 : Publication de Montray Kreyol du 17/07/2019 attaquant un recrutement en cours du requérant)
— 18/07/2019(https://www.montraykreyol.org/article/un-groupe-beke-recrute-lun-des-revoques-de-lex-ceregmia)(pièce 9 : Publication de Montray Kreyol du 18/07/2019 attaquant un recrutement en cours du requérant)
— 30/11/2019(http://www.montraykreyol.org/article/jugement-du-cneser-considerant-que-m-F-logssah-a-percu-des-remunerations-non-autorisees)(pièce 1 : Publication par Montray Kreyol le 30/11/2019 de la décision du CNESER du 18/09/2018)
— 14/06/202(http://www.montraykreyol.org/article/justice-sous-les-cocotiers-presomption-dinnocence-ou-exemption-de-culpabilite)(pièce 41 : Publication de M. Y su Montray Kreyol du 14/06/2020)
Ordonner :
– l’arrêt, dès la signification de l’ordonnance, de toute publication nouvelle, sous quelque support que ce soit, portant atteinte au droit à la vie privée de l’intimé, sous astreinte de 5000 euros par infraction;
— la diffusion, à compter de 72 heures après la signification de l’ordonnance, sous astreinte de 5000 euros par jour de non-publication sous la forme spécifiée, sur www.montraykreyol.org, d’un communiqué, en page supérieure du site, immédiatement accessible et visible, sans qu’aucune mention n’y soit ajoutée, en police Verdana, de taille 12, de couleur noire sur fond blanc, en dehors de tout encart publicitaire, et qui devra rester ainsi sur le site durant UN AN;
— ce communiqué doit être précédé de la mention : ‘COMMMUNQUE JUDICIAIRE’, en lettres capitales, police Verdana, de taille 14, et libellé comme suit :
– « Par ordonnance du (date de l’ordonnance) le Président de la Chambre civile de la Cour d’appel de Fort-de-France a condamné M. C Y, directeur de publication du site Montray Kreyol et auteur de plusieurs articles, anonymes comme non anonymes sur le site, ainsi que Madame D E, présidente de l’Association Dikte Kreyol qui gère le site Montray Kreyol, pour avoir publié sur ce site plusieurs articles portant atteinte à la vie privée de Monsieur F X et a ordonné la diffusion du présent communiqué ».
6) ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET DÉPENS
CONDAMNER M. C Y, directeur de publication du site Montray Kreyol et auteur de plusieurs articles, anonymes comme non anonymes sur le site, ainsi que Madame D E, présidente de l’Association Dikte Kreyol qui gère le site Montray Kreyol, à verser la somme de 5 000 euros à l’intimé au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNER aux entiers dépens M. C Y, directeur de publication du site Montray Kreyol et auteur de plusieurs articles, anonymes comme non anonymes sur le site, ainsi que Madame D E, présidente de l’Association Dikte Kreyol qui gère le site Montray Kreyol, aux entiers dépens.
SOUS TOUTES RÉSERVES.
Il rappelle l’historique de la décision du CNESER du 8 septembre 2018 contre laquelle il s’est pourvu en cassation en vain et qui a prononcé sa radiation de la fonction publique. Il soutient que les publications du site Montray Kreyol qu’il incrimine, ont pour seule volonté de l’attaquer et de lui nuire, étant mis en cause de manière quasi continue depuis 2013. Il conteste la nullité de l’assignation pour non-respect des règles de formes prescrites par la loi d’une 29 juillet 1881 rappelant qu’il avait engagé son action sur le fondement de l’article 9-1 du code civil et soutenant que les abus de la liberté d’expression qui portent atteinte à la présomption d’innocence peuvent être réparées sur le seul fondement de cet article.
Selon lui l’assignation n’est pas nulle pour défaut de motivation d’autant que l’erreur quant aux textes visés du code de procédure civile a été régularisée dans ses conclusions du 7 mai 2020. Il conteste également toute prescription, les dernières confrontations écrites organisées par le juge des référés remontant à début mai 2020, l’affaire ayant été plaidée le 15 mai 2020, ce qui a permis au juge d’être éclairé.
En substance il maintient que les articles publiés portent atteinte à sa présomption d’innocence en procédant par affirmations, suggestions et insinuations de sa culpabilité alors que la procédure pénale est toujours en cours. Il soutient que les atteintes à la présomption d’innocence se poursuivent et qu’il est nécessaire de prendre des mesures très fortes pour y mettre fin. Il dénonce de nouvelles publications du 10 juin 2020, 11 juin 2020 et 14 juin 2020, 24 juin 2020 et 30 juin 2020 qui le présentent comme coupable et portent ainsi atteinte à sa présomption d’innocence. Il souligne l’extrême gravité de la situation due à la récurrence des atteintes qu’il subit et au mépris pour la justice et ses décisions, ainsi que par la volonté de poursuivre leurs agissements et de continuer à lui nuire.
Il invoque également une atteinte à sa vie privée, au droit à l’image, une menace de mort, menace qui n’a pas été contestée par les appelants et qui reste un délit dont la prescription est de six ans selon la loi du 27 février 2017. Il soutient que contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 a été respecté. Il fait au surplus valoir que le juge a omis d’aborder la question de l’atteinte à son droit à l’image les publications du 8 mars 2018, 6 octobre 2016, 10 février 2017 visant à lui nuire, les photos utilisées l’ayant été sans son autorisation. Il demande à la cour d’infirmer le jugement du 9 juin 2020 en ce qu’il retient l’impossibilité d’identification de l’intimé par le public. Il fait valoir qu’il n’a pu être embauché compte tenu des menaces proférées à l’encontre de son employeur potentiel.
Le ministère public dans son avis communiqué aux parties le 23 septembre 2020 requiert la confirmation de l’ordonnance de référé du 9 juin 2020 pour les motifs qui sont exposés .
L’affaire a été retenue le 29 janvier 2021 et mise en délibéré au 30 mars 2021.
Par courriel du 8 février 2021, le conseil de Monsieur X a indiqué que le dossier étant clos et ayant été mis en délibéré, il ne pouvait décemment répondre aux conclusions tardives qui devaient être écartées des débats.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour ne répondra qu’aux conclusions communiquées le 31 juillet 2020 pour les appelants et le 24 août 2020 pour l’intimé étant précisé que contrairement au courriel du 8 février 2021, aucune autre conclusion n’a été déposée ultérieurement.
Le dispositif du présent arrêt sera limité aux strictes prétentions formées par les parties constituées, étant rappelé qu’il n’a pas vocation à contenir les moyens venant au soutien des demandes, peu important que ces moyens figurent dans le dispositif des conclusions .
Sur la nullité de l’assignation au regard des articles 4 et 56 du code procédure civile
Aux termes des dispositions de l’article 4 du code de procédure civile l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l’acte introductif d’instance et par les conclusions en défense. Toutefois l’objet du litige peut être modifié par les demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.
Aux termes des dispositions de l’article 56 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au litige, l’assignation contient à peine de nullité un exposé des moyens en fait et en droit et elle vaut conclusions.
Les appelants reprochent au premier juge d’avoir rejeté ce moyen tiré de la nullité de l’assignation au motif que l’assignation visait l’article 809 du code de procédure civile relative à la communication des affaires gracieuses au ministère public et qu’il convenait d’en déduire l’absence de dispositions réglementaires applicables au référé. Cependant, comme l’a souligné le premier juge, l’assignation fait état de l’existence d’un trouble manifestement illicite et de la nécessité de prendre toutes mesures utiles qui s’imposent s’agissant de la protection de la vie privée et de la présomption d’innocence de monsieur X. Les dernières conclusions reprises devant le juge des référés visent expressément l’article 835 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable au litige de sorte que la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte et il ne peut être fait droit à cette demande.
Sur le moyen tiré de la prescription
Il convient de rappeler qu’aux termes des dispositions de l’article 835 du Code civil le président du tribunal judiciaire peut toujours même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Aux termes des dispositions de l’article 9 du Code civil chacun a droit au respect de sa vie privée et les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée ; ces mesures peuvent s’il y a urgence être ordonnées en référé.
Aux termes des dispositions de l’article 9 ‘ 1 du code civil chacun a droit au respect de la présomption d’innocence.
Lorsqu’une personne est avant toute condamnation présentée publiquement comme coupable de faits faisant l’objet d’une enquête ou d’une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que l’insertion d’une rectification ou la diffusion d’un communiqué, aux fins de faire cesser l’atteinte à la présomption d’innocence, et ce aux frais de la personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte. Le droit au respect de sa vie privé est repris par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et par l’article 12 de la déclaration universelle des droits de l’homme.
Aux termes de l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur, à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé, est une diffamation.
Toute expression outrageante, terme de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est une injure .
Aux termes des dispositions de l’article 65 ‘ 1 de cette même loi, les actions fondées sur une atteinte au respect de la présomption d’innocence commises par l’un des moyennes visées à l’article 23 se prescriront après trois mois révolus à compter du jour de l’acte de publicité.
Aux termes de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 l’action publique et l’action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévues par cette loi se prescrivent après trois mois révolus, à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite s’il en a été fait.
Il n’est pas contesté et il résulte des pièces produites aux débats que les articles visés par Monsieur X ont été publiés sur le site Montray Kreyol qui est un moyen de communication au public par voie électronique, protégé par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.
C’est à juste titre que le premier juge a rappelé que le juge des référés ne doit pas s’attacher à la qualification donnée par monsieur X qui visait exclusivement les articles 9 et 9-1 du code civil, l’article 8 de la CEDH, l’article 12 de la déclaration universelle des droits de l’homme et l’article 1240 du Code civil.
En effet l’action civile est soumise à la prescription de trois mois dès lors que le dommage prend sa source directement dans une infraction prévue par la loi sur la presse. Il n’est pas possible d’éluder l’application de la prescription sous couvert d’une demande fondée sur une faute purement civile.
Seuls les faits attentatoires à la vie privée ou à l’image de la personne qui sont détachables de ceux délictueux au sens de la loi du 29 juillet 1881 peuvent être réparés sur le fondement des dispositions des articles 9 et 9 ‘ 1 du Code civil. Si la cause du dommage réside dans la publication d’articles diffamatoires portant atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou à sa présomption d’innocence, la loi du 29 juillet 1881 s’applique.
Monsieur X soutient que seuls les articles publiés le 26 novembre 2019 le 30 novembre 2019, le 1er décembre 2019 et le 4 décembre 2019 sont soumis à la loi du 29 juillet 1881 et comportent des propos diffamatoires.
Comme l’a très justement analysé le premier juge, ces articles présentent monsieur F X comme un mafieux,( ce terme revenant plusieurs fois dans les articles cités,) un ‘petit joueur, ‘et un’ menteur’, ces termes constituant des diffamations au sens de la l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881. Monsieur X lui-même soutient dans son assignation en référé qu’il s’agit d’une ‘communication malveillante ‘qui témoigne d’une ‘volonté de lui nuire ‘qui porte atteinte à son honneur et à sa considération. C’est donc à juste titre que le premier juge a considéré que les propos tenus dans ces articles constituaient des diffamations, ce que reconnaît monsieur X dans ses écritures devant la cour.
En conséquence l’assignation du 19 février 2020 devait préciser et qualifier les faits incriminés et indiquer le texte de loi applicable à la poursuite par application des dispositions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 qui précise que ces formalités sont observées à peine de nullité de la poursuite.
Or la cour ne peut que constater que l’assignation du 19 février 2020 ne vise pas la loi du 29 juillet 1881 comme elle aurait dû le faire en application des dispositions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881.
C’est donc à juste titre que le premier juge a prononcé la nullité de l’assignation pour les propos incriminés relevant de la diffamation. La décision sera confirmée de ce chef.
Devant la cour Monsieur X soutient que les articles des 6 octobre 2016,17 juillet 2019,18 juillet 2019, 30 novembre 2019 et 14 juin 2020 portent atteinte à sa vie privée.
La pièce 13 (article du 6octobre 2016) est un article du site Montray Kréyol intitulé « une cellule d’aide psychologique mise en place…”
Cet article invoque l’élection comme doyennes des universités des femmes « opposées à leur système mafieux », Monsieur X ainsi que deux autres universitaires étant présentés comme « trois mafieux, » « désespérés »ayant dû faire appel au SAMU et à une cellule d’aide psychologique « pour leur permettre de surmonter cette douloureuse épreuve et surtout de faire leur deuil de leur volonté d’hégémonie sur le campus ». Ces propos ne peuvent être considérés comme portant atteinte à leur vie privée puisqu’il s’agit au contraire de leur vie publique professionnelle s’agissant d’élections au sein de l’université. Ils portent atteinte à l’honneur ou à la considération de Monsieur X et constituent une diffamation soumise à la prescription du délai de trois mois prévus par les dispositions de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881.
La cour ne peut que constater que ces faits sont prescrits.
L’article du 17 juillet 2019 est intitulé ” reconversion express : deux des révoqués de l’ex-Ceregmia retrouvent du travail.’
Cet article ne nomme pas précisément Monsieur X et parle de deux des trois révoqués à vie de la fonction publique du Ceregmia ” . Dès lors Monsieur X ne pouvant être identifié avec certitude comme ayant retrouvé un emploi, il n’est pas démontré d’atteinte à sa vie privée et il ne peut être fait droit à sa demande.
L’article du 18 juillet 2019 est intitulé « un groupe béké recrute l’un des révoqués de l’ex-Ceregmia”.
La cour constate à nouveau que le nom de Monsieur X n’est pas cité, et que s’il est fait référence à trois professeurs d’université révoqués de l’ex-Ceregmia« comme dans l’article précédent, rien ne permet d’établir qu’il ait été l’une des trois personnes employées par le groupe béké ou une municipalité »PPM”. En conséquence il ne peut être fait droit à la demande de Monsieur X.
L’article du 30 novembre 2019 est intitulé “jugement du CNESER: considérant que M. F X a perçu des rémunérations non autorisées comme une rémunération annuelle de 100’000 €…” et reprend les termes du jugement du CNESER du 8 septembre 2018.
C’est par des motifs pertinents que la cour adopte, que le premier juge a considéré que la diffusion sans anonymisation d’une décision administrative ne porte pas atteinte à la vie privée, en l’absence de risque particulier pour les personnes concernées, la décision ne comportant pas de données à caractère personnel sensible ou relatives à une condamnation pénale. Il ne peut dès lors être fait droit à la demande de Monsieur X au titre d’une atteinte à la vie privée par la publication de cet article.
La cour constate que l’article du 14 juin 2020 n’était pas visé dans l’assignation en référé et rappelle que l’action en diffamation ne peut être étendue par voie de conclusions à des faits postérieurs à l’acte introductif d’instance qui a fixé irrévocablement la nature et l’étendue de la poursuite quant aux faits et à leur qualification. Monsieur X soutenant que les propos tenus dans cet article relèvent d’une atteinte à sa vie privée et non d’une diffamation, il convient de les examiner.
L’article est intitulé « justice sous les cocotiers : présomption d’innocence ou exemption de culpabilité »
Cet article traite de la condamnation du site Montray Kreyol pour atteinte à la présomption d’innocence en expliquant que les présumés innocents qui n’ont pas été jugés deviennent de facto des innocents, la longueur des procédures judiciaires constituant une’ exemption d’innocence’. L’article rappelle l’existence de la procédure pénale et les propos tenus ne sont pas détachables de l’atteinte à la présomption d’innocence dont se prévaut également Monsieur X à l’encontre de la publication de cet article. La cour examinera donc les propos tenus dans le cadre de l’examen de l’atteinte à la présomption d’innocence et ne constitue pas une atteinte distincte à sa vie privée.
Il ne peut être fait droit aux demandes de Monsieur X de dire que ces quatre articles constituent une atteinte à sa vie privée.
Monsieur X reproche également au premier juge de ne pas avoir abordé la question de l’atteinte à son droit à l’image et soutient que, c’est par une volonté de nuire, que son image a été publiée dans les articles des 6 octobres 2016, 6 février 2017, 8 mars 2018 et 14 juin 2020.
La cour constate à la lecture de la pièce 41 (article du 14 juin 2020) que figurent deux photographies, l’une d’une manifestation où n’est pas identifié Monsieur X et une deuxième prise devant une vitrine d’une croissanterie . Monsieur X soutient qu’il figure sur cette deuxième photographie en T-shirt blanc et bleu ce qui n’est pas contesté par les appelants. Il n’est pas plus contesté que la publication de cette image a été faite sans l’autorisation de Monsieur X. Cependant cette image vient à l’appui de l’article qui a pour but de démontrer que des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale sont présumées innocentes tant qu’elles n’ont pas été condamnées et qu’elles restent donc libres.
L’image est donc l’illustration de l’article incriminé dont la teneur sera examinée dans le cadre de l’atteinte à la présomption d’innocence et n’est pas détachable de celui-ci.
C’est cette même image que l’on trouve dans l’article du 6 octobre 2016 intitulé ‘ une cellule d’aide psychologique mise en place…” Et qui vient à l’appui de la diffamation telle que qualifiée ci-dessus. N’étant pas détachable des faits diffamatoires, l’action de Monsieur X est également prescrite.
L’article du 6 février 2017 est intitulé « après K A, les mafieux du Ceregmia présentent leurs excuses aux Antillais”.
L’article traite d’une conférence de presse que Monsieur X avec deux autres personnes aurait tenue, ce qu’il ne conteste pas . L’image n’est pas détachable du contenu de l’article et au surplus force est de constater que la photographie est visiblement un extrait d’une conférence publique donnée par Monsieur X.. Ce dernier ne peut dès lors se prévaloir de son droit à l’image, l’image étant en lien avec le contenu de l’article sur cette conférence .
L’article du 8 mars 2018 présente la photographie de Monsieur X avec le commentaire suivant « en 2018 ces deux hommes après avoir détourné 14 millions d’euros en toute impunité ont l’audace de réclamer leur réintégration à l’UAG” .Comment allez-vous pouvoir regarder vos élèves dans les yeux après les avoir spoliés de ses millions destinés à leur formation »
Il s’agit d’une image à l’appui de l’article mettant en cause la présomption d’innocence de Monsieur X qui n’en est pas détachable. Il ne peut être fait droit en conséquence à la demande de Monsieur X.
Monsieur X soutient qu’il a été porté atteinte à sa présomption d’innocence aux termes des quatre articles cités dans son assignation en date des 26 novembres 2019, 30 novembre 2019, 4 décembre 2019 et 1er décembre 2019
C’est par une exacte qualification des faits et un examen attentif des propos tenus dans ces quatre articles que le juge des référés, par des motifs que la cour adopte, a considéré qu’il était porté atteinte à la présomption d’innocence de Monsieur Z . ll convient de rappeler qu’aux termes de l’article 65 ‘ 1 de la loi du 29 juillet 1881, les actions fondées sur une atteinte au respect de la présomption d’innocence commises par l’un des moyens visés à l’article 23 se prescrivent après trois mois révolus à compter du jour de l’acte de publicité. Il y a lieu de vérifier l’absence de prescription invoquée par les appelants.
L’assignation a été délivrée le 19 février 2020, soit dans les trois mois de la première publication de chacun de ces articles.
L’assignation constitue un acte de poursuite interruptive de prescription démontrant la volonté de monsieur X de poursuivre son action. Un nouveau délai de prescription de trois mois a couru, soit jusqu’au 19 mai 2020. Il convient de préciser que la procédure s’est déroulée pendant la crise sanitaire et qu’en tout état de cause la cour ne peut que constater que l’audience de plaidoirie du 15 mai 2020, est intervenue dans les trois mois suivants l’acte interruptif du 19 février 2020. La prescription est interrompue par l’audience à laquelle ont lieu les débats et un nouveau délai de trois mois a couru à compter du 15 mai 2020. Le délai de prescription a été suspendu pendant toute la durée du délibéré. En conséquence le délai de prescription a recommencé à courir à compter du 9 juin 2020. Monsieur X ayant notifié des conclusions avec appel incident le 24 août 2020, la prescription a de nouveau été interrompue pour un délai de trois mois. La clôture est intervenue dans ce délai de trois mois suivant ces conclusions, soit le 15 octobre 2020, et il est constant que le délai de prescription est suspendu à compter de l’ordonnance de clôture jusqu’à ce que la cour rende son arrêt. En conséquence Monsieur X n’est pas prescrit dans son action portant sur une atteinte à sa présomption d’innocence pour les publications du 26 novembre 2019 au 4 décembre 2019.
À l’appui de sa demande au titre de l’atteinte à la présomption d’innocence Monsieur X invoque quatre nouveaux articles publiés après la décision du 9 juin 2020, soit le 10 juin 2020, le 11 juin 2020, le 14 juin 2020, le 24 juin 2020 et le 30 juin 2020.
L’article du 10 juin 2020 est intitulé « Délocalisons ! Délocalisons ! Il en restera toujours quelque chose” et traite de différentes procédures pénales en cours qui ont été délocalisés. Le nom de Monsieur X n’est pas cité et celui-ci est difficilement identifiable par le lecteur sauf à avoir déjà une connaissance très particulière de la procédure dont il fait l’objet. Cet article ne porte pas atteinte à sa présomption d’innocence.
L’article du 11 juin 2020 est intitulé« F X révoqué à vie de la fonction publique est présumé innocent dans le scandale du Ceregmia ».
Monsieur X y est présenté comme ayant été radié à vie de la fonction publique« pour la volatilisation de 12 millions d’euros » ce qui constitue une sanction administrative, mais est présumé innocent pour les mêmes faits dans le cadre de la procédure pénale, dont la longueur est stigmatisée et renforcée par la délocalisation à H du procès pénal toujours en cours. Les termes employés sont constitutifs d’une atteinte à sa présomption d’innocence, la procédure pénale étant toujours en cours et le CNESER dans sa décision du 8 novembre 2018, n’ayant pas indiqué, contrairement à ce que fait croire l’article, que Monsieur X a personnellement détourné 12 millions d’euros , le CNESER retenant une absence de probité constitutive d’une faute disciplinaire au motif notamment qu’il ne pouvait ignorer le système organisé de fraude aux fonds européen mis en place par un tiers. Cet article porte en conséquence atteinte à sa présomption d’innocence.
L’article du 14 juin 2020 intitulé’ Justice sous les cocotiers : présomption d’innocence ou exemption de culpabilité ‘reprend le même thème que l’article précédent expliquant que malgré une sanction administrative tant que les personnes visées par ces sanctions n’ont pas été condamnées pénalement elles sont présumées innocentes. Monsieur X est également présenté comme ayant détourné 12 millions d’euros de fonds européens, ce qui ne ressort pas de la décision administrative susvisée et ce qui constitue une atteinte évidente à la présomption d’innocence d’autant que l’article précise que la justice n’a « toujours pas jugé bon de les juger (et donc de leur infliger une sanction pénale);
L’article du 24 juin 2020 est intitulé « pendant ce temps-là, les empoisonneurs au chlordécone, les révoqués de la fonction publique du Ceregmia et autres délinquants se la coulent douce ..” cet article relate la garde à vue d’un tiers pour s’offusquer de la longueur de la procédure pénale dans l’affaire du Ceregmia.
Les termes les ‘présumés responsables’ ainsi que les phrases ‘Evidemment, si l’on ne traîne jamais un présumé innocent à la barre du tribunal, il finira au fil du temps par devenir un parfait innocent. Et ce sera au contribuable de rembourser les 12 millions d’euros volatilisés” constituent une atteinte à la présomption d’innocence de Monsieur X qui est présenté comme coupable avant d’avoir été jugé.
L’article du 30 juin 2020 est intitulé « A case prison, Ceregmia case fiesta » fait un parallèle entre la condamnation de Monsieur A et l’absence de condamnation pénale dans la procédure du Ceregmia, le procès étant toujours en cours pour les « présumés innocents« du Ceregmia. L’article reprend sept chefs d’accusation qui pèseraient sur » l’ex trio dirigeant”et déduit de la décision administrative du Cneser, une culpabilité dans le cadre du procès pénal, l’article se terminant par la phrase suivante : « les « Negs » présumés innocents semblent être, en effet, blanchis d’office sous les cocotiers”. Cet article porte également atteinte à la présomption d’innocence de Monsieur X.
Monsieur X reproche également au premier juge d’être resté silencieux sur les menaces de mort qu’il visait à la page 43 de son assignation. Cependant la cour constate que la référence à une menace de mort s’inscrit dans le paragraphe sur « un très grand nombre d’interventions publiques mettant en cause le requérant » et que le dispositif de l’assignation visait uniquement l’atteinte à la vie privée, à la présomption d’innocence et l’atteinte à son honneur et à sa dignité . Dans le dispositif des conclusions déposées devant la cour il est demandé à celle-ci de dire que les appelants ont proférés une menace de mort à son encontre matérialisée par la publication du 16 avril 2018. Il soutient que les termes suivants : «la Ceregmia et sa bande ont tout fait pour nous détruire (..) à mon niveau il n’y aura ni cessez-le-feu ni calumet de la paix ni trêve ni armistice tant que les chefs mafieux ne seront pas jugés au plan pénal .
(…)Je bous d’indignation et de colère (..) parce que vivant dans un pays « européen » je suis obligé de respecter les lois(…) ma colère vient du fait qu’il m’est impossible de leur faire la peau à ces hijos de puta sous peine de faire de la taule alors que si j’avais vécu au Guatemala, en Colombie, en Haïti, à Saint-Domingue ou même tout près, à Sainte-Lucie cela aurait parfaitement été possible. Encore que…”
Ces deux derniers mots contredisent l’accusation de menaces de mort, l’auteur, d’une part indiquant qu’il doit respecter la loi vivant en Europe et qu’il ne peut donc commettre d’homicide, d’autre part, que même s’il vivait dans un pays voisin il lui serait également impossible de commettre cet homicide. Dès lors il ne peut être déduit une menace de mort des termes employés et Monsieur X sera débouté de sa demande de ce chef.
En conséquence seule une atteinte à la présomption d’innocence peut être retenue à l’encontre des appelants. C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a rejeté l’interdiction de toute publication nouvelle et a estimé que pour réparer l’atteinte à la présomption d’innocence de Monsieur X il y avait lieu d’ordonner la publication d’un communiqué judiciaire dans les termes et les modalités que la cour approuve.
La décision sera en conséquence confirmée de ce chef sans qu’il y ait lieu d’y rajouter .
Sur les dépens et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Succombant les appelants devront prendre en charge les dépens de première instance et d’appel. Il est équitable qu’ils conservent leurs frais irrépétibles et qu’ils prennent en charge les frais exposés par Monsieur X en première instance tels que justement appréciés par le juge des référés, ainsi que ceux exposés dans le cadre de l’appel pour faire valoir ses droits, frais évalués à 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,
CONFIRME en toutes ses dispositions l’ordonnance du 9 juin 2020,
Y ajoutant,
DIT que les articles publiés les 11 juin 2020, 14 juin 2020, 24 juin 2020 et 30 juin 2020 sur le site Montray Kréyol portent atteinte à la présomption d’innocence de monsieur L X.
CONDAMNE in solidum Monsieur C Y, directeur de la publication du site Montray Kreyol et Madame D E ès qualité de présidente de l’association Dikte Kreyol gérant le site Montray Kreyol aux dépens de la procédure d’appel,
DÉBOUTE Monsieur L X du surplus de ses demandes,
CONDAMNE in solidum Monsieur C Y directeur de la publication du site Montray Kréyol et Madame D E ès qualités de présidente de l’association Dikte Kreyol gérant le site Montray Kréyol aux dépens de la procédure d’appel,
CONDAMNE in solidum Monsieur C Y, directeur de la publication du site Montray Kréyol et Madame D E ès qualités de présidente de l’association Dikte Kreyol gérant le site Montray Kréyol à verser à Monsieur F X la somme de 3000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Signé par Madame G H, Présidente de chambre et par
Mme B
PIERRE-GABRIEL, Greffière, lors du prononcé à laquelle la minute a été remise.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,