Cession de magazine : prévoir une clause de non concurrence

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Cession de magazine : prévoir une clause de non concurrence

En cas de cession de fonds de commerce portant sur plusieurs titres de presse, n’oubliez pas de prévoir une clause de non concurrence / non édition à la charge du cessionnaire.

Par acte sous seing privé, la société Editair qui exerce une activité d’édition de magazines spécialisés a cédé son fonds de commerce correspondant au seul pôle maison à la société MFLT dont le capital était alors majoritairement (80%) détenu par la société Tangram Finance, les deux sociétés ayant le même dirigeant.

Figure à l’acte de cession une clause de non concurrence d’une durée de 36 mois applicable sur le territoire de l’Union Européenne aux termes de laquelle « le cédant, directement ou indirectement (notamment au travers de toute société dans laquelle il détiendrait une participation) s’interdit de créer, acquérir, diriger, exploiter ou développer, de manière directe ou indirecte, une activité concurrente de celle du Pôle Maison ».

Dans un écrit daté du même jour et signé par le représentant de la société MFLT, figurait la mention suivante : « En considération de la cession du fonds de commerce, MFTL, directement ou indirectement (notamment au travers de toute société dans laquelle elle détiendrait une participation) s’interdit par les présentes de créer, acquérir, diriger, exploiter ou développer, de manière directe ou indirecte, une activité d’édition de publications spécialisées dans le secteur de la piscine, étant précisé que les termes « publications spécialisées » s’entendent comme toute publication dont le contenu aborde exclusivement le domaine de la piscine ».

Cette cession s’accompagnait du transfert de plusieurs salariés de la société Editair à la société MFLT.

La société Editair estimant que la publication par la société Tangram Finance en tant que locataire gérant de la société les Editions Messignac des deux magazines « Côté Piscine » et « l’Activité Piscine » portait atteinte à cet engagement de non concurrence, a obtenu la condamnation de cette dernière.  

Du fait du caractère très restreint de l’activité sur laquelle portait l’engagement de non concurrence, sa durée de 36 mois et son étendue géographique à l’union Européenne, la   clause de non concurrence n’a pas été jugée disproportionnée ni contraire à l’article L.420-1 du code de commerce qui prohibe les actions concertées, conventions, ententes ou coalitions qui ont pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence.

L’engagement de non concurrence souscrit par la société MFLT présentait un caractère très restreint en ce qu’il portait uniquement sur l’activité d’édition de publications spécialisées dans le secteur de la piscine, cette notion étant elle-même définie commune une publication qui aborde exclusivement le domaine de la piscine. La société MFLT qui édite les magazines « Extérieurs Design », « Design Home », « Concept Bains », a ainsi sans porter atteinte à son engagement de non concurrence de faire paraître des numéros de ces magasines ayant des contenus importants sur le domaine de la piscine.

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRET DU 11 JUIN 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/23345 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6UN4

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Octobre 2018 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2017048579

APPELANTE

SARL EDITAIR

prise en la personne de ses représentants légaux

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Versailles sous le numéro 334 504 701

représentée par Me Grégoire HALPERN de la SELAS Cabinet G.Halpern & Associé, avocat au barreau de PARIS, toque : E0593

INTIMES

SARL TANGRAM FINANCE

prise en la personne de ses représentants légaux

217 rue Saint-Honoré

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 384 260 733,

SARL MFTL

prise en la personne de ses représentants légaux

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 353 020 977

Maître J K ès qualités de Commissaire à l’exécution du plan de la SARL MFTL

[…]

[…]

SELAFA MJA en la personne de Me N Y X, ès qualités de Mandataire judiciaire de la SARL MFTL

[…]

[…]

représentés par Me Jean-Claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0945, assistés de Me Renaud THOMINETTE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0248

SAS LES EDITIONS MESSIGNAC

prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

69210 FLEURIEUX-SUR-L’ARBRESLE

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon sous le numéro 410 292 858

N’ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 Avril 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Denis ARDISSON, Président de la chambre

Mme Marie-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre

Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.

ARRÊT :

— réputé contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par M. Denis ARDISSON, Président de la chambre, et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffière présente lors de la mise à disposition.

Par acte sous seing privé daté du 31 mai 2014, la société Editair qui exerce une activité d’édition de magazines spécialisés d’une part dans le secteur de la piscine avec la parution des magazines « Ambiance Piscines » et « Piscines & Spa » (pôle piscine) et d’autre part dans le secteur de la maison avec la parution des magazines « Cuisines & Bains » et « Guide Chauffage & Cheminées » (pôle maison) a cédé son fonds de commerce correspondant au seul pôle maison à la société MFLT dont le capital était alors majoritairement (80%) détenu par la société T., les deux sociétés ayant le même dirigeant.

Figure à l’acte de cession une clause de non concurrence d’une durée de 36 mois applicable sur le territoire de l’Union Européenne aux termes de laquelle « le cédant, directement ou indirectement (notamment au travers de toute société dans laquelle il détiendrait une participation) s’interdit de créer, acquérir, diriger, exploiter ou développer, de manière directe ou indirecte, une activité concurrente de celle du Pôle Maison ».

Dans un écrit daté du même jour et signé par le représentant de la société MFLT, figure la mention suivante : « En considération de la cession du fonds de commerce, MFTL, directement ou indirectement (notamment au travers de toute société dans laquelle elle détiendrait une participation) s’interdit par les présentes de créer, acquérir, diriger, exploiter ou développer, de manière directe ou indirecte, une activité d’édition de publications spécialisées dans le secteur de la piscine, étant précisé que les termes « publications spécialisées » s’entendent comme toute publication dont le contenu aborde exclusivement le domaine de la piscine ».

Cette cession s’accompagnait du transfert de plusieurs salariés de la société Editair à la société MFLT.

La société Editair estimant que la publication par la société T. en tant que locataire gérant de la société les Editions M. des deux magazines « Côté Piscine » et « l’Activité Piscine » portait atteinte à cet engagement de non concurrence, a mis en demeure par courriers du 9 mars 2016 ces deux sociétés ainsi que la société MFLT de mettre un terme au contrat de location-gérance. Le dirigeant commun de la société MFLT et de la société T. après avoir indiqué par courrier du 31 mars 2016 qu’il prenait les dispositions nécessaires pour faire cesser cette location-gérance pour la fin du mois d’avril 2016, a indiqué le 10 mai 2016 qu’il n’avait pu résilier ce contrat pour cette date, mais que les modalités de sa collaboration commerciale avec les Editions M. allaient être redéfinies, de façon à respecter scrupuleusement « notre clause de non concurrence ».

La société T. a poursuivi la publication du magazine « Côté Piscine » jusqu’au numéro de mai/juin/juillet 2017 et la société MFLT a fait paraître un magazine « Extérieur Design » comprenant un volet piscine.

Le nom Mme B A, une des anciennes salariées de la société Editair dont le contrat a été transféré à l’occasion de la cession du fonds de commerce, figure dans l’ours de plusieurs numéros des magazines « Côté Piscine » et « Extérieur Design » au titre du département publicité

Deux ordonnances sur requête ont autorisé la société Editair à faire constater par huissier de justice les atteintes à l’engagement de non concurrence et faits de concurrence déloyale qu’elle dénonçait ; elles ont été rétractées par une ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris du 28 octobre 2016.

La société Editair a saisi par acte d’huissier des 28 juillet, 3 et 23 août 2017 le tribunal de commerce statuant au fond d’une action en réparation de la violation de l’engagement de non concurrence et en réparation des faits de concurrence déloyale qu’elle impute à la société MFLT, la société T. et la société les Editions M. ; les organes de la procédure au redressement judiciaire ouvert à l’égard de la société MFLT par un jugement du 1er mars 2017 ont été appelés à l’instance ; la société les Editions M. n’a pas comparu devant le tribunal de commerce.

Ce tribunal par un jugement du 12 octobre 2018 a débouté la société Editair de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions, débouté la société MFLT et la société T. de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile, condamné la société Editair aux dépens.

Le 30 octobre 2017, la société MFLT a interjeté appel de ce jugement, intimant la société Editair, les organes de la procédure collective ouverte à son égard, la société T. et la société les Editions M..

Au cours de l’instance d’appel, la société MFLT après qu’un plan de redressement judiciaire a été adopté à son égard, a été placée le 8 octobre 2020 en liquidation judiciaire.

Aux termes de ses dernières conclusions remises le 25 février 2021 dont le dispositif est expurgé des demandes de constat et de « dire et juger » qui s’apparentent à des moyens et ne sont pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile, la société Editair en application des articles 1134, 1145, 1149 et 1382 anciens du code civil demande à la cour de :

A titre liminaire

— déclarer recevables les conclusions notifiées le 25 février 2021 ;

— écarter la demande tendant à voir rejeter des débats les conclusions notifiées le 25 février

2021,

Subsidiairement

— rouvrir les débats,

— révoquer l’ordonnance de clôture du 25 février 2021 au jour des plaidoiries,

— déclarer recevables les présentes conclusions,

A titre principal

— infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 12 octobre 2018 en ce qu’il a débouté la société EDITAIR de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

Statuant à nouveau,

— ordonner à la société T. et à la société les Editions M. de lui communiquer une copie du contrat de location-gérance de fonds de commerce conclu entre elles deux en date du 11 janvier 2016 et ses éventuels avenants, sous astreinte de 5.000 € de retard à compter de la décision à intervenir, même frappée d’un éventuel appel,

— ordonner à la société MFLT et à la société MFTL, représentée par la personne de la Selafa MJA, en la personne de Maître N Y-X es qualités de Mandataire Judiciaire liquidateur de la Société MFTL, de lui communiquer une copie des conventions de mise à disposition des salariés Madame B A, Madame C D, Madame E F, Madame G F, Monsieur H I conclues entre la société MFTL et la société T., sous astreinte de 5.000 € de retard à compter de la décision à intervenir, même frappée d’un éventuel appel,

Sur l’édition des magazines « Côté Piscine » et « L’Activité Piscine » :

1. Sur la violation de l’engagement de non concurrence

En tout état de cause,

— inscrire au passif de la liquidation de la société MFTL, représentée par la Selafa MJA en la personne de Me Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL, la somme de 213.000 € correspondant au préjudice économique subi par cette dernière au titre de la perte du chiffre d’affaires entre le 1 er janvier 2016 et le 31 mai 2017,

— condamner in solidum la société MFTL, représentée par la Selafa MJA en la personne de Me Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL, la société T. et la société Les Editions M. à lui verser la somme de 213.000 € correspondant au préjudice économique subi par cette dernière au titre de la perte du chiffre d’affaires entre le 1 er janvier 2016 et le 31 mai 2017,

2. Sur la concurrence déloyale

— inscrire au passif de la liquidation de la société MFTL, représentée par la Selafa MJA

en la personne de Me Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL, la somme de 50.000 € titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale du fait de publicité mensongère,

— condamner in solidum la société MFTL, représentée par la Selafa MJA en la personne de Me Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL, la société T. et la société Les Editions M. à lui verser la somme de 50.000 € titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale du fait de publicité mensongère,

Sur l’édition du magazine « Extérieurs Design » :

— condamner la société MFTL, représentée par la Selafa MJA en la personne de Me

Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL à verser à la société Editair la somme de 20.000 € correspondant au préjudice économique subi par cette dernière,

— inscrire au passif de la liquidation de la société MFTL, représentée par la Selafa MJA

en la personne de Me Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL la somme de 20.000 € correspondant au préjudice économique subi par la société Editair,

En conséquence :

— condamner in solidum la société MFTL, représentée par la Selafa MJA en la personne de Me Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL, la société T. et la société Les Editions M. à verser à la société EDITAIR la somme de 15.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— inscrire au passif de la liquidation de la société MFTL, représentée par la Selafa MJA

en la personne de Me Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL la somme de 15.000 €,

— condamner in solidum la société MFTL, représentée par la Selafa MJA en la personne de Me Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL, la société T. et la société Les Editions M. aux dépens, en ce compris les frais d’expertise de la SCP Z ‘ Flament ‘ Z qui s’élèvent à 5.343,06 € TTC,

— inscrire au passif de la liquidation de la société MFTL, représentée par la Selafa MJA

en la personne de Me Y-X ès qualité de liquidateur de la société MFTL la

somme 5.343,06 € TTC,

— dire que l’arrêt à venir sera communiqué à Madame le Juge commissaire en charge

du suivi des opérations de liquidation judiciaire de la société MFTL ;

Aux termes de leurs dernières écritures remises le 26 avril 2019, la société T., la société MFLT, Maître J K pris en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de redressement de la société MFLT et Maître N Y-X de la Selafa MJF prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société MFLT au visa des articles 1134, 1145 1149 et 1382 du code civil, L.420-1 et L.420-3 du code de commerce, demandent à la cour de :

— dire et juger nul l’engagement de non-concurrence du 31 mai 2014 souscrit par MFTL au profit d’Editair,

— confirmer le jugement du 12 octobre 2018,

A titre subsidiaire,

— dire et juger que MFTL n’a pas violé l’engagement de non-concurrence souscrit par MFTL le 31 mai 2014 au profit de la société Editair,

— dire et juger que l’engagement de non-concurrence souscrit par MFTL le 31 mai 2014 au profit de la société Editair est inopposable à T., qui, en tout état de cause, ne l’a pas violé,

A titre très subsidiaire,

— dire et juger infondées les demandes indemnitaires d’Editair au titre de la violation de l’engagement de non-concurrence souscrit par MFTL le 31 mai 2014 au profit de la société Editair,

Sur les demandes d’Editair assises sur de prétendus actes de concurrence déloyale de T. et/ou de MFTL :

— dire et juger les demandes d’Editair à ce titre irrecevables et, à tout le moins, mal fondées,

— confirmer le jugement du 12 octobre 2018,

Sur les demandes de communication de pièces,

— dire et juger les demandes d’Editair mal fondées,

— confirmer le jugement du 12 octobre 2018,

En tout état de cause,

— condamner la société Editair à verser la somme de 15.000 euros à MFTL au titre de l’article 700 code de procédure civile,

— condamner Editair à verser la somme de 15.000 euros à Finance au titre de

l’article 700 code de procédure civile,

— condamner Editair aux entiers dépens.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 25 février 2021 et l’affaire fixée pour être plaidée à l’audience du 7 avril 2021.

Par des conclusions de procédure remises le 1er mars 2011, la société MFLT et la société T. demandent en application de l’article 16 du code de procédure civile à la cour de :

— constater que le principe du contradictoire n’est pas respecté,

— rejeter des débats les conclusions de la société Editair signifiées tardivement.

La Selafa MJA prise en la personne de Maître N Y-X prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société MFLT qui a été assignée par la APP1 devant la cour par acte d’huissier du 14 janvier 2021, n’a pas constitué avocat.

La société les Editions M. qui s’est vue signifier la déclaration d’appel par acte d’huissier du 19 décembre 2018 et a été assignée devant la cour, n’a pas constitué avocat.

La société Editair lui a a signifié par acte d’huissier ses conclusions d’appelante le 4 février 2019.

SUR CE :

L’instance interrompue par l’ouverture de liquidation judiciaire ouverte à l’égard de la société MFLT a été valablement reprise par la société Editair qui après avoir déclaré sa créance le 17 décembre 2020 au passif de la liquidation judiciaire, a intimé par acte d’huissier du 14 janvier 2021 la Selafa MJA, en la personne de Maître N Y X prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société.

L’ouverture de la liquidation judiciaire a par ailleurs mis fin au plan de redressement adopté à l’égard de la société MFLT et donc à la mission de Maître K désigné en qualité de commissaire à l’exécution de ce plan. Ce dernier est par conséquent mis hors de cause. Il en est de même de la Selafa MJA prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société MFLT.

Après avoir accompli les diligences nécessaires à la reprise de l’instance interrompue par l’ouverture de la liquidation judiciaire à l’égard de la société MFLT, l’appelante a remis des conclusions le 25 février 2021, soit le jour fixé pour la clôture de l’instruction ; ces conclusions ont pour finalité d’adapter ses précédentes demandes figurant dans ses conclusions d’appelant remises le 30 janvier 2019 à la procédure de liquidation judiciaire ouverte le 8 octobre 2020 à l’égard de la société MFLT et à l’impossibilité qui en résulte de prononcer une condamnation au paiement d’une somme d’argent trouvant son origine antérieurement à l’ouverture de cette procédure, ces demandes ne pouvant alors faire l’objet que d’une fixation au passif de la procédure collective ; il n’apparaît pas que ces conclusions contiennent de moyens nouveaux .

Ces conclusions tirant les conséquences des dispositions d’ordre public attachées à l’ouverture de la liquidation judiciaire dont fait l’objet la société MFLT, et la protestation des intimées étant purement formelle, il n’y pas lieu d’écarter les conclusions de l’appelante remises le 25 février 2021.

Il convient néanmoins pour recevoir les conclusions de procédure des  sociétés T. et MFLT remises le 1er mars 2021, rabattre l’ordonnance de clôture et clôturer à nouveau préalablement aux débats fixés le 7 avril 2021.

***

Sur la demande de nullité de l’engagement de non concurrence

Si le projet d’acte de cession avant d’être régularisé a fait l’objet de plusieurs moutures et que n’y figurait pas initialement un engagement de non concurrence de la part de la société MFLT qui a refusé de signer un projet dans lequel figurait un tel engagement, il n’en demeure pas moins que cet engagement a fait l’objet d’un écrit à part signé par le représentant de la société MFLT.

La menace dont la société MFLT se plaint d’avoir été victime n’est autre que le refus de la société Editair de céder le pôle maison pour le cas où de celle-ci ne souscrirait pas un engagement de non concurrence ; ce refus est la conséquence du caractère déterminant au consentement de cette dernière de l’existence de cet engagement portant sur le pôle piscine qui ne faisait pas partie du périmètre de la cession. Il est relevé que la société MFLT a obtenu un engagement de non concurrence de la part de la société Editair portant sur le pôle maison, étant expressément stipulé à l’acte de cession qu’il « constitue une condition essentielle de la cession du fonds de commerce sans laquelle elle n’aurait pas lieu ».

Le refus qu’aurait opposé la société Editair de contracter en l’absence d’un engagement de non concurrence de la part de la société MFLT, n’est que l’exercice de sa liberté contractuelle et ne s’apparente en aucun cas à une violence ou à une quelconque contrainte que ne caractérise aucun autre élément du dossier.

A l’appui de sa demande de nullité de son engagement de non concurrence, les intimées soutiennent en premier lieu que celui-ci contrevient aux dispositions de l’article L.420-1 du code de commerce aux motifs qu’il tend à une répartition du marché prohibée visant à lui interdire le marché de l’édition dans le secteur de la piscine, que ce texte est applicable quelque soit l’ampleur de l’opération,, cet engagement figurant sur un instrumentum distinct, est autonome par rapport à la cession du fonds de commerce et que la restriction imposée au vendeur par cet engagement n’est pas légitimée par la cession du fonds de commerce et n’est pas utile à la bonne fin de celle-ci.

En second lieu, elles invoquent le caractère disproportionné de cet engagement en ce qu’il s’applique à l’ensemble de l’Union Européenne et pendant une durée de trois ans.

Au demeurant, la société Editair exerçait jusqu’à la cession une activité d’édition répartie en deux pôles, chacun faisant l’objet de l’édition de deux magasines. Il s’en suit que la cession partielle du fonds de commerce porte concrètement sur les deux magasines « Cuisines & Bains » et « Guide Chauffage & Cheminées » du pôle maison à l’exclusion des magazines du pôle piscine.

Certes, l’article L.420-1 du code de commerce prohibe les actions concertées, conventions, ententes ou coalitions qui ont pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence ; cet article vise ainsi à préserver le libre jeu de la concurrence sur un marché donné. Toutefois, ne résultant d’aucun élément du dossier que l’activité d’édition de magazines exclusivement spécialisés dans le domaine des piscines se cantonnent aux deux seuls magazines « Ambiance Piscine » et « Piscines & Spa », il s’en suit que n’est pas établie l’atteinte au jeu de la concurrence susceptible d’être créée par l’engagement litigieux souscrit par la société MFLT à l’égard de la société Editair.

Quelque soit le refus opposé par le dirigeant de la société MFLT et de la société T. pour que figure à l’acte de cession un engagement de non concurrence du cessionnaire, il n’en demeure pas moins que cet engagement a été négocié dans le cadre de la cession dont il est fait expressément rappel à titre liminaire sur l’acte d’engagement, étant précisé que l’engagement est souscrit « en considération de la cession du fonds de commerce » ; ce rappel du contexte permet ainsi de comprendre l’économie générale de la cession, laquelle ne doit pas porter atteinte au pôle Piscine qui ne fait pas partie de son périmètre et que la APP1 avait intérêt à voir respecter. Ainsi, l’existence d’un intrumentum distinct de celui de la cession ne suffit pas à conférer à cet engagement une autonomie juridique et économique par rapport à la cession.

La société MFLT ne peut sans se contredire soutenir tout à la fois qu’à défaut de cet engagement de non concurrence, la société Editair aurait refusé de signer la cession et que cet engagement est indépendant de la cession alors même qu’il vise à contenir la cession à l’intérieur de son périmètre de sorte que l’activité d’édition des magazines « Ambiance Piscine » et « Piscines & Spa » du pôle piscine, qui n’en fait pas partie, ne soit pas affectée par la cession de l’activité d’édition des magazines du pôle maison.

Cet engagement qui était utile à la préservation des intérêts de la société Editair dans le cadre de la cession, contribuait à la bonne exécution de la cession même si c’est d’une façon apparemment négative, dans le sens qu’il vise à protéger non pas l’objet de la cession, mais ce qui n’en relève pas.

L’engagement de non concurrence souscrit par la société MFLT présente un caractère très restreint en ce qu’il porte uniquement sur l’activité d’édition de publications spécialisées dans le secteur de la piscine, cette notion étant elle-même définie commune une publication qui aborde exclusivement le domaine de la piscine. La société MFLT qui édite les magazines « Extérieurs Design », « Design Home », « Concept Bains », a ainsi sans porter atteinte à son engagement de non concurrence faire paraître des numéros de ces magasines ayant des contenus importants sur le domaine de la piscine.

Comme le montre l’indication du prix au numéro en Tunisie et au Maroc sur la tranche de la reliure du magazine « Ambiance Piscine » édité par la société Editair, celui-ci est commercialisé en dehors de l’union Européenne. Ainsi, l’engagement de non concurrence querellé ne porte pas sur ces pays à fort potentiel touristique et dont le climat est propice à l’exploitation de piscines. Contrairement à ce que prétendent les intimées, il n’empêche pas toute activité dans le secteur de la publication de magazines uniquement consacrés à l’univers de la piscine tandis qu’il autorise la publication de magazines sur des thèmes plus vastes mais pouvant avoir des contenus importants sur la piscine.

Du fait du caractère très restreint de l’activité sur laquelle porte l’engagement de non concurrence, sa durée de 36 mois et son étendue géographique à l’union Européenne, contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges n’est pas disproportionnée.

Partant, cet engagement de non concurrence ne saurait être déclaré nul.

Sur la demande d’irrecevabilité tirée du cumul des fondements contractuel et délictuel attaché à une même demande.

Les intimées soulèvent l’irrecevabilité des demandes de la société Editair en ce qu’elles cumulent à leur égard un fondement délictuel et contractuel.

En premier lieu, pour le cas où il aurait été fait droit à la demande de nullité de l’engagement de non concurrence soulevée par les intimées, la responsabilité des intimées pouvait alors être recherchée sur le fondement délictuel.

En second lieu, les écritures de la société Editair contiennent deux développements principaux. Le I) qui traite de l’édition des magazines « Côté Piscine » et « L’Activité Piscine » comprend une partie sur la violation de l’engagement de non concurrence par la société MFLT et la société Tangram Finance (A) et une autre partie par la société les Editions M. en qualité de complice (B). L’action dirigée à l’encontre de la société MFLT et de la société T. repose sur un fondement contractuel et à l’encontre de la société les Editions M. sur un fondement délictuel. Les volets sur le préjudice distinguent celui résultant du détournement de clientèle en violation de l’engagement de non concurrence (C) et celui résultant des actes de concurrence déloyale qui ne visent pas les mêmes faits que ceux reprochés à l’appui de la violation de l’engagement de non concurrence. Le II) sur l’édition du magazine Exterieur Design ne relevant pas du champ de l’engagement de non concurrence, le fondement de l’action de la société Editair est délictuel.

Il ressort ainsi que la société Editair ne cumule pas un fondement contractuel et délictuel pour chacune de prétention dirigée à l’égard de la même personne reposant sur les mêmes faits mais juxtapose les fondements délictuel et contractuel en fonction des personnes à l’égard desquels ses prétentions sont dirigées et des faits invoqués à l’appui.

Partant, aucune irrecevabilité ne saurait être encourue de ces chefs.

Sur les demandes au titre de la violation de l’engagement de non concurrence.

Cette demande concerne l’édition des magazines « Côté Piscine » et « L’Activité Piscine » qui seuls traitant exclusivement de l’univers de la piscine, sont protégés par l’engagement de non concurrence.

Les sociétés Tangram et MFLT et le liquidateur de cette dernière soutiennent que l’engagement de non concurrence n’étant pas opposable à la première, celle-ci ne l’a pas violé en prenant en location gérance le fonds de commerce des Editions M.. Se prévalant du principe de l’autonomie de la personnalité morale et de l’effet relatif des contrats, les intimées font valoir que la société T. n’est pas tenue par l’engagement de non concurrence souscrit par la société MFLT.

Au demeurant, l’engagement a été souscrit par la société MFLT « directement ou indirectement (notamment au travers de toute société dans laquelle elle détiendrait une participation) ». Contrairement à ce qu’ont soutenu les parties défenderesses devant les premiers juges qui ont retenu leurs arguments, aucune restriction n’étant apportée au terme « indirectement », cet engagement n’exclut nullement les sociétés qui auraient des participations dans la société MFLT, la mention « toute société dans laquelle elle [la société MFLT] détiendrait une participation » introduite par l’adverbe « notamment » étant seulement donné à titre d’exemple. En l’occurrence, il n’est pas contesté qu’au jour de la cession, la société T. détenait sinon la totalité du capital de la société MFLT, 80% de celui-ci ; ces deux sociétés avaient le même dirigeant en la personne de M. L M. Au vu de ces éléments qui manifeste la grande proximité existant entre la société MFLT et la société T., il apparaît que la société T. n’a pas seulement été informée de la cession, mais qu’elle a donné aussi son accord à la cession dont relève l’engagement de non concurrence qui participe à son économie générale.

Il suit que l’interdiction indirecte souscrite par la société MFLT de créer, acquérir, diriger, exploiter ou développer une activité d’édition de publications spécialisées dans le secteur de la piscine s’applique à la société T..

Cette interdiction vise l’exercice d’une activité d’édition de publications dans le secteur de la piscine « de manière directe ou indirecte ». Même si le locataire gérant n’est pas propriétaire du fonds donné en location gérance, qu’il n’a pas créé, ni acquis, et ne le développerait-il pas, la location gérance implique en application de l’article L.144-1 du code de commerce l’exploitation de ce fonds de sorte qu’elle relève du champ de l’engagement de non concurrence.

Les exemplaires en original des numéros 23 (novembre, décembre, janvier 2016) et 24 (février, mars, avril 2016) du magazine « côté Piscine » versés aux débats établissent que cette revue d’une fréquence trimestrielle, publiée par les Editions M. l’a été à compter du numéro 24 par la société T. en qualité de locataire gérante de celle-ci. De même, la revue « l’activité Piscine » destinée à un public uniquement professionnel, à compter de son numéro des mois de juillet et août 2016, a été publiée par la société T. en sa qualité de locataire gérant de la société les Editions M..

Ces revues portant exclusivement sur l’univers de la piscine, leur publication par la société T. en qualité de locataire gérant de la société les Editions M. constitue une violation manifeste de l’engagement de non concurrence souscrit par la société MFLT pour son compte mais aussi pour celui de sa société mère ; cette dernière qui écrivait le 31 mars 2016 en réponse aux mises en demeure adressées par le conseil de la société Editair, « avoir pris les dispositions nécessaires pour mettre fin au contrat de location-gérance avec la société les Editions M., à la fin du mois d’avril 2016 » même si elle est revenue ultérieurement sur cette position, admettait implicitement, l’atteinte ainsi portée à cet engagement.

L’examen de l’ours des numéros 24 à 29 du magazine « Côté Piscine » montre que Mme B A qui fait partie des anciens salariés de la société Editair transférés à l’occasion de la cession au profit de la société MFLT, participe désormais à l’édition de ce magazine, au département publicité qui dans ce genre de revue à visée essentiellement commerciale revêt une importance cruciale.

Il en résulte que l’affectation de Mme B A au département publicité de ce magazine a été l’un des moyen utilisé par la société MFLT et la société T. dans leur stratégie visant à enfreindre leur engagement de non concurrence.

Diverses pièces montrent que d’autres anciens salariés de la société Editair (Mme C D, Mme E F, Mme G F, M. H I) à l’instar de Mme A ont participé à la publication du magazine « Côté Piscine » devenant ainsi l’instrument de ces infractions à l’engagement de non concurrence ; en revanche, le magazine « Exterieur Design » n’entrant pas dans le champ de l’engagement de non concurrence, leur participation à la publication de ce magazine ne peut être retenue comme contribuant à de telles infractions.

Les éléments qui précèdent étant suffisants pour établir la violation par la société MFLT et la société T. de l’engagement de non concurrence, la production du contrat de location gérance passé entre la société les Editions M. et la société T. et du ou des contrats de mise à disposition des salariés transférés lors de la cession à la société MFLT au profit de la société T. n’étant pas directement utile à la solution du litige, il n’y pas lieu de la retarder en ordonnant par une décision avant dire droit leur production ; partant, confirmant le jugement entrepris, la cour statuera en l’absence de ces pièces.

La société T. en élargissant son objet social qui portait uniquement sur une activité de « Conseil aux entreprises » à celles de « presse, édition de publication, revues, magazines, journaux, livres, documents techniques et périodiques sur tout sujet quelque soit leur périodicité », a entendu montrer que son activité ne consistait plus seulement à venir au soutien de l’activité de sa ou ses filiale(s) mais qu’elle avait une activité directement opérationnelle pour son propre compte.

Que cette activité de presse et de publication des deux magazines précités par la société T. soit réelle ou fictive ‘ la société Editair prétendant que celle-ci a en fait été poursuivie par la société MFLT et que les modifications statutaires de la société T. ont servi seulement à donner de la crédibilité à une telle activité et à camoufler qu’elle était en fait poursuivie par la société MFLT ‘ la société T. ne saurait pas pour autant échapper à sa responsabilité contractuelle au titre de la violation de l’engagement de non concurrence souscrit par sa filiale pour elle-même mais aussi pour le compte des sociétés du groupe Tangram, dont la société mètre. En effet, si cette activité de publication est poursuive réellement par la société T. en sa qualité de locataire gérant de la société les Editions M., les actes contraires à l’engagement de

non concurrence sont commis directement par elle ; dans l’hypothèse inverse, elle s’en est rendue co-auteur, tout en essayant de couvrir sa filiale par les modifications apportées à ses statuts. Dès lors, il n’y a pas lieu de se prononcer plus avant sur le caractère réel ou fictif de l’activité de presse et de publication par la société MFLT qui n’est pas utile à la solution du litige.

La société les Editions M. a été mise en demeure de mettre fin au contrat de location gérance par un courrier du 9 mars 2016 adressé par le conseil de la société Editair qui l’informait de la cession partielle par cette dernière à la société MFLT du fonds de commerce portant sur le pôle maison et de la conservation par celle-ci du pôle piscine, les termes exacts de l’engagement de non concurrence étant repris ; la société les Editions M.e n’a pas pour autant mis fin au contrat de location gérance comme le montre l’ours des numéros suivants du magazine « Côté Piscine » qui font apparaître que sa parution a été faite par la société T. en sa qualité de locataire gérant de la société les Editions M.. La poursuite du contrat de location gérance alors qu’avait été portée à sa connaissance le contrat de location gérance engage la responsabilité de cette dernière.

Sur le préjudice résultant des manquements à l’engagement de non concurrence.

Les intimées font valoir que la société Editair ne justifie pas la perte des annonceurs dont elle se prévaut dans les annonces dites « classées » depuis la reprise par la société MFLT en location gérance de la société les Editions M. de la publication du magazine « Côté Piscine », faute pour l’appelante d’identifier les annonceurs perdus, d’indiquer le nombre moyens d’annonces que ces derniers faisaient publier par an, le chiffre d’affaires et la marge réalisée avec chacun de ces annonceurs.

Les magazine « Ambiance Piscines » et « Piscines et Spa » édité par la société Editair contiennent, en effet, une rubrique qui s’intitule « Les Bonnes Adresses des Professionnels » ; cette rubrique par département géographique comprend une liste de piscinistes avec leurs coordonnées, lesquels s’acquittent pour être intégré à cette liste et pour 8 numéros d’une somme annuelle de 199 € HT , ce montant étant porté à 469 € par an si leur encart est faite sous leur logo. Elle correspond à un référencement par les magazines concernés de ces piscinistes présentés sous l’appellation avantageuse de cette rubrique.

Il ressort des numéros des magazines « Ambiance Piscines » des mois de janvier/février/mars 2016 au juillet/août/septembre 2017 et « Piscines et Spa » des mois de décembre/janvier /février 2016 à mai/juin/juillet 2017 que le nombre des piscinistes référencés par ces magazines de 473 est descendu à 383, diminution qui a commencé à compter de la reprise en location gérance par la société T. du magazine « Côté Piscine » qui a pratiqué à l’égard de ces annonceurs des prix légèrement plus bas (200 € HT par an) ceux de la société Editair, cette prestation étant par ailleurs offerte en cas d’insert d’une publicité.

La société T., grâce à Mme A, sa chef de publicité embauchée en 1999 par la société Ledoux Presse jusqu’à la reprise de cette entreprise par la société Editair et qui avait en charge la tenue des bases de données statistiques et les piges de publicité de l’ensemble des publications de la société Editair, a ainsi pu avoir une connaissance fine du marché de la publicité du domaine de la piscine et des différents annonceurs intervenant dans ce domaine lui ayant permis de se positionner légèrement en deçà des tarifs de la société Editair et d’en rallier un nombre important au détriment de la société Editair.

Au vu des éléments produits, le préjudice subi par la société Editair au titre du manque à gagner sur cette prestation de référencement résultant du manquement à l’engagement de non concurrence souscrit par la société MFLT pour son compte et celui de sa société est fixé à la somme de 30.000 €.

Il y a lieu de fixer la créance à ce titre de la société Editair au passif de la société MFLT à cette somme et de condamner la société T. au paiement de celle-ci. La société Editions

M. est condamné in solidum au paiement de cette somme mais à concurrence de 10.000 €, sa responsabilité étant moindre que celle des sociétés T. et MFLT tenues par l’engagement de non concurrence et qui sont les auteurs principaux de sa violation.

La société Editair justifie, par ailleurs, avoir enregistré sur ses magazines « Ambiance Piscines » et « Piscines et Spa », une perte de pagination d’une trentaine de pages entre 2015 et 2016 et une perte supplémentaire comparable entre 2016 et 2017. Alors que le magazine « Côté Piscine » existait déjà, cette perte est à attribuer directement à la parution de ce magazine sous la location gérance de la société T. au mépris de l’engagement de non concurrence auquel elle était tenue.

Pour autant, la société Editair qui réclame de ce chef l’allocation de la somme de 213.000 € ne fournit aucun élément pour justifier de la perte de son chiffre d’affaires et de marges correspondantes. C’est donc à juste titre que le jugement l’a déboutée de ce chef de demande.

Sur la demande au titre des actes de concurrence déloyale portant sur les magazines « Côté Piscine » et « Activités Piscine ».

Cette demande de la société Editair d’un montant de 50.000 € qui repose sur un fondement délictuel est articulée sur des éléments factuels distincts des manquements à l’engagement de non concurrence, notamment une information inexacte par la société MFLT et la société T. auprès des annonceurs du nombre d’exemplaires publiés afin de le majorer indûment dans le but de détourner à son profit ces annonceur à la recherche d’une meilleure visibilité, faisant ainsi passer cette diffusion à hauteur de 38.900 exemplaires alors que ce nombre est en fait de 18.000 .

Comme l’ont justement relevé les premiers juges, il y a ainsi eu tromperie des annonceurs sur la portée de leurs annonces destinée à les inciter à confier leurs actions publicitaires aux publications du groupe T. au détriment de celles de la société Editair ; cette tromperie est caractéristique d’un acte de concurrence déloyale à l’égard de cette dernière.

En revanche, même si la INT1 et la société les Editions M. ont acheté des listes de « fan », « folowears » ou « leads » sur différents réseaux sociaux, il ressort des documents produits que le temps de connexion moyen des internautes de l’ordre de 50 secondes est renseigné de sorte que les destinataires de cette communication commerciale sont à même d’en apprécier l’intérêt ; la société Editair ne saurait soutenir à l’existence d’une méthode trompeuse.

Il s’avère que la rubrique du magazine « Côté Piscine » consacré au référencement des professionnels sous l’appellation « adresses utiles » était jusqu’alors présentée sous forme d’une liste des différents professionnels sans différence graphique pour chacun d’eux ; à compter de la publication de ce magazine sous la location gérance de la société T., cette liste s’est faite sous la forme d’encadrés pour chacun des professionnels adoptant le logo et le graphisme qui leur est propre et s’accompagnant d’un « sticker » professionnel recommandé pour l’enseigne de l’annonceur à afficher sur sa vitrine. L’adoption de ces différents procédés qui sont la reprise exacte deux ceux déjà en cours chez la société Editair s’explique par l’arrivée de Mme A. Cette communication commerciale des différents professionnels auprès du même public sous les mêmes procédés est de nature à créer une confusion entre les deux magazines.

La société Editair explique son abstention à produire en justice toute pièce comptable pour justifier de son préjudice résultant des actes de concurrence déloyale qu’elle impute aux sociétés intimées par le fait que ses comptes sociaux n’ont pas été déposés au greffe du tribunal de commerce et que la saisie des pièces et documents comptables autorisées par l’ordonnance du 21 juin 2016 devait permettre de préciser le quantum du préjudice subi.

D’une part, la faculté que donne l’article R.123-111-1 du code de commerce à certaines sociétés commerciales de ne pas communiquer aux tiers leurs comptes annuels est sans effet sur le droit de la preuve de sorte qu’elle conserve la charge de la preuve du préjudice dont elle demande réparation.

D’autre part, à supposer que ces ordonnance n’avaient pas été rétractées et que les huissiers commis avaient obtenu les ordres et les factures de publicité émises au sein de la publication « Côté Piscine », qui pouvaient certes présenter un intérêt pour établir les manquements ou fautes imputés aux sociétés intimées ; elles n’avaient pas, pour autant, d’utilité pour démontrer le préjudice personnellement subi par la société Editair résultant de ces manquements ou fautes.

Partant, à défaut, pour la société Editair de justifier de son préjudice causés par ces actes de concurrence déloyale au titre de son activité relative à la publication des magazines « Ambiance Piscines » et « Piscines et Spa », le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté la société Editair de ses demandes d’indemnisation à ce titre.

Sur la demande au titre des actes de concurrence déloyale portant sur le magazine « Extérieurs Design ».

La croissance du nombre de publicités insérées dans le magazine « Extérieur Design » édité par la société MFLT ayant attrait au secteur de la piscine sous la responsabilité de Mme A chef de publicité de ce magazine et de « Coté Piscine »ne relève pas en soi, d’agissements de concurrence déloyale, laquelle n’est pas caractérisée par d’autres procédés déloyaux.

La société Editair se voit en conséquence déboutée de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de 50.000 €.

Sur les autres demandes.

La solution apportée au litige justifie que soit allouée à la société Editair la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; cette somme est fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société MFLT ; la société T. est condamnée au paiement de cette somme.

L’ordonnance ayant rétracté les deux ordonnance sur requête ayant statué sur les sort des dépens qui comprennent les frais de l’huissier commis par ces deux ordonnances, il n’y pas lieu de statuer à nouveau sur ces frais que la société Editair présente de façon erronée comme des frais d’expertise.

La société Editair se voit en conséquence déboutée de sa demande en paiement de la somme de 5.343,06 €.

La société MFLT, la société T. supportent les dépens d’appel, étant précisé que s’agissant de la société MFLT ils seront employés en frais de procédure collective.

PAR CES MOTIFS :

Dit qu’après le rabat de l’ordonnance de clôture, l’instruction de la procédure a été clôturée préalablement à l’ouverture des débats lors de l’audience du 7 avril 2021 ;

Dit que l’instance interrompue par le prononcé de la liquidation judiciaire de la société MFLT a été valablement reprise à l’égard de la SELAFA MJA prise en la personne de Maître N Y X prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société MFLT ;

Met hors de cause Maître K pris en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de redressement judiciaire de la société MFLT ;

Met hors de cause la société MJA prise en sa qualité de mandataire judiciaire au redressement

judiciaire de la société MFLT ;

Déclare recevables à l’égard des intimées constituées les conclusions remises le 25 février 2021 par la société Editair ;

Infirme le jugement rendu le 12 octobre 2018 par le tribunal de commerce de Paris en ce qu’il a débouté de l’intégralité de ses demandes relatives aux manquements à l’engagement de non concurrence ;

Statuant à nouveau :

Fixe les dommages et intérêts alloués à la société Editair à ce tire à la somme de 30.000€ en réparation du préjudice résultant des manquements à l’engagement de non concurrence commis par la société MFLT et la société T. ;

Fixe la créance de ce chef de la société Editair au passif de la société MFLT à la somme de 30.000 € à titre chirographaire ;

Condamne la société T. payer à la société Editair la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts de ce chef ; condamne in solidum la société les Editions M. au paiement de cette somme mais à concurrence de 10.000 €

Confirme pour le surplus le jugement en l’ensemble de ses dispositions ;

Y ajoutant :

Alloue à la société Editair la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Fixe à la somme de 10.000 € au passif de la liquidation judiciaire de la société MFLT la créance de la société Editair au titre de l’article 700 du code de procédure civile à titre chirographaire ;

Condamne in solidum la société T. à payer à la société Editair la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamne in solidum la société les Editions M. au paiement de cette somme à concurrence de 3.000 €;

Déboute la société Editair de sa demande en paiement de la somme de 5.346,06 € au titre des frais d’huissier commis par les deux ordonnances rendues le 21 juin 2016 ;

Dit que la société MFLT et la société T. supportent les dépens d’appel ;

Dit qu’à l’égard de la société MFLT ils seront employés en frais privilégies de procédure collective et condamne la société T. aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


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