9 mars 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/05421

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9 mars 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/05421

N° RG 21/05421 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NWYK

Décision du Tribuanl de

proximité de VILLEURBANNE

du 11 mars 2021

RG : 11-19-004115

[L]

C/

Etablissement POLE EMPLOI

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 09 Mars 2023

APPELANT :

M. [N] [L]

né le 12 Décembre 1990 à [Localité 7] (COMORES)

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Florence ALLIGIER, avocat au barreau de LYON, toque : 386

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/016495 du 17/06/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LYON)

INTIMEE :

POLE EMPLOI, agissant pour le compte de L’UNEDIC

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Aymen DJEBARI de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON, toque : 1823

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 7 Juin 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 31 Janvier 2023

Date de mise à disposition : 09 Mars 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Dominique BOISSELET, président

– Evelyne ALLAIS, conseiller

– Stéphanie ROBIN, conseiller

assistés pendant les débats de Manon CHINCHOLE, greffier

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Dominique BOISSELET, président, et par Clémence RUILLAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES :

Suivant contrainte du 3 décembre 2019, prise en application des articles L.5426-8-2, R.5426-20, R.5426-21 et R.5426-22 du code du travail et notifiée le 6 décembre 2019 à M. [N] [L], Pôle Emploi Auvergne-Rhône-Alpes (Pôle Emploi) a réclamé à celui-ci le paiement de la somme totale de 4.836,19 euros, soit 4.831,48 euros en remboursement d’un indu d’allocation retour emploi pour la période du 1er septembre 2018 au 31 mars 2019 et 4,71 euros au titre des frais de recouvrement.

Par déclaration au greffe du 10 décembre 2019 au tribunal d’instance de Villeurbanne, M. [L] a fait opposition à cette contrainte.

Il contestait être redevable d’un indu d’allocation de retour à l’emploi pour la période susvisée, faisant état de ce qu’au cours de cette période, il était bien sans emploi mais avait laissé un ami, en situation irrégulière, utiliser son compte bancaire pour percevoir des salaires qu’il lui reversait intégralement. Or, cette personne avait usurpé son identité.

Pôle Emploi a demandé la condamnation de M. [L] au paiement des sommes mentionnées dans la contrainte outre intérêts au taux légal sur le principal à compter du 24 juin 2019.

Par jugement du 11 mars 2021, le tribunal de proximité de Villeurbanne, devenu compétent pour connaître du litige, a :

– reçu l’opposition formée par M. [L],

– validé la contrainte UN311908410 du 3 décembre 2019 pour la somme de 4.831,48 euros et 4,71 euros de frais,

– condamné M. [L] à payer à Pôle Emploi la somme de 4.836,19 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 iuin 2019, au titre de l’allocation d’aide au retour à l’emploi indûment perçue entre le 1er septembre 2018 et le 31 mars 2019,

– condamné M. [L] à payer à Pôle Emploi la somme de 150 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [L] aux entiers dépens de l’instance incluant les frais de notification de la contrainte.

Par déclaration du 23 juin 2021, M. [L] a interjeté appel de la décision, sauf en ce que celle-ci a déclaré recevable son opposition à la contrainte.

Dans ses conclusions notifiées le 23 septembre 2021, M. [L] demande à la Cour de :

– constater qu’il a été victime d’usurpation d’identité,

– constater qu’il n’a pas cumulé perception de salaires et allocations d’aide au retour à l’emploi sur la période du 1er septembre 2018 au 10 avril 2019 ;

– réformer le jugement en ce qu’il a validé la contrainte en date du 3 décembre 2019 et l’a condamné à payer à Pôle Emploi la somme de 4.836,19 euros, outre intérêts à taux légal à compter du 27 juin 2019, outre 150 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– annuler la contrainte en date du 3 décembre 2019 pour le recouvrement de l’allocation d’aide au retour à l’emploi versée sur la période du 1er septembre 2018 au 31 mars 2019, portant les références UN311908410,

Dans ses conclusions notifiées le 21 décembre 2021, Pôle Emploi demande à la Cour, au visa des articles L.5411-2, R.5411-6 et R.5411-7 du code du travail, 1302 et 1302-1 du code civil, de :

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

en conséquence,

– condamner M. [L] à lui payer la somme de 4.836,19 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2019, au titre de l’allocation d’aide au retour à l’emploi indûment perçue entre le 1er septembre 2018 et le 31 mars 2019,

y ajoutant

– débouter M. [L] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– condamner M. [L] à payer à Pôle Emploi la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [L] aux entiers dépens d’appel qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile, par Maître Aymen Djebari, avocat associé de la Selarl Levy Roche Sarda, qui en a fait la demande.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 7 juin 2022.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties aux conclusions écrites susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION :

Il ressort des pièces versées aux débats que :

– le 25 juillet 2018, Pôle Emploi a notifié à M. [L] la reprise du versement de son allocation d’Aide au Retour à l’Emploi (ARE) à partir du 25 juillet 2018,

– le 15 avril 2019, Pôle Emploi a été informé de ce que M. [L] avait travaillé du 1er septembre 2018 au 10 avril 2019 au sein de l’entreprise [10],

– par courrier du 18 avril 2019, Pôle Emploi a réclamé à M. [L] la somme de 4.831,48 euros au titre d’un indu d’ARE au motif que l’allocataire avait omis de déclarer l’activité susvisée et que le revenu de cette activité ne pouvait être cumulé intégralement avec les allocations versées,

– par lettre recommandée du 24 juin 2019, retournée par la Poste avec la mention « pli avisé et non réclamé », Pôle Emploi a réclamé à nouveau à M. [L] la somme de 4.831,48 euros, précisant que celle-ci correspondait à un indu d’ARE pour la période du 1er septembre 2018 au 31 mars 2019.

A l’appui de ses prétentions, M. [L] fait valoir que :

– il a été victime d’une usurpation d’identité, n’ayant jamais travaillé pour le compte de la société [10] du 1er septembre 2018 au 10 avril 2019,

– il a seulement fait l’erreur d’accepter de réceptionner sur son compte bancaire les salaires d’une autre personne qui ne bénéficiait pas d’un compte propre et de restituer ensuite à celle-ci les salaires considérés,

– les pièces produites sont suffisantes pour prouver qu’il reversait à son ami les salaires de la société [10] et qu’il ne travaillait pas pour le compte de cette société; il est de bonne foi et n’a pas cumulé des salaires et des allocations de retour à l’emploi pendant la période litigieuse.

Pôle Emploi réplique que :

– M. [L] a perçu la totalité de ses allocations de chômage du 1er septembre 2018 au 31 mars 2019, du fait qu’il a déclaré être sans emploi pendant cette période,

– une attestation d’employeur dématérialisée envoyée en avril 2019 fait apparaître que M. [L] a exercé une activité salariée pour l’entreprise [10] du 1er septembre 2018 au 10 avril 2019, de telle sorte que l’intéressé est redevable d’un indu d’allocations de chômage,

– les pièces produites par M. [L] ne prouvent pas qu’il a été victime d’une usurpation d’identité.

A l’appui de ses prétentions, M. [L] produit :

– le procès-verbal de sa plainte pénale pour usurpation d’identité du 29 janvier 2020, faisant état de ce qu’un individu de type Nord Africain se serait fait passer pour lui et aurait travaillé en son nom pour le compte du restaurant [10] situé [Adresse 2] à [Localité 9] du 1er septembre 2018 au 10 avril 2019 en fournissant des documents d’identité semblables aux siens (mêmes nom, prénom etc.), de ce qu’il n’a jamais perdu de papiers officiels, et de ce qu’il n’a pas plus d’information ni n’a d’idée sur le ou les auteurs,

– un relevé de son livret A pour la période du 21 mars au 19 avril 2019, mentionnant le virement d’un salaire de [10] de 1.199,22 euros au crédit de ce compte le 28 mars 2019 et un retrait en espèces de 800 euros au débit de ce compte le 29 mars 2019,

– un relevé de son compte [12] du 31 janvier au 28 février 2019, faisant apparaître que le lundi 26 février 2019, il faisait des achats à [Localité 6] et [Localité 11] et ne pouvait travailler à [Localité 8],

– un courrier non daté mais postérieur au 12 octobre 2020, dans lequel il explique avoir accepté de donner à un ami comorien, sans papiers, son relevé d’identité bancaire pour permettre à celui-ci de percevoir des salaires, de soupçonner l’intéressé d’avoir profité de son absence pour prendre sa carte d’identité et sa carte vitale, d’avoir appris par des connaissances que cet ami avait pris son identité et avoir essayé ensuite vainement de rentrer en contact avec lui.

Toutefois, il convient d’observer que la plainte pénale de M. [L] est particulièrement imprécise, alors que celui-ci fait état dans son courrier de nombreux éléments qui permettraient de procéder à l’identification de l’auteur de l’usurpation alléguée. Par ailleurs, M. [L] ne prouve pas que le salarié employé par la société [10] pendant la période litigieuse a travaillé le lundi 26 février 2019. Enfin, le relevé du livret A de M. [L] ne corrobore pas ses allégations selon lesquelles il reversait intégralement les salaires de la société [10] à l’ami auquel il rendait service.

M. [L] étant d’accord pour reconnaître que la société [10] a employé un salarié ayant la même identité que lui du 1er septembre 2018 au 10 avril 2019, les seuls éléments versés aux débats sont insuffisants pour établir qu’il a été victime d’une usurpation d’identité pendant cette période. M. [L] ne prouve donc pas qu’il n’a pas travaillé pour le compte de la société [10] du 1er septembre 2018 au 10 avril 2019. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a validé la contrainte et condamné M. [L] à payer à Pôle Emploi la somme de 4.836,19 euros avec intérêts au taux légal au titre de l’ARE indument perçue entre le 1er septembre 2018 et le 31 mars 2019.

Compte tenu de la solution apportée au litige, le jugement sera confirmé quant aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile. M. [L], qui n’obtient pas gain de cause dans le cadre de son recours, sera condamné aux dépens d’appel, avec le droit pour Maître Aymen Djebari, avocat associé de la SELARL Levy Roche Sarda, de recouvrer directement ceux dont il aura fait l’avance sans avoir reçu provision en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile. M. [L] sera condamné en outre à payer à Pôle Emploi la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

statuant dans les limites de l’appel,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Condamne M. [L] aux dépens d’appel, avec droit de recouvrement direct de ceux-ci au profit de Maître Aymen Djebari, avocat associé de la SELARL Levy Roche Sarda, en application de l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamne M. [L] à payer à Pôle Emploi la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Rejette le surplus des demandes.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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