8 septembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/00533

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8 septembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/00533

N° RG 19/00533

N° Portalis DBVX – V – B7D – ME3P

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 19 décembre 2018

Chambre 9 cab 09 G

RG : 16/02766

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 08 Septembre 2022

APPELANTE :

SCCV CALUIRE PASTEUR BRANLY

[Adresse 4]

[Localité 8]

représentée par la SELAS CMS FRANCIS LEFEBVRE LYON AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1203

INTIMES :

M. [R] [X]

né le 13 Août 1965 à [Localité 12](HAUTE SAVOIE)

[Adresse 7]

[Localité 10]

M. [W] [H]

né le 11 Mars 1942 à [Localité 17] (ILLE ET VILAINE)

[Adresse 3]

[Localité 9]

Mme [A] [E] épouse [H]

née le 28 Novembre 1943 à [Localité 20] (RHONE)

[Adresse 3]

[Localité 9]

M. [I] [G]

né le 06 Juin 1984 à BEZON (VAL D’OISE)

[Adresse 7]

[Localité 10]

Mme [PE] [CT]

née le 26 Mars 1984 à [Localité 22] (YONNE)

[Adresse 7]

[Localité 10]

M. [M] [Y]

né le 18 Avril 1963 à [Localité 13] ([Localité 15])

[Adresse 7]

[Localité 10]

Mme [P] [V]

née le 07 Novembre 1943 à [Localité 20] (RHONE)

[Adresse 7]

[Localité 10]

M. [L] [J]

né le 16 Mars 1984 à [Localité 18] (NORD)

[Adresse 1]

[Localité 6]

Mme [OD] [D] épouse [J]

née le 13 Décembre 1983 à MAUTAUBAN (TARN ET GARONNE)

[Adresse 1]

[Localité 6]

M. [K] [B]

né le 26 Février 1954 à [Localité 19] (RHONE)

[Adresse 7]

[Localité 10]

Mme [C] [B]

née le 16 Novembre 1960 à [Localité 19] (RHONE)

[Adresse 7]

[Localité 10]

M. [S] [Z]

né le 18 Février 1962 à [Localité 16] (HAUTE LOIRE)

[Adresse 11]

[Localité 5]

Mme [N] [O] épouse [Z]

née le 18 Février 1962 à [Localité 16] (HAUTE-LOIRE)

[Adresse 11]

[Localité 5]

M. [F] [U]

né le 21 Octobre 1955 à [Localité 21] (AIN)

[Adresse 2]

[Localité 10]

représentés par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES – LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 938

et pour avocat plaidant la SELARL PRIOU – MARGOTTON, avocat au barreau de LYON, toque : T.1287

PARTIE INTERVENANTE :

SAS 6ème SENS PROMOTION

[Adresse 4]

[Localité 8] (RHONE)

représentée par la SELAS CMS FRANCIS LEFEBVRE LYON AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1203

******

Date de clôture de l’instruction : 21 Janvier 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 01 Juin 2022

Date de mise à disposition : 08 Septembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Anne WYON, président

– Françoise CLEMENT, conseiller

– Annick ISOLA, conseiller

assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l’audience, l’un des membres de la Cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Dans le cadre d’une opération de renouvellement urbain du quartier Montessuy-Pasteur, sur la commune de [Localité 14] (69), à la fin de l’année 2012, la société Caluire Pasteur Branly et son associée, la société 6ème Sens immobilier, ont assuré la promotion et les travaux de construction de deux projets immobiliers en l’état futur d’achèvement, dénommés [Adresse 23].

29 logements de l’ensemble immobilier Greenway ont été vendus en l’état futur d’achèvement, les actes authentiques étant régularisés du 29 juillet 2013 au 23 juin 2014.

M. [X], M. et Mme [H], M. [G], Mme [CT], M. [Y], Mme [V], M. et Mme [J], M. [B], Mme [B], M. et Mme [Z] et M. [U] (les copropriétaires) sont ainsi devenus copropriétaires de différents lots au sein de l’ensemble immobilier Greenway situé [Adresse 7].

Sur les 29 logements composant cet ensemble immobilier, l’Office public d’aménagement et de construction (l’OPAC) a acquis 18 logements en décembre 2014.

Considérant que lors du lancement du programme immobilier, la société 6ème Sens immobilier avait vanté les avantages de la résidence Greenway par rapport à la résidence 1888 en mettant en avant la distinction selon laquelle la première ne comptait aucun logement social, contrairement à la seconde, et que la plaquette mentionnant cette spécificité constituait un argument de vente déterminant, les copropriétaires sus mentionnés ont, après avoir mandaté un expert judiciaire qui a rendu un rapport le 30 septembre 2015 sur la diminution de la valeur des biens, fait citer par acte d’huissier de justice du 19 février 2016, la société 6ème Sens immobilier sur le fondement de l’article 1604 du code civil afin d’obtenir réparation du préjudice financier subi.

Par jugement du 19 décembre 2018, le tribunal de grande instance de Lyon a :

        – donné acte à la société Caluire Pasteur Branly de son intervention volontaire,

      – condamné la société Caluire Pasteur Branly à verser les sommes suivantes :

‘ 24 307 euros à M.[X],

‘ 27 622 euros à M. et Mme [H],

‘ 50 000 euros à M. [G] et Mme [CT],

‘ 37 143 euros à M. [Y],

‘ 50 985 euros à Mme [V],

‘ 28 250 euros à M. et Mme [J],

‘ 40 375 euros à M. [B],

‘ 25 063 euros à M. [U],

‘ 36 750 euros à M. [Z],

‘ 35 500 euros à Mme [B],

 

        – condamné la société Caluire Pasteur Branly à verser, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, une somme de 300 euros à chaque copropriétaire(s) susnommé(s),

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

 

– condamné la société Caluire Pasteur Branly à supporter les entiers dépens de l’instance qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement.

 

Selon déclaration du 22 janvier 2019, la société Caluire Pasteur Branly a interjeté appel de ce jugement, intimant les copropriétaires susvisés qui ont formé appel incident provoqué à l’encontre de la société 6ème sens promotion.

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées au greffe le 16 janvier 2020, la société Caluire Pasteur Branly et la société 6ème Sens promotion demandent à la cour de :

– confirmer la décision rendue le 19 décembre 2018 par le tribunal de grande instance de Lyon en ce qu’elle a mis hors de cause la société 6ème Sens promotion,

– réformer la décision en ce qu’elle a condamné la société Caluire Pasteur Branly au paiement, outre les dépens et la somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, des sommes susvisées, et débouté les parties du surplus de leurs demandes,

et statuant à nouveau,

à titre principal,

– dire et juger que ni la société Caluire Pasteur Branly ni la société 6ème Sens promotion ne peuvent se voir reprocher un quelconque manquement à leurs obligations contractuelles, 

 

– dire et juger que ni la société Caluire Pasteur Branly ni la société 6ème Sens Promotion ne peuvent se voir reprocher un quelconque manquement à leur obligation de délivrance conforme,

 

        – débouter les copropriétaires de l’intégralité de leurs demandes,

à titre subsidiaire, 

        – ordonner avant-dire droit, une expertise judiciaire et désigner tel expert qu’il plaira avec pour mission de chiffrer l’éventuel préjudice résultant pour les copropriétaires de la résidence le GREENWAY de la présence au sein de la copropriété de logements sociaux, 

en tout état de cause,

        – condamner les copropriétaires à payer, chacun, à  la société Caluire Pasteur Branly, ainsi qu’à la société 6ème Sens promotion une indemnité de 1 000 euros chacune en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance,

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées au greffe le 26 décembre 2019, les copropriétaires demandent à la cour de :

– dire et juger que la société Caluire Pasteur Branly ayant interjeté appel contre l’ensemble des parties présentes en première instance à l’exception de la société 6ème Sens promotion, les concluants sont recevables et bien fondées à effectuer un appel provoqué conformément aux dispositions des articles 551 et 909 du code de procédure civile à l’encontre de la société 6ème Sens afin qu’elle soit condamnée in solidum avec la société Caluire Pasteur Branly à les indemniser.

en tout état de cause,

– confirmer le jugement le jugement sauf en ce qu’il a retenu la responsabilité de la société Caluire Pasteur Branly et l’a condamnée à payer, outre la somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, les sommes susvisées,

– réformer le jugement en ce qu’il a mis hors de cause la société 6ème Sens, débouté les copropriétaires lésés de leur demande de condamnation au paiement de la somme de 5 000 euros chacun au titre du préjudice moral, rejeté leur demande de publication du jugement dans 3 journaux au choix des requérants et aux frais avancés de la société 6ème Sens promotion et de la société Caluire Pasteur Branly dans la limite de 3 000 euros HT par insertion,

statuant à nouveau,

        – dire et juger recevables et bien fondées les demandes des requérants,

 

          – dire et juger à titre principal que l’engagement pris par la société 6ème Sens promotion et la société Caluire Pasteur Branly au titre de l’absence de logements sociaux dans la résidence Greenway n’a non seulement pas été respecté mais encore totalement violé au vu du nombre de logements sociaux présents dans la Résidence, soit 18 sur les 29 logements ce qui correspond à 62 % de logements sociaux,

 

        – dire et juger que le défaut de conformité et les fautes commises dans la présentation erronée du programme Greenway imputables à la société 6ème Sens promotion et la société Caluire Pasteur Branly sont caractérisées, 

 

          – dire et juger à titre subsidiaire que les sociétés 6ème Sens promotion et Caluire Pasteur Branly se sont rendues responsables de pratique commerciale trompeuse engageant leur responsabilité civile quasi-délictuelle,

 

          – dire et juger que les concluants sont bien fondés à obtenir l’indemnisation du préjudice résultant des fautes commises par les sociétés 6ème Sens Promotion et Caluire Pasteur Branly,

  

          – dire et juger que les concluants sont bien fondés à obtenir la condamnation des société 6ème Sens Promotion et société Caluire Pasteur Branly au paiement de dommages et intérêts représentant 12,5% du prix de vente des logements acquis au titre de la réparation de leur préjudice financier,

 

          – rejeter l’intégralité des demandes, fins et conclusions, de la société Caluire Pasteur Branly à l’encontre des concluants,

 

          – rejeter la demande d’expertise judiciaire formée par les sociétés 6ème Sens promotion et Caluire Pasteur Branly,

par conséquent,

        – condamner in solidum les sociétés 6ème Sens promotion et Caluire Pasteur Branly  au titre de la réparation du préjudice financier subi, aux sommes de :

 

‘ 24 307 euros à M. [R] [X] (prix d’achat : 194 452 euros),

’27 622 euros à M. et Mme [H] (prix d’achat : 220 979 euros),

‘ 50 000 euros à M. [G] et Mme [CT] (prix d’achat : 400 000 euros),

‘ 37 143 euros à M. [Y] (prix d’achat : 297 144 euros),

‘ 50 985 euros à Mme [P] [V] (prix d’achat : 407 886 euros),

‘ 28 250 euros à M. [J] et Mme [D]-[J] (prix d’achat : 226 000 euros),

‘ 40 375 euros à M. [B] (prix d’achat : 323 000 euros),

‘ 25 063 euros à M. [U] (prix d’achat : 200 500 euros),

‘ 36 750 euros à M. [Z] (prix d’achat : 294 000 euros),

‘ 35 500 euros à Mme [C] [B] (prix d’achat : 284 000 euros),

 

– condamner in solidum les sociétés 6ème Sens promotion et Caluire Pasteur Branly à payer à chacun des concluants la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

 

         – ordonner la publication de l’arrêt à intervenir dans 3 journaux au choix des requérants et aux frais avancés des sociétés 6ème me Sens Promotion et Caluire Pasteur Branly dans la limite de 3 000 euros HT par insertion,

 

         – condamner in solidum les sociétés 6ème Sens promotion et Caluire Pasteur Branly à payer à chacun des concluants la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

 

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 janvier 2020.

 

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il sera rappelé que les « demandes » tendant à voir « constater » ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour ; il en est de même des « demandes » tendant à voir « dire et juger» lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.

L’extrait Kbis actualisé produit au dossier à la demande de la cour permet de constater que la société dénommée 6ème sens immobilier par le premier juge est en réalité dénommée 6ème sens promotion, seule dénomination retenue par la cour.

I. Sur la demande tendant à la mise hors de cause de la société 6ème Sens promotion :

La cour constate que le dispositif du jugement critiqué n’a nullement mis hors de cause la société 6ème Sens promotion comme l’indiquent à tort les parties ; le jugement ne peut donc être ni infirmé ni confirmé de ce chef et il sera statué par la cour sur la responsabilité de la société 6ème Sens promotion que le premier juge a omis de trancher.

II. Sur la responsabilité des sociétés 6ème sens promotion et Caluire Pasteur Branly :

La société 6ème Sens promotion considère qu’elle est étrangère au litige en raison de l’inexistence de lien contractuel entre elle et les copropriétaires de la résidence Greenway.

Elle rappelle que ces derniers ne démontrent pas l’existence d’un lien de causalité entre la faute et le dommage engendré et qu’elle n’est pas intervenue dans le processus de commercialisation.

La société Caluire Pasteur Branly fait essentiellement valoir qu’elle a annexé une notice descriptive de l’immeuble à chaque acte authentique de vente qui n’érigeait en rien les modalités d’occupation de l’immeuble au rang de condition essentielle du contrat ; elle conteste ainsi s’être engagée contractuellement quant à la présence ou l’absence de logements sociaux au sein de la résidence.

Les appelantes rappellent que la plaquette commerciale invoquée par les copropriétaires n’est pas un document contractuel mais un document publicitaire qui ne justifie pas le mode d’occupation des lots ; qu’elle ne peut être considérée que comme une indication pour les agents commerciaux quant aux types d’acquéreurs à cibler.

Elles indiquent qu’au jour de l’édition des plaquettes, aucun logement social n’avait encore été réservé et que l’article de presse rédigé le 3 juin 2013 ne saurait définir les engagements contractuels du vendeur.

Les copropriétaires fondent leur action indemnitaire sur la responsabilité délictuelle à l’encontre de la société 6ème sens promotion et sur le fondement de la responsabilité contractuelle à l’égard de la société Caluire Pasteur Branly.

Ils invoquent à l’encontre de ces deux sociétés, à titre principal un défaut de conformité et des fautes dans la présentation erronée du programme « Greenway » et à titre subsidiaire l’existence de pratiques commerciales trompeuses engageant leur responsabilité quasi-délictuelle sur le fondement de l’article L.121-1 du code de la consommation.

Ils estiment que la diffusion d’un article dans la presse locale suffit à démontrer que les deux sociétés invoquaient l’absence de logement social dans la résidence pour en faire un argument commercial phare.

Ils estiment que cette plaquette avait force obligatoire et que l’élément de l’absence ou de la présence de logements sociaux au sein de la résidence était un élément déterminant de leur engagement, constituant une obligation de résultat à la charge du vendeur.

Ils ajoutent que contrairement à ce qui avait été conclu dans le contrat, 18 logements sur les 29 logements de la résidence Greenway sont gérés par l’OPAC, soit les 2/3 de la résidence, ce qui caractérise un défaut de conformité du bien.

Ils font enfin valoir que la société 6ème Sens promotion a commis une faute en élaborant un stratagème consistant à produire une plaquette publicitaire mensongère.

Sur ce :

La société 6ème sens promotion, associée de la société Caluire Pasteur Branly à l’époque de la mise en vente des appartements du programme Greenway, est intervenue, par l’intermédiaire de son réseau d’agents commerciaux, dans le cadre de la commercialisation du programme immobilier ; elle n’est donc pas étrangère aux négociations et ventes intervenues entre la société Caluire Pasteur Branly et les différents copropriétaires ayant acquis un bien immobilier à ce titre.

Sa responsabilité peut ainsi être recherchée par les acquéreurs et elle ne doit donc pas être mise hors de cause.

En application de l’article 1604 du code civil, le vendeur est tenu de délivrer à l’acheteur un produit conforme aux caractéristiques convenues ; en matière de vente en l’état futur d’achèvement, tel le cas en l’espèce, les défauts de conformité se déduisent de la comparaison entre le bien promis et le bien effectivement réalisé.

Les copropriétaires de l’espèce ne formulent aucune critique concernant les caractéristiques ou les qualités des bâtiments construits, limitant leurs griefs au mode d’occupation de ces derniers, à la nature et aux caractéristiques des occupants qu’ils considèrent comme source de préjudice.

Il ressort de l’ensemble des documents produits aux dossiers des parties que :

– il n’était pas prévu au lancement du programme Greenway, contrairement au programme voisin 1888 situé à proximité, la présence de logements sociaux et ce n’est que postérieurement à la signature des contrats de réservation et des actes authentiques de vente dont la signature s’est étalée de juillet 2013 à juin 2014, face aux difficultés de commercialisation du programme rencontrées par le promoteur, que l’Office public de l’habitat du département du Rhône (OPAC), a acquis, par acte authentique de vente du 23 décembre 2014, après contrats de réservation du 17 novembre précédent, la pleine propriété de 5 appartements et l’usufruit temporaire de 13 autres lots pour une durée de 16 années à compter du mois d’avril 2015,

– un permis modificatif sollicité le 28 avril 2015 a été délivré le 28 juillet 2015, entérinant la présence de 18 logements sociaux sur 29 logements à construire,

– sur la plaquette publicitaire destinée à être diffusée au public, remise aux copropriétaires de l’espèce, ne figurait aucune information concernant la présence ou l’absence de logements sociaux dans l’immeuble et seul un document commercial établi à destination des agents commerciaux chargés de la vente des appartements, incluait dans la liste des arguments commerciaux de vente, la mention « absence de logements sociaux ».

Une telle mention portée sur le document commercial remis aux agents commerciaux chargé de la vente des appartements, qui ne peut s’analyser en un document contractuel et ne peut non plus constituer une publicité dans la mesure où elle n’a pas été destinée à être diffusée au public, n’était ni erronée ni mensongère à l’époque de la commercialisation à destination des différents particuliers concernés, constituant un simple argument commercial de vente ne pouvant entrer dans le champ contractuel des parties ; de la même façon, l’exactitude de l’information donnée le 9 octobre 2012 par M. [T], agent commercial s’adressant à M. [G], futur copropriétaire potentiel, en lui indiquant « qu’aucun logement social n’est prévu sur ce programme », exclut tout élément intentionnel nécessaire à la caractérisation du délit de publicité trompeuse puisqu’à cette date, aucun logement social n’était effectivement prévu dans le programme considéré.

L’information donnée sur l’absence de logements sociaux au lancement des opérations de commercialisation du programme immobilier ne peut être considérée comme caractérisant une manoeuvre ou une réticence du vendeur tendant à dissimuler un fait qui contredirait les spécificités de la chose déterminée entre les parties et aucune indication dans les contrats de vente ne permet de constater que les acquéreurs avaient fait de cette absence de logement social ou des modalités d’occupation de l’immeuble, dans une quelconque proportion, une qualité substantielle de la chose vendue.

De la même façon l’article de presse paru le 3 juin 2013 dans la presse locale, rédigé par un journaliste totalement étranger aux parties, indiquant que « les 29 logements seront exclusivement en accession à la propriété » ne pouvait engager la société Caluire Pasteur Branly, qui ignorait d’ailleurs encore à cette date, qu’elle allait vendre à l’OPAC en décembre 2014, 18 appartements du programme, sauf à renoncer la construction de celui-ci en l’absence de réservations suffisantes.

Aucun manquement du vendeur à son obligation de délivrance conforme ni aucune pratique commerciale trompeuse ne peuvent donc être reprochées en l’espèce aux société Caluire Pasteur Braly et 6ème sens promotion ; le jugement qui a retenu le manquement du vendeur à son obligation de délivrance doit donc être infirmé en ce sens et l’ensemble des copropriétaires déboutés de leurs demandes indemnitaires à ce titre, comme ils doivent également être déboutés de leurs demandes sur le fondement de l’existence de pratiques commerciales trompeuses à l’encontre des sociétés Caluire Pasteur Braly et 6ème sens promotion et de leur demande tendant à la publication du présent arrêt.

La cour constate enfin à titre surabondant, que le préjudice allégué par l’ensemble des copropriétaires, consistant dans la dépréciation de la valeur de leur bien, ne peut en tout état de cause que constituer un préjudice hypothétique, non indemnisable, en l’absence de justification d’une revente de leur bien les exposant de façon certaine, à l’existence d’une moins-value soumise à l’aléa de toute vente d’immeuble jusqu’à sa réalisation.

II. Sur les demandes des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile :

L’équité et la situation économique des parties ne commandent l’octroi d’aucune indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 19 décembre 2018 par le tribunal de grande instance de Lyon sauf en ce qu’il a reçu l’intervention volontaire de la société Caluire Pasteur Branly,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute la société 6ème sens promotion de sa demande tendant à être mise hors de cause,

Déboute M. [X], M. et Mme [H], M. [G], Mme [CT], M. [Y], Mme [V], M. et Mme [J], M. [B], Mme [B], M. et Mme [Z] et M. [U] de l’intégralité de leurs demandes,

Condamne in solidum M. [X], M. et Mme [H], M. [G], Mme [CT], M. [Y], Mme [V], M. et Mme [J], M. [B], Mme [B], M. et Mme [Z] et M. [U] aux dépens de première instance et d’appel avec droit de recouvrement au profit de Me Belluc, avocat,

Rejette les demandes des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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