COUR D’APPEL DE CAEN
2ème Chambre civile
O R D O N N A N C E
N° RG 21/00869
S.A.R.L. ACIER DISTRIBUTION Exerçant sous ‘AD SERVICE’,
Représentée par Me [G], substitué par Me [T], avocats au barreau d’ARGENTAN – N° du dossier C100327
C/
Société PERIPRO BV
Représentée par Me [P], avocat au barreau de CAEN, substitué par Me [Y], avocat au barreau de ROUEN – N° du dossier LC5584
Le MERCREDI HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,
Nous, L. COURTADE, Conseiller, chargée de la mise en état, assistée de Mme LE GALL, greffier,
Avons rendu l’ordonnance suivante après débats tenus le Mercredi 27 Avril 2022, les parties ayant été préalablement avisées de la date de délibéré,
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Vu le jugement du 23 mars 2021, auquel il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, rendu par le tribunal de commerce de Lisieux entre, en demande, la société PERIPRO BV, société de droit néerlandais ayant son siège social aux PAYS BAS, et en défense, la SARL ACIER DISTRIBUTION ;
Vu la déclaration d’appel de la SARL ACIER DISTRIBUTION en date du 25 mars 2021 ;
Par conclusions d’incident déposées le 28 juin 2021, la société PERIPRO BV a saisi le conseiller de la mise en état d’une demande de caducité de la déclaration d’appel.
Par dernières conclusions déposées le 8 octobre 2021, la société PERIPRO BV demande au conseiller de la mise en état de prononcer la caducité de la déclaration d’appel faite par la SARL ACIER DISTRIBUTION et de condamner cette dernière à lui régler la somme de 3500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Par dernières conclusions en réponse sur incident déposées le 15 octobre 2021, la SARL ACIER DISTRIBUTION demande de débouter la société PERIPRO BV de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Il est expressément renvoyé aux dernières écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS
La société PERIPRO BV soulève la caducité de la déclaration d’appel au motif que celle-ci ne lui a pas été signifiée à son siège social aux PAYS BAS, mais à une adresse correspondant aux showrooms de ses deux filiales françaises, à savoir les sociétés PERIPRO FENCING FRANCE et CLOTURES REMOISES, entités juridiquement distinctes, et que l’acte a été remis à une personne non habilitée à le recevoir.
La SARL ACIER DISTRIBUTION répond notamment que l’intimée a un établissement en FRANCE à [Localité 3] où elle a une activité, qu’elle est fondée à faire valoir la jurisprudence dite ‘des gares principales’ et qu’en tout état de cause, elle a régularisé la procédure en faisant signifier sa déclaration d’appel aux PAYS BAS les 5 et 9 juillet 2021.
L’article 902 al 2 et 3 du code de procédure civile dispose qu’en cas de retour au greffe de la lettre de notification ou lorsque l’intimé n’a pas constitué avocat dans un délai d’un mois à compter de l’envoi de la lettre de notification, le greffier en avise l’avocat de l’appelant afin que celui-ci procède par voie de signification de la déclaration d’appel.
A peine de caducité de la déclaration d’appel relevée d’office, la signification doit être effectuée dans le mois de l’avis adressé par le greffe ; cependant, si, entre-temps, l’intimé a constitué avocat avant la signification de la déclaration d’appel, il est procédé par voie de notification à son avocat.
Par ailleurs, selon l’article 690 du code de procédure civile, la notification destinée à une personne morale de droit privé ou à un établissement public à caractère industriel ou commercial est faite au lieu de son établissement.
A défaut d’un tel lieu, elle l’est en la personne de l’un de ses membres habilité à la recevoir.
Ainsi, dès lors qu’une société possède un établissement, l’huissier de justice ne peut valablement signifier l’acte à une personne habilitée en un lieu différent.
En l’espèce, le 6 mai 2021, le greffe avisait la SARL ACIER DISTRIBUTION du défaut de constitution d’avocat de l’intimée et l’invitait à lui signifier la déclaration d’appel dans un délai d’un mois à compter du présent avis, à peine de caducité.
Par acte du 26 mai 2021 délivré par Me [U], huissier de justice, l’appelante a fait signifier sa déclaration d’appel et ses conclusions à l’adresse de deux filiales de la société PERIPRO BV domiciliées en France au [Adresse 1].
L’acte a été remis à Mme [B], salariée de la société CLOTURES REMOISES, qui en qualité de secrétaire s’est déclarée habilitée à le recevoir.
Or, il est établi que la société intimée PERIPRO BV a son siège social à [Adresse 2].
Les éléments produits par l’appelante, notamment la plaquette publicitaire mentionnant un n° de téléphone et une adresse mail identiques pour la société mère et sa filiale PERIPRO FENCING FRANCE, les échanges de mails entre les dirigeants et collaborateurs des sociétés en litige et les courriers de Me [U], sont insuffisants à établir que l’intimée a un établissement à [Localité 3], adresse de sa filiale française, et sont au surplus contredits par le constat d’huissier de Me [W] du 23 septembre 2021 (pièce n° 14 de la société PERIPRO BV).
La SARL ACIER DISTRIBUTION invoque à tort la théorie des ‘gares principales’ qui n’a pas vocation à s’appliquer en l’espèce puisqu’elle concerne la compétence territoriale du tribunal à saisir en cas de litige contre une société disposant d’agences ou de succursales.
De même, le fait que la préposée ait expressément confirmé à l’huissier de justice son habilitation est inopérant.
L’appelante connaissait l’adresse de la société néerlandaise qui est mentionnée sur le jugement déféré ainsi que sur la déclaration d’appel.
C’est donc à cette adresse qu’elle aurait dû signifier la déclaration d’appel et non au lieu d’établissement de la filiale qui est une personne morale distincte. A défaut, l’acte n’a pas été valablement dénoncé.
Enfin, la signification effectuée aux PAYS BAS les 5 et 9 juillet 2021 n’a pas permis de régulariser la procédure puisqu’elle a été délivrée hors du délai prévu à l’article 902 qui expirait le 6 juin 2021.
L’appelante se prévaut vainement de l’article 643 du code de procédure civile qui énonce que
lorsque la demande est portée devant une juridiction qui a son siège en France métropolitaine, les délais de comparution, d’appel, d’opposition, de tierce opposition dans l’hypothèse prévue à l’article 586 alinéa 3, de recours en révision et de pourvoi en cassation sont augmentés de deux mois pour celles qui demeurent à l’étranger.
En effet, la SARL ACIER DISTRIBUTION demeurant en France, ne peut se prévaloir de l’application de cette disposition, édictée en faveur des parties qui demeurent à l’étranger.
Par suite, il convient de prononcer la caducité de la déclaration d’appel.
Partie perdante, la SARL ACIER DISTRIBUTION est condamnée aux dépens d’appel, à payer à la société PERIPRO BV la somme de 1200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, et est déboutée de sa demande formée à ce titre.
PAR CES MOTIFS
Statuant par ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe,
PRONONCONS la caducité de la déclaration d’appel de la SARL ACIER DISTRIBUTION en date du 25 mars 2021;
CONDAMNONS la SARL ACIER DISTRIBUTION à payer à la société PERIPRO BV la somme de 1200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
DEBOUTONS la SARL ACIER DISTRIBUTION de sa demande formée à ce titre;
CONDAMNONS la SARL ACIER DISTRIBUTION aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE CONSEILLER
DE LA MISE EN ETAT
N. LE GALL L. COURTADE