8 décembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/06114

·

·

8 décembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/06114

N° RG 19/06114 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MSCM

Décision du

Tribunal de Commerce de bourg en bresse

Au fond

du 07 juin 2019

RG :

ch n°

SARL BATI SERVICES

C/

SASU SIDERMETAL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 08 Décembre 2022

APPELANTE :

SARL BATISERVICES

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Raphaël DE PRAT de la SELARL INCEPTO AVOCATS CONTENTIEUX, avocat au barreau de LYON, toque : 2086

INTIMEE :

SAS SIDERMETAL

[Adresse 3]

[Localité 5] / FRANCE

Représentée par Me Yves-Marie GUILLAUD, avocat au barreau de LYON, toque : 331

PARTIE EN INTERVENTION FORCEE :

S.E.L.A.R.L. MJ SYNERGIE prise en la personne de Me [D] [E], ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société BATISERVICES

[Adresse 4]

[Localité 1]

non représentée

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 05 Février 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 26 Octobre 2022

Date de mise à disposition : 08 Décembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Patricia GONZALEZ, présidente

– Marianne LA-MESTA, conseillère

– Aurore JULLIEN, conseillère

assistés pendant les débats de Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffière

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La Sarl Batiservices dans laquelle sont associés les époux [W] a commandé en octobre 2017 et janvier 2018 différentes marchandises à la Sas Sidermétal pour la somme totale de 36.117,96 euros facturée de la manière suivante :

– facture n° 32035365 du 2 novembre 2017 d’un montant de 19.526,64 euros correspondant à une commande du 10 octobre 2017,

– facture n° 32036589 du 19 janvier 2018 d’un montant de 16.591,32 euros correspondant à une commande du 8 janvier 2018.

La société Sidermétal a tenté vainement d’obtenir le paiement de ces factures par courriers de mise en demeure des 20 avril et 3 mai 2018, la société Batiservices contestant avoir passé ces commandes et faisant valoir qu’une procédure pénale était en cours pour faux et usage de faux à l’encontre d’un associé de la société Global Armatures Lyon, Sas présidée par M. [W].

Par acte du 6 août 2018, la société Sidermétal a assigné la société Batiservices en paiement de la somme en principal de 36.117,96 euros outre 2.000 euros de dommages et intérêts.

Par jugement du 7 juin 2019, le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse a :

– débouté la société Batiservices de sa demande de sursis à statuer,

– jugé la société Sidermétal bien fondée dans son action en paiement,

en conséquence,

– condamné la société Batiservices à régler à la société Sidermétal la somme de 36.117,96 euros correspondant aux factures n° 32035365 et n° 32036589, outre intérêts de retard à compter de l’échéance de chaque facture au taux d’intérêt légal prévu par les dispositions de l’article L.441-6 du code de commerce,

– ordonné la capitalisation des intérêts échus, conformément aux dispositions de l’article 1342 du code civil,

– débouté la société Sidermétal dans sa demande de dommages et intéréts,

– condamné la société Batiservices à payer à la société Sidermétal la somme de 1.500,00 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties du surplus,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement,

– condamné la société Batiservices aux entiers dépens.

La société Batiservices a interjeté appel par acte du 27 août 2019.

Par jugement du 8 juillet 2020 du tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse, la société Batiservices a été mise en redressement judiciaire, la Selarl MJ Synergie représentée par Me [E] étant désignée en qualité de mandataire judiciaire.

Par courrier recommandé du 24 juillet 2020 adressé à la Selarl MJ Synergie ès-qualités, la société Sidermétal a déclaré sa créance au passif de la société Batiservices pour un montant de 38.775,20 euros.

Par acte du 16 octobre 2020, la société Sidermétal a assigné en intervention forcée la Selarl MJ Synergie représentée par Me [E] ès-qualités de mandataire judiciaire de la société Batiservices, l’assignation étant délivrée à personne habilitée.

* * *

Par conclusions du 25 novembre 2019 fondées sur l’article 1353 du code civil, la société Batiservices demande à la cour de :

– dire son appel recevable et bien fondé

et jugeant à nouveau,

– réformer intégralement le jugement dont appel,

– surseoir à statuer dans l’attente de l’enquête pénale en cours,

en tous les cas,

– dire irrecevables les demandes formulées à l’encontre de la société Batiservices,

– rejeter intégralement les demandes de la société Sidermétal,

– condamner la société Sidermétal à payer à la société Batiservices la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

– et les dépens de l’instance.

Par conclusions du 4 décembre 2020 fondées sur l’article 4 du code de procédure pénale, les articles 1101 et suivants du code civil et l’article 1998 du code civil, la société Sidermétal demande à la cour de :

– débouter la société Batiservices de toutes ses fins, moyens et conclusions et de tous ses chefs d’appel dans lesquels elle sera déclarée mal fondée,

– confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à substituer une fixation du montant de la créance aux condamnations prononcées, et, plus particulièrement, en ce qu’il a :

‘ débouté la société Batiservices de sa demande de sursis a statuer,

‘ jugé la concluante bien fondée dans son action en paiement,

‘ condamné la société Batiservices à payer à la concluante la somme en principal de 36.117,96 euros, outre intérêts de retard à compter de l’échéance de chaque facture au taux d’intérêt légal prévu par les dispositions de l’article L 441-6 du code de commerce,

‘ ordonné la capitalisation des intérêts échus, conformément aux dispositions de l’article 1342 du code civil,

‘ condamné la société Batiservices à payer à la concluante la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ condamné la société Batiservices aux entiers dépens,

y ajoutant,

– condamner la Selarl MJ Synergie, ès-qualités, à payer à la société Sidermétal la somme de 3.000 euros en vertu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais non compris dans les dépens exposés devant la cour d’appel,

– condamner la Selarl MJ Synergie aux entiers dépens d’appel que Me Guillaud sera autorisé à recouvrer directement.

La Selarl MJ Synergie ès-qualités de mandataire judiciaire de la société Batiservices, assignée en intervention forcée et à qui la déclaration d’appel a été signifiée par acte du 16 octobre 2020, n’a pas constitué avocat.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 5 février 2021, les débats étant fixés au 26 octobre 2022.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il est précisé que le litige est soumis au nouveau droit des contrats issu de l’ordonnance du 10 février 2016 puisque les commandes litigieuses ont été passées postérieurement au 1er octobre 2016.

Sur le sursis à statuer

La société Batiservices a expliqué qu’elle avait déposé devant le Procureur de la République une plainte pénale qui concerne les demandes de la société Sidermétal et demandé à la cour, sur le fondement de l’article 4 du code de procédure civile, de surseoir à statuer » dans l’attente de l’enquête pénale en cours ».

La société Sidermétal demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Batiservices de sa demande de sursis à statuer dès lors :

– qu’aucune indication n’est donnée sur le sort de cette plainte qui ne semble pas avoir été poursuivie,

– que depuis la loi du 5 mars 2007, la portée de l’article 4 du code de procédure pénale est retreinte, le sursis à statuer étant facultatif et à l’appréciation de la juridiction civile,

– qu’en tout état de cause, le sort de la plainte pénale serait sans incidence sur la présente procédure.

Selon l’article 4 du code de procédure pénale dans sa version applicable à la cause, « …La mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu’elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil ».

Force est de constater en l’espèce que la société Batiservices n’a justifié que d’une plainte déposée le 10 octobre 2018 devant le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bourg en Bresse, plainte qui n’a manifestement été suivie d’aucun acte de poursuite du ministère public (pièce 17 appelante produite par l’intimée). Ce seul élément ne peut justifier un sursis à statuer et le jugement est confirmé en ce qu’il a rejeté cette prétention.

Sur les créances de la société Sidermétal

La société Batiservices demande à la cour de dire irrecevables les demandes formulées à son encontre et de rejeter intégralement les demandes de la société Sidermétal dès lors :

– qu’un acte ne peut être valablement passé pour une Sarl que par son gérant et que les commandes litigieuses ont été passées frauduleusement, par une personne qui n’avait pas pouvoir pour l’engager,

– que les bons de livraison sont au nom de la société Global Armatures et que le seul bon de commande produit a été émis depuis une adresse courriel de la société Global Armatures.

La société Sidermétal fait valoir :

– qu’une précédente commande en date du 28 juin 2017 a été émise par la société Batiservices et réglée par un chèque signé de M. [W], son gérant,

– que les deux commandes litigieuses (des 10 octobre 2017 et 8 janvier 2018) se sont déroulées dans les mêmes conditions de livraison et de facturation et qu’elle était donc fondée à estimer que ces commandes étaient régulières,

– que M. [W] qui dit savoir depuis juillet 2017 que des commandes frauduleuses avaient lieu n’a pas pris la peine de prévenir les fournisseurs des précautions à prendre avant d’honorer une commande venant de sa société,

– qu’en réalité l’opposition de la société Batiservices au paiement des factures résulte de la mise en liquidation judiciaire de la société Global Armatures Lyon par jugement du 11 avril 2018.

A l’appui de ses prétentions, la société Sidermétal, qui justifie de sa déclaration de créance au passif du redressement judiciaire de la société Batiservices (en p14) verse aux débats :

– le relevé de compte client de la société Batiservices faisant apparaître un solde dû de 36.117,96 euros et ses factures du 2 novembre 2017 et du 19 janvier 2018,

– les bons de commande des 10 octobre 2017 et 8 janvier 2018 sur papier à entête de Batiservices et mentionnant comme adresse de livraison [Adresse 7], le premier bon de commande ne comportant pas de cachet d’entreprise et le second celui de Global armatures Lyon,

– les bons de livraison correspondant aux commandes.

Si l’un des deux bons de commande comporte ainsi le cachet de Global Armatures, il résulte des productions que cette société avait au moment des faits litigieux pour gérant M. [F] [W] dont l’épouse est gérante de la société Batiservices dans laquelle il est associé, que lors d’une commande précédente, M. [W] avait ainsi adressé un chèque « Batiservices » sur un courrier portant un cachet Global Armatures et que le lieu de livraison était identique.

Ainsi que justement relevé par le tribunal de commerce, la livraison des marchandises peut s’effectuer en tout lieu à la demande du client et le lieu de livraison en l’espèce, est celui du siège de la société Global Armatures dont le gérant est M. [W].

Enfin, la société Batiservices ne peut opposer une commande sans lien avec son objet social alors qu’elle concerne le même type de marchandises que la première commande.

La société Sidermétal ne pouvait en conséquence suspecter aucune anomalie quant à l’origine des commandes par une personne habilitée pour le compte de la société Batiservices, au vu de ce précédent et l’appelante ne peut lui opposer une commande frauduleuse, ne procédant que par simples affirmations sur l’existence d’une usurpation d’identité par un nouvel associé.

Les productions révélant l’apparence de régularité de la commande par la société Batiservices, cette dernière échoue dans son argumentation et le jugement est confirmé en ce qu’il a fait droit aux demandes de la société Sidermétal sauf à fixer les créances en conséquence de la procédure collective comme précisé au dispositif de l’arrêt.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Les dépens de première instance et d’appel sont à la charge de la procédure collective de la société Batiservices.

Il est en outre fait droit à la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile de la société Sidermétal en cause d’appel à hauteur de 2.500 euros, la somme accordée à ce titre en première instance étant confirmée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à substituer aux condamnations à paiement la fixation du montant des créances.

En conséquence, statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe au passif de la procédure collective de la société Batiservices les créances suivantes :

– la somme de 36.117,96 euros en principal outre intérêts de retard à compter de l’échéance de chaque facture au taux d’intérêt légal prévu par les dispositions de l’article L.441-6 du code de commerce, et capitalisation des intérêts échus, conformément aux dispositions de l’article 1342 du code civil jusqu’à arrêt du cours des intérêts en raison de la procédure collective,

– les sommes de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour frais de procédure de première instance et 2.500 euros pour frais de procédures en cause d’appel.

Dit que les dépens de première instance et d’appel sont en frais privilégiés de la procédure collective de la société Batiservices.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x