7 septembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/07401

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7 septembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/07401

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRET DU 07 SEPTEMBRE 2022

(n° 132 , 18 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/07401 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDQGP

Jugement du Tribunal de commerce de PARIS du 08 Novembre 2013 – 15ème Chambre – RG n° 2012065543

Arrêt de la cour d’appel du 11 Juin 2015 – RG 13/22384

Arrêt de la Cour de Cassation du 31 Mars 2021 – Pourvoi n°19-14-968

DEMANDERESSE ET DEFENDERESSE A LA SAISINE

S.A.R.L. POMPES FUNEBRES PRIVEES agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de CRÉTEIL sous le numéro 393 102 249

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065, avocat postulant

Assistée de Me Clémence TESSIER, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 17, avocat plaidant

DEMANDERESSE ET DEFENDERESSE A LA SAISINE

S.A. OGF agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège.

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de PARIS sous le numéro 542 076 799

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Christian VALENCIEN, avocat au barreau de PARIS, toque : C2441, avocat postulant

Assistée de Me Cécile REBIFFE de la SELAFA CMS FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : NAN1701, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 30 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, chargée du rapport, et de Madame Camille LIGNIERES, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre

Madame Sophie DEPELLEY, Conseillère

Madame Camille LIGNIERES, Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffière, lors des débats : Madame Meggy RIBEIRO

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, et par Madame Claudia CHRISTOPHE, Greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

******

La société S.A.R.L. Pompes Funèbres Privées (ci-après « PFP ») exerce une activité d’opérateur de pompes funèbres créée en 1993 à la suite de la libéralisation du secteur et opère exclusivement sur la commune de [Localité 5] sans disposer de chambre funéraire, mais en utilisant les services de la chambre funéraire de la société OGF.

La société S.A. OGF (ci-après « OGF ») est spécialisée dans les services funéraires. Elle était titulaire de multiples concessions communales de pompes funèbres sur tout le territoire français, avant la loi de 1993, notamment à [Localité 5] où elle gère la chambre funéraire et exerce également l’activité d’opérateur de pompes funèbres sous l’enseigne PFG.

La loi du 8 juillet 1993 a mis fin au monopole communal des opérations funéraires, ouvrant à toutes entités le service extérieur des pompes funèbres lequel peut être assuré désormais par les communes ou leurs délégataires mais aussi par toute entité de droit privé dûment habilitée par autorisation du représentant de l’État dans le département.

Reprochant à la société OGF d’opérer une confusion entre son activité de gestionnaire de la chambre funéraire et son activité de pompes funèbres et d’attirer ainsi la clientèle, la société PFP a assigné celle-ci en concurrence déloyale.

Par arrêt du 5 mai 2000, la cour d’appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Paris lequel, constatant que la société OGF avait manqué au principe de neutralité de la chambre funéraire, l’avait condamnée à payer à la société PFP des dommages et intérêts d’un montant de 500.000 francs.

Saisi par la société PFP, le Conseil de la concurrence a rendu le 27 juillet 2004 une décision sanctionnant des comportements de la société OGF dans le Val-de-Marne sur la période entre 1993 et 1995 pour abus de position dominante, et la condamnant à une sanction pécuniaire de 76.224 euros.

Soutenant que la société OGF avait persisté dans ces pratiques illicites, la société PFP l’a assignée en référé le 9 juin 2004 afin d’obtenir la désignation d’un expert

Par ordonnance de référé du 14 septembre 2004, le président du tribunal de commerce de Paris a désigné en qualité d’expert M. [M] [E] afin de :

Donner au tribunal les informations sur les conditions de la concurrence entre les parties et les moyens de commerce mis en ‘uvre par chacune d’elles et, plus précisément,

Déterminer pour la période s’étalant de mai 2000 au 20 janvier 2004, le pourcentage des convois funéraires assurés par chaque partie au regard de la totalité des convois assurés à [Localité 5],

Dresser un état de l’évolution des parts de marché de chaque partie sur cette même ville.

Le rapport d’expertise a été déposé le 3 août 2012.

Par jugement du 8 novembre 2013, le tribunal de commerce de Paris, saisi par acte du 11 octobre 2012 de la société PFP a statué en ces termes :

‘Condamne la SA OGF à payer à la SARL Les Pompes Funèbres Privées PFP les sommes de :

346.500 euros outre les intérêts légaux à compter du 9 juin 2004 ;

23.200 euros au titre des frais d’expertise ;

20.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne OGF aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,17 €

Dont 13,25 € de TVA.’

Par arrêt du 11 juin 2015, la Cour d’appel de Paris saisie par la société OGF, a :

-déclaré irrecevable, comme constituant une demande nouvelle, la demande tendant à la condamnation de la société OGF à payer à la société Pompes Funèbres Privées la somme de 1.337.074 € à titre de dommages et intérêts ;

– déclaré irrecevable, comme prescrite, la demande de désignation d’un expert judiciaire en tant qu’elle porte sur des faits antérieurs au 11 octobre 2007 ;

– confirmé le jugement attaqué sauf en ce qu’il a condamné la société OGF à payer à la société Pompes Funèbres Privées la somme de 346.500 euros à titre de dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau,

– condamné la société OGF à payer à la société Pompes Funèbres Privées la somme de 51.765 euros outres les intérêts légaux à compter du 9 juin 2004 ;

-débouté la société Pompes Funèbres Privées de sa demande de publication ;

– condamné la société OGF à payer à la société Pompes Funèbres Privées la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– rejeté toutes les demandes autres, plus amples ou contraires des parties ;

– condamné la société OGF aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

La société PFP a formé un pourvoi contre cet arrêt.

Par arrêt du 5 juillet 2017, la Cour de cassation a statué en ces termes:

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne la société OGF à payer à la société Pompes funèbres privées la somme de 51 765 euros outre les intérêts légaux à compter du 9 juin 2004, déclare irrecevable, comme constituant une demande nouvelle, la demande tendant à la condamnation de la société OGF à payer à la société Pompes funèbres privées la somme de 1 337 034 euros à titre de dommages-intérêts, l’arrêt rendu le 11 juin 2015, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée

Condamne la société OGF aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Pompes funèbres privées la somme de 3 000 euros et rejette sa demande ‘

Aux motifs :

Visant l’article R. 2223-72 du code général des collectivités territoriales,

« Attendu, selon ce texte, que les gestionnaires des chambres funéraires doivent veiller à ce qu’aucun document de nature commerciale n’y soit visible ; que pour écarter la demande de dommages-intérêts de la société PFP, l’arrêt, après avoir relevé qu’un constat d’huissier du 20 janvier 2004 révélait qu’un signe distinctif sous forme d’un logo PFG avait été apposé à l’entrée de la chambre funéraire, retient que l’expert judiciaire a indiqué dans les conclusions de son rapport, à la suite de sa visite du 29 novembre 2005, qu’aucun signe ou marque distinctifs propres à la société OGF n’est présent tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la chambre ; Qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à démontrer l’absence de violation du principe de neutralité pour la période de 2000 à 2004, la cour d’appel a privé sa décision de base légale »;

Visant les articles 564 et 565 du code de procédure civile,

« Attendu que pour déclarer irrecevable comme nouvelle la demande de la société PFP tendant à la condamnation de la société OGF à lui payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour la période allant de 2004 à 2014, l’arrêt retient que la demande présentée en première instance tendait à la nomination d’un expert en vue de déterminer, pour l’année 2004, le pourcentage de dossiers dans lesquels la société OGF avait établi un devis et un bon de commande, avant l’admission du corps en chambre funéraire pour les convois ultérieurement assurés par elle, tandis que la demande présentée en appel tendait à la condamnation de la société OGF à lui payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts ; Qu’en statuant ainsi, alors que la demande d’indemnisation présentée en cause d’appel au titre de la période 2004 à 2014 était virtuellement comprise dans les demandes initiales de nouvelle expertise et d’indemnisation concernant la période 2000 à 2004, dont elle est la conséquence, la cour d’appel a violé les textes susvisés’.

Par arrêt du 27 février 2019, la cour d’appel de Paris a statuant sur renvoi de cassation, a confirmé le jugement sauf en ce qu’il a condamné la société OGF à payer à la société PFP la somme de 346.500 euros outre intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2004,

l’infirmant sur ce point, et statuant à nouveau, a condamné la société OGF à payer à la société PFP la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour des actes de concurrence déloyale commis entre les mois de mai 2000 et janvier 2004 avec intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2012,

Y ajoutant, a déclaré recevables les demandes formées par la société PFP pour la période entre le mois de janvier 2004 et le 11 octobre 2007, débouté la société PFP de ses demandes à l’encontre de la société OGF pour actes de concurrence déloyale à compter du mois de janvier 2004, condamné la société OGF aux dépens d’appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer à la société PFP la somme de 15.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

La société PFP a formé un pourvoi contre cet arrêt.

Par arrêt du 31 mars 2021, la Cour de cassation a statué en ces termes :

« PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour :

Casse et annule, mais seulement en ce qu’il condamne la société OGF à payer à la société Pompes funèbres privées la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour des actes de concurrence déloyale commis entre les mois de mai 2000 et janvier 2004, avec intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2012, et déboute la société Pompes funèbres privées de ses demandes à l’encontre de la société OGF pour actes de concurrence déloyale à compter du mois de janvier 2004, l’arrêt rendu le 27 février 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société OGF aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société OGF et la condamne à payer à la société Pompes funèbres privées la somme de 3 000 euros .»

Aux motifs :

« Vu l’article R. 2223-72 du code général des collectivités territoriales :

9. Selon ce texte, les gestionnaires des équipements mentionnés à l’article R. 2223-68 du même code doivent veiller à ce qu’aucun document de nature commerciale n’y soit visible, sous réserve des dispositions des articles R. 2223-71 et R. 2223-88.

10. Pour rejeter partiellement la demande relative à la chambre funéraire de [Localité 5], l’arrêt constate que le procès-verbal de constat d’huissier dressé le 20 janvier 2004 atteste de la présence du logo PFG au-dessus de la porte d’entrée de la chambre funéraire pour la période de mai 2000 à mai 2004 et indique que les locaux commerciaux PFG et la chambre funéraire partagent un parking commun. Il relève que les locaux sont néanmoins matériellement séparés, n’étant pas situés dans le même bâtiment, même si des entrées respectives donnent sur ce même parking, et que d’autres entrées sont existantes, directement sur rue. Il en déduit que n’est pas établie une confusion entre la salle d’attente du funérarium et le salon d’accueil de l’entreprise OGF. Il constate aussi que, lors de sa visite de la chambre funéraire le 30 novembre 2005, l’expert judiciaire a relevé que celle-ci était séparée des locaux « PFG » et y a noté l’affichage des opérateurs de pompes funèbres du département mais n’a pas constaté la présence de documentation publicitaire relative à l’organisation d’obsèques. Il estime que, dans les circonstances de l’espèce, il n’est pas démontré par la société PFP que l’apposition isolée du logo litigieux, sur la porte donnant sur rue et non sur la cour, crée un risque de confusion dans l’esprit des familles des défunts sur la réglementation relative à l’organisation des obsèques et la nature de la chambre funéraire, pouvant les inciter à recourir aux services de la même société, pour l’ensemble des prestations funéraires.

11. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure la faute alléguée, consistant en la présence du logo PFG, nom commercial de la société OGF, sur la porte d’entrée de la chambre funéraire dont la gestion lui est concédée, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. 

[‘]

Vu l’article R. 2223-72 du code général des collectivités territoriales :

13. Pour rejeter la demande de la société PFP relative à la chambre funéraire de [Localité 5] pour la période postérieure au mois de janvier 2004, l’arrêt retient que la société PFP formule des griefs identiques à ceux développés précédemment et que ces griefs doivent être écartés, pour les mêmes motifs que ceux déjà exposés.

14. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à exclure la faute alléguée, consistant en la seule présence du logo PFG, nom commercial de la société OGF, constante après le mois de janvier 2004, sur la porte d’entrée de la chambre funéraire de Saint-Maur-des-Fossés dont la gestion lui est concédée, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. »

Vu les dernières conclusions de la société PFP déposées et notifiées le 15 septembre 2021 par lesquelles il est demandé à la Cour de :

Vu l’article 1382 ancien du Code civil et 1240 nouveau du Code Civil,

Vu l’article 420-2 du Code de Commerce

Vu le rapport d’expertise déposé par [V] [I] [E] le 3 août 2012,

Vu les multiples dispositions visées du Code Général des Collectivités Territoriales,

Vu l’article 4 de l’arrêté du 11 janvier 1999,

Vu l’article 700 du Code de Procédure Civile,

Vu les arrêts de la Cour de Cassation des 5/7/2017 et 31/3/2021

Vu les pièces livrées aux débats,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit la responsabilité de la société OGF engagée ;

Constater les multiples fautes commises par les sociétés OGF ayant pour objet et pour effet de fausser la concurrence ;

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit la responsabilité de la société OGF engagée et en ce qu’il l’a condamnée au paiement à la société POMPES FUNEBRES PRIVEES d’une somme d’un montant de 346 500 € outre intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2004 mais uniquement au titre de la compensation du préjudice sur la période s’étalant du mois de mai 2000 au mois de décembre 2003 ;

Infirmer le jugement rendu le 8 novembre 2013 en ce qu’il a débouté la société POMPES FUNEBRES PRIVEES de ses plus amples demandes,

Constater la réitération des comportements fautifs commis par OGF postérieurement au mois de janvier 2004 ;

Condamner la société OGF au paiement à la société POMPES FUNÈBRES PRIVÉES d’une somme d’un montant de 2 831 199,15 € sur la période s’étalant du 20 janvier 2004 au 13 septembre 2021 à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice ;

A titre subsidiaire,

Condamner la société OGF au paiement à la société POMPES FUNÈBRES PRIVÉES d’une somme d’un montant de 1 766 668,27 € sur la période s’étalant du 20 janvier 2004 au 13 septembre 2021 à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice ;

En tout état de cause,

Condamner la société OGF au paiement à la société POMPES FUNÈBRES PRIVÉES d’une somme d’un montant de 30 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du CPC;

Condamner la société OGF aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions de la société OGF déposées et notifiées le 17 mars 2022 par lesquelles il est demandé à la Cour de :

Vu le jugement entrepris, rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 8 novembre 2013

Vu l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 11 juin 2015,

Vu l’arrêt de la Cour de cassation du 5 juillet 2017,

Vu l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 27 février 2019,

Vu l’arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 31 mars 2021,

Vu l’article 1240 (ancien) du Code Civil,

Vu l’article L 420-2 du Code de commerce,

Vu le rapport d’expertise de Monsieur [E] du 3 août 2012,

Constater qu’il est désormais jugé de façon irrévocable qu’il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise postérieurement à mai 2004, dans la mesure où il n’existe aucun indice d’une quelconque concurrence déloyale de la part d’OGF au préjudice de PFP et que la demande d’expertise de PFP portant sur la période allant de mai 2004 au 11 octobre 2007 est irrecevable comme prescrite ;

Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a dit que PFP ne rapportait la preuve d’aucun acte de concurrence déloyale sur la période postérieure à janvier 2004 et qu’il n’y avait par conséquent pas lieu d’ordonner une expertise complémentaire ;

Statuant à nouveau :

Declarer irrecevables comme nouvelles au sens de l’article 564 du Code de procédure civile les demandes de dommages-intérêts formées par PFP pour un montant de 794.532,29 € au titre d’un prétendu abus de position dominante et, à titre surabondant, prescrites sur la période allant de janvier 2004 au 4 juin 2016 ;

Debouter la société Pompes Funèbres Privées de la totalité de ses demandes et prétentions comme partiellement irrecevables et en tout état de cause non fondées ;

Condamner la société Pompes Funèbres Privées à régler à la société OGF la somme de 30.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

La condamner aux dépens de première instance et d’appel dont distraction, pour ces derniers, au profit de Maître Christian VALENTIE et ce dans les termes de l’article 699 du CPC.

MOTIVATION

Sur la concurrence déloyale

La société PFP reproche à OGF le non-respect de la réglementation applicable en matière funéraire :

– en l’absence de remise de devis préalable à toute opération funéraire

La société PFP soutient que la société OGF établit les devis postérieurement à l’admission en chambre funéraire, alors que l’article 4 de l’arrêté du 11 janvier 1999 prévoit que la remise gratuite des devis doit être suivie, en cas d’acceptation et avant les transports sans cercueil (ou TSC), par un bon de commande signé contenant toutes les informations énumérées par l’arrêté.

Elle affirme qu’une telle pratique fausse le jeu de la concurrence et qu’elle n’est en aucun cas limité à la période 2000-2004, mais perdure à ce jour.

La société OGF rétorque qu’aucune des décisions postérieures au jugement n’est revenue sur la problématique de la signature des devis et sur l’arrêté du 11 janvier 1999, problématique sans lien avec celle de l’apposition du logo de PGF sur l’extérieur de la chambre funéraire et le principe de neutralité de la chambre funéraire, pourtant à l’origine des cassations partielles intervenues. Elle conteste le sens et la portée que donne la société PFP aux dispositions de l’arrêté de 1999. Selon elle, seul le bon de commande du transport doit être signé par les parties et non le devis, surtout dans les cas où la famille n’a pas pu être contactée et que la demande d’admission dans la chambre funéraire émane d’une personne autre que la famille, laquelle fait ultérieurement le choix de l’opérateur funéraire.

Réponse de la Cour

Selon l’article 4 de l’arrêté du 11 janvier 1999 relatif à l’information sur les prix des prestations funéraires:

‘ Avant toute opération funéraire, un devis écrit gratuit, détaillé et chiffré selon les mêmes rubriques que la documentation générale présentée à la clientèle, fait apparaître pour chaque prestation ou fourniture, la nature et le prix TTC ainsi que le montant total du devis TTC. Il est remis à la clientèle.’

L’article 5 du même arrêté précise que ‘lorsque le devis est accepté un bon de commande est alors établi.’

Le transport sans cercueil étant une opération funéraire ainsi qu’il résulte de l’article L 2223-19 du code général des collectivités territoriales, la remise d’un devis préalable à l’admission en chambre funéraire est une obligation.

Cette obligation a pour objet de permettre aux familles de s’engager en pleine connaissance de cause à l’égard d’un opérateur, le cas échéant après comparaison avec le prix des prestations offertes par d’autres opérateurs. Tout manquement à cette obligation fausse le jeu de la concurrence et constitue un acte de concurrence déloyale.

Cette obligation ne vise évidemment pas le cas où la demande d’admission dans la chambre funéraire émane d’une personne autre que la famille, celle-ci faisant alors ultérieurement le choix de l’opérateur funéraire.

En l’espèce, il résulte du rapport d’expertise de M. [E] qui a sélectionné des convois entre le 16 février et le 11 avril 2003 (pièce 17 PFP pages 75 à 77 et 114) que ‘les procédures d’admission à la chambre funéraire qui consistent notamment en la présentation préalable de devis, et la signature des demandes d’admission et des bons de commande ne sont pas strictement respectées. OGF, gestionnaire de funérarium, admet des défunts et régularise la situation administrative a posteriori.’

L’expert a relevé que sur les convois réalisés entre le 16 février et 11 avril 2003, 5 ont été réalisés par PFP et 31 par OGF, que sur ces 31 convois, 4 avaient fait l’objet préalablement d’un contrat prévoyance obsèques déterminant dès l’origine le choix d’OGF comme opérateur, que sur les 27 restants, 6 devis ont été établis avant l’entrée en chambre funéraire et 24 postérieurement.

La régularisation de la situation a posteriori ne peut être admise dans la mesure où la famille n’est alors plus en mesure d’exercer un choix.

En conséquence, une faute constitutive d’une concurrence déloyale est établie pour la période de mai 2000 au 20 janvier 2004, ainsi que le tribunal l’a retenue.

En revanche, tel n’est pas le cas pour la période postérieure puisqu’en effet, il ne peut se déduire des déclarations du réprésentant d’OGF en 2010 (page 67-68 du rapport précité et pièce E 24 du rapport) confirmant la pratique de faire signer une demande de transfert en chambre funéraire avant la décision des proches du choix de l’organisation des obsèques, une reconnaissance de ces pratiques pour la période postérieure à 2004, objet de l’expertise.

Et la seule pièce 19 établissant l’absence de signature préalable d’un bon de commande pour le séjour d’un corps à la maison funérarire de [Localité 5] admis le 24 décembre 2018 est insuffisante pour établir un manquement généralisé pour la période postérieure au mois de janvier 2004, de nature à constituer un acte de concurrence déloyale, ce d’autant qu’en l’espèce le décès est intervenu la veille du jour de Noël.

– en l’absence de respect du principe de neutralité de la chambre funéraire

PFP soutient que la responsabilité de la société OGF est engagée du fait de la constatation par huissier de l’apposition de son logo sur la chambre funéraire avant et après 2004 et que la seule séparation physique des locaux ne suffit pas à respecter le principe de neutralité

Elle ajoute qu’il existe une grande confusion entre le rôle de la maison funéraire et l’agence PGF/OGF sur internet qui constitue une pratique anticoncurrentielle.

La société OGF rétorque que le tribunal n’a pas examiné les critères posés par la loi permettant de vérifier la neutralité, que la société PFP ne démontre pas qu’il existe des manquements à l’obligation d’exploiter la chambre funéraire de façon neutre, et que PFP n’explique pas en quoi cela affecte le jeu de la concurrence. La société OGF insiste sur le fait que la société PFP a accès à la chambre funéraire de [Localité 5] qu’elle exploite et que les locaux de la chambre funéraire sont distincts de ceux où le gestionnaire offre les autres prestations du service extérieur des pompes funèbres, et ce depuis les travaux réalisés en 1995 comme le souligne la décision du 27 juillet 2004 du Conseil de la concurrence. Elle soutient que la présence d’un logo PGF est un élément insuffisant à entrainer, en soi, un manquement d’OGF à son obligation d’exploiter la chambre funéraire de [Localité 5] de façon neutre. Enfin, elle dit que la société PFP n’apporte aucun élément permettant d’admettre l’existence d’une concurrence déloyale ayant perduré au-delà de janvier 2004, ayant retiré son logo en juillet 2004 et ayant déménagé l’agence commerciale dans des bâtiments éloignés de ceux de la chambre funéraire.

La société OGF ajoute qu’un opérateur funéraire n’a pas à exploiter une chambre funéraire dans l’anonymat et que, selon le Conseil de la concurrence, l’obligation de neutralité ne peut aller jusqu’à empêcher un opérateur de pompes funèbres de faire état de la totalité de services offerts, y compris ceux des chambres funéraires. En outre, une recherche sur Google n’indique pas seulement l’adresse de la chambre funéraire à l’internaute, mais peut également renvoyer au site de l’opérateur qui exploite la chambre funéraire.

Réponse de la Cour

Le principe de neutralité de la chambre funéraire que le gestionnaire de la chambre funérraire doit respecter, résulte du code général des collectivités territoriales en ses articles L 2223-28 qui indique que les locaux où l’entreprise ou l’association gestionnaire de la chambre funéraire offre les autres prestations énumérées à l’article L 2223-19 doivent être distincts de ceux abritant la chambre funéraire, R 2223-71 qui prévoit que la liste de l’ensemble des opérateurs des pompes funèbres du département doit y être affichée de façon visible , R 2223-72 qui fait peser sur les gestionnaires des chambres funéraires l’obligation de veiller à ce qu’aucun document de nature commerciale n’y soit visible sous réserve des dispositions des articles R 2223-71 et R 2223-88, R 2223-75 qui pose le principe de l’accès aux chambres funéraires pour le dépôt et le retrait des corps et la pratique des soins de conservation et de la toilette mortuaire.

En l’espèce, le procès-verbal de constat d’huissier du 20 janvier 2014 (pièce 20 PFP) mentionne la présence d’une enseigne en drapeau indiquant maison funéraire avec le logo ‘PFG’, nom commercial de OGF, au dessus de la porte d’entrée de la chambre funéraire et l’existence de locaux commerciaux matériellement séparés.

Il est établi que le logo n’était plus en place le 2 juillet 2004 ( procès-verbal de constat du 2 juillet 2004 pièce 7 OGF) ainsi que lors de la réunion d’expertise qui s’est tenue le 30 novembre 2005 au funérarium (pièce 8 OGF),

Il s’ensuit que la société OGF en sa qualité de gestionnaire de la chambre funéraire , n’a pas satisfait à son obligation de veiller à ce qu’aucun document de nature commerciale ne soit visible (article R 2223-72 du CGCT) jusqu’au 1er juillet 2004, violant le principe de neutralité de la chambre funéraire et se livrant ainsi à un un acte de concurrence déloyale.

En revanche, si le site internet de la chambre funéraire de [Localité 5], qui propose un lien avec le site commercial d’OGF via une recherche avec le moteur de recherche Google comportant une icône ‘produits et services’ ainsi qu’une icône ‘Devis obsèques’ (pièce 26), l’obligation de neutralité ne peut aller jusqu’à empêcher un opérateur de pompes funèbres de faire état des services offerts, en plus de celui de la chambre funéraire. Une confusion ou une violation de l’interdiction de présenter de la documentation commerciale dans la chambre funérarire de ce fait, constitutive d’un acte de concurrence déloyale, ne peut être retenue.

S’agissant des griefs relatifs aux chambres funéraires du Val de Marne, le principe de neutralité a bien été respecté .

En effet, selon les procès-verbaux de constat produits:

– s’agissant du funérarium de [Localité 4], les locaux commerciaux , s’ils sont dans le même bâtiment, ont deux portes séparées, le logo PFG n’apparaît pas sur les paneaux relatifs au funérarium et n’y est pas associé,

– s’agissant du funérarium de [Localité 7], celui-ci et les locaux commerciaux se trouvent dans deux bâtiments séparés côte à côte, qu’ils ont deux portes séparées, que les panneaux sont dictincts à l’entrée du parking et que seul un grand panneau ‘Pompes Funèbres Funespaces’ figure sur le bâtiment commercial.

– s’agissant du funérarium de [Localité 6], celui-ci et les locaux commerciaux se trouvent dans deux bâtiments séparés côte à côte, qu’ils ont deux portes séparées,que les panneaux sont dictincts et que le panneau ‘Services funéraires PFG’ ne figure pas sur le bâtiement abritant le funérarium.

– par le manquement à l’obligation de l’article R. 2223-88 du CGCT d’information de la famille avant toute commande

La société PFP invoque encore le non-respect, dans le cas où le corps a été transféré à la chambre funérarire sans que la famille n’ait fait de choix d’opérateur, de l’obligation pour le gestionnaire de la chambre funéraire avant d’accepter une commande, de recevoir de la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles un document signé par elle attestant qu’elle a pris connaissance, au préalable, de la liste mentionnée à l’article R 2223-71, obligation qu’elle estime fondamentale pour le jeu de la concurrence.

La société OGF considère que les informations affichées dans la chambre funéraire permettent aux familles d’avoir accès aux coordonnées des différents opérateurs funéraires, dont PFP, susceptibles de réaliser les prestations d’obsèques postérieures au passage en chambre funéraire et que la société PFP ne rapporte pas la preuve du non-repect des obligations énoncées par l’article R. 2223-88 du CGCT.

Réponse de la Cour

La PFP ne justifie pas du manquement de la société OGF à son obligation d’informer les familles que celles-ci peuvent recourir aux services de l’opérateur de leur choix, en leur fournissant la liste des opérateurs, étant observé qu’il a été constaté que les informations affichées dans la chambre funéraire permettent d’avoir accès aux coordonnées des différents opérateurs.

– par la confusion entretenue par OGF sur la notion de « chambre funéraire » 

La société PFP soutient que la société OGF confond équipement qu’est la chambre funéraire et prestation de service, disant que le prestataire de service est l’opérateur funéraire. Elle estime que cette confusion aux yeux du public et des prescripteurs porte atteinte à l’obligation de neutralité et à la libre concurrence.

Elle soutient que par ce biais, la société OGF détourne les utilisateurs de la chambre funéraire vers son opérateur funéraire privé.

La société OGF rétorque que la neutralité est assurée par la tenue des opérateurs et du véhicule utilisé qui ne comporte aucun logo OGF. Selon elle, considérer la chambre funéraire comme un équipement et non comme un service constitue un déni des services qu’elle est habilitée à fournir en tant qu’exploitant d’une chambre funéraire. L’exploitation d’une chambre funéraire, le transport et l’admission en chambre funéraire sont des prestations de service extérieures des pompes funèbres que peut proposer un opérateur funéraire. Elle ajoute que cette question adéjà fait l’objet d’un moyen de cassation rejeté sans motivation comme n’étant pas de nature à entrainer la cassation.

Réponse de la Cour

La seule circonstance que le transport sans cercueil puisse être réalisé sur appel des familles à une agence commerciale, ou sur appel à la chambre funéraire ne peut être imputée à faute à la société OGF. En effet, une prestation de transport du corps sans cercueil peut être réalisée par la chambre funéraire sous réserve de respecter le principe de neutralité. Or, il n’est pas établi que tel ne soit pas le cas à compter du 2 juillet 2004, date à laquelle le logo commercial à l’entrée de la chambre funéraire a été supprimé . En conséquence, aucune faute ne peut être retenue postérieurement à cette date.

– par le maintien de conventions tacites avec les prescripteurs, d’ offres de services et d’offres d’avantages en contradiction des articles L.2223-33 et -35 du CGCT

La société PFP reproche à OGF de maintenir des conventions illicites avec les établissements de santé puisque cette dernière a établi une tarification spéciale très faible (de l’ordre de 60 à 75 % moins cher en fonction de la prestation) communiquée annuellement aux hopitaux et aux maisons de santé tant pour le séjour en chambre funéraire mais aussi pour le transport sans cercueil qui est une opération funéraire.

Elle soutient que la fiche tarifaire personnalisée à destination des établissements de santé a une valeur contractuelle et constitue une offre de contracter, en violation de l’article L 2223-33 du CGCT .

Elle ajoute qu’OGF propose des tarifs préférentiels de manière anticipée à un établissement de santé et ainsi un avantage financier pour obtenir d’une personne qui, à l’occasion de son activité professionnelle, a connaissance d’un décès, qu’elle lui fasse connaître au mépris des dispositions de l’article L 2223-35 du CGCT alors que les concurrents sont tributaires des tarifs qu’OGF leur applique.

Elle considère que cette pratique, en ce qu’elle détourne les convois vers OGF, est anticoncurrentielle.

Elle soutient également que, malgré l’interdiction du démarchage ( article L 2223-33 du CGCT ), la société OGF continue à se rendre dans les établissements de santé et à leur proposer des tarifs préférentiels. Elle dit que les établissements de santé, les professionnels de santé, les maisons de retraite et la chambre funéraire encouragent avec insistance, voire contraignent via diverses man’uvres, à contracter avec l’opérateur OGF et non avec un concurrent.

La société OGF rétorque que les conventions ont été résiliées en 1995 comme le relève le Conseil de la concurrence et ont pris fin, pour les dernières, en 1998, PFP ne versant aucun élément pour les années postérieures à 1998.

Elle ajoute que PFP ne peut tirer aucune irrégularité de la pratique des tarifs différents concernant les transports sans cercueil et les frais d’admission pour les établissements de santé, d’une part, et pour les familles, d’autre part, dès lors que ce sont bien les établissements de santé qui, à la fin, supportent le coût du transport sans cercueil et de l’admission en chambre funéraire lorsqu’ils sont à l’origine de la demande de transfert.

Elle soutient que cette pratique de prix différenciés n’est aucunement interdite et n’est pas susceptible de constituer un acte de concurrence déloyale.

S’agissant du démarchage, elle conteste les allégations sans preuve de PFP et fait valoir que cette dernière intervient autant qu’elle dans les maisons de retraite et de santé qu’OGF, proportionnellement à sa part de marché selon le rapport de l’expert [E].

Réponse de la Cour

L’article L 2223-33 du CGCT dans sa version en vigueur au 21 décembre 2008, dispose:

‘ A l’exception des formules de financement d’obsèques, sont interdites les offres de services faites en prévision d’obsèques ou pendant un délai de deux mois à compter du décès en vue d’obtenir ou de faire obtenir, soit directement, soit à titre d’intermédiaire, la commande de fournitures ou de prestations liées à un décès. Sont interdites les démarches à domicile ainsi que toutes les démarches effectuées dans le même but sur la voie publique ou dans un lieu ou édifice public ou ouvert au public.’

Il n’est pas établi que la pratique d’OGF de conventions avec les maisons de santé ait perduré après 1998.

En revanche, il est constant qu’un tarif particulier qui leur est adressé annuellement par l’exploitant du funérarium, leur est appliqué en cas de transfert du corps sans cercueil à l’initiative de ces établissements ( sans réponse des familles pendant un délai de 10 heures), étant observé que dans ce cas, la prestation est facturée directement à la maison de santé.

Au regard de ces éléments, il ne peut être retenu que la fiche tarifaire personnalisée à destination des établissements de santé soit constitutive d’une offre de contracter en violation de l’article L 2223-33 du CGCT .

La pratique des tarifs différents concernant les transports sans cercueil et les frais d’admission pour les établissements de santé, dans la mesure où ces coûts sont supportés par les établissements, n’est pas susceptible de constituer un acte de concurrence déloyale.

En outre, il ne peut se déduire de cette pratique de prix différents la violation de l’article L 2223-35 qui dispose :

‘(…)

Est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende le fait de proposer, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour obtenir d’une personne qui, à l’occasion de son activité professionnelle, a connaissance d’un décès, qu’elle fasse connaître aux entreprises ou associations fournissant les prestations énumérées à l’article L. 2223-19 la survenance d’un décès ou qu’elle recommande aux familles les services d’une entreprise ou association déterminée.

(…).’

En effet, le prix pratiqué par le gestionnaire de la chambre funéraire à l’égard des établissements de santé ne peut constituer un avantage en échange de l’information d’un décès ou d’une recommendation de ses services en tant qu’opérateur alors que ces établissements n’interviennent qu’en l’absence de manifestation de la famille et uniquement pour le transport et l’admission du corps dont ils supportent le coût.

La circonstance alléguée que les établissements de santé, les professionnels de santé et les maisons de retraite encouragent avec insistance, voire contraignent via diverses man’uvres, à contracter avec l’opérateur OGF et non avec un concurrent, à la supposer établie, ne peut être imputée à faute à OGF.

Les faits de démarchage d’OGF dans les établissements de santé au sens de l’article L 2223-33 du CGCT ne sont pas établis. A cet égard, les pièces 27 et 28 produites par PFP mettant un terme aux conventions signées avec les maisons de santé(pièce 27) et faisant état d’une réunion en maison de retraite puis avec le commissariat de police pour la mise en place de la procédure relative au transfert des corps à visage découvert, sont insuffisantes à cet égard.

En outre, l’expert [E] (page 49) conclut s’agissant des maisons de retraite et de santé: ‘il parait possible que OGF bénéficie ou ait bénéficié d’une situation légèrement privilégiée qui serait aussi bien la conséquence des habitudes antérieures que de l’obligation légale, de ne pas conserver un corps au-delà de 24 heures. Mais les chiffres et parts de marché ne montrent pas une situation favorisant particulièrement OGF. ‘

En conséquence, le moyen pris de la violation par OGF des articles L.2223-33 et L.2223-35 du CGCT est rejeté.

– par les relations privilégiées d’OGF avec les prescripteurs

La société PFP soutient que la situation est figée puisque les pratiques illicites perdurent et cantonnent la société PFP a des parts de marché résiduelles qui diminuent de 3 % sur les catégories 1 et 2 (décès de [Localité 5] et des communes avoisinantes). Elle affirme qu’OGF a répercuté les prix du transport sans cercueil auprès des familles sans jamais en rendre destinataire les établissements. Enfin, elle ajoute que la survivance de ce type de relations privilégiées est également établie auprès des services de police ou du SAMU qui ne proposent que les numéros d’OGF ou réservent directement à la chambre funéraire, ce même lorsqu’un contrat de prévoyance obsèques a été conclu avec un autre opérateur. Elle en déduit que cette situation ne permet pas d’établir un marché concurrentiel équitable.

La société OGF rétorque qu’en l’absence de pratiques concertées, les comportements adoptés par les interlocuteurs de la chambre funéraire (établissements de santé, maisons de retraite, services de police, SAMU, etc.) ne peuvent lui être imputés en tant que gestionnaire de la chambre funéraire. Elle estime que l’on ne saurait lui reprocher les éventuelles habitudes ou préférences qu’ont certains services ou établissements de soins à son égard, et qui s’expliquent par l’historique du marché sur lequel elle a été jusqu’à son ouverture à la concurrence l’unique opérateur.

Réponse de la Cour

La répercussion alléguée du prix du transport sans cercueil auprès des familles sans jamais en rendre destinataire les établissements n’est pas établie.

Par ailleurs, la préférence de certains interlocuteurs en faveur de la société OGF ne peut lui être imputée à faute.

Enfin, il convient de rappeler à nouveau les conclusions de l’expert s’agissant des maisons de retraite et de santé : ‘il parait possible que OGF bénéficie ou ait bénéficié d’une situation légèrement privilégiée qui serait aussi bien la conséquence des habitudes antérieures que de l’obligation légale, de ne pas conserver un coprps au-delà de 24 heures. Mais les chiffres et parts de marché ne montrent pas une situation favorisant particulièrement OGF. ‘

En conséquence, aucune faute ne peut être retenue à l’encontre de la société OGF à raison de relations privilégiées avec les prescripteurs.

Sur l’abus de position dominante

La société PFP reproche à la société OGF un abus de position dominante sur le fondement de l’article L 420-2 du code de commerce.

Sur la recevabilité de la demande

La société OGF soutient que la société PFP, qui n’a agi depuis 2012 qu’en réparation d’actes de concurrence déloyale résultant d’un non-respect de le règlementation applicable aux opérateurs funéraires,sur le fondement de l’article 1382 (ancien) du code civil, présente pour la première fois devant la Cour des demandes indemnitaires tendant à obtenir réparation d’un prétendu abus de position dominante sur la période allant de janvier 2004 à mai 2021 d’un montant de 794 532,29 euros.

La société OGF estime cette demande irrecevable comme nouvelle en cause d’appel, s’agissant d’une pratique anticoncurrentielle sanctionnée par l’article L 420-2 du code de commerce, par nature distincte de faits de concurrence déloyale fondé sur l’article 1240 du code civil.

La société PFP rétorque qu’il s’agit d’un moyen nouveau mais non de prétentions nouvelles puisqu’elle a formulé sa demande en réparation du préjudice subi du fait des pratiques anticoncurrentielles dès la première instance en 2013. Elle soutient qu’une demande visant les pratiques anticoncurrentielles est plus large que la concurrence déloyale, comprenant notamment les abus de position dominante de OGF via le détournement des convois funéraires par la proposition de prix prédateurs, l’application de prix discriminants pour les concurrents contraints d’utiliser la chambre funéraire. Elle ajoute qu’en 2013, le fondement pour le régime indemnitaire de ces pratiques était le droit commun, soit l’article 1382 du code civil.

Réponse de la Cour

Selon l’article 564 du code de procédure civile, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions. Mais l’article 563 du même code dispose que les parties peuvent invoquer en appel des moyens nouveaux.

L’article 565 précise que la prétention n’est pas nouvelle dès lors qu’elle tend aux mêmes fins que celle soumise aux premiers juges, même si son fondement juridique est différent.

En l’espèce, devant le tribunal la société PFP a invoqué des pratiques anticoncurrentielles dont elle a demandé réparation sur le fondement de l’article 1382 du code civil.

Devant la cour, elle invoque des pratiques anticoncurrentielles prises d’un abus de position dominante sur le fondement de l’article L 420-2 du code de commerce dont elle demande réparation, en reprochant à OGF de capter les convois par la pratique de prix prédateurs et de prix discriminatoires pour les concurrents contraints d’utiliser les services de la chambre funéraire. Elle sollicite du fait de l’entrave au développement commercial qu’elle a subi du fait de ces pratiques, la somme de 794 532,29 euros en soutenant qu’elle aurait dû gagner 153 convois sur 17 ans, de 2004 à 2020.

Seul le moyen de droit est nouveau mais il ne s’agit pas d’une nouvelle demande s’agissant des mêmes faits prolongés dans le temps et la demande tendant aux mêmes fins, la réparation du préjudice subi du fait des pratiques de la société OGF.

La demande fondée sur l’abus de prosition dominante est recevable.

Sur le fond de la demande

Sur l’existence d’une position dominante

La société PFP soutient qu’avec l’ouverture à la concurrence, le monopole d’OGF sur le Val-de-Marne s’est transformé en position dominante sur le marché des services extérieurs de pompes funèbres du Val-de-Marne, s’appuyant à cet égard sur la décision du Conseil de la concurrence du 27 juillet 2004, et sur les rapports des experts judiciaires, [I] [U] et [M] [E].

Elle estime que la position de la société OGF sur le marché lui permet d’agir de manière indépendante sur le marché indifféremment du comportement des autres acteurs de ce marché (pratique de prix préférentiels très bas pour certains établissements, et filiales pour la fourniture des accessoires nécessaires).

La société PFP ajoute que la société OGF occupe une position extrêmement dominante voire exclusive (80,5 % de parts de marché) sur le marché des transports sans cercueil sur le Val-de-Marne, bénéficiant d’un quasi-monopole de fait puisqu’elle confirme être la seule société appelée lorsqu’un décès intervient sur la voie publique, en maison de retraite et les maisons de santé ne disposant pas de chambre mortuaire. Elle estime que cette position lui permet de pratiquer des prix préférentiels envers ces dernières.

La société OGF rétorque que PFP ne démontre pas l’existence d’une position dominante de PGF sur le marché des services extérieurs de pompes funèbres du Val-de-Marne puisque PFP se fonde sur des constats opérés par le Conseil de la concurrence et les rapports de Messieurs [E] (2000 ‘ 2004) et [U] (1992 ‘ 1995) qui portent sur une période antérieure à celle visée par ses prétentions, périodes qui ne sont pas transposables à la période allant de 2004 à 2021. Elle estime, d’après les données de l’INSEE, sa part de marché aux alentours de 36,5 % au 31 mars 2021.

Elle critique le choix de PFP de considérer le marché des transports sans cercueil comme étant un marché pertinent, en l’absence de démonstration qu’il s’agirait d’un marché pertinent à part entière.Elle estime que la société PFP déforme les données, en utilisant celles de 1999 à 2004 pour la période allant de 2004 à 2021, puisque que si elle assurait 80,5 % des transports sans cercueil sur le département du Val de Marne entre 2000 et 2004, PFP ne démontre pas que cette part de marché s’est maintenue entre 2004 et 2021.

Réponse de la Cour

L’article L420-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable dispose :

‘Est prohibée, dans les conditions prévues à l’article L. 420-1, l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises d’une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées.

Est en outre prohibée, dès lors qu’elle est susceptible d’affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises de l’état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées, en pratiques discriminatoires visées au I de l’article L. 442-6 ou en accords de gamme.’

L’appréciation d’une position dominante passe en premier lieu par la délimitation d’un marché pertinent et en second lieu, par l’existence de critères de domination sur ce marché.

Le marché pertinent se définit comme le lieu sur lequel se confrontent l’offre et la demande de produits ou de services qui sont considérés par les acheteurs comme substituables entre eux mais non substituables aux autres biens ou services offerts.

En l’espèce, l’existence d’un marché pertinent peut être retenu sur le marché des services extérieurs de pompes funèbres du Val-de-Marne ansi qu’il résulte de la décision n°04-D-37 du 27 juillet 2004 relative à des pratiques mises en oeuvre sur le marché des pompes funèbres dans le Val-de Marne. En revanche, l’existence d’un marché pertinent sur le marché des transports sans cercueil sur le Val-de-Marne n’est pas établie, aucune démonstration n’étant faite à cet égard.

En second lieu, il convient de rechercher l’existence de critères de domination sur ce marché.

La position dominante concerne une situation de puissance économique détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au maintien d’une concurennce effective sur un marché en cause en lui fournissant la possibilité de comportements indépendants dans une mesure appréciable vis-àvis de ses concurrents, de ses clients, et finalement des consommateurs.

La part de marché contrôlé par l’entreprise constitue un critère essentiel de l’existence d’une position dominante.

En l’espèce, PFP ne démontre pas l’existence d’une position dominante de PGF sur le marché des services extérieurs de pompes funèbres du Val-de-Marne sur la période en cause allant de 2004 à 2021, se bornant à produire des éléments portant sur des périodes antérieures ne permettant pas d’apprécier la part de marché de PGF sur la période litigieuse.

En conséquence, les demandes présentées au titre de l’abus de position dominante sont rejetées.

Sur le préjudice

Sur le préjudice subi du fait de la perte des convois par la société PFP entre 2000 et le 20 janvier 2004 et postérieurement au 20 janvier 2004

La société PFP estime qu’entre 2000 et 2004, il y a eu 884 convois passant par la chambre funéraire, sachant que la part de marché d’OGF augmente de 30% en moyenne, la société PFP considère que la société OGF a détourné 265 (30% x 884) convois. Étant donné que sur cette période la société PFP possédait 29% des parts de marché, la société OGF a détourné 77 (29% x 265) convois de PFP. Le prix moyen d’un convoi étant de 4.500 €, la société PFP estime avoir subi un préjudice de 346.500 €.

S’agissant de la période postérieure, la société PFP estime que la question de la prescription de ces actes a été tranchée par la Cour de cassation dans son arrêt du 5 juillet 2017 confirmant l’interruption de la prescription pour les préjudices postérieurs au 20 janvier 2004. La société PFP considère qu’entre 2002 et 2018 sa part de marché sur les convois de [Localité 5] a légèrement diminué passant de 11% à 9,7%, et ce malgré la stagnation du nombre de concurrents. La société PFP estime que pour l’année 2020, du fait du de la pandémie (Covid 19), du nombre de décès dans les hôpitaux et maisons de retraite et des agissements d’OGF, la part de marché de la société PFP est tombée à 7,4% soit une baisse de 3,6% par rapport à sa part de marché moyenne sur la période. Ainsi, la société PFP soutient qu’il était très raisonnable de retenir la perte de convois en relation avec les agissements illicites de la société OGF à 22 par an (en se fondant sur les travaux d’expertise judiciaire) comme s’étant poursuivi à compter du 20 janvier 2004 et jusqu’à ce jour ; chiffre auquel il convient d’ajouter 12 convois détournés supplémentaires pour l’année 2020 (351 décès x 3,6 %). Elle estime ainsi à 402 le nombre de convois détournés sur la période au prix unitaire de 4.500 € le convoi, avec prise en compte de l’inflation et estime ainsi son préjudice à la somme de 2.036.666,86 € HT au 13 septembre 2021.

La société OGF, estimant qu’elle n’a commis aucun acte de concurrence déloyale, demande à la Cour de rejeter les prétentions de PFP et notamment l’allocation d’une somme de 346.500 € à titre de dommages- intérêts pour la période 2000/2004.

A titre surabondant, la société OGF conteste le quantum du préjudice invoqué par PFP, considérant que PFP ne rapporte pas la preuve de son préjudice et utilise une méthode de calcul biaisée, faisant valoir que les parts de marché de PFP sont supérieures lorsque les convois transitent par la chambre funéraire (part de marché de 9,9 % en moyenne) que lorsqu’ils n’y transitent pas (part de marché de 4,6 % en moyenne). Elle ajoute que rien ne permet d’établir que PFP aurait été en charge d’une partie des convois prétendument détournés étant donné les faibles investissements que PFP consacre à son activité et observe que l’expert n’a aucunement procédé à une évaluation de quelconques pertes de parts de marché de PFP.

La société OGF estime que le nombre de convois invoqué par PFP (77) sur la période 2000 à 2004 est exagéré puisqu’il correspond à la totalité des convois réalisés par PFP entre 2000 et 2002 compris. De plus, elle estime que le préjudice ne doit pas être évalué avec le chiffre d’affaires, mais avec la marge moyenne potentiellement perdue par PFP. La société OGF, sur la base du rapport [E] retient une marge nette de PFP par convoi de 3.176 €.

Elle considère que la société PFP n’a subi aucun préjudice réel pour la période postérieure au 20 janvier 2004. Toutefois, elle critique le montant de l’indemnisation demandée par PFP comme reposant sur une extrapolation sur la période de janvier 2004 à mai 2021, de la condamnation prononcée en première instance sur la période mai 2000 à janvier 2004. Elle estime que le marché et les parts de marché des différents acteurs ont considérablement changé entre la période 2000-2004 et la période postérieure au 20 janvier 2004. Elle observe que la société PFP continue en retenant la somme de 4.500 € par convoi, d’utiliser la perte de chiffre d’affaires brut toutes charges comprises au lieu de la marge nette.

Réponse de la Cour

Il a été retenu le manquement de la société OGF à l’obligation règlementaire de remettre aux familles un devis préalablement à toute opération funéraire pour la période de mai 2000 au 10 janvier 2004, faussant le jeu de concurrence.

Il a été également retenu une atteinte au principe de neutralité de la chambre funéraire entre les mois de mai 2000 et le 20 janvier 2004, qui a subsisté jusqu’au 1er juillet 2004.

En revanche, aucun acte de concurrence déloyale n’est retenu postérieurement à cette date.

S’agissant de la réparation du préjudice sollicitée au titre de la perte des convois, au regard de l’expertise judiciaire mettant en évidence que pour un tiers des convois, un devis préalable n’a pas été soumis aux familles par la société OGF, de la part de marché des sociétés OGF et PFP, respectivement de 63% et de 11%, de la période considérée, du nombre de convois passant par la chambre funéraire entre 2000 et 2004 (884) et de la marge brute réalisée par la société PFP par convoi soit la somme de 3451 euros retenue pas l’expert, le montant du préjudice subi s’élève à la somme de 110 432 euros, soit 32 convois détournés (un tiers des 97 convoisde PFP) x 3451€ pour la période de mai 2000 au 20 janvier 2004,

Il sera ajouté pour la période du 20 janvier au 1er juillet 2004 au titre de la persistance de la violation du principe de neutralité de la chambre funéraire, une somme prorata temporis de 13 804 euros correspondant à 4 convois détournés.

En revanche, pour la période postérieure, aucun acte de concurrence déloyale ayant été mis en évidence, aucune somme ne sera donc allouée.

Sur le préjudice subi du fait de l’entrave au développement commercial de la société à compter du 20 janvier 2004

La société PFP soutient qu’en plus d’avoir perdu des convois, les pratiques anticoncurrentielles d’OGF l’ont empêchée de se développer et de gagner des parts de marché. A l’origine de l’ouverture du marché en 1992 la société PFP avait 1,5% de part de marché et a atteint en 1995 10% de part de marché. Sur la base du rapport d’expert de M. [I] [U], la société PFP estime qu’en 1998 sa part de marché aurait dû être de 24% et que son activité aurait augmenté d’un convoi par an entre 2004 et 2020, ce qui fait 153 convois sur cette période. Ainsi la société PFP estime à 2.831.199,15 euros son préjudice entre le 20 janvier 2004 et le 13 septembre 2021 et subsidiairement à la somme de 1.766.668,27 euros sur la base de la marge brute.

La société OGF considère que PFP fonde son raisonnement sur les données de marché issues du rapport de l’expert [U] qui portait sur la période allant de 1992 à 1995 soit lors de l’ouverture du marché à la concurrence.

Réponse de la Cour

S’agissant de la réparation du préjudice sollicitée au titre de l’entrave au développement commercial de PFP du fait de la concurrence déloyale subie depuis le 20 janvier 2004 jusqu’au 1er juillet 2004, il doit être retenu au vu des éléments du dossier que ces pratiques ont également empêché cette société de gagner des parts de marché à hauteur d’un demi convoi. La somme de 1 726 euros lui sera allouée à titre du trouble commercial.

En conséquence, les actes de concurrence déloyale subis par la société PFP sur la période de mai 2000 au 1er juillet 2004 seront justement réparés par la somme totale de 125 962 euros que la société OGF devra lui verser

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

La société OGF qui succombe, est condamnée aux dépens d’appel ainsi qu’à payer à la société PFP la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Elle est déboutée de sa demande sur ce fondement.

Les sommes allouées à ce titre par le tribunal sont confirmées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Vu l’arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale financière et économique du 31 mars 2021,

Dans la limite de sa saisine,

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a condamné la société OGF à payer la somme de 346 000 euros outre intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2004,

L’infirme sur ce point,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société OGF à payer à la société PFP la somme de 125 962 euros à titre de dommages-intérêts pour des actes de concurrence déloyale du mois de mai 2000 au 1er juillet 2004 avec intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2012 ;

Déboute la société PFP de ses demandes à l’encontre de la société OGF pour des actes de concurrence déloyale postérieurs au 1er juillet 2004 ;

Déclare la société PFP recevable mais non fondée en sa demande au titre de l’abus de psoition dominante ;

L’en déboute ;

Condamne la société OGF aux dépens d’appel ainsi qu’à payer à la société PFP la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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