Ordonnance N°23/85
N° RG 23/00091 – N° Portalis DBVH-V-B7H-IWFI
J.L.D. NIMES
28 janvier 2023
X se disant [D]
C/
LE PREFET DU VAR
COUR D’APPEL DE NÎMES
Cabinet du Premier Président
Ordonnance du 30 JANVIER 2023
(Au titre des articles L. 742-4 et L 742-5 du CESEDA)
Nous, Madame Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d’Appel de NÎMES, conseiller désigné par le Premier Président de la Cour d’Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l’Asile (CESEDA), assisté de Mme Emmanuelle PRATX, Greffière,
Vu l’interdiction du territoire national prononcée le 08 janvier 2020 par la cour d’appel de Toulouse notifiée le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 28 novembre 2022, notifiée le même jour à 16h40 concernant :
X se disant M. [J] [D]
né le 26 Août 1981 à [Localité 3] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
Vu l’ordonnance en date du 1er décembre 2022 rendue par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes portant prolongation du maintien en rétention administrative de la personne désignée ci-dessus ;
Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 27 janvier 2023 à 10h08, enregistrée sous le N°RG 23/00494 présentée par M. le Préfet Var ;
Vu l’ordonnance rendue le 28 Janvier 2023 à 14h09 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES sur troisième prolongation, à titre exceptionnel qui a :
* Rejeté les exception de nullité soulevées
* Ordonné pour une durée maximale de 15 jours commençant à l’expiration du précédent délai de 30 jours déjà accordé, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, de X se disant M. [J] [D];
* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l’expiration d’un délai de 15 jours à compter du 27 janvier 2023 à 16h40 ;
Vu l’appel de cette ordonnance interjeté par X se disant M. [J] [D] le 28 Janvier 2023 à 15h50 ;
Vu l’absence du Ministère Public près la Cour d’appel de NIMES régulièrement avisé ;
Vu la présence de Monsieur M. [C] [Y], représentant le Préfet VAR, agissant au nom de l’Etat, désigné pour le représenter devant la Cour d’Appel en matière de Rétention administrative des étrangers, entendu en ses observations ;
Vu la comparution de X se disant M. [J] [D], régulièrement convoqué ;
Vu la présence de Me Annélie DESCHAMPS, avocat de X se disant M. [J] [D] qui a été entendu en sa plaidoirie ;
MOTIFS
Monsieur X se disant [J] [D] a été condamné le 8 janvier 2020 par jugement contradictoire de la Cour d’appel de Toulouse à la peine complémentaire d’interdiction du territoire national pendant cinq ans.
A [Localité 4], le 27 novembre 2022, à 17h00, Monsieur X se disant [J] [D] était placé en garde à vue. Il lui était notifié le 28 novembre 2022 à 16h40, un arrêté préfectoral du même jour le plaçant en rétention administrative.
Par ordonnance prononcée le 1er décembre 2022 à 11h22, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a rejeté les exceptions de nullité soulevées ainsi que les moyens présentés par Monsieur X se disant [J] [D] et ordonné la prolongation de sa rétention administrative pour vingt-huit jours, décision confirmée par la Cour d’Appel le 2 décembre 2022.
Sur nouvelle requête de la Préfecture et par ordonnance du Juge des libertés et de la détention en date du 28 décembre 2022 confirmée par la Cour d’appel le 29 décembre 2022, sa rétention administrative a été encore prolongée de trente jours supplémentaires.
Sur requête du Var, le 26 janvier 2023, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a ordonné une troisième prolongation de cette rétention pour 15 jours, et ce par ordonnance du 28 janvier 2023 à 14h09.
Monsieur X se disant [J] [D] a relevé appel de cette ordonnance le 28 janvier 2023 à 15h50.
Sur l’audience, il indique que :
– il a des justificatif à l’appui de ses dires sur son âge d’arrivée en France à l’âge de dix ans,
– il deux enfants, et une femme espagnole qui ne parle pas français mais leur enfant est français ; il est cependant prêt à partir en Espagne,
– il confirme avoir vu un médecin et avoir un traitement pour sa pathologie, au CRA.
Son avocat soutient que :
– il a des justificatifs de sa situation,
– il n’est pas l’auteur des infractions pour lesquelles il a été condamné à une ITN,
– la dégradation de l’état de santé au CRA car il souffre d’un état d’épilepsie,
Le Préfet du Var est représenté à l’audience. Il explique que le retenu n’a pas d’élément nouveau à l’appui des dires du retenu sur son identité et son usurpation d’identité.
SUR LA RECEVABILITE DE L’APPEL :
L’appel interjeté par Monsieur X se disant [J] [D] sur une ordonnance rendue le 28 janvier 2023 à 14h09 a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Il est donc recevable.
SUR LES MOYENS NOUVEAUX ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D’APPEL:
L’article L.743-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose que « à peine d’irrecevabilité, prononcée d’office, aucune irrégularité antérieure à une audience à l’issue de laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la mesure ne peut être soulevée lors d’une audience ultérieure ».
L’article 563 du Code de Procédure Civile ajoute encore que « pour justifier en appel les prétentions qu’elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »
En l’espèce, ne restent recevables que le moyen d’irrecevabilité de la requête en prolongation sur laquelle l’ordonnance dont appel a statué et les moyens de fond, même nouveaux en appel.
Monsieur X se disant [J] [D] soulève l’irrégularité de la requête en prolongation de la mesure pour défaut de qualité de son signataire. Ce moyen est recevable. Il soulève également un moyen de fond tenant à une erreur sur son identité, moyen de fond également recevable.
SUR LA RECEVABILITE DE LA REQUETE EN PROLONGATION :
– en ce que son signataire n’aurait pas compétence pour ce faire :
Monsieur X se disant [J] [D] soutient qu’il appartient au juge judiciaire de vérifier la compétence du signataire de la requête en prolongation et la mention des empêchements éventuels des délégataires de signature. En l’espèce, le signataire de la requête ne serait pas compétent.
C’est à tort qu’il est argué de l’incompétence du signataire de la requête en prolongation signée pour le Préfet du Var le 26 janvier 2023 par Monsieur [Z] [V], secrétaire général, alors qu’est précisément joint à cette requête un arrêté préfectoral en date du 28 avril 2022 lui portant délégation de signature.
L’apposition de sa signature sur ladite requête présuppose l’empêchement des autres personnes ayant délégation par préférence, le retenu ne démontrant pas le contraire alors qu’en application de l’article 9 du code de procédure civile c’est bien à lui qu’il incombe d’apporter la preuve du bienfondé de ses prétentions.
Le moyen d’irrecevabilité doit donc être écarté.
SUR LE FOND :
L’article L742-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile en son alinéa 5 dispose que, «à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L.742-4 lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement,
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 9° de l’article L.611-3 ou du 5° de l’article L.631-3,
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L.754-1 et L.754-3 ,
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application du huitième alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède pas alors quatre-vingt-dix jours. »
Ces dispositions doivent s’articuler avec celles de l’article L.741-3 du même code, selon lesquelles il appartient au juge judiciaire d’apprécier la nécessité du maintien en rétention et de mettre fin à la rétention administrative, lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient : « « Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet. »
En l’espèce, Monsieur X se disant [J] [D] fait l’objet d’une interdiction judiciaire du territoire national. Il ne peut ainsi prétendre se maintenir sur le territoire français.
Le retenu affirme que l’interdiction ne le concerne pas car il y a eu une usurpation d’identité au moment de sa condamnation ; qu’il n’était pas présent à ce jugement et qu’il ne s’applique pas à sa personne. Ce moyen a été soulevé lors de la première prolongation de sa mesure et il n’y a pas été fait droit par le juge des libertés et de la détention ni par la Cour d’appel, le 29 décembre 2022.
A ce jour, Monsieur X se disant [J] [D] n’apporte pas d’élément nouveau de nature à faire valoir une usurpation d’identité, aucune plainte n’ayant été déposée, aucune enquête n’a eu lieu pour permettre de vérifier ses dires. La seule circonstance selon laquelle les noms de ses parents, sur son acte de naissance, ne sont pas ceux mentionnés dans la décision de justice contestée ne suffit pas, en l’absence d’enquête ayant abouti à ce sujet, à caractériser l’usurpation dont il se dit victime. Ce moyen sera donc rejeté.
Monsieur X se disant [J] [D] a été reconnu par les autorités consulaires d’Algérie, le 29 décembre 2022 comme étant un de leur ressortissant, après audition du 21 décembre 2022. Un laisser passer a donc été délivré par ces autorités, le 17 janvier 2023, après obtention du routing par la Préfecture.
Monsieur X se disant [J] [D] a refusé l’embarquement prévu le 26 janvier 2023, faisant ainsi sciemment obstruction à l’exécution de la mesure d’éloignement.
En conséquence, il convient de confirmer l’ordonnance du Juge des libertés et de la détention en ce qu’il a prolongé la rétention administrative de Monsieur X se disant [J] [D] de quinze jours supplémentaires.
SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE MONSIEUR X se disant [J] [D] :
Monsieur X se disant [J] [D], présent irrégulièrement en France est dépourvu de passeport et de pièces administratives pouvant justifier de son identité et de son origine de telle sorte qu’une assignation à résidence judiciaire est en tout état de cause exclue par les dispositions de l’article L743-13 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Monsieur X se disant [J] [D] a refusé d’embarquer sur le vol fixé afin d’exécuter la mesure d’éloignement. Le procès verbal dressé à cette occasion fait état du refus de l’intéressé de quitter le territoire national.
L’état de santé de Monsieur X se disant [J] [D] n’a pas été jugé contraire jusqu’ici à la mesure de rétention.
Monsieur X se disant [J] [D] est l’objet d’une mesure d’éloignement en vigueur, telle que précitée, et qui fait obstacle à sa présence sur le sol français.
Il s’en déduit que la prolongation de sa rétention administrative demeure justifiée et nécessaire aux fins qu’il puisse être procédé effectivement à son éloignement.
Il convient par voie de conséquence de confirmer l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,
Vu l’article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles L.741-1, L742-1 à L743-9 ; R741-3 et R.743-1 à L.743-19 et L.743-21 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
DECLARONS recevable l’appel interjeté par X se disant M. [J] [D] ;
CONFIRMONS l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
RAPPELONS que, conformément à l’article R.743-20 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].
Fait à la Cour d’Appel de NÎMES,
le 30 Janvier 2023 à
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
‘ Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 2] à X se disant M. [J] [D].
Le à H
Signature du retenu
Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel à :
X se disant M. [J] [D], pour notification au CRA
Me Me Annélie DESCHAMPS, avocat
M. Le Préfet VAR
M. Le Directeur du CRA de [Localité 2]
Le Ministère Public près la Cour d’Appel de NIMES
M / Mme Le Juge des libertés et de la détention