Sommaire
25 janvier 2023
Cour d’appel de Rouen
RG n°
21/02153
1ère ch. civile
Texte de la décision
N° RG 21/02153 – N° Portalis DBV2-V-B7F-IY7Q
COUR D’APPEL DE ROUEN
1ERE CHAMBRE CIVILE
ARRET DU 25 JANVIER 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
1118001934
Juge des contentieux de la protection de Rouen du 19 avril 2021
APPELANTE :
SARL [N]
RCS de Rouen n° 343 124 889
[Adresse 7]
[Localité 3]
représentée et assistée par Me Philippe DUBOC de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de Dieppe
INTIMES :
Monsieur [F] [C]
né le 13 mai 1946 à Rouen
[Adresse 4]
[Localité 2]
représenté et assisté par Me Fabrice LEGLOAHEC de la SELARL D’AVOCAT LEGLOAHEC LEGIGAN, avocat au barreau de Rouen
SA COMPOSITES GUREA
[Adresse 6]
[Localité 1] (Espagne)
représentée par Me Vincent MOSQUET de la SELARL LEXAVOUE NORMANDIE, avocat au barreau de Rouen
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 17 octobre 2022 sans opposition des avocats devant M. Jean-François MELLET, conseiller, rapporteur,
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée :
Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre,
M. Jean-François MELLET, conseiller,
Mme Magali DEGUETTE, conseillère,
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme [S] [Z],
DEBATS :
A l’audience publique du 17 octobre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 25 janvier 2023.
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Rendu publiquement le 25 janvier 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.
*
* *
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Selon devis du 1er février 2002, M. [F] [C] a confié à la Sarl [N] la fourniture et la pose d’une isolation extérieure en ossature bois dans sa maison au prix total de 10 420,54 euros. Invoquant une dégradation anormale des panneaux de parement Parklex, fabriqués par la société de droit espagnol Composites Gurea, il a sollicité une mesure d’expertise judiciaire qui a été prononcée par ordonnance du 24 janvier 2013. L’expert a déposé son rapport le 15 décembre 2014.
Par acte d’huissier du 20 septembre 2017, M. [F] [C] a fait assigner la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea en indemnisation au titre du coût des travaux de reprise.
Par jugement réputé contradictoire du 19 avril 2021, le tribunal judiciaire de Rouen a :
– déclaré recevable l’action de M. [F] [C] ;
– déclaré irrecevable la demande de la Sarl [N] en paiement de la somme de 4 909,88 euros ;
– condamné la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea à payer solidairement à M. [F] [C] la somme de 4 571,60 euros au titre des travaux de reprise ;
– condamné la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea à payer solidairement à M. [F] [C] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral ;
– rejeté toute demande plus ample ou contraire ;
– condamné la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea à payer solidairement à M. [F] [C] la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– dit n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire ;
– condamné la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea aux dépens, qu’elles supporteront solidairement, en ce compris les frais de l’expertise judiciaire et de la procédure de réferé.
Par déclaration reçue au greffe le 25 mai 2021, la Sarl [N] a interjeté appel de la décision.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 26 septembre 2022 , la Sarl [N] demande à la cour d’appel, au visa des articles 1792 du code civil, 1134 et 1147 anciens du code civil, 1290, 1202 du code civil, L.110-4 du code de commerce, 1382 ancien du code civil, 1103, 1231-1, 1199, 1240, 1310 et 1347 nouveaux du code civil, 699 et 700 du code de procédure civile d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
– déclaré recevable l’action de M. [C] ;
– déclaré irrecevable la demande de la Sarl [N] en paiement de la somme de 4 909,88 euros ;
– condamné la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea à payer solidairement à M. [C] la somme de 4 571,60 euros au titre des travaux de reprise ;
– condamné la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea à payer solidairement à M. [C] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral ;
– rejette toute demande plus ample ou contraire ;
– condamné la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea à payer solidairement à M. [C] la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit n’y avoir lieu écarter l’exécution provisoire ;
– condamné la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea aux dépens, qu’elles supporteront solidairement, en ce compris les frais d’expertise judiciaire et de la procédure de référé ;
et statuant à nouveau, de :
– à titre principal, déclarer irrecevable l’action engagée par M. [C] en raison de la prescription de la garantie biennale ;
– à titre subsidiaire, déclarer irrecevable l’action engagée par M. [C] en raison de la prescription de l’action en responsabilité contractuelle ;
– à titre très subsidiaire, débouter M. [C] de l’ensemble de ses demandes ;
en tout état de cause,
– constater que M. [C] reste devoir une somme de 4 909,88 euros au titre du marché ;
– ordonner qu’il soit fait compensation entre cette somme et l’éventuelle condamnation susceptible d’être prononcée à son encontre ;
– déclarer que M. [C] doit supporter 75 % du préjudice subi ;
– condamner la société Composites Gurea à la relever et garantir de toutes les condamnations susceptibles d’être prononcées à son encontre au profit de M. [C] ;
– condamner M. [C] et tout contestant à lui payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner M. [C] et tout contestant aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de la Sas Fortium conseil.
Elle soutient en substance ce qui suit :
– les panneaux ont été correctement posés et la seule revendication recevable concerne l’aspect esthétique qui s’est dégradé sous l’effet des rayons ultra-violet sans affecter la solidité de l’ouvrage ou encore compromettre son étanchéité ;
– tout dommage présentant les caractéristiques susceptibles de le soumettre aux garanties décennale ou biennale ne peut être réparé que sur le fondement de ces garanties ;
– le caractère isolant des panneaux leur confère un caractère fonctionnel si bien que la garantie biennale s’applique ;
– la réception est intervenue le 20 décembre 2002 par la prise de possession des travaux réalisés ;
– l’action concernant la vente et la pose des matériaux litigieux est prescrite depuis le 20 décembre 2012 (10 ans) dès lors que la prescription décennale s’est éteinte antérieurement à la nouvelle prescription quinquennale ;
– M. [C] ne peut pas prétendre qu’il aurait découvert l’apparition des désordres uniquement en 2011 alors qu’il a refusé de payer le solde de la facture dès 2002 au motif que des panneaux avaient été abîmés pendant le transport, puis en 2003 au motif que les teintes en surface étaient sensiblement différentes ;
– le devoir d’information et de conseil ne s’applique pas s’agissant d’une information connue de tous ou facilement accessible ;
– M. [C], assisté de son fils, architecte, connaissait manifestement le produit, et il était en mesure de se renseigner sur ses caractéristiques essentielles ;
– en se contentant de condamner in solidum les sociétés Composite Gurea et [N], le tribunal n’a manifestement pas précisé la manière dont la contribution à la dette entre tous les codébiteurs condamnés devait s’effectuer.
Par dernières conclusions notifiées le 28 septembre 2022, la société de droit espagnol Composites Gurea demande à la cour, au visa du règlement CE 1393/2007, de la Convention de [Localité 5] du 11 avril 1980, de l’article L.110-4 du code de commerce, des articles 1134, 1147 et 1165 anciens du code civil, 1103, 1231-1 et 1199 nouveaux du code civil, d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :
à titre liminaire,
– déclarer que M. [C] ne démontre pas que les conditions de délivrance de l’assignation telles qu’édictées par le règlement européen CE n° 1393/2007 ont été respectées ;
– juger que le tribunal n’a pas été valablement saisi d’une demande à l’encontre de la société de droit espagnol Composites Gurea et le débouter ;
– la mettre hors de cause ;
subsidiairement,
– juger qu’au visa de l’article L.110-4 du code de commerce l’action de M. [C] à l’encontre de la société Composites Gurea est manifestement prescrite ;
– juger qu’au visa de l’article 39-2 de la Convention de [Localité 5] du 11 avril 1980, la société [N] est forclose en ses demandes ;
– juger au surplus qu’au visa de l’article L.110-4 du code de commerce, la société [N] est prescrite en ses demandes dirigées à l’encontre de la société Composites Gurea ;
– débouter M. [C], et la société [N] de l’ensemble de leurs demandes ;
à titre infiniment subsidiaire,
– juger que l’évolution de l’aspect des panneaux, prévisible aux termes des documents techniques, était nécessairement connue de M. [C] et de l’entreprise [N] ;
– juger qu’aucun manquement contractuel ou aucune faute délictuelle ne peuvent être reprochée à la société Composites Gurea ;
– juger, à la lecture de l’avis technique notamment, que la société composites Gurea a parfaitement respecté son obligation d’information ;
– débouter en conséquence M. [C], et au besoin toute autre partie, de l’intégralité de ses demandes ;
en toutes hypothèses,
– limiter la contribution à la dette de la société Composites Gurea à un tiers des sommes mises à sa charge, tant sur le préjudice matériel que sur toutes autres demandes ;
– débouter M. [C] de ses demandes au titre du préjudice immatériel de jouissance, en ce qu’il n’est justifié ni dans son principe, ni dans son quantum ;
– homologuer le rapport d’expertise judiciaire en ce qu’il a partagé les responsabilités en 1/3, à parts égales entre M. [C], la Sarl [N] et la société Composites Gurea ;
– limiter en conséquence la condamnation de la société Composites Gurea à une somme d’un montant maximum de 1 500 euros ;
– débouter la société [N] de sa demande visant à voir la société Composites Gurea condamnée à la relever et garantir indemne de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;
– condamner M. [C] au paiement d’une indemnité de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Elle soutient en substance ce qui suit :
– il ne ressort pas des éléments du dossier que M. [C] ait accompli les diligences conformes aux dispositions du règlement européen n° 1393/2007 et il ne fournit pas l’avis de réception prévu par ce réglement ;
– l’acte enrôlé par le greffe du tribunal n’était pas conforme aux règles applicables et la juridiction de première instance n’aurait ainsi pas dû s’estimer valablement saisie ; – il s’agit d’une nullité de forme sans grief, s’agissant d’un vice de fond ;
– subsidiairement, il s’agit d’une fin de non-recevoir qui peut être soulevée en tout état de cause ;
– le point de départ du délai de prescription quinquennal des obligations est fixé s’agissant des contrats de vente, au jour de la vente ;
– ce point de départ du délai de la vente initiale s’applique également aux relations entre sous acquéreurs et acquéreur final ;
– à compter du 19 juin 2008, un nouveau délai a commencé à courir, et a expiré le 28 novembre 2012 ;
– la Sarl [N] est prescrite en ses demandes au visa de la Convention de [Localité 5] sur les ventes internationales de marchandises et à l’article L.110-4 du code de commerce ;
– elle n’a pas manqué à ses obligations contractuelles car le vieillissement des panneaux est tout à fait normal et ne porte aucune atteinte dans leurs caractéristiques mécaniques ;
– il n’existe aucune obligation de communiquer un avis technique au client final si la demande n’émane pas du client lui-même ;
– la société [N] est une entreprise de pose de bardage à qui il n’est pas nécessaire de rappeler ce qu’elle est supposée connaître ;
– l’avis technique publié indiquait très clairement qu’une rénovation des panneaux serait nécessaire.
Par dernières conclusions notifiées le 9 novembre 2021, M. [F] [C] demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1147 anciens du code civil et 1792 et suivants du code civil de confirmer en toutes ses dispositions le jugement à l’exception du montant des dommages et intérêts alloués au titre du préjudice moral ;
– condamner solidairement la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea au paiement d’une somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral ;
– condamner in solidum la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea à lui payer une somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
– condamner in solidum la Sarl [N] et la Sa Composites Gurea aux dépens en cause d’appel.
Il soutient en substance ce qui suit :
– un acte de transmission de l’assignation a été délivré par voie postale à la société Composites Gurea afin de pallier la carence de l’entité requise espagnole (qui n’a pas transmis l’attestation justifiant de la saisine de la juridiction compétente) ;
– l’assignation a été transmise par deux moyens différents de signification afin de pallier l’absence de retour de la signification par l’entité requise espagnole ;
– l’accusé de réception signé le 20 septembre 2017 par la société Composites Gurea est versé aux débats ;
– la saisine du tribunal d’instance est régulière, même si l’attestation prévue à l’article 10 du règlement européen n°1393/2007 n’est pas versée ;
– la société Composites Gurea s’est régulièrement constituée et a pu faire valoir ses moyens de défense au fond dans le cadre de la présente procédure et elle ne peut donc pas justifier d’un quelconque grief ;
– le maître de l’ouvrage et l’acquéreur disposent contre le fabricant ou le fournisseur de matériaux d’une action contractuelle directe ;
– le délai de cinq ans court ‘à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer’ ;
– M. [C] a adressé une première réclamation à la société Parklex qui commercialise les panneaux fabriqués par la société Composites Gurea le 7 février 2012 ;
– le délai de prescription de cinq ans a été interrompu par l’introduction de la demande d’expertise judiciaire et ce jusqu’au prononcé de l’ordonnance désignant l’expert judiciaire ;
– ce délai est suspendu jusqu’au dépôt du rapport d’expertise judiciaire puis reprend à cette date ;
– le rapport d’expertise judiciaire a été déposé le 15 décembre 2014 de sorte que
M. [F] [C] disposait d’un délai jusqu’au 15 décembre 2019 pour assigner les sociétés [N] et Composites Gurea ;
– l’assignation a été délivrée en juillet 2017 soit dans le délai de cinq ans ;
– les réclamations apparues en 2012 étaient différentes de celles formulées en 2002, 2003 et 2005 et aucun élément ne permettait d’établir que le vieillissement des panneaux était anormal avant la lettre de réclamation du 7 février 2012 ;
– l’argumentation développée contre la société Composites Gurea s’applique également à la société [N] ;
– la responsabilité de la société [N] peut être engagée sur la théorie des dommages intermédiaires ;
– la pose d’une protection (lasure) sur les panneaux aurait permis d’éviter ce vieillissement anormal et ce changement d’aspect des panneaux ;
– la société [N] engage sa responsabilité pour ne pas avoir respecté les recommandations de pose et avis techniques et n’avoir pas informé son client du vieillissement de l’aspect extérieur ;
– les matériaux utilisés ne sont donc pas conformes contractuellement aux attentes du client et engagent ainsi la responsabilité du poseur mais également du fabricant ;
– M. [F] [C] n’est pas un professionnel mais un simple consommateur.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 septembre 2022.
MOTIFS
Sur la régularité de l’assignation
La société Composites Gurea soulève l’irrégularité de l’assignation délivrée devant le tribunal d’instance de Rouen au motif que M. [C] n’a pas accompli les diligences conformes aux dispositions du règlement européen n° 1393/2007 et ne fournit pas l’avis de réception prévu par ce règlement.
Elle soutient que l’acte enrôlé par le greffe du tribunal n’était pas conforme aux règles de procédure applicables de sorte que la juridiction de première instance n’aurait pas dû s’estimer saisie. Elle en conclut que l’assignation délivrée est nulle et précise qu’il s’agit d’une nullité de forme sans grief.
M. [C] réplique que l’assignation a été délivrée par voie postale à la société Composites Gurea, conformément aux dispositions prévues par l’article 14 du règlement européen n° 1393/2007, et produit l’avis de réception signé par l’intéressée le 20 septembre 2017.
L’article 683 du code de procédure civile énonce que la transmission des actes judiciaires et extrajudiciaires à l’étranger est faite par voie de notification ou de signification internationale.
En matière d’assignation internationale au sein de l’Union européenne, les parties doivent appliquer le règlement (CE) n°1393/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les Etats membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale.
Ainsi, lorsque le défendeur en justice est domicilié à l’étranger, l’assignation doit être notifiée conformément à la procédure spécifique des notifications internationales.
En l’espèce, il est constant que la société Composites Gurea est une société de droit espagnol de sorte que le règlement du 13 novembre 2007 doit s’appliquer.
Il résulte de l’article 2 de ce règlement, dans ses dispositions relatives aux ‘entités d’origine et aux entités requises’, que chaque Etat membre désigne les officiers ministériels, autorités ou autres personnes, dénommés ‘entités d’origine’, compétents pour transmettre les actes judiciaires ou extrajudiciaires aux fins de signification ou de notification dans un autre Etat membre. Chaque Etat membre désigne les officiers ministériels, autorités ou autres personnes, dénommées ‘entités requises’, compétents pour recevoir les actes judiciaires ou extrajudiciaires en provenance d’un autre Etat membre.
La France a désigné comme entité d’origine les huissiers de justice ou le greffe lorsqu’il est compétent pour notifier.
L’article 4 du règlement dans ses dispositions relatives à la ‘transmission des actes’ précise que l’acte à transmettre est accompagné d’une demande établie au moyen du formulaire type figurant à l’annexe I.
L’article 14 du règlement, dans ses dispositions relatives à la ‘signification ou notification par l’intermédiaire des services postaux’ précise que tout Etat membre a la faculté de procéder directement par l’intermédiaire des services postaux, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à la notification des actes judiciaires ou extrajudiciaires aux personnes résidant dans un autre Etat membre.
En vertu de ces textes, les huissiers de justice peuvent procéder à la notification des actes judiciaires ou extrajudiciaires aux personnes résidant dans un Etat membre de l’Union européenne autre que l’Etat d’origine directement par l’intermédiaire des services postaux, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
En l’espèce, il résulte des pièces produites aux débats que l’assignation de la société Composites Gurea a été adressée le 12 septembre 2017 par Me [W] [G], huissier de justice, par lettre recommandée avec avis de réception, au ‘Secretario Judicial del juzgado decano’, répondant ainsi aux dispositions du règlement susmentionné qui prévoient que les actes de procédure peuvent être transmis par tout moyen. Cette assignation était accompagnée du formulaire de l’annexe 1 complété par l’huissier de justice.
Si l’entité requise espagnole n’a pas remis d’attestation justifiant de l’accomplissement de ses diligences, il convient de relever que l’assignation a également été adressée par l’huissier à la société Composites Gurea par lettre recommandée avec avis de réception signé par l’intéressée le 20 septembre 2017 que M. [F] [C] produit aux débats.
En conséquence, l’assignation adressée par M. [F] [C] à la société Composites Gurea a été notifiée conformément à la procédure spécifique des notifications internationales prévue par le règlement européen du 13 novembre 2007 ; elle est régulière et le tribunal d’instance de Rouen a été valablement saisi des demandes formées par M. [F] [C] à l’encontre de la société Composites Gurea.
Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a déclaré recevable l’action de M. [F] [C] formée à l’encontre de la société Composites Gurea.
Sur les fins de non-recevoir
– Sur la recevabilité de la demande en condamnation formée par M. [C] à l’encontre de la Sarl [N]
M. [C] demande la condamnation solidaire des sociétés [N] et Composites Gurea sur le fondement de la responsabilité contractuelle à raison d’un manquement à leur devoir d’information et de conseil.
La Sarl [N] soulève en cause d’appel la ‘prescription’ de l’action en garantie de bon fonctionnement, sur le fondement de l’article 1792-3 du code civil, qui instaure un délai biennal à compter de la réception des travaux, et qu’elle estime seule applicable. Elle soutient que les panneaux isolants constituent des éléments d’équipement dissociables de la maison dès lors qu’ils sont simplement vissés sur des éléments du gros oeuvre et peuvent être démontés sans porter atteinte à celui-ci. Elle ajoute que le caractère isolant des panneaux leur confère un caractère fonctionnel confirmant l’application de la garantie biennale. Elle considère que la prescription a commencé à courir le 20 décembre 2002, date de la réception par la prise de possession des travaux réalisés et relève que les premières demandes à son encontre ont été formulées plus de deux ans après cette réception.
M. [C] réplique que les conditions d’application de la garantie biennale ne sont pas remplies dès lors que l’installation d’une isolation thermique extérieure constituée d’une ossature en bois fixée sur la façade de la maison à l’aide de tasseaux horizontaux ne constitue pas un élément d’équipement dissociable de l’ouvrage.
La fin de non-recevoir tirée de la forclusion peut être proposée en tout état de cause, et pour la première fois en cause d’appel.
L’article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère.
L’article 1792-2 du même code précise que la présomption de responsabilité établie par l’article 1792 s’étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d’équipement d’un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert. Un élément d’équipement est considéré comme formant indissociablement corps avec l’un des ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s’effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage.
L’article 1792-3 dudit code ajoute que les autres éléments d’équipement de l’ouvrage font l’objet d’une garantie de bon fonctionnement d’une durée minimale de deux ans à compter de sa réception.
En l’espèce, il ressort du rapport d’expertise judiciaire que les travaux litigieux ont consisté en la mise en oeuvre d’un complexe d’isolation thermique par l’extérieur constitué d’une ossature en bois chevronnée dans les murs de façades de la maison, sur laquelle ont été vissés des panneaux de bois de type ‘Parklex 1000’, distribués par la société Composites Gurea. De la laine de verre a été installée entre l’ossature en bois et les panneaux isolants.
L’expert indique à la page 4 du rapport de la deuxième réunion d’expertise qu’il a été décidé de démonter et de remonter un panneau isolant, pendant la réunion d’expertise, afin de pouvoir examiner l’état de celui-ci.
Il s’agit néanmoins d’un complexe d’isolation thermique, inerte et non destiné à fonctionner, qui ne constitue pas un élément d’équipement dissociable visé par l’article 1792-3 du code civil.
Il s’ensuit que la fin de non-recevoir soulevée par la Sarl [N] au motif de la forclusion de l’action formée par M. [C] sur le fondement de l’article 1792-3 du code civil doit être rejetée.
Après avoir rappelé que l’action du maître d’ouvrage en responsabilité contractuelle se prescrit par dix ans à compter de la réception de l’ouvrage, la Sarl [N] soulève, à titre subsidiaire, la prescription de l’action en responsabilité contractuelle, sur le fondement de l’article L.110-4 du code de commerce, modifié par la loi du 17 juin 2008. Elle soutient que la pose des matériaux litigieux est prescrite depuis le 20 décembre 2012 dès lors que la prescription décennale s’est éteinte antérieurement à la nouvelle prescription quinquennale. Elle ajoute que M. [C] ne peut pas prétendre qu’il aurait découvert l’apparition des désordres uniquement en 2011 alors qu’il a refusé de payer le solde de la facture dès 2002 au motif que des panneaux avaient été abîmés pendant le transport, puis en 2003 au motif que les teintes en surface étaient sensiblement différentes.
M. [C] réplique que la prescription de son action en responsabilité contractuelle a commencé à courir à compter du 7 février 2012, date à laquelle il a adressé une première réclamation à la société Parklex concernant la dégradation anormale du vernis des panneaux isolants, de sorte que son action n’est pas prescrite.
L’action en responsabilité engagée par M. [C] à l’encontre de la Sarl [N], sur le fondement contractuel des articles 1134 et 1147 du code civil, est régi par les dispositions de l’article 2224 du code civil, issu de la loi du 17 juin 2008, qui prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Ce délai est repris par l’article L. 110-4 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la même loi, pour les actions nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants.
En application des articles 2239 et 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription et la prescription est suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d’instruction présentée avant tout procès.
En l’espèce, il ressort du rapport d’expertise judiciaire que la dégradation de l’aspect des panneaux isolants litigieux est causée par le vieillissement du produit, sous l’action des rayons du soleil.
Le délai de prescription quinquennal a commencé à courir à compter du jour où M. [C] a connu les faits lui permettant d’exercer son action à l’encontre de la Sarl [N] qui a réalisé les travaux. Il ne résulte pas des débats que la décoloration anormale des panneaux installés se serait révélée antérieurement au courrier adressé par M. [C] le 7 février 2012 à la Sarl [N].
La Sarl [N] prétend à tort que M. [C] avait connaissance de ce désordre dès 2002 alors que le courrier reçu le 9 septembre 2002 par la Sarl [N] concerne le remplacement de certains panneaux endommagés au niveau de l’arrête de bardage et que le courrier reçu le 29 janvier 2003 mentionne l’existence d’une différence de teinte entre les différents panneaux installés et non le vieillissement de ces derniers ainsi que leur décoloration conséquente.
Le délai de prescription a été interrompu par l’assignation en référé délivrée à la Sarl [N] le 15 octobre 2012 puis a été suspendu par l’ordonnance de référé du 24 janvier 2013 désignant l’expert 3 mois et 9 jours plus tard, pour recommencer à courir le 15 décembre 2014, date du dépôt du rapport d’expertise judiciaire.
Il s’ensuit que le délai de prescription n’était pas expiré lorsque M. [C] a fait assigner la Sarl [N] le 20 septembre 2017 en paiement du coût de reprise des travaux et que les demandes sont recevables.
– Sur la recevabilité de la demande en condamnation formée par M. [C] à l’encontre de la société Composites Gurea
M. [C] indique agir sur le fondement de la non-conformité contractuelle de droit commun.
La société Composites Gurea, venderesse, soulève la prescription de l’action en responsabilité contractuelle sur le fondement de l’article L.110-4 du code de commerce. Elle soutient que le point de départ du délai de prescription quinquennal est fixé au jour de la naissance de l’obligation, c’est-à-dire s’agissant des contrats de vente, au jour de la vente initiale, et que ce délai de prescription s’applique aux relations entre l’acquéreur final et le fabricant, comme en l’espèce. Elle relève qu’un nouveau délai de prescription quinquennal a commencé à courir à compter du 19 juin 2008 et a expiré le 28 novembre 2012.
M. [C] réplique que la prescription de son action en responsabilité contractuelle a commencé à courir à compter du courrier du 7 février 2012.
Le maître de l’ouvrage, comme le sous-acquéreur, jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur ; il dispose donc à cet effet, à l’encontre du vendeur initial, d’une action contractuelle directe fondée sur la non-conformité de la chose livrée.
Le point de départ du délai de prescription extinctive court à compter de la vente initiale, l’acquéreur final ne pouvant détenir plus de droit que le vendeur intermédiaire.
Le délai de prescription applicable entre commerçants et entre commerçants et non-commerçants, de l’action contractuelle directe du maître de l’ouvrage contre le fabricant, fondée sur la non-conformité des matériaux, court à compter de la livraison des matériaux à l’entrepreneur.
Le délai de l’action en non-conformité a été réduit de 10 à 5 ans par la loi du 17 juin 2018, délai applicable aux prescriptions en cours, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
Le délai de l’action du sous-acquéreur contre le vendeur initial a donc expiré le 29 novembre 2012 si bien que l’action est prescrite.
– Sur la recevabilité de la demande en garantie formée par la Sarl [N] à l’encontre de la société Composites Gurea
La société Composites Gurea soulève en cause d’appel la prescription de la demande en garantie au regard de l’effet extinctif du bref délai régi par l’article 39 de la Convention de [Localité 5] du 11 avril 1980 sur les ventes internationales de marchandises. Elle soutient que la Sarl [N] disposait d’un délai de deux ans pour agir à compter du 20 décembre 2002, date à laquelle l’installation des panneaux isolants a été achevée. Elle relève que la Sarl [N] n’a fait délivrer aucune assignation à son égard de sorte qu’il n’existe aucun acte interruptif de la prescription.
La Sarl [N] ne réplique pas à cette fin de non-recevoir.
L’appel en garantie de la Sarl [N] est fondé, non pas sur l’obligation de délivrance, mais sur la responsabilité contractuelle de la société Composites Gurea pour manquement à son devoir d’information et de conseil, pour n’avoir pas préconisé l’emploi d’une lasure.
Il s’ensuit que le bref délai régi par l’article 39 de la Convention de [Localité 5] du 11 avril 1980 sur les ventes internationales de marchandises n’est pas applicable à la demande en garantie formée. Il s’agit en effet d’une action en responsabilité pour faute et non d’une garantie de conformité.
La société Composites Gurea soulève par ailleurs la prescription de la demande en garantie au visa de l’article L.110-4 du code de commerce et soutient que le délai de prescription a expiré le 28 novembre 2012.
La Sarl [N] ne réplique pas davantage.
Le délai de prescription de l’action en responsabilité contractuelle du vendeur auquel il est reproché un manquement à son devoir de conseil court à compter du jour de la livraison des matériaux à l’entrepreneur.
La prescription était donc nécessairement acquise antérieurement au 29 novembre 2012 en application de l’article L. 110-4 du code de commerce.
La demande en garantie formée par la Sarl [N] contre la société Composites Gurea est donc irrecevable.
Sur la demande en condamnation formée par M. [C] à l’encontre de la Sarl [N]
M. [C] reproche à la Sarl [N] l’absence d’information préalable sur le vieillissement de l’aspect extérieur des panneaux et la nécessité de les préserver par l’application d’un vernis de protection, ce qui aurait permis d’éviter ce changement d’aspect anormal.
La Sarl [N] soutient n’avoir commis aucun manquement puisque le vieillissement des panneaux en bois dû à l’ensoleillement est une information connue de tous et à laquelle M. [C] pouvait facilement avoir accès. Elle fait valoir qu’elle a parfaitement respecté les préconisations de l’avis technique applicable qui ne mentionnait pas la nécessité d’appliquer une lasure de protection sur les panneaux isolants. Elle ajoute qu’elle a posé les panneaux litigieux à la demande et selon les instructions de M. [C], qui a lui-même choisi les panneaux avec l’assistance de son fils architecte, l’expert judiciaire ayant d’ailleurs retenu une faute de M. [C] à cet égard.
Il convient de relever que la demande en condamnation de M. [C] se fonde exclusivement sur la responsabilité contractuelle, sur le fondement des articles 1134 et 1147 du code civil, en raison d’un manquement à un devoir d’information et de conseil.
Il lui appartient de démontrer le préjudice, la faute et le lien de causalité en rapport avec cette faute.
L’expert judiciaire a constaté une grande sensibilité des panneaux isolants, posés par la Sarl [N] et fournis par la société Composites Gurea, aux rayons ultra-violets du soleil, entraînant un vieillissement prématuré de la face extérieure des panneaux dont l’aspect n’est pas uniforme sur les façades de la maison.
Ces désordres sont corroborés par les photographies annexées au rapport d’expertise qui montrent que l’aspect extérieur des panneaux en bois s’est dégradé sur l’ensemble des façades, la décoloration se trouvant plus marquée au niveau des zones les plus exposées au rayonnement solaire.
Il ressort de ce qui précède que ce changement d’aspect visuel des panneaux en l’espace de dix ans ne correspond pas à l’usure normale du bois, mais constitue un véritable désordre esthétique, d’autant plus qu’il affecte les panneaux de façon hétérogène et que l’aspect ne s’harmonise plus avec le caractère traditionnel de la maison. Leur retour à l’aspect initial est impossible.
La Sarl [N], tenue de respecter les recommandations de pose, aurait dû informer M. [C] du vieillissement de l’aspect extérieur des panneaux de bois qui était clairement mentionné dans l’avis technique émanant du fabricant.
L’article 2.2 de cet avis de 2002 intitulé ‘Durabilité-Entretien’, reproduit à la page 8 du rapport d’expertise judiciaire, mentionne dans les termes suivants que :
‘Du point de vue de l’aspect, [le panneau Parklex 1000] présentera une évolution perceptible dans un délai variable (2 à 5 ans), selon la sévérité de l’exposition, notamment au rayonnement UV.
Ce changement d’aspect, assimilable à celui d’un bois verni par son blanchiment, n’en présente cependant pas l’écaillage habituellement constaté dans ce cas.’
Il n’est pas contesté que la Sarl [N] n’a pas transmis cet avis technique étant relevé que l’avis technique produit par ce dernier (pièce 19) est postérieur à 2005. Le DTU mentionnait également le risque de bleuissement du bois et la nécessité de poser une protection adaptée.
Sa faute est donc établie, dès lors qu’elle n’a pas informé son client des précautions d’entretien nécessaires afin d’éviter l’apparition du dommage, a fortiori au regard de l’exposition aux rayons UV des panneaux qu’elle a installés.
Nonobstant les conclusions de l’expert, aucune faute de la victime n’est établie. En effet, le fait que M. [C] ait sélectionné les panneaux isolants n’est pas fautif. Il est constant que la brochure publicitaire de la société Composites Gurea qui a déterminé le choix des panneaux ‘Parklex 1000’ ne mentionnait ni la nécessité d’appliquer une lasure de protection, ni même l’existence d’un vieillissement de l’aspect extérieur des panneaux litigieux. Quand bien même il aurait pu bénéficier, dans le choix des panneaux, de l’assistance de son fils, architecte, M. [C] n’était pas un professionnel et il n’avait pas l’obligation de se renseigner lui-même sur les précautions à prendre pour les entretenir, ni de s’informer de sa propre initiative sur l’avis technique applicable, ce document ne lui ayant pas été fourni et n’étant pas facilement acessible. Les conditions de vieillissement des panneaux, compte tenu de leurs caractéritiques techniques, particulièrement leur faible résistance aux rayons UV ne constituent pas des données évidentes nécessairement connues de tous.
Sur la réparation des dommages
– Sur le préjudice matériel
L’expert a chiffré le coût total de la réfection des panneaux pour un montant de
4 500 euros en prenant en compte l’application d’une couche de vernis de protection qui peut adhérer sur ce type de panneaux en bois.
M. [C] produit le devis de réfection des panneaux établi par la société [X] pour un montant de 4 571,60 euros qui n’est pas utilement contesté.
La Sarl [N] sera donc condamnée à payer à M. [C] la somme de 4 571, 60 euros au titre des travaux de reprise, le jugement étant infirmé sur ce point.
– Sur le préjudice moral
Le tribunal a alloué une indemnité de 1 000 euros en réparation du préjudice moral de M. [C] en se fondant sur le rapport d’expertise judiciaire et les constatations de Me [R], huissier de justice, dans son procès-verbal du 10 avril 2019.
M. [C] sollicite une indemnité de 1 500 euros du fait de l’aspect dégradé des panneaux isolants, détérioration qui s’aggrave avec le temps et empêche par ailleurs la mise en location.
En l’espèce, l’expert a indiqué dans son rapport d’expertise judiciaire qu’il serait ‘probablement difficile de récupérer une apparence bois’.
Me Hussenet, dans son procès-verbal du 10 avril 2019, a constaté que les panneaux présentaient un ‘aspect sale, blanchi et limé. Des tâches verdâtres sont également visibles par endroits’.
Compte tenu du temps écoulé depuis la décision de première instance, de la longueur des démarches à entreprendre, de l’aggravation des désordres depuis dix ans compromettant l’aspect extérieur de la maison, les panneaux n’ayant toujours pas été rénovés, une indemnité de 1 500 euros lui sera allouée.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a condamné les sociétés [N] et Composites Gurea solidairement à payer à M. [C] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.
Sur la demande de la Sarl [N] en compensation des sommes dues par M. [C] au titre du solde du marché de travaux
En cause d’appel, la Sarl [N] sollicite la compensation de toute condamnation avec son reliquat de facture à hauteur de 4 909,88 euros.
M. [C] conclut à l’irrecevabilité de la demande pour prescription. La Sarl [N] réplique que la compensation s’opère de plein droit et peut être invoquée à tout moment.
La compensation légale ne s’opère, aux termes de l’ancien article 1291 du code civil, dès lors que les créances réciproques sont également certaines, liquides et exigibles. Tant que l’une des créances est litigieuse, les conditions de la compensation ne sont pas réunies. La prescription est interrompue à la date de la compensation légale soit, aux termes du nouvel article 1347 du code civil, à la date où les conditions en sont réunies.
En l’espèce, la créance indemnitaire mise à la charge de la Sarl [N], qu’elle a toujours contestée, est définitivement fixée par la présente décision.
La créance en paiement dont elle se prévaut correspond à un reliquat de facture pour des travaux effectués au mois de novembre 2002.
La Sarl [N] ne se prévaut d’aucun acte interruptif alors que la compensation n’a été sollicitée que le 10 février 2021.
Il ne sera pas fait droit à la demande de compensation, la créance alléguée étant atteinte par la prescription.
Sur le surplus des demandes
La demande d’homologation du rapport d’expertise n’est pas pertinente puisque le professionnel n’émet qu’un avis afin que la juridiction tranche le litige en bénéficiant des connaissances techniques utiles. La demande est rejetée.
Les dispositions de première instance relatives aux dépens et frais irrépétibles seront infirmées en ce que la Sa Composites Gurea a été condamnée.
La Sarl [N] succombe à l’instance et sera condamnée aux dépens d’appel et de première instance, dont distraction au profit de la Sas Fortium conseil en application de l’article 699 du code de procédure civile, outre une somme pour frais irrépétibles au profit de M. [C] qu’il convient de fixer à 3 000 euros.
L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour le surplus.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris des chefs déférés sauf en ce que le tribunal a :
– condamné solidairement la société de droit espagnol Composites Gurea à payer la somme de 4 571 euros au titre de travaux de reprise ;
– condamné solidairement la société de droit espagnol Composites Gurea à payer la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles, outre les dépens, en ce compris les dépens d’expertise et de référé ;
– condamné solidairement la Sarl [N] et la société de droit espagnol Composites Gurea à payer une somme de 1 000 euros au titre du préjudice moral ;
La confirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Déclare irrecevables les demandes formées à l’encontre de la société de droit espagnol Composites Gurea ;
Condamne la Sarl [N] à payer à M. [F] [C] la somme de 1 500 euros en réparation de son préjudice moral ;
Y ajoutant,
Déboute la Sarl [N] de sa demande en compensation de créances ;
Condamne la Sarl [N] à payer à M. [F] [C] la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne la Sarl [N] aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de la Selas Fortium conseil en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, La présidente de chambre,