MINUTE N° 22/507
Copie exécutoire à :
– Me Julie HOHMATTER
– Me Alexandre DIETRICH
Le
Le greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A
ARRET DU 24 Octobre 2022
Numéro d’inscription au répertoire général : 3 A N° RG 20/02653 – N° Portalis DBVW-V-B7E-HMTT
Décision déférée à la cour : jugement rendule 10 juillet 2020 par le tribunal judiciaire de STRASBOURG
APPELANTE :
S.A.R.L. LILA prise en la personne de son représentant légal.
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Julie HOHMATTER, avocat au barreau de COLMAR
INTIMEE :
S.A.S. GRENKE LOCATION prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège,
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Alexandre DIETRICH, avocat au barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 modifié et 910 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 septembre 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme MARTINO, Président de chambre, et Mme FABREGUETTES, Conseiller, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme MARTINO, Président de chambre
Mme FABREGUETTES, Conseiller
Monsieur FREY, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme HOUSER
ARRET :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Annie MARTINO, président et Mme Anne HOUSER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
Se prévalant de la résiliation anticipée, notifiée le 16 septembre 2016, d’un contrat en date des 8 et 30 avril 2015, portant sur la location d’une centrale et un détecteur infrarouge fourni par la société ATS Securité et prévoyant le paiement par la locataire de soixante-trois loyers mensuels au montant de 64,80 € l’un, la société Grenke Location a, suivant acte délivré le 2 novembre 2017, fait citer la Sarl Lila devant le tribunal judiciaire de Strasbourg en paiement des sommes de :
– 259,20 € ttc au titre des loyers impayés avec intérêts au taux légal majoré de cinq points sur chaque séance impayée à compter de sa date,
– 2 732,40 € au titre de l’indemnité contractuelle de résiliation, avec les intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2016,
– 40 € au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement avec intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 16 septembre 2016,
– 180 € au titre des frais de résiliation anticipée du contrat.
Elle sollicitait outre la capitalisation des intérêts, la restitution du matériel objet du contrat ainsi que la condamnation de la défenderesse aux dépens et à lui payer la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La Sarl Lila s’est opposée à la demande en contestant avoir signé le contrat litigieux et le bon de livraison, documents sur lesquels, figurerait, un cachet commercial qui n’est pas le sien, une signature sur le bon de livraison qui n’est pas la sienne ainsi que la mention manuscrite du nom et du prénom du gérant comportant une erreur d’orthographe.
Par jugement en date du 10 juillet 2020, le tribunal ainsi saisi a :
– Condamné la Sarl Lila à payer à la société Grenke Location les sommes de :
– 259,20 € ttc au titre des loyers impayés, avec intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 19 mai 2016 sur 64,80 €, du 1er juillet 2016 sur 64,80 €, du 1er août 2016 sur 64,80 € et du 1er septembre 2016 sur 64,80 €
– 2 732,40 € au titre de l’indemnité contractuelle de résiliation avec intérêts au taux légal à compter de la résiliation du 16 septembre 2016,
– 40 € au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement, avec intérêts au taux légal majoré de cinq points à compter du 16 septembre 2016,
– Accordé la capitalisation annuelle des intérêts,
– Ordonné la restitution du matériel objet du contrat de location sous astreinte de 10 € par jour de retard passé le délai de quinze jours suivant la signification du jugement,
– Condamné la Sarl Lila aux dépens et à payer à la société Grenke Location la somme de 300 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Ordonné l’exécution provisoire de la décision.
Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu qu’il peut être admis que les documents contractuels ont été signés par un commettant de l’entreprise pour le compte du gérant et non par ce dernier ; que toutefois, ces éléments sont insuffisants à démontrer qu’il s’agit d’une usurpation d’identité dès lors que les prélèvements effectués par la société Grenke Location se sont poursuivis pendant une année sans soulever aucune objection, ni d’ailleurs de demande de remboursement devant le tribunal et que si en réalité, le gérant n’a pas passé commande lui-même, il a bel et bien ratifié ladite commande et a délégué la signature des documents contractuels à un commettant ou à un proche. Il a estimé par ailleurs que faute de paiement des loyers, la société Grenke Location avait pu résilier par anticipation le contrat de location et était fondée en ses réclamations.
La Sarl Lila a interjeté appel à l’encontre de cette décision suivant déclaration en date du 17 septembre 2020 et par écritures d’appel notifiées le 14 décembre 2020, elle conclut à l’infirmation de la décision déférée et demande à la cour statuant à nouveau de :
– constater que les conditions de l’article 1113 du code civil ne sont pas réunies faute par la société Grenke Location de démontrer une volonté non équivoque de la Sarl Lila de régulariser le contrat du 8 avril 2015,
– dire et juger que le tribunal judiciaire de Strasbourg a méconnu les dispositions de l’article 16 du code de procédure civile,
– en conséquence rejeter l’ensemble des demandes de la société Grenke Location,
– condamner la société Grenke Location à payer à la Sarl Lila la somme de 2 000 € à titre de dommages intérêts,
-condamner la société Grenke Location à lui payer la somme de 2 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens.
Au soutien de son appel, l’appelante maintient qu’elle n’est pas la signataire du contrat de location ni celle du bon de livraison, que le tampon commercial apposé sur ces documents n’est pas le sien ; que la signature portée sur le bon de livraison n’est pas celle de son gérant ; que les nom et prénom de son gérant, figurant de manière manuscrite sur ces documents, comportent une erreur d’orthographe ; qu’elle n’a ni commandé ni reçu le matériel litigieux ; que Monsieur [J], gérant de la Sarl Lila n’a eu de cesse que de contester la régularité du contrat de location et que la société n’avait au demeurant pas d’intérêt à souscrire ce contrat puisqu’elle avait régularisé depuis septembre 2012 une convention de surveillance et de gardiennage auprès d’une société tierce ; que le premier juge a méconnu le principe du contradictoire en retenant l’existence d’une prétendue délégation, qu’elle conteste à hauteur d’appel, pour la condamner au paiement des loyers impayés et de l’indemnité de résiliation.
La société Grenke Location a notifié des conclusions d’intimé en date du 16 juillet 2021, lesquelles ont été déclarées irrecevables par ordonnance du magistrat chargé de la mise en état en date du 14 décembre 2021.
MOTIFS
Il sera relevé in limine litis qu’en application de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions figurant au dispositif et qu’en conséquence il n’y a pas lieu de statuer sur les demandes de « constater », « dire et juger » qui ne sont en réalité que les moyens articulés au soutien des prétentions.
Il n’y a donc notamment pas lieu de statuer sur le « dire et juger que le premier juge a méconnu l’article 16 du code de procédure civile » faute de prétention tendant à l’annulation du jugement déféré.
***
Il est de règle que lorsque les conclusions de l’intimé ont été déclarées irrecevables, il appartient à la cour d’examiner, au vu des
moyens d’appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s’est déterminé.
En l’espèce, la partie appelante invoque les dispositions de l’article 1113 du code civil dans la rédaction que lui a donnée l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, entrée en vigueur le 1er octobre 2016, et qui ne sont donc pas applicables au cas d’espèce puisque le contrat litigieux est en date du mois d’avril 2015.
Il reste qu’en vertu de l’article 1108 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le consentement de la partie qui s’oblige est une condition essentielle à la validité d’une convention.
Le contrat de location est un contrat consensuel dont la preuve de l’existence n’est soumise à aucun formalisme, a fortiori entre commerçants.
Le présent litige est circonscrit à la question de la réalité de l’engagement contractuel de la Sarl Lila, étant acquis que le contrat de location dont se prévaut la société Grenke Location ne comporte aucune signature mais seulement un tampon au nom de « Café brasserie Pizzeria de la Place [Adresse 2] », tampon que la Sarl Lila déclare ne pas être le sien, sans au demeurant présenter aucun document contemporain permettant de s’en convaincre, ainsi que l’indication manuscrite en lettres capitales « MOSTAPHA LARHISSI » alors que, d’après la copie de la carte d’identité produite aux débats l’orthographe du nom du gérant est « [K] [J] », et étant également acquis que le bon de livraison comporte le même tampon, la même mention manuscrite du nom du gérant ainsi qu’une signature qui n’est pas conforme à celle figurant sur la photocopie de la carte d’identité de Monsieur [J].
Le premier juge a toutefois exactement retenu que le contrat avait été exécuté par la Sarl Lila durant douze mois sans qu’aucune objection n’ait été formulée.
De fait, l’appelante, qui prétend que son identité aurait été usurpée, n’explique pas dans quelles conditions elle aurait pu, mensuellement et par voie de prélèvement, payer le loyer prévu à un contrat qu’elle n’aurait pas conclu et auquel elle prétend être étrangère, en rémunération de la fourniture d’un bien qu’elle n’aurait pas réceptionné, et ce durant une année entière sans soulever la moindre objection.
À ce titre, la Sarl Lila ne soutient pas sérieusement n’avoir eu de cesse que de protester auprès de la société Grenke location alors qu’elle ne justifie pas de l’envoi du moindre mail ou courrier adressé à la société Grenke Location, voire à la société ATS Sécurité.
Les seuls courriels adressés par le gérant de la Sarl Lila à son avocate les 31 janvier 2017 et 16 février 2017 par lesquels celui-ci assure avoir « tenté plusieurs fois d’expliquer que je ne suis pas l’auteur de la signature du contrat » et précise « cela fait plusieurs mois que je leur envoie des courriers avec preuve écrite ; pas de réponse » ne sauraient pallier l’absence de production aux débats des dits envois.
De même, l’appelante ne peut soutenir qu’elle n’aurait pas eu intérêt à conclure le contrat litigieux du fait qu’elle bénéficiait en 2015 de prestations de rondes de surveillance alors que le contrat de bail a un objet différent portant sur l’installation de détecteurs infrarouges.
En présence d’un contrat exécuté durant une année entière et en l’absence de toute contestation antérieure ou concomitante à la notification de la résiliation du contrat de location, le premier juge a retenu à bon escient que la Sarl Lila a consenti à la convention de sorte que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il l’a condamnée au paiement des loyers impayés et de l’indemnité de résiliation, telle que contractuellement définie et accessoires, aucun de ces postes n’ayant donné lieu à contestation fût ce à titre subsidiaire.
Il suit de ces énonciations que la demande de dommages et intérêts formée par la société Lila pour procédure abusive sera rejetée.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Les dispositions du jugement déféré quant aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile seront confirmées.
Partie perdante à hauteur d’appel, l’appelante sera condamnée aux dépens conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile et déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
En revanche, il sera fait droit à la demande formée par l’intimée au titre de l’article 700 du code de procédure civile dans la limite de la somme de 800 €.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME la décision déférée en toutes ses dispositions,
Et y ajoutant,
DEBOUTE la Sarl Lila de ses demandes en dommages et intérêts et au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la Sarl Lila à payer à la société Grenke Location la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la Sarl Lila aux dépens.
La GreffièreLa Présidente de chambre