24 novembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01692

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24 novembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 21/01692

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 24/11/2022

****

N° de MINUTE :

N° RG 21/01692 – N° Portalis DBVT-V-B7F-TQYG

Jugement n° 2020003464 rendu le 09 février 2021par le tribunal de commerce de Lille Métropole

Ordonnance de référé rendue le 25 mai 2021 par le premier président de la cour d’appel de Douai

APPELANT

Monsieur Monsieur [J] [F]

né le [Date naissance 2] 1982 à [Localité 6] (Belgique)

demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Emmanuel Lacheny, avocat au barreau de Lille, avocat constitué,

substitué par Me Guillaume Derrien, avocat au barreau de Lille

INTIMÉS

SELARL MJ Valem, représentée par Me [G] [L], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Kade Nature par jugement rendu le 25 juillet 2018

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 5]

défaillante à qui une assignation en intervention forcée a été signifiée le 28 avril 2021 à personne habilitée

Monsieur le procureur général près la cour d’appel de Douai

représenté par M. Christophe Delattre, substitut général

DÉBATS à l’audience publique du 14 septembre 2022 tenue par Pauline Mimiague magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Valérie Roelofs

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Dominique Gilles, président de chambre

Pauline Mimiague, conseiller

Clotilde Vanhove, conseiller

ARRÊT REPUTÉ CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2022 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Dominique Gilles, président et Valérie Roelofs, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 7 juillet 2022

****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par jugement du 11 juin 2018 le tribunal de commerce de Lille métropole a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de l’EURL Kade Nature, converti en liquidation judiciaire par jugement du 25 juillet 2018, Me [G] [L] étant nommé en qualité de liquidateur judiciaire.

Par requête déposée au greffe le 12 février 2020 le procureur de la République a saisi le tribunal de commerce aux fins de voir prononcer à l’encontre de M. [J] [F], désigné alors comme gérant de la société Kade Nature, une mesure d’interdiction de gérer pour une durée de sept ans sur le fondement des articles L. 653-1 et suivants du code de commerce.

Par jugement réputé contradictoire du 9 février 2021, rectifié par jugement du 23 février 2021, le tribunal de commerce de Lille Métropole a prononcé à l’encontre de M. [F], né le [Date naissance 2] 1982 à [Localité 6] (Belgique), de nationalité belge, demeurant [Adresse 3], une mesure d’interdiction de gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celle-ci, a fixé cette mesure à sept ans et a ordonné l’exécution provisoire du jugement et sa publicité. La décision prévoit l’emploi des dépens en frais de procédure.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 22 mars 2021 M. [F] a relevé appel de l’ensemble des chefs de ce jugement, intimant M. le procureur général.

Par acte d’huissier de justice du 28 avril 2021, signifié à personne morale, M. [F] a appelé en la cause la SELARL MJ Valem associés, représentée par Me [L], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Kade Nature.

Par ordonnance de référé du 25 mai 2021 le premier président de cette cour a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire assortissant le jugement déféré.

Aux termes de ses conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 26 avril 2021, M. [F] demande à la cour d’infirmer le jugement du 9 février 2021, de débouter le ministère public de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre lui et de le condamner à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’instance.

Par réquisitions notifiées par voie électronique le 12 juillet 2021 et signifiées le 16 juillet suivant à Me [L] ès qualités, par acte remis à personne morale, le procureur général sollicite l’infirmation du jugement ayant prononcé une interdiction de gérer pendant sept ans.

Le liquidateur judiciaire n’a pas constitué avocat.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties constituées pour l’exposé de leurs moyens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 7 juillet 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoiries du 14 septembre 2022.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l’appel

Vu l’article R. 661-6 (1°) du code de commerce, les articles 552 alinéa 2 et 900 du code de procédure civile et l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

En l’espèce, M. [F] a intimé la SELARL MJ Valem associés ès qualités par voie d’assignation et non par le biais d’une nouvelle déclaration d’appel. Il convient toutefois de déclarer son appel recevable dès lors que le liquidateur judiciaire n’est pas mentionné comme partie sur le jugement de première instance, qu’il a été effectivement mis en cause devant la cour, et alors que l’appelant n’était pas comparant devant le premier juge, la convocation lui ayant été adressée par acte d’huissier de justice signifiées dans les conditions de l’article 659 du code de procédure civile et que le ministère public, qui a initié la procédure, abandonne ses poursuites, sauf à porter atteinte de manière disproportionnée, eu égard aux circonstances de l’espèce, au droit d’accès au juge garanti par l’article 6 §1 de la Convention européenne.

Sur l’appel

Vu les articles 653-1 et 653-8 du code de commerce.

Il ressort des pièces communiquées que M. [F] a déposé plainte le 16 novembre 2016 pour usurpation d’identité, qu’il avait découverte lors de la notification par l’URSSAF d’une mention de changement d’adresse concernant une société Kade Nature et que, renseignement pris auprès du greffe du tribunal de commerce, il avait pu constater que la copie de sa carte d’identité laissée chez un commerçant avait été utilisée lors de l’inscription de cette société Kade Nature, plainte qui a fait l’objet d’un classement sans suite le 29 septembre 2020 pour ‘auteur inconnu’. Il apparaît également que M. [F] avait signalé cette situation au tribunal des affaires de sécurités sociale par une lettre du 30 août 2018, transmise par le juge au procureur de la République du tribunal de grande instance de Lille.

Il n’est communiqué aucun élément établissant que M. [F] serait effectivement le gérant de cette société Kade Nature, comme l’admet le ministère public, l’ensemble des courriers et convocations dans le cadre de la procédure collective ayant été adressé à l’adresse du siège social de la société Kade Nature par lettres revenues avec la mention ‘destinataire inconnu à l’adresse’ ou signifié par actes remis dans les conditions de l’article 659 du code de procédure civile ; M. [F] justifie par ailleurs de son adresse personnelle distincte.

Il en résulte qu’il n’est pas établi que M. [F] serait gérant de la société Kade Nature et il convient en conséquence d’infirmer le jugement qui prononce une sanction contre lui.

Vu les dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile et R. 93 du code de procédure pénale, il convient de laisser les dépens de première instance et d’appel à la charge du ministère public et d’allouer à M. [F] une indemnité de procédure de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare l’appel recevable ;

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute le ministère public de sa demande de mesure d’interdiction de gérer contre M. [J] [F] ;

Alloue à M. [J] [F] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, mise à la charge du ministère public ;

Dit que les dépens seront supportés par le ministère public.

Le greffier

Valérie Roelofs

Le président

Dominique Gilles

 


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