22 millions d’euros pour pointes de trafic non gérées

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22 millions d’euros pour pointes de trafic non gérées
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Débordement de trafic et pénalités contractuelles

Dans ce litige, la société Orange reprochait à la société SFR d’avoir sciemment sous-dimensionné la taille de ses faisceaux d’interconnexion afin d’engendrer un trafic dit de débordement et de faire assumer la charge et l’acheminement de son propre trafic d’appels en période de pointe par elle-même.   Chacune des conventions conclues entre les parties en cause stipule que chaque opérateur alternatif est responsable du dimensionnement des faisceaux d’interconnexion nécessaires pour écouler le trafic relevant de sa responsabilité.

Des avenants avaient également fixé entre les parties les conditions dans lesquelles la société Orange devait fournir à la société SFR une prestation sécurisant l’interconnexion de leurs réseaux dans la seule hypothèse où les faisceaux d’interconnexion de la société SFR seraient défaillants. Les clauses pénales prévues par lesdits avenants ont été jugées pleinement applicables.  La clause en cause était rédigée de la façon suivante :

« Télécom développement déclare qu’il n’est pas dans son intention d’utiliser le mécanisme de débordement automatique pour gérer les pointes de trafic et qu’elle fera ses meilleurs efforts pour assurer une gestion préventive du trafic adéquate. Toutefois, dans le cas (…) où Télécom Développement utiliserait abusivement le mécanisme de débordement automatique pour gérer des pointes de trafic, les parties conviennent que : i) France Télécom lorsqu’elle constatera un tel abus suspend le débordement et adresse à Télécom Développement une notification motivée ; ii) Télécom Développement pourra le cas échéant contester par lettre motivée le bien-fondé de l’abus invoqué par France Télécom ; iii)  France Télécom se réserve le droit de facturer une pénalité forfaitaire et définitive d’un montant de 30KF ; LDCOM (ou Télé2) ne peut utiliser le débordement qu’à des fins de sécurisation de son réseau et dans le cas où LDCOM (ou Télé2) utiliserait abusivement le mécanisme de débordement automatique pour gérer des pointes de trafic, les parties conviennent que sur chaque CA interconnecté : France Télécom lorsqu’elle constatera un tel abus suspend le débordement et adresse à LDCOM (ou Télé2) une notification motivée ; France télécom se réserve le droit de facturer une pénalité forfaitaire d’un montant de 4.573 € par abus constaté. »

Droit de suspendre le mécanisme de débordement automatique

Pour rappel, la suspension du mécanisme de débordement automatique est une sanction dont les parties conviennent d’un commun accord pour sanctionner un abus (..) Du fait de cette finalité, elle n’entre pas dans les cas de suspension de l’interconnexion visés par l’article D 99-7 du Code des postes et télécommunications qui reste par ailleurs applicable.

Aux termes de l’article 1161 du code civil, toutes les clauses s’interprètent les unes par les autres en donnant à chacune le sens qui résulte de l’acte entier ; Au cas particulier il résulte de l’énoncé des clauses des avenants que les différentes sanctions (suspension-notification, facturation d’une pénalité) prévues en cas de débordement automatique pour gérer des pointes de trafic sont juxtaposées, il n’est nulle part fait mention d’une subordination de l’une par rapport à l’autre, ou de la réalisation préalable de l’une avant l’autre ; par ailleurs, l’emploi du verbe ‘peut interrompre temporairement ‘ou l’utilisation de l’indicatif ‘suspend le débordement’ n’engendre nullement une obligation impérieuse de procéder à une suspension préalable.

De surcroît, suivant la décision de l’ARCEP du 5 janvier 2000 selon laquelle .’s’il est vrai qu’un contrôle en temps réel du type de débordement n’est pas réalisable , il est en revanche possible de le faire a posteriori et de prévenir d’éventuels abus en prévoyant de les sanctionner le cas échéant’, il est entendu que la sanction de la suspension a priori n’est pas réalisable, dans la mesure où il n’est pas possible de distinguer les deux types de débordement (dûs à une défaillance technique ou à une pointe de trafic) et que de surcroît pèse sur la société Orange l’obligation d’assurer la sécurisation du trafic et la permanence du service public conformément aux dispositions de l’article L.33 du code des postes et télécommunications électroniques , de sorte qu’existe une impossibilité matérielle de mettre un terme en temps réel au débordement imputé.

Mise en demeure avant clause pénale

En revanche, en application de l’article 1230 du code civil, c’était à bon droit que la société SFR invoquait l’obligation de mise en demeure préalable à la mise en jeu de la clause pénale.


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