19 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/18805

·

·

19 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/18805

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 9

ARRET DU 19 MAI 2022

(n° , 4 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/18805 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CESJE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Octobre 2021 – Tribunal de Commerce de BOBIGNY – RG n° 2021L02128

APPELANT

Monsieur [T] [C]

né le 16 Octobre 1966 à Paris 18ème

71 rue Youri Gagarine

92700 COLOMBES

Représenté par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090, avocat postulant

Représenté par Me Arnaud ALBOU, avocat au barreau de PARIS, toque : L0038, avocat plaidant

INTIMES

Monsieur LE PROCUREUR GENERAL – SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

34 quai des Orfèvres

75055 PARIS

S.E.L.A.F.A. MJA, en la personne de Me [K] [M]

en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS MAILBACK

14/16 rue de Lorraine

93000 BOBIGNY

défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 804 et suivants du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 avril 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant :

Madame Isabelle ROHART, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Déborah CORICON, Conseillère

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:Madame Sophie MOLLAT, Présidente

Madame Isabelle ROHART, Conseillère

Madame Déborah CORICON, Conseillère

GREFFIERE : Madame FOULON, lors des débats

MINISTÈRE PUBLIC : représenté lors des débats par Madame Monica D’ONOFRIO, avocat général, qui a fait connaître son avis.

ARRET :

– réputé contradictoire

– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Sophie MOLLAT, Présidente et par Madame FOULON, Greffière.

*********

Par jugement du 26 novembre 2019, sur déclaration de cessation des paiements, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de la société MAILBACK exploitant un fonds de commerce de constitution, gestion, analyse et commercialisation de base de données auprès d’entreprises et particuliers ainsi que la régie publicitaire, le marketing sur internet et toutes les opérations de compilation de bases de données et de tri de fichiers grand public en vue d’une exploitation commerciales.

Me [M] a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire et la date de cessation des paiements fixée au 1er octobre 2019.

L’insuffisance d’actif est de 617 384, 91 euros.

M. [T] [C] était le gérant de cette société.

Par requête en date du 3 novembre 2020, le ministère public a saisi le tribunal de commerce de Bobigny aux fins de voir prononcer à l’encontre de M. [T] [C], en sa qualité de dirigeant de droit, une faillite personnelle ou, à défaut, une interdiction de gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit une entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci.

Par jugement en date du 21 octobre 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a condamné M. [C] à une interdiction de gérer de 4 ans.

M. [C] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 28 octobre 2021.

*****

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 décembre 2021, M. [T] [C] demande à la cour de :

A titre principal,

Infirmer le jugement du Tribunal de Commerce de Bobigny en date du 21 octobre 2021, en ce qu’il a :

– Prononcé pour une durée de 4 ans l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale, artisanale et toute personne morale ;

– Ordonné l’exécution provisoire du jugement, conformément à la loi ;

– Dit qu’en application des articles L 128-1 et R 128-1 et suivants du Code de commerce, cette sanction fera l’objet d’une inscription au fichier national des interdictions de gérer.

Statuant à nouveau,

Débouter Monsieur le Procureur Général de l’ensemble de ses demandes,

Dire n’y avoir lieu de prononcer une sanction à l’encontre du concluant,

A titre subsidiaire,

Limiter à deux mois la durée de l’interdiction faite au concluant de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale, artisanale et toute personne morale ;

En tout état de cause,

Condamner la société SELAFA MJA en la personne de Maître [I]-[K] [M] ès qualités à payer à Monsieur [T] [C] la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

La condamner aux dépens.

*****

Dans son avis notifié par voie électronique le 31 décembre 2021, le ministère public demande la confirmation du jugement ou à défaut la réduction de l’interdiction de gérer à une durée de 2 ans.

SUR CE,

Sur l’absence de motivation du jugement entrepris

M. [C] fait grief aux premiers juges de ne pas avoir motivé leur condamnation, en violation des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile. Il demande la réformation du jugement à ce titre.

Le ministère public reconnaît que la motivation est très sommaire et indique que si la cour annule le jugement, elle pourra statuer sur le fond en vertu de l’effet dévolutif de l’appel.

Il ressort du jugement attaqué que celui-ci ne comporte pas de motivation justifiant la condamnation de M. [C] à une mesure d’interdiction de gérer de 4 ans.

Il y a donc lieu d’annuler le jugement, qui méconnaît les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile. La cour est saisie par l’effet dévolutif de l’appel pour examiner les griefs reprochés à M. [C].

Sur les griefs reprochés à M. [C]

– la tenue de la comptabilité – article L. 653-5 6° du code de commerce

Le ministère public fait valoir que seul le bilan arrêté au 30 juin 2015 a été remis au liquidateur et qu’aucun document n’a pu être produit concernant la comptabilité de 2015 à 2019, malgré les demandes du liquidateur.

M. [C] indique qu’il a perdu son père le 29 janvier 2018, ce qui l’a plongé dans une dépression nerveuse nécessitant la prise de médicaments et l’empêchant d’assurer pleinement les fonctions de direction de la société, notamment celle de tenue de la comptabilité.

Il en résulte que M. [C] ne conteste pas le grief qui lui est reproché, invoquant des circonstances personnelles pour l’expliquer. La cour remarque que la comptabilité est défaillante depuis juin 2015, soit bien antérieurement aux difficultés alléguées par M. [C].

Il y a donc lieu de considérer que ce grief est caractérisé à son encontre.

– l’augmentation frauduleuse du passif

Le ministère public indique abandonner ce grief, puisque la preuve de majorations ou pénalités n’est pas rapportée.

Il n’y a donc pas lieu de se prononcer sur ce grief.

Sur la sanction

Le ministère public indique que c’est à juste titre que le tribunal a prononcé une sanction de 4 ans d’interdiction de gérer, prenant en compte la participation de M. [C] aux opérations de procédure collective mais également le montant très élevé de l’insuffisance d’actif et l’existence d’une précédente procédure de liquidation judiciaire.

Il ajoute que M. [C] a lui-même déposé une déclaration de cessation des paiements, a traversé une période difficile et souhaite être auto-entrepreneur ; qu’il ne s’oppose pas à une réduction de la durée de l’interdiction de gérer à 2 ans.

M. [C] indique ne pas avoir fait preuve de malhonnêteté, avoir coopéré avec les organes de la procédure et être auto-entrepreneur. Il demande la réformation du jugement et le prononcé d’une mesure d’interdiction de gérer de 2 mois.

Prenant en compte d’une part la longue période sur laquelle la comptabilité n’a pas été tenue et l’importance de l’insuffisance d’actif, et d’autre part la coopération de M. [C] au cours de la procédure collective et les difficultés personnelles qu’il a rencontrées, la cour estime qu’une mesure d’interdiction de gérer d’une durée de 2 ans apparaît appropriée.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

M. [C] demande la condamnation de Me [M] à lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Les circonstances de l’espèce commandent de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Annule le jugement attaqué,

Condamne M. [T] [C] à une mesure d’interdiction de gérer d’une durée de 2 ans,

Met à la charge de M. [T] [C] les dépens de l’instance.

La greffière La présidente

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x